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22 déc. 2018, 21:22
Jeanne  Solo/Rpg ++ 
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 20 décembre 2043
Londres - Angleterre


 
La main de son père placée dans son dos, Audric courrait au milieu du parking. Rentré à Londres comme promis pour les vacances de noël, il avait été entraîné toute la journée par Andrew qui semblait vouloir rattraper ces derniers mois d'absences en une seule journée. Courses de noël de dernière minute, repas en tête à tête dans un petit restaurant,... et à présent cinéma. Ils avaient prit du retard sur le plan du rouquin qui poussait à présent son fils à courir plus vite, de peur de manquer le début de la séance.
 
 «
C'est tout ce que tu peux faire? Vous ne faites pas de sport dans ton école ou quoi? Tu te ramollis. » Le garçon aux yeux vairons ne répondit pas mais ne put s'empêcher de retenir de rire ce qui ralentit légèrement sa course. Bien sûr que son père était au courant qu'il était entré dans l'équipe de Quidditch de sa maison, mais pour le rouquin s'amuser avec des balles assit sur un balai n'avait rien de très sportif. Pour autant ce n'était pas cela qui faisait rire son fils, mais le fait que les joues de son père étaient presque de la même couleur que ses cheveux, et qu'il commençait doucement à souffler comme un bœuf. 
 L'adolescent cala son rythme sur celui d'Andrew qui tentait toujours de le pousser plus fort. Alors qu'ils débarquèrent comme des sauvages au milieu du hall du cinéma, le jeune sorcier ne ralentit pas et se jeta presque sur le comptoir de la vendeuse à laquelle il cracha rapidement le nom du film qu'ils avaient choisit. Andrew tenta vainement de reprendre son souffle tout en payant la femme, avant de pousser de nouveau son fils vers la salle que l'on venait de leur indiquer. Il se glissèrent entre les rangs, essayant de se faire aussi discret que des ombres alors que le film démarrait. 


*   *   *


 Après plusieurs lettres envoyées par Jeanne et Gabrielle, Audric avait fini par céder à la demande de ses deux mères et avait accepter à contre-cœur de rentrer chez lui pour Noël. Elles avaient même fait le programme de ses vacances sans lui demander son avis, ce contre quoi le brun s'était rebellé aussitôt.  Elles avaient prévu de partir quelques jours en Allemagne, chez Gabrielle, avant de rentrer en France pour Noël. Une angoisse sourde était montée chez l'adolescent qui refusait catégoriquement de remettre les pieds là-bas. *Tout mais pas ça!*
Andrew, qui jusque-là ne s'était pas interposé dans les affaires de sa femme et de sa belle-sœur, avait posé une main sur l'épaule de son fils et l'avait attiré à lui comme pour le protéger des deux femmes. 
 « Laissez-le tranquille un peu. Vous allez déjà l'avoir pour vous la semaine du nouvel an, vous pouvez bien me laisser mon fils jusqu'à Noël non? » L'homme avait alors insister sur le fait qu'il n'avait qu'une semaine de vacances et qu'il prévoyait une "virée entre hommes" pendant que les deux sœurs partaient de leur côté. Il avait bien insisté sur le "mon fils" tout en regardant Gabrielle dans les yeux. Il détestait le caractère changeant de la jeune femme, un jour c'était oui et le lendemain un non catégorique. C'était déjà lui qui s'était occupé du garçon après le fiasco de cet été, et il voulait à tout prit éviter que cela recommence à nouveau. 

 Au grand soulagement de l'adolescent, les deux femmes avaient alors acceptés de le laisser tranquille. Du moins jusqu'à ce que son père reparte au travail. Le brun projetait déjà de supplier ses cousines pour qu'elles restent avec lui tout le long du séjour. Le seul point positif à ce jour pour lui, était la présence du Lucie chez son grand-père. Il comptait bien en profiter pour se rapprocher de sa demi-sœur autant que possible. 
 A la gare ou Andrew avait déposé les deux femmes, Audric avait alors regardé sa mère adoptive et sa mère biologique  partir, bras dessus bras dessous dans le train qui les amèneraient d'abord à Paris avant de changer de train. Sachant qu'il les reverrait dans quelques jours, il les avait simplement saluées de la main, ignorant les remarques de Jeanne qui s'agaçait de voir qu'il grandissait si vite. 

*   *   *


 Alors qu'ils sortaient de la salle de cinéma, Andrew et son fils débattait sur le film qu'ils venaient de voir. Tout en marchant vers la voiture, le rouquin ébouriffa la chevelure de Audric alors que ce dernier tentait de rejeter ses mèches rebelles vers l'arrière. L'adolescent repoussa doucement son père qu'il rattrapait doucement mais surement en taille. Leurs rires en s'échappant de leurs bouches laissèrent un petit nuage s'envoler devant leurs visages. Sur le chemin Andrew ralluma son téléphone qu'il avait rangé au fond de sa poche en début d'après-midi. Il s'arrêta brusquement pour déchiffrer les notifications qui apparaissaient en masse sur son écran avant de finalement tendre l'objet à son fils. 
 « Tiens, on dirait que ton oncle a essayé d'appeler toute la soirée. Je vais chercher la voiture, essaie de le joindre en attendant. »

 L'adolescent acquiesça et pianota sur l'écran malgré ses doigts déjà engourdis par le froid.. Juste au moment où il allait appuyer pour appeler, le téléphone vibra dans ses mains et le prénom de son oncle apparu en gros sous ses yeux. 
 « Ah bah j'allais justement t'appeler. » s'amusa le garçon en passant une main dans ses cheveux. « Qu'est-ce qu'il y a? 
 - Est-ce que ton père est là? Passes-le moi s'il te plait. » 

 Audric fronça les sourcils, inquiet. Il s'était passé quelque chose, c'était certain mais quoi? Sous sa boîte crânienne ses neurones s'agitaient, cherchant à trouver de quoi il s'agissait. Il pensa tout d'abord qu'il était peut-être arrivé quelque chose à son grand-père, puis il songea à Emma qui s'attirait continuellement des ennuis.

« Il arrive, il est partit chercher la voiture. » annonça l'adolescent comme si Edouard pouvait savoir où ils se trouvaient et ce qu'ils y faisaient. « Qu'est-ce qu'il y a, il est arrivé quelque chose à papy? Ou Emma? Jess'? Tata? » Il avait fait tout le tour de sa famille française, mais cela ne semblait pas être la bonne réponse. De l'autre côté du combiné son oncle soupira. Il pouvait presque le voir se passer une main sur son visage tiré par la fatigue. Il était sûr de ce dernier point en entendant la voix d'Edouard. 
 Ce dernier laissa passer un long silence avant de grommeler quelque chose d'incompréhensible. Puis finalement il se décida à dire à son neveu la raison de son appel, puisque son beau-frère ne semblait pas pressé d'arriver.

« C'est Gabrielle et Jeanne. Elles ont eu un accident ce matin. J'ai essayé de vous joindre tout l'après-midi. » Il y eu un nouveau soupire pendant que Audric se liquéfiait sur place. Ses joues, rougies par le froid, pâlirent à vue d’œil alors qu'il retenait son souffle. Jeanne, un accident? Mais elle allait bien n'est-ce pas? Ignorant son silence, son oncle insista : « Audric, passes moi ton père s'il te plait. Vite. »
Dernière modification par Audric Hitward le 23 déc. 2018, 21:39, modifié 2 fois.

Je suis d'accord avec la signature d'Amaryllis.
Là où les Ninker passent, la défaite trépasse. Audsée un jour, Audsée toujours! Un jour Jonois resplendira."

23 déc. 2018, 21:20
Jeanne  Solo/Rpg ++ 
21 décembre 2043
Allemagne


 Les bruits de l’hôpital étaient étouffants. Les gens allaient et venaient sans les voir alors qu'ils attendaient dans le couloir, assit sur des siège dont la notion de confort était assez dérisoire. Les jambes tendues devant lui, Audric observait le plafond sans le voir, l'estomac patraque, se noyant dans les paroles des gens qui déambulaient sans les comprendre. S'ils avaient été dans un pays dont il comprenait la langue, il aurait laissé traîner ses oreilles afin de récolter la moindre informations, mais ici c'était totalement vain. 
 A sa droite son père était courbé en deux, les coudes posés sur les genoux et le visage enfouit dans ses mains. Son pied gauche ne cessait de trembler, faisant subir ce rythme infernal à toute la rangée des sièges, ce qui ajoutait à la nausée du garçon. 
 Devant eux, au milieu du couloir, c'était Edouard qui faisait les cent pas depuis qu'ils étaient arrivés. Les heures passaient étrangement, tantôt s'étirant de tout leur long, tantôt passant en un éclair. L'adolescent avait déjà compté que trois médecins et deux infirmières étaient venus donner des nouvelles depuis le matin, et même s'il n'avait pas comprit un traître mot qu'ils avaient pu prononcer, il avait bien comprit que rien allait bien. Les adultes ne cessaient de lui faire de grand sourire encourageants, essayant surement de l'apaiser. Seul Andrew était honnête avec lui depuis le début et lui traduisait tout ce que les médecins rapportaient, bien que son beau-frère l'ai reprit plus d'une fois à ce sujet. 

«
Il est grand. Il a le droit de savoir. » avait rétorqué le rouquin avant de serrer rapidement la main de son fils. Puis il s'était à nouveau enfermé dans son mutisme et l'adolescent avait reprit son observation aveugle du plafond. L'angoisse sourde qui lui vrillait le ventre l'empêchait de penser correctement. 
 La veille au soir tout s'était enchaîné après le coup de téléphone de son oncle. Andrew avait foncé jusqu'à leur appartement, ne se préoccupant pas du fait que la voiture était très mal garée dans la rue en bas de chez eux. Il avait ordonné à son fils de prendre rapidement quelques affaires, s'était occupé des siennes et avait poussé l'adolescent dans la voiture à nouveau. Le brun avait seulement pu jeter un œil inquiet à son chat avant de se faire embarquer.  Audric n'avait jamais vu son père à la fois si inquiet et si serein. Son fils ne le lâchait pas d'une semelle pendant qu'il gérait tous les billets dont ils auraient besoin ainsi que les différents trajets. Quand le brun avait mentionné le fait que Pebirw était seul à la maison, le rouquin lui avait passé le téléphone en lui disant de demander à Ruby si elle pouvait aller s'occuper du matou. 


 Quand il avait expliqué la raison de leur départ précipité, sa  tante avait eu alors une réaction qui avait surprit le garçon. Elle qui n'avait jamais cessé de cracher sur sa mère semblait s’inquiéter pour elle. Ruby avait même demandé au garçon de la tenir au courant de son état, et de ne pas hésiter à appeler si'ils avaient besoin de quoi que ce soit. Étrangement elle semblait plus douce depuis qu'elle avait été mise au courant pour l'adoption du garçon, dont elle avait toujours été tenue à l'écart de la vérité, comme si c'était un grand secret tellement dangereux qu'elle-même, la propre sœur d'Andrew, devait être tenue à l'écart. L'adolescent avait cru comprendre qu'elle avait d'ailleurs passé un savon à son frère, et fait tout aussi incroyable : elle s'était excusée auprès de Jeanne pour toutes ces années où elle l'avait accusée d'avoir mentit à Andrew et profité de lui. 

 Le siège sur lequel il était assit cessa soudainement de trembler. Rabaissant les yeux, Audric vit que son père s'était levé et précipité à la rencontre du médecin qui s'approchait. Gregor, le mari de Gabrielle, se tenait juste derrière l'homme. Il s'approcha doucement du garçon, laissant Andrew et Edouard parler au médecin. 
 « Pas trop fatigué? » L'homme était déjà venu aux nouvelles quelques heures plus tard, lui-même s’inquiétant pour Gabrielle. C'était elle qui conduisait la voiture lors de l'accident, et c'était aussi elle qui avait été la moins touchée des deux femmes.

 L'adolescent secoua la tête, observant son père derrière Gregor. Le roux se passait nerveusement la main sur le visage et semblait se retenir de hurler. Son oncle lui ne s'en priva pas et cria rapidement sur le médecin avant de masquer son visage avec sa main. Une jeune femme, faisant partie aussi du personnel hospitalier s'avança vers eux lentement. Les mains croisés devant elle, elle s'adressa en priorité à Andrew et lui dit quelques mots, avant de poser une main douce sur son épaule. 
« Non. » souffla le père de famille en secouant la tête. « Non, non, non! » 

 Edouard retint de justesse son beau-frère qui se laissa tomber lourdement sur son siège. Audric observa quelques secondes les larmes qui roulaient le long des joues de son père. Ce dernier tourna vaguement la tête vers lui et secoua la tête. Il attrapa vivement les doigts de son fils et les écrasa sans y faire attention. 
 « Je... je suis sincèrement désolé. » souffla Gregor en serrant l'épaule du garçon. Mais le brun n'entendait plus rien. Il avait comprit.

 Le monde autour de lui devint étrangement silencieux. Il voyait les lèvres de son oncle bouger, mais aucun son n'en sortait. Il eu l'impression de s'enfoncer doucement dans de la mélasse, son corps devint lourd, et intérieurement il se sentait vide. Tellement vide, comme si plus rien dans le monde n'avait d'importance. Dans sa tête, il revit l'image de sa mère s'éloignant pour prendre son train, et lui qui la saluait vaguement de loin. Si seulement il avait su que c'était la dernière fois... Audric réprima un frisson.
 En plus d'être vide et silencieux, le monde était devenu glacial.

Je suis d'accord avec la signature d'Amaryllis.
Là où les Ninker passent, la défaite trépasse. Audsée un jour, Audsée toujours! Un jour Jonois resplendira."

03 janv. 2019, 21:41
Jeanne  Solo/Rpg ++ 
23 décembre 2043
Bourgogne - France



Le vide ne l'avait pas quitté depuis l’hôpital. Il ne lui collait pas à la peau, il se noyait dedans. Le silence s'était invité également, un silence dans lequel le garçon s'était enfermé et refusait de sortir. Seule la voix d'Andrew parvenait à passer au travers, tout comme sa présence repoussait un peu le vide. Audric n'avait plus conscience du temps qui semblait s'écouler encore, refusant d'arrêter sa course sous prétexte que des gens mourrait. Cela lui faisait une belle jambe à lui, et puis s'il devait s'arrêter à chaque fois le monde ne tournerait plus.
 L'adolescent avait pu voir une autre facette de son père. Ce dernier affichait un sourire complètement hypocrite devant les gens, il faisait de son mieux pour garder le dos droit et paraître fort, mais le brun lui voyait bien qu'il n'en était rien. Son père passait ses journées et ses nuits assit dans le fauteuil de son grand-père, à regarder le vide avec les yeux dans le vague. 

 Les explications de l'accident étaient arrivées dans un fil décousu, les oreilles de l'adolescent parvenant à attraper quelques bribes de conversations entre Edouard qui gérait presque tout et André. Jeanne et Gabrielle étaient seules dans la voiture, une banale dispute aurait éclatée, et la cadette qui conduisait aurait ensuite perdu le contrôle du véhicule alors qu'elle redressait son volant, la voiture s'étant déportée sur la voie d'à côté. Dans un réflexe incontrôlé elle aurait poussé la voiture dans l'autre direction, percutant un mur du côté de sa sœur. 
 En observant les rainures au plafond, Audric laissa quelques minutes ses pensées dériver vers Gabrielle. Il ne ressentait pas pour elle la même angoisse qui l'avait envahie à la sortie du cinéma, lorsque son oncle lui avait annoncé que sa mère adoptive était à l’hôpital. Pour autant il ne lui en voulait pas, ce n'était qu'un bête accident... Puis alors que son grand-père annonça que plus jeune fille devrait certainement rester en fauteuil roulant pendant un long moment, Audric se laisse happer à nouveau par le vide. C'était plus simple de tout abandonner et de se noyer dans l'apathie. 

  Il avait reprit sa chambre chez son grand-père, comme si tout était normal, comme avant. La nuit précédant l'enterrement il sortit de la chambre trop calme, vide de ses cousines, et rejoignit la cuisine afin de prendre un verre d'eau. Il retrouva son père, assit dans l'un des fauteuils du salon, à l'endroit même où il l'avait laissé la veille avant d'aller se coucher.
Affalé entre les accoudoirs, Andrew se tenait la tête d'une main, le regard plongé vers le sol. L'adolescent s'approcha doucement de lui et posa une main sur son épaule avant d'ouvrir la bouche pour parler. L'adulte sursauta, surprit autant pas le contact que par la présence d'une personne dans le salon à cette heure.
« Que... Tu n'arrives pas à dormir? »
  Audric secoua la tête. Il ne retourna pas la question, les cernes noires sous les yeux du rouquin répondaient à sa place.

 Pendant l'enterrement également, l'adolescent ne parla pas ou très peu. Il n'ouvrait la bouche que pour s'adresser à sa famille proche, les autres n'étaient que des visages flous qui l'indifféraient totalement. Il resta tout le long collé à son père, prêt à le rattraper s'il faisait mine de tomber. Jessica et Emma qui étaient arrivées avec leur mère dans la matinée restaient près de lui. La cadette lui avait même glissé un paquet de mouchoir dans sa poche mais le brun ne s'en servirait pas. Il n'avait pas versé une larme depuis le début, le vide les engloutissait avant qu'elles ne sortent. 
 Le temps continua sa course folle, comme si tout devait passer vite, comme si tout irait mieux une fois que tout serait terminé. Audric avait à la fois hâte de rentrer chez lui, et aucune envie de retourner dans leur appartement où sa mère ne remettrait plus jamais les pieds. Mais il n'appréciait pas plus de rester en France, dans cette maison où elle avait grandit et où son souvenir était trop présent. 

 La nuit arriva bien vite et Andrew reprit sa place dans le fauteuil, où le sommeil le trouva au milieu de la nuit. Son fils s'était endormi sur le canapé, refusant de retourner dans la chambre qu'il partageait avec ses cousines. Dans le salon au moins, il pouvait s'enfermer à nouveau dans ce silence si confortable.

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07 janv. 2019, 20:42
Jeanne  Solo/Rpg ++ 
30 décembre 2043
Londres - Angleterre


 Plus d'une semaine était passée depuis le départ de Jeanne, depuis la dernière fois qu'Audric avait vu sa mère. Il avait beau savoir qu'elle ne reviendrait pas, il ne pouvait s'empêcher de croire à son retour chaque fois qu'il entendait la porte d'entrée s'ouvrir. La déception lorsqu'il comprenait que ce n'était pas elle était toujours aussi présente à chaque fois et la peine le dévorait un peu plus de l'intérieur. Andrew lui avait délaissé le fauteuil de son beau-père pour le canapé du salon dans le petit appartement. Ce dernier n'avait jamais paru aussi silencieux ni si vaste aux deux garçons avant toute cette histoire. La porte du bureau de Jeanne était restée résolument fermée depuis son départ, ni le père ni le fils n'ayant de courage de la pousser pour affronter la pièce vide.

 Chacun avait reprit ses petites habitudes, même si certaines paraissaient particulièrement difficile sans raison apparente. Audric avait écrit à ses amis sans mentionner la mort de sa mère, leur souhaitant un joyeux noël comme si de rien n'était. Il avait glissé les lettres dans de petits paquets qui enfermait les cadeaux qu'il avait choisit de leur offrir. Il avait même trouvé le courage d'envoyer Zia, la chouette que sa mère avait achetée, à Nathanaël. Il avait écrit à son père biologique une lettre simple, presque banale dans laquelle il lui souhaitait de bonnes fêtes ainsi qu'au reste de sa famille. Ce dernier point était plus par politesse d'ailleurs, l'adolescent était persuadé que si Nathanaël ne gardait pas les mots pour lui ils ne seraient pas bien reçus par les autres membres de cette famille à laquelle il n'appartenait pas de toute manière.
 Il avait également ressenti le besoin d'écrire à Eider. Il avait mit plus d'une journée à tracer des mots bateau qui seraient certainement jetés à la poubelle aussitôt après, mais il fallait qu'il le fasse. Il y avait même glissé un présent à l'intérieur d'un petit paquet. Une magnifique plume de paon accompagnait alors le parchemin sur lequel étaient griffonnés ces quelques mots : 

Chère Eider,

Je te souhaites un joyeux Noël.

Audric.

 C'était la lettre la plus courte qu'il n'avait jamais écrite. En l'envoyant il avait constaté combien c'était ridicule, pourtant cela lui avait demandé un gros effort pour simplement le faire. Alors que la chouette s'envolait dans la nuit, il regrettait son geste en se trouvant bête. Le garçon aux yeux vairons s'était ensuite écroulé sur son lit en se demandant s'il pourrait parler à sa sœur à la rentrée. Tout comme pour la lettre il ressentait soudainement le besoin de mettre les choses aux clairs avec sa demi-sœur. Mais il avait encore le temps de changer d'avis, et peut-être éviter de paraître ridicule une nouvelle fois.

 Noël était finalement passé, Audric ne faisait plus vraiment attention aux jours qui passaient jusqu'à ce qu'il réalise qu'à la fin de la semaine, il retournerait à l'école. Quand il avait comprit qu'Andrew se retrouverait seul à l'appartement, le garçon s'était secoué mentalement et avait changé son comportement. Au lieu de s'enfermer dans son apathie, il avait commencé à cuisiner à la place de son père. Etant loin d'être très doué, il n'avait réussit qu'à faire brûler les pâtes. 
 Suite à cette catastrophe, au lieu de se fâcher, Andrew avait éclaté de rire déclenchant la phase deux du plan du garçon : tout simplement le faire sourire. Les fenêtres grandes ouvertes malgré la fraîcheur de décembre, ils avaient ensuite commandés des pizzas qu'ils avaient mangé dans le salon devant un film choisit par l'adolescent. Si l'absence de Jeanne se faisait toujours cruellement sentir, le père de famille et son fils n'en parlaient pas et tentaient de reprendre un train de vie normal. Seuls les coups de téléphones qui résonnaient dans la maison venaient troubler le semblant de paix qui y régnait. 
 C'est d'ailleurs l'un de coup de téléphone qui replongea Audric dans l'apathie, alors qu'il faisait de son mieux pour en sortir.

 « Tout ça, c'est entièrement de ta faute. » La voix de Gabrielle résonnait à son oreille alors qu'il essayait de comprendre le sens de ces paroles.

 
 

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04 févr. 2019, 21:45
Jeanne  Solo/Rpg ++ 
31 décembre 2043
Londres - Angleterre


 

Jessica fut la première à pousser la porte de l'appartement des Hitward, se servant du double de la clef que son père possédait. Ainsi elle put, à sa grande joie, surprendre son oncle et son cousin dans la cuisine. Le premier était en train de se débarrasser discrètement d'un restant de riz que son fils avait fait cuire pour le repas du midi, pendant que l'adolescent finissait de laver la vaisselle. Il songeait en même temps qu'il était peut-être temps pour lui de reprendre sa place derrière les fourneaux. Audric voulait bien faire, mais il n'avait pas très envie de mourir à cause d'une intoxication alimentaire... 
 Le brun vit sa cousine alors qu'il se tournait pour parler à son père. Il retint son souffle sous la surprise et manqua de peu de faire tomber le verre qu'il avait dans les mains. Andrew, entendant le bruit étrange de son fils, se tourna vers la porte et sursauta à son tour à la vision de l'adolescente dans l'encadrement. La française fronçait le nez en cherchant quelque chose du regard.

«
Qu'est-ce que vous avez fait brûler ici?
- Le nouvel an. C'est aujourd'hui c'est ça? » s’exclama Andrew en tendant les mains vers sa nièce. Tout comme son fils il était perdu dans les jours et ne se souvenait plus d'où il en était. Ce n'est qu'en voyant la jeune fille dans sa cuisine qu'il se rappela que son beau-frère et toute sa famille avaient insisté pour venir faire le réveillon du nouvel an avec eux. 

 Sans attendre et par habitude, Jessica retourna dans le salon, se saisit de la valise qu'elle partageait avec sa sœur et la poussa jusqu'au bureau de Jeanne. La voyant faire, Andrew se crispa inconsciemment et détourna le regard, pendant que son fils lui se jetait sur sa cousine pour l'empêcher d'ouvrir la porte.

 « Pourquoi? On a toujours fait comme ça : Emma et moi dans le bureau et papa et maman dans le salon. Non?
- Oui mais... »

 Audric ferma la bouche et baissa la tête. Bien sûr, pour elle tout était une question d'habitude. Pour lui, et même s'il avait conscience que c'était idiot, il avait l'impression qu'en gardant la porte du bureau de sa mère fermée c'était comme si elle était toujours à l'intérieur en train de travailler sur l'un de ses livres. Comme avant. 
 Si la porte était ouverte, alors son souvenir s'évanouirait lorsqu'il constaterait que la pièce était humainement vide. Jeanne sortirait alors définitivement de leur vie.

 Jessica ne comprit pas ce qui trottait dans la tête de son cousin, mais elle voyait bien qu'il pensait à sa mère et n'essaya pas de chercher plus loin ce qui semblait le rendre si malheureux. Sans un mot, elle lui prit doucement la main et posa la deuxième sur la poignée de la porte. Avec lenteur, elle ouvrit la porte et la poussa, restant avec le garçon sur le seuil. 
 Audric, qui avait fermé les yeux, les rouvrit lorsque Jessica bafouilla : « Mais qu'est-ce que...? ». Le souffle court, il détailla un moment l'objet qui se trouvait juste devant eux et qui encombrait une bonne partie de la pièce. Sans réfléchir, le brun s'avança et posa délicatement sa main sur l'instrument, admirant la batterie électrique noire et orange qui se tenait devant lui. 

 « Elle est magnifique...
 - Alors c'était là qu'elle était? »

 Depuis le couloirs, Andrew observait son fils qui tournait autour de l'instrument. Le garçon souriait, des étoiles dans les yeux. Les baguettes étaient posées sur l'un des tambour, comme si elles attendaient sagement qu'on les prennent pour jouer enfin. 

 « Je ne savais pas où elle l'avait rangé. Comme elle à caché les cadeaux chez ton grand-père je pensais qu'elle était là-bas... Joyeux Noël Audric. » Avec tout ce qu'il s'était passé, ils n'avaient pas effectués l'échange de cadeaux traditionnel au pied du sapin. Andrew n'avait aucune idée de l'endroit où sa femme avait tout rangé, et de toute façon il n'avait pas vraiment eût la tête à la fête. Noël n'avait été finalement qu'un jour comme tous les autres où ils étaient restés silencieux dans le salon français. 
 L'adolescent quitta l'instrument de musique sans un mot et serra son père dans ses bras en murmurant « Merci. ». Ce mot n'était pas destiné qu'à son père, mais cela il le gardait pour lui. Il s'était trompé au final : que la porte soit ouverte ou non, sa mère était toujours là. Andrew lui rendit son étreinte et le repoussa doucement en entendant le téléphone sonner.

 « Laisses, j'y vais! » s'exclama l'adolescent en s'éclipsant. Il voulait s'éloigner un peu du bureau dans lequel, même s'il avait été ravit de voir l'instrument -il avait enfin sa propre batterie!- il ne se sentait pas à son aise. Et puis si possible, il voulait éviter à son père un autre appel épuisant de personnes venant s'épancher sur la mort de Jeanne. A chaque fois son père partait s'enfermer dans sa chambre pendant un long moment avant d'en ressortir les yeux rougit. 
 Il décrocha le combiné et déclina son identité, exactement de la même manière que son père qu'il avait apprit à imiter avec les années. Il s'attendait à parler à un autre collègue de sa mère, ou un lointain cousin inconnu sorti des profondeurs de sa caverne pour présenter ses condoléances. Il ne s'attendait certainement pas à entendre la voix de sa mère biologique, et encore moins avec cet air guilleret.


 « Audric! C'est justement à toi que je voulais parler. Comment ça va à la maison? »

 Le brun fixa le salon sans le voir, répondant vaguement à son père toujours planté dans le couloir qui demandait l'identité de la personne à l'autre bout du téléphone. Puis il répondait à Gabrielle sans vraiment réfléchir à ce qu'il disait.
Comment ça allait? Bien. Tout allait bien, la routine.
Oui oui, ils étaient bien rentrés. Non, Andrew -et pas André- n'avait pas reprit le travail.
Oui, il retournerait à l'école après le nouvel an. Et Andrew -oui oui, c'est Andrew- au travail.

 Audric se frotta le front tout en fixant le bout de ses chaussures. Il n'avait rien à raconter à Gabrielle, à vrai dire même s'il ne lui en voulait pas pour l'accident il n'avait pas pour autant envie de lui parler. Elle lui rappelait beaucoup trop la mort de Jeanne, étant la dernière personne qu'il avait vue avec sa mère. 
 Mais si lui n'avait rien à dire, la jeune femme elle semblait avoir un but bien précis en tête. Un sujet de conversation qu'elle n'hésita pas à aborder quand elle comprit que son fils n'avait pas vraiment envie de parler et qu'il allait raccrocher. 

 « Tu sais, je voulais te dire... Je voulais te dire que je te pardonnes.
- Ah? A propos de quoi? 
- A propos de l'accident. Mais je te pardonne. C'est de ta faute mais je te pardonne.  »

 Le brun suspendit son geste et son regard accrocha le mur derrière la télévision. Sa faute? En quoi était-ce sa faute? Il y avait pensé un moment bien sûr. Peut-être que s'il était allé avec elles... mais non : qu'aurait-il fait de plus? Il aurait lui aussi été prit dans l'accident, c'était tout. Il avait rapidement cessé de se blâmer pour tout cela. Trop rapidement apparemment. 

« Tout ça, c'est entièrement de ta faute. C'est de ta faute si Jeanne est morte. C'est à cause de toi que nous nous sommes disputées, tout ça c'est de ta faute. Mais je te pardonnes, après tout c'était un accident. »

 Le souffle court, l'adolescent était incapable de répondre. N'écoutant que la voix de Gabrielle, il n'avait pas entendu son oncle arriver dans l'appartement, pas plus qu'il ne l'avait entendu discuter avec Andrew. Lui tournant le dos, il n'avait pas vu le visage de son oncle se décomposer, tout comme il ne l'avait pas vu se précipiter dans le salon ou entendu ses pas lourds. 
 En revanche il sentit qu'on lui arrachait le téléphone des mains. Et c'est seulement là qu'il vit Edouard, les joues rouges, en train de vociférer des paroles incompréhensibles dans le combiné. L'homme raccrocha brutalement et en voyant le visage décomposé de l'adolescent, il le serra dans ses bras.

« Elle te l'a dit pas vrai? Elle a dit que c'était de ta faute? C'est pas vrai mais qu'elle plaie cette femme... »
 Audric l'entendit vaguement parler à Jessica, et il cru comprendre que son oncle avait coupé les ponts avec sa dernière sœur. Apparemment cela avait aussi un rapport avec le décès de Jeanne. « Ne l'écoute surtout pas, elle essaie juste de rejeter sa faute sur toi. Ce n'est en rien de ta faute Audric tu m'entends? Elle est la seule responsable. »

 Si le vide n'avait pas engloutit ses larmes, le brun les aurait volontiers laissées sortir. A la place il préféra partir s'enfermer dans sa chambre en prétextant un mal de tête naissant et reprit là où il l'avait laissée, sa contemplation du plafond. 

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