Vous vous tenez devant une maison de campagne, le genre de maison avec de grosses pierres apparentes et un toit de chaume. Autour de vous, un immense jardin, avec une petite mare où sont plantés des roseaux. Au loin, vous pouvez voir une pommeraie, dont les fruits mûrs font ployer les branches des arbres. Le soleil tape fort dans le ciel, mais une légère brise rend l’air environnant moins étouffant. Que faites-vous ici, comment êtes-vous arrivé là ? Vous n’en avez aucune idée. Allons, maintenant que vous êtes là, jetez donc un coup d’œil à l’intérieur de la chaumière, au travers des grandes vitres un peu salies. Voyez-vous cette petite, rousse comme un renard, qui sourit joyeusement ? Il semblerait qu’elle tienne une enveloppe dans sa main … Vous plissez les yeux pour essayer de déchiffrer les inscriptions écrites en vert émeraude. La petite fille saute dans les bras de ses parents, parle si fort que vous pouvez l’entendre même au travers des carreaux « J’ai reçu ma lettre pour Poudlard ! ». Cette petite fille, c’est Eirian. Et l’histoire que nous allons maintenant vous raconter, c’est la sienne …

Tout commença lors de la naissance d’Eirian … Ou peut-être devons-nous remonter encore plus loin encore, enfuir nos racines il y a plus de trente ans, dans le petit village irlandais de Lullymore.

Lullymore est, comme un certain nombre de village planqués au milieu de nulle part, un endroit où cohabitent sorciers et moldus. En réalité et comme souvent, ces moldus ne savent pas que des sorciers sont présents. Mais les familles de sorcier ont tendance à se réunir, et la petite communauté de Lullymore comptait 4 familles de sorcier, dont une partie était restée là depuis des décennies voire des centaines d’années, et l’autre s’était propagée au sein de l’Irlande et du Royaume Uni.

Ces familles, considérées comme des « notables » au sein d’un village principalement agricole, étaient parfaitement intégrées au village. Les enfants suivaient les cours dans l’école du village jusqu’à leur entrée à Poudlard, que leurs parents justifiaient par un envoi dans une coûteuse école privée de Londres. Les grands jardins cachés par de hautes haies leur permettaient d’utiliser leur magie loin des yeux malavisés.

Les Mac Cailin étaient les plus engagés dans la mixité moldus/sorciers du village. Ils organisaient régulièrement des fêtes chez eux, où tous dansaient jusque tard dans la nuit. Leurs deux fils, Josselin et Mitran, étaient déjà entrés à Poudlard. Leur fille, Marjory, fréquentait l’école du village où elle avait beaucoup d’amis, avec qui elle aimait partir à l’aventure dans les champs de maïs.

Son ami le plus proche, auquel elle confiait tous ses secrets, était un garçon du nom d’Evan. Contrairement au précepte de sécurité qui était de mise dans la famille, Evan allait librement dans le jardin et la maison, en tout temps et tout lieu. Quelle catastrophe cela aurait-il pu provoquer s’il était arrivé au mauvais moment ! Heureusement, aucun incident ne fut à déplorer.

L’année des 10 ans de Marjory, Evan commença à faire la grise mine. Il pressait Marjory de lui dire dans quel collège elle allait aller pour qu’il y postule lui aussi. Lorsqu’elle lui dit qu’il ne pourrait pas y entrer, parce que c’était une école dans laquelle les enfants étaient inscrits dès leur naissance, il eut un reniflement méprisant et déclara « tu es bien une gosse de riche élitiste ! ».  Marjory s’enfuit en pleurant, et ils ne se revirent pas avant son départ.

A l’été suivant, lorsque Marjory rentra chez elle accompagnée de ses deux frères, Evan l’attendait devant la porte de sa maison, un énorme bouquet de fleurs dans les mains. Il s’excusa, et leur vieille amitié reprit le dessus. Pendant 6 ans, à chaque retour de Marjory, Evan lui offrait un bouquet de fleurs, puis ils passaient tout l’été ensemble.

A la fin de sa septième année, lorsque Marjory revint de Poudlard, son diplôme en poche, en plus de l’éternel bouquet de fleurs, Evan lui offrit une bague, en lui demandant de l’épouser. Marjory lui avoua alors qu’elle était une magicienne, et que c’était pour cela qu’elle était partie loin de lui si longtemps. Il l’embrassa en lui faisant jurer de ne plus jamais s’en aller.

C’est ainsi que, trois ans plus tard, les deux jeunes gens se marièrent. Marjory avait continué ses études en Botanique, et créait désormais ses propres remèdes. Les habitants du village la consultaient régulièrement pour leurs petits maux, et considéraient ses soins comme « magiques ». Evan, quant-à-lui, s’était spécialisé dans la conception de meuble en bois sculptés à la main, que tous les habitants de la région s’arrachaient.

Eirian naquit dans la maison de pierre qui resterait jusqu’à maintenant son foyer. Comme sa mère, c’était une petite fille joyeuse, un peu espiègle, attachante. Elle avait les longs cheveux roux de sa mère et les yeux verts de son père. Elle riait beaucoup, s’émerveillait de tout ce qu’elle voyait.

Ses accès de magie, comme les ont tous les jeunes enfants, étaient comme de petits bonbons au miel. Un jour, alors qu’elle regardait avec envie les pommiers du jardin, ceux-ci s’inclinèrent tous pour la laisser cueillir leurs fruits. Une autre fois encore, les poissons de la mare du jardin avaient pris des couleurs vives et chatoyantes, du bleu, du jaune, du rouge, du vert … Bien qu’Evan soit désemparé par ces petits accidents, Marjory riait.

Quand elle eut 6 ans, une petite sœur, nommée Kristen, vint à son tour. C’était le bijou et le soleil de sa vie. Elle l’adorait et s’occupait sans cesse d’elle. Elle lui tressait de petites nattes qu’elle agrémentait de fleurs des champs. Elle lui racontait des histoires de princesse et de dragon. Et, lors de la sieste de l’après-midi, elle lui chantait de petites berceuses.

La vie d’Eirian se déroula donc sans encombre, jusqu’au jour où la lettre tant attendue arriva, pour l’inviter à se rendre à Poudlard en septembre. Et c’est ainsi que commence désormais une nouvelle aventure …