« Vous savez, la plupart des légendes et mythes moldus trouvent une origine dans le monde magique »
Oxy médita cette phrase.
S'ils viennent de notre monde, alors ce ne sont pas des mythes. Et si les mythes n'existent pas, alors toutes les légendes sont vraies. Les dieux ont vraiment existé ? Mais s'ils étaient immortels, pourquoi sont-ils morts ? Ou alors ils ne le sont pas. Mais dans ce cas là, pourquoi on ne les voit pas ?
Elle ouvrit la bouche pour interroger Miss Taylor quand elle la vit le regard perdu sur le paysage qui défilait. Elle devait en avoir marre de parler avec une gamine. C'était compréhensible.

Elle prit son colis sur ses genoux et l'ouvrit comme un cadeau le matin de Noël. Elle en sortit un morceau parchemin avec quelques mots de son père qui la rendirent dubitative.

... pour tester ta patience...

... parce que je peux voir d'ici l'étincelle dans tes yeux quand tu va la retourner...

Qu'est-ce qu'il avait voulu dire ?
On verra bien !
Il y avait quatre formes géométriques en bois qui semblaient faites de pièces plus petites.

Et un petite boite en plastique avec un dessin très enfantin dessus.

Elle attrapa la première, en forme de cube et mit un long moment de manipulation avant de comprendre qu'il s'agissait d'un puzzle. Apparemment, il fallait le défaire. Sauf que si le jeu était simple en soit, la mise en œuvre l'était beaucoup moins.
C'est clair que ma patience va être soumise à rude épreuve !

Elle posa son casse-tête sur le côté et prit la cinquième boite. Celle qui était différente des autres. Elle la retourna et... rien.
Tu parles d'une étincelle dans mes yeux, j'ai surtout l'air idiote à tenir une boite pour bébé à l'envers ! Encore plus que les vaches dessinées dessus qui ont les pattes en l'air maintenant !

Elle remit la boite dans le bon sens quand un mugissement s'en échappa. Surprise elle la laissa tomber et leva la tête vers la femme face à elle.

Elle était occupée à regarder le paysage tandis que la jeune fille semblait ouvrir des cadeaux. Joanne ne lui accordait pas spécialement d’importance, son esprit se perdant au grès des contrées verdoyantes qui défilaient. Le roulis du train aurait presque l’endormir. Seulement, elle n’était pas seule dans le compartiment. Bien loin de là. Pourtant, peu à peu, ses paupières se fermèrent, bercées sans doute par les mouvements du Poudlard Express et par l’agitation de la jeune fille qui lui faisait face.

Pourtant le sommeil fut de courte durée. Un étrange bruit animalier – pareil à celui d’une vache qu’on aurait forcé à meugler longuement – retentit dans l’ensemble du compartiment, suivi d’un bruit sourd, comme un objet qui tombe lourdement sur le sol. Instinctivement, l’enseignante attrapa sa baguette en rouvrant les yeux, le tout dans une demi-seconde. Il lui fallut toutefois quelques secondes supplémentaires pour comprendre que les bruits suspects émanaient simplement de la jeune fille qui lui faisait face.

L’enseignante poussa un soupir de soulagement, rangea sa baguette dans sa manche – qu’elle n’aurait jamais dû quitter – et se pencha pour ramasser l’objet du délit. Au passage, elle en profita pour marmonner un « Voilà qui n’est pas très discret » alors qu’elle tournait en tous sens l’objet qui n’arrêta pas, dès lors, de meugler encore et encore. « Un bien étrange objet que vous avez là ». Elle le tendait à la jeune fille comme s’il s’agissait du diable en personne, alors qu’il ne s’agissait là que d’un objet à destination des enfants, mais cela, la trentenaire l’ignorait.

La jeune Gryffondor ne vit pas sa vie défiler devant ses yeux mais eut tout de même le temps d'élaborer un certain nombre de scenarii à la vue de la baguette pointée sur elle. Heureusement, aucun ne se réalisa. Elle n'explosa pas, ne vit pas le monde à travers les yeux d'un veracrasse et n’atterrit nullement dans un désert arctique entourée de morses lui courant après pour lui voler ses chocogrenouilles.
A la place, elle pu observer la femme ramasser la boite et... Jouer avec ?

A chaque fois que la chose revenait dans le bon sens, un meuglement de vache en sortait. Et pourtant l'adulte continuait à la tourner, encore et encore. Le jeune fille, d'abord intriguée par l'attitude de son aînée, contempla la scène sur-réaliste en essayant de ne pas éclater de rire.
La femme, austère, arborait un air sérieux alors qu'elle faisait mugir un troupeau entier de vaches dans le compartiment du Poudlard express. Le décalage qui en résultait rendait la situation cocasse.
Oxy avait un sourire difficilement réprimable qui lui crispait le visage, et des larmes au bord des yeux tant elle se retenait de s'esclaffer quand la professeur lui tendit l'objet comme s'il avait la capacité de la transformer en... vache ?

"C'est mon papa qui me l'a donnée répondit-elle fièrement ! C'est trop drôle hein ?" reprit-elle en s'amusant, elle aussi, à tourner la boite en plastique dans un sens puis dans l'autre. Puis en recommençant. Et encore...
De son autre main, elle attrapa le cube en bois et le tendit à la femme. "J'ai aussi eu des trucs comme ça regardez !"

Elle ne comprenait toujours pas l’intérêt de la boite qui envahissait le compartiment d’un tonitruant « MEUH » qui ne s’arrêtait pas vraiment. Fort heureusement, la jeune fille vint au secours de l’enseignante en récupérant ce qui semblait être un … jouet ? Les sourcils relevés, la trentenaire se demandait ce qui pouvait bien être amusant à avoir une pareille boîte. Elle ne comprenait décidément pas la jeunesse qui lui faisait face mais n’en pipa pas un mot. Après tout, il était inutile de dire ce qu’elle pensait de ce « jouet » à la fillette qui semblait ébahie devant ce « cadeau » qui n’en était pas un aux yeux de Joanne.

Le pire, c’est lorsqu’elle apprit que c’était son père qui lui avait offert. Elle aussi, elle avait une relation étrange avec son géniteur, mais jamais elle n’avait reçu ce genre de cadeau totalement … improbable ? Peut-être était-ce cela que d’avoir un véritable père, peut-être que la jeune fille avait finalement plus de chance que Joanne. Cette dernière n’arrivait pas à savoir et ce n’est pas avec la suite de la conversation que ça allait s’arranger. D’ailleurs, la jeune fille était plutôt occupée à faire tourner sa boîte sonore en tous sens, tirant des soupirs exaspérés à la professeure qui préféra ne pas se saisir du cube en bois tendu par la jeune fille. Sait-on jamais que ce soit encore un objet étrange et beaucoup trop sonore.

« Votre père vous fait de biens étranges cadeaux ». L’incompréhension est à peine masquée dans la voix de Joanne, il est vrai qu’elle ne comprend absolument pas le genre de relation que la jeune fille peut avoir avec son père. Ne connaissant pas quelle est la véritable relation qui convient à ce genre de lien familial.

La femme ne prit pas le cube de bois tendu ce qui laissa perplexe la jeune fille.
Ben quoi ? Elle joue avec la boite qui fait "meuh" et pas le casse-tête ? Et après c'est moi qui suit pas patiente ?
Elle le reposa sur ses genoux tout en se demandant comme elle s'en sortait dans ses traductions ou elle ne savait trop ce qu'on faisait dans son cours si elle n'aimait pas résoudre des puzzles.
« Votre père vous fait de biens étranges cadeaux »
Oxy regarda à nouveau ce qu'elle venait de déballer.
"Il vous fait pas de cadeaux votre papa ?"
Sérieux ? C'est possible ça ?
Est-ce que le sien arrêterait quand elle grandirait ?
"C'est parce que vous êtes adulte ?"
Elle en avait forcément reçu quand elle avait son âge. Tous les papas offraient des cadeaux à ses petites filles ! C'était vrai qu'elle n'en avait jamais parlé avec d'autres, mais quand même... Ou alors...
"Ah mais j'ai compris ! Mon papa étudie les Moldus ! dit-elle fièrement, et c'est pour ça qu'il m'envoie souvent des trucs moldus ! Vous, vous n'avez du avoir que des trucs sorciers ! Bon c'est vrai que parfois je comprends pas trop comment on s'en sert. Une fois j'ai eu une boule de verre remplie d'eau avec un paysage de ville dedans et des grains blancs. J'ai toujours pas compris quoi en faire... Mais l'année dernière, il m'a envoyé une boite de pétards ! On les a testés dans notre salle commune avec..."
Euh, oui, non. Ça on va peut-être pas le raconter.
"Enfin bref il visite plein de villes et m'envoie des souvenirs !"
Elle se remit à faire meugler la boite en plastique avec un grand sourire, montrant comme son papa à elle était le plus fort !

Son père lui faisait-il des cadeaux ? Non. Aucun. Si ce n’est les affreuses marques qu’elle avait dans le dos. Son père ne lui avait offert que ça dans la vie, ça, et l’impossibilité de choisir. Elle devait être un pantin à la solde des Taylor et c’est tout. Sa vie était destinée à ça, rien de plus. Alors « Non, je n’ai pas eu de cadeau ». Mais la jeune fille était partie sur autre chose. Elle présageait que c’était parce qu’elle était adulte et l’enseignante se contente d’hocher la tête : elle n’avait rien à répondre de concret de toute façon.

La fraîcheur qui se dégageait de la jeune fille lui faisait du bien, mais en même temps, cela la renvoyait à ce qu’elle n’avait pas eu et elle ne savait plus trop quoi répondre à la jeune fille. Alors, elle se contenta d’un simple « Vous avez bien de la chance d’avoir un papa comme le vôtre » pour éviter à tout prix d’avoir à parler de sa propre famille. De toute façon, elle était l’adulte et n’avait aucune obligation à se confier ainsi dans le compartiment du Poudlard Express à une jeune élève. Rien. Aucune obligation.

« Quelle ville a-t-il visité dernièrement pour vous ramener cette étrange boite à son ? ». La question lui permettrait-elle de détourner l’attention de la gamine sur autre chose ? L’enseignante l’espérait. Sinon, elle ferait semblant de s’être endormie. Après tout, bercée par le roulis du train, cela ne relevait pas de l’impossible puisque cela lui était déjà arrivé quelques instants plutôt. C’était peut-être la seule solution viable à dire vrai …

La jeune Gryffondor était triste pour l'adulte avec laquelle elle voyageait. Ses paroles laissaient penser que son papa à elle ne lui offrait pas de cadeaux, et pas seulement parce qu'elle était adulte. Elle se leva pour la prendre dans ses bras avant de se dire que ce n'était pas vraiment un bonne idée.
A la place elle posa la drôle de boite sur le siège, à côté de la femme :
"Je vous l'offre ! Tout le monde devrait avoir un cadeau de temps en temps !"

Très fière de son don elle revint s'asseoir et jeta un œil à sa cape qui vibrait.
Mince, mince, mince !
"Pardon, je suis désolée !!!"
Elle se jeta à genoux par terre et en extirpa un Odin tout tremblant. Il avait du être terrorisé par les meuglements et elle ne l'avait même pas rassuré ! Quelle mauvaise maîtresse elle était à jouer sans s'occuper de ses frayeurs.
Elle le rassura autant que possible, et il finit par se calmer, blotti dans le creux de ses mains. Se réinstallant à sa place, elle le cala sur ses cuisses et commença à répondre à la jeune femme alors qu'il se frayait un passage sous son pull :
"Ces cadeaux là viennent d'une ville française qui s'appelle euh..." Elle reprit le courrier "Wishtr.. Wis-Treu-ham Ouistreham ! Il étudie comment les moldus s'habillent en vacances dans le monde entier vous savez ? Mais là, elle regarda à nouveau le morceau de papier, ben il dit pas grand chose, ils doivent pas avoir de tenue particulière."
Elle regarda à droite et à gauche comme si quelqu'un avait pu entrer dans le compartiment sans qu'elles ne s'en aperçoivent avant de révéler son secret en chuchotant :
"Vous savez qu'il y a certains endroits où ils ne portent pas de vêtements du tout ? Mais je veux dire aucun, genre tout nu" Elle avait tellement baissé la voix sur ses mots quelques peu tabou qu'elle n'était pas sûre que Miss Taylor ait pu l'entendre.

La jeune fille se leva d’un coup, surprenant au passage l’enseignante qui n’était visiblement pas prête à voir un tel mouvement dans sa compagne de compartiment. Elle n’était pas davantage prête à recevoir le cadeau de la jeune fille – cet immonde truc qui n’avait de cesse de meugler dès qu’on le tournait et retournait en tous sens. Pourtant, au fond d’elle-même, Joanne devait bien l’admettre : elle était touchée par le présent de la jeune Gryffondor. Ne sachant pas trop quoi dire, elle se contenta d’un très maladroit « Merci ».

Il est fort peu probable que la jeune fille l’ait entendu de toute façon, elle était occupée à s’excuser pour son boursouflet ou à son boursouflet – Joanne ne savait pas trop mais observait le manège avec la même expression figée de stupeur qu’elle avait eu depuis le cadeau de la jeune fille. Finalement, quand la jeune fille se repositionna sur son siège, elle-même posa la boite à côté, en prenant bien garde à ne pas la retourner de manière inopinée. Sait-on jamais que l’outil du diable se remette en marche.

Elle écoutait les explications d’Oxy sans mot dire – de toute façon, elle n’avait pas grand-chose à répondre. Pourtant, les expressions et mouvements de la jeune fille l’interpellèrent. On aurait dit qu’elle allait lui délivrer un puissant secret et qu’elle ne voulait pas être entendue. « Pardon ? » qu’elle demande suite aux marmonnements de la jeune Gryffondor « je ne suis pas certaine d’avoir très bien compris ». Ou peut-être préférait-elle simplement oublié ce qu’elle avait cru entendre sortir des lèvres de la jeune sorcière.

Elle lui demandait vraiment de répéter ? De répéter ce mot en deux lettres ? Vraiment ?
Noooon....
Ça devait être une question de rhétorique. N'est-ce pas ? Oxy regarda la jeune femme les yeux pleins d'interrogations. Est-ce qu'elle pouvait changer de sujet discrètement ou devait-elle expliquer ce qu'elle savait sur ce sujet ? Elle était particulièrement indécise sur la marche à suivre. Elle finit par aller à l'essentiel et lui demanda, après s'être raclé la gorge, le visage passant du rouge à l'écarlate :
"Euh... Vous voulez vraiment que je répète ou c'était juste une façon de parler ?"
Quand la Professeur de runes leva les yeux au ciel en réponse, la Gryffondor soupira de soulagement. Elle se voyait mal lui expliquer ce que son père lui avait appris sur ces plages un peu étranges... Elle opta pour une question innocente :
"Et vous, vous aimez aller où en vacances ?" (pourvu qu'elle ne soit pas naturiste !)
Puis, tout en l'écoutant, elle reprit son "jouet" en bois quelque peu agaçant. Elle tira un bout, poussa d'un autre côté, tourna l'objet et, sans qu'elle ne comprenne le comment du pourquoi toutes les pièces tombèrent sur ses genoux.
Mince alors j'ai réussi !
Elle offrit un sourire éclatant de fierté à la femme face à elle avant de commencer à douter :
"Vous croyez que je dois le remonter après ?"
Peut-être que l'adulte pourrait le faire à l'aide de la magie si elle demandait gentiment.

Il était visible – comme le nez au milieu de la figure – que la jeune Gryffondor ne comprenne pas l’ironie et le sarcasme. A tel point qu’elle demanda à Joanne si elle devait véritablement redire ce qu’elle venait de dire ou si c’était uniquement une façon de parler. Devant le roulement d’yeux vers le ciel de l’enseignante, la jeune sorcière sembla comprendre le message et même en soupirer de soulagement. Ce qui laissa à Joanne un fin sourire narquois – un peu moqueur – sur ses lèvres.

La question qui suivit s’avèra toute aussi surprenante que le reste de la conversation avait pu l’être « Non, je ne vais pas beaucoup en vacances ». Après tout, elle ne devait pas sortir du giron familial depuis bien longtemps et Poudlard, en ce sens, ressemblait à une cure de jouvence. Face à l’adolescente, Joanne prit conscience que sa vie n’avait rien d’enviable. Pourtant, elle se surprenait à l’aimer chaque jour un peu plus. Comme si chaque journée révolue était la preuve de sa propre survie.

Le regard de la trentenaire s’arrêta sur l’espèce de puzzle en bois qui semblait se désagréger au fur et à mesure que la jeune fille le triturait. Face à la fierté de l’enfant – et surtout à sa question – l’enseignante haussa les épaules. « Si c’est une sorte de casse-tête, je pense qu’il vous faut en effet le remonter correctement ». Elle riait intérieurement de voir la jeune fille s’arrachait les cheveux. C’était malsain, un peu, non ?