La petite marchait dans le parc, nous étions à l'une des dernières soirées encore chaudes, ou du moins supportables de l'automne. Mais la petite n'avait pas froid car il réchauffait son coeur. Bien qu'il soit parfois sombre, il était toujours là pour elle. Lorsqu'elle posait les yeux sur lui, son regard se voilait, preuve de ses sentiments éperdus. Elle pensait souvent à lui, si riche, si beau... Muet dans une sorte de mutisme qui lui donnait tout son charme. Calme et orgueilleux selon ses jours de bonheurs, il reflétait tant de tristesse ces jours où, grisonnant, il grondait envers et contre tous. Et pourtant, malgré ses changements radicaux, ses comportements inexplicables, elle l'admirait, elle l'aimait, le chérissait. Il était à la fois son protecteur, sa maison, son ami et son confident, son tout. Sans lui, que serait-elle ? Sûrement une fille, plongée dans ses pensées noires et obscures qu'il était le seul à pouvoir éclairer.
Ah oui... Que serions nous sans ciel ? Notre ciel, celui qu'elle devait, malgré son amour inconditionnel, partager avec tous.

La petite s'assit dans un coin reculé du parc mais sans rien autour pour lui boucher la vue. Ils étaient tous dans la tour d'astronomie... Elle avait trouvé une meilleure idée, enfin, selon elle. Elle observa le soleil quitter celui qu'elle admirait tant et se prépara à chercher les premières étoiles en s'allongeant sur l'herbe fraîche.

Sibylle errait dans le parc, à la lumière du soleil qui diminuait chaque secondes. Bien que la température n'était pas très basse, elle avait froid et ne savait pas vraiment où aller. Elle aurait eu bien plus chaud dans sa salle commune mais le bruit ambiant l'agaçait légèrement : elle avait besoin de calme et d'espace et le parc lui avait semblé être l'endroit idéal. Mais plus le temps passait, plus cette idée lui semblait idiote. Elle n'avait rien à faire, rien pour l'occuper et bientôt le soleil se coucherait et elle serait plongée dans le noir de la nuit.

Pendant qu'elle hésitait à rentrer se blottir sous sa couette, Sibylle remarqua une silhouette marcher au loin. Elle n'y prêta pas vraiment attention jusqu'au moment où celle-ci s'allongea dans l'herbe. Pourquoi cette personne s'était couchée par terre ? De nature curieuse, la jeune fille eut directement envie de se rapprocher de l'élève pour savoir ce qu'elle faisait. Elle avança à petits pas jusqu'à se retrouver à moins d'une demi-douzaine de mètre de la personne qui s'avérait être également une petite fille. C'est à ce moment que Sibylle se rendit compte que la fille l'avait sûrement entendue arriver et devait se demander pourquoi est-ce qu'elle était là. Elle n'avait plus le choix, la jeune Serdaigle allait devoir lui adresser la parole.

"Sa-salut, t-tu regardes le ciel ?" lui demanda t-elle timidement

Elle était tellement absorbée par sa contemplation qu'elle n'entendit pas ses pas crisser sur l'herbe fraîche, elle sursauta même au son de sa voix :

"Sa-salut, t-tu regardes le ciel ?"

La petite tourna la tête vers la provenance du son. Au dessus d'elle, à ce qui lui semblait être des kilomètres, se tenait une fille, debout. Elle ne distinguait pas son visage, mais au son de sa voix, elle semblait jeune et sûrement en première ou deuxième année. Cyanna, surprise dans un moment de "méditation" et de réflexion failli l'envoyer balader avant de se rendre compte que la petite cherchait peut-être, comme elle, un endroit calme où se réfugier. Peut-être était-elle même une amoureuse du ciel elle aussi, ça, la Poufsouffle savait qu'il n'y avait que très peu de chances, mais elle le demanda quand même dans sa question implicite :

- Oui. Je viens voir le ciel. Il est beau n'est-ce pas ? Et toi, tu fais quoi ?

Envoûtée par le spectacle des étoiles qui apparaissaient devant elle, Cyanna avait parlé sur un ton rêveur et lunatique, bien loin de celui sec et tranchant qu'elle avait eu l'intention de prendre il y a quelques instants.
A force de lever la tête pour regarder le peu qu'elle voyait de la silhouette de la nouvelle arrivante, elle eût mal au cou, alors elle proposa :

- T'as qu'à t'asseoir. Tu seras mieux que debout.

Elle posa la main sur l'herbe près d'elle avant de se rendre compte que la fille n'avait peut être pas envie de rester, elle ajouta donc, gênée :

- Enfin... C'est à toi de voir ! Je t'oblige pas à rester ici... T'as peut être autre chose à faire... Te sens pas forcée...

En voyant la jeune fille tourner sa tête vers elle, Sibylle sentit ses joues rougir. Elle avait grandement l'impression de la déranger mais c'était un peu tard pour revenir en arrière désormais.

"Oui. Je viens voir le ciel. Il est beau n'est-ce pas ? Et toi, tu fais quoi ?" lui répondit la Poufsouffle.

Avant même que Sibylle ne puisse répondre à cette question, à laquelle elle ne savait d'ailleurs pas quoi répondre car voilà plusieurs minutes qu'elle ne faisait qu'errer dans l'herbe, la jeune fille lui proposa de s'asseoir.
Se sentant soudain en confiance, la jeune Serdaigle se laissa tomber un peu trop brutalement à côté de l'élève dont elle ne connaissait toujours pas le prénom. Afin d'éviter que le silence retombe, elle plongea rapidement ses yeux dans ceux de la fille aux cheveux ébènes et lui posa une autre question :

"Non je veux bien rester ici mais, je ne connais pas ton prénom, tu t'appelles comment ? Moi c'est Sibylle, je suis en première année à Serdaigle. C'est vraiment impressionnant ici, le château est gigantesque et les élèves tellement nombreux..."

Elle se stoppa pour éviter de déballer toute sa vie à une totale inconnue, elle avait tendance à trop parler lorsque quelqu'un lui accordait de l'attention et elle ne voulait pas l'effrayer, et s'allongea entièrement dans l'herbe fraîche en frissonnant. Puis elle leva son regard vers le ciel obscur pour observer les amas d'étoiles rayonnantes formant, d'après Sibylle, des schémas incompréhensibles en attendant que la fille lui réponde. La Poufsouffle avait l'air de bien s'y connaître en étoiles, après tout si elle était venue voir le ciel ce ne pouvait être qu'une passionnée. Sibylle se demanda si elle ne pourrait pas la questionner sur les constellations. Il y a longtemps, elle avait rêvé de pouvoir les reconnaître sans difficulté dans le ciel mais n'y était jamais arrivée et s'était vite lassée.

Cyanna avait eu peur que la fille se sente obligée et par le suite gênée par sa proposition, mai il n'en était rien. Cyanna la regardait en se dévissant le cou, elle finit par s'asseoir, assez lourdement, sur le sol. Elle plongea alors son regard dans les yeux de Cyanna.

La jeune fille avait remarqué le frisson de sa voisine lorsque son corps s'était imprégné de l'humidité de l'herbe. La jeune enfant, elle, avait l'habitude et savait que, quoi qu'il se passe, elle finirait par tomber malade. La jeune fille se disait donc qu'il valait mieux profiter puisque nuit sous les étoiles ou pas, elle finirait le nez rouge et a gorge irritée. Mais une once de pitié pour sa voisine qui, n'avait sûrement pas le système immunitaire d'un vieillard de 80 ans, lui soufflait qu'elle devait la prévenir du mal qui la guettait, au risque de se retrouver seule avec le ciel pour seul interlocuteur.

Avant qu'elle ne puisse songer à un avertissement qui ne ressemblerait pas à une remarque sous-entendant qu'elle veuille que la nouvelle arrivante parte - ce qu'elle souhaitait pour le moins du monde - la fille en question la questionna.

Cyanna voulu se taper le front mais elle se retint pour ne pas paraître étrange et faire fuira jeune fille par même occasion. Quelle quiche ! Elle aurait pu penser à se présenter !

- Excuses moi, je ne me suis pas présentée, je suis Cyanna, en première année à Poufsouffle. Je n'avais pas pensé qu'on ne voyait plus les enseignes sur les robes dans la pénombre.

Elle reprit son souffle, tournant à nouveau son regard vers le ciel envoûtant aux milles astres dont le feu irradiait chaque parcelle de son coeur. Cyanna trouvait un repos dans cette foule d'étoiles comme dans aucune autre foule.

- C'est vrai... Il y a beaucoup de monde dans les couloirs... on ne s'retrouve plus. D'ailleurs, le château est tellement grand que je ne m'y retrouve pas plus. Un peu de calme, ça fait du bien. Il y a peut être même presque, à mes yeux, autant d'élèves que d'étoiles visibles dans le ciel...

Sur cette phrase un peu philosophique, Cyanna laissa un léger silence s'installer en attendant une remarque de sa camarade ou si elle ne le souhaitait pas, en attendant simplement que le ciel montre la totalité de ses joyaux.

"Oui, c'est pas faux ! Je ne m'attendais pas à ce qu'il y ait autant de monde ici." lui répondit-elle en souriant timidement, le regard toujours levé vers le ciel.

Puis, replongeant ses yeux dans ceux de la jeune Poufsouffle, elle lui demanda si cela faisait longtemps qu'elle venait ici la nuit pour observer les étoiles. Ce n'est qu'après avoir fini de lui poser cette question qu'elle se rappela que l'on était seulement début octobre et que cette jeune fille, étant une première année, ne pouvait venir ici depuis très longtemps. Elle se maudit intérieurement de ne pouvoir poser des questions pertinentes et reprit :

"Enfin, je me doute que ce ne doit pas faire si longtemps que cela. Mais par contre tu m'as l'air passionnée par le ciel, les étoiles, les constellations, tout ça quoi ! Ça fait longtemps que tu t'y intéresses ?"

Elle s'arrêta de parler un court instant, le temps de se demander si lui raconter sa vie allait vraiment l'intéresser, puis ajouta :

"Moi je trouve ça intéressant tout ce qui se trouve dans le ciel mais je n'ai jamais eu la patience de vraiment faire des recherches par rapport à ça."

Puis, prenant son courage à deux mains, elle lui demanda si ça ne la dérangerait pas de lui en apprendre un peu plus sur les cieux.