Cours, cours cours... Cours!

La neige vole autour de lui.

Cours! Tu t'envoles! Cours!

Tap tap, ses pas rapides dans la neige. Trop rapides. Un pied s'enfonce, la silhouette vacille, écarte les bras, se stabilise et repart plus vite au milieu des flocons, les yeux pétillants.

Vite vite, avant qu'elle n'arrête!!

Il trébuche une dernière fois, la dernière pente de cette hauteur et stoppe, chancelant. Sa poitrine se soulève, s'abaisse, débordante encore d'énergie. Alors que les flocons viennent blanchir ses cheveux, il prend une grande inspiration, lève les bras au ciel et lâche l'explosion de joie qu'il contenait au creux de son estomac.

- IL NEEEIIIIIGE !!!!!!

Quelques élèves étant sortis pour profiter de ce spectacle lui jettent des regards amusés ou agacés.
Enfin! Oui! Enfin il neige. Enfin, dans ce froid tranchant de l'hiver, dans cette grisaille, cette absurde absence de couleur, de la lumière tombe du ciel. Ça lui réchauffe les entrailles, son cœur boue à l'intérieur. Enfin, il se sent vivre dans cette immobilité totale de novembre.

Et puis il se calme. Ses mouvements ralentissent, il lève lentement la main pour accueillir les flocons.
C'est beau... Ouais c'est magnifique. C'est blanc mais c'est si coloré! C'est froid mais c'est comme de petites flammes qui fusent dans les yeux de chacun. Et puis c'est tout petit, minuscule. Saul lève le regard pour embrasser l'étendu blanche qui s'étale tout autour. Minuscule mais impressionnant.
Saul ferme le poing sur les cinq flocons dans sa main et c'est comme une si la boule d'énergie qu'il avait échappée revenait en plein fouet lui percuter la poitrine, cognard fou s'infiltrant en lui.
Le Gryffon s'ébroua, faisant voler la neige dans ses cheveux et reprit ses cris de joie, mené par ce qui semblait être des feux d'artifice dans son ventre.

- Il neige!!! Il neige enfin!

D'autres cris l'accompagnaient déjà. Devant cette joie intense, le parc semblait frémir, comme si un cœur heureux battait aussi, on savait où, partout.
Saul fit un pas en avant pour rejoindre les enfants en bas qui se lançaient dans des combats acharnés de boules de neige. Mais son pied s'enfonça plus qu'il ne l'avait prévu.
Par Merl'
Se redressant vivement, fut emporté en arrière. Ses bottes s'étaient remplies de neige et il se débattait maintenant avec l'invisible pour se redresser.
Non, non, non...
Il laissa échapper un cri lorsque son poids l'entraîna sur la pente opposé. Et puis ce fut le chaos. Son champ de vision fut en un instant brouillé par du blanc, du gris et encore du blanc. Roulant dans la neige, il ne discerna pas, pendant quelques secondes, le bas du haut, les pieds de la tête.
Et tout s'arrêta.
Saul passa ses mains sur ses yeux en grognant pour enlever les billes de neige qui s'y amassaient et tenta de s'asseoir. Le monde tournait autour de lui mais il était immobile. Il ferma aussitôt les paupières, prit de vertige et d'une méchante envie de vomir. Les poings appuyés sur les yeux, il attendit que la folie du monde se calme.
Quand il ouvrit les yeux, ce ne fut ni les arbres, ni le Lac tout proche, ni même la neige qu'il vit. Mais une paire de bottes fichées juste face à lui.

Il était grilheure ; les slictueux toves;
Gyraient sur l'alloinde et vriblaient :
Tout flivoreux allaient les borogoves ;
Les verchons fourgus bourniflaient.

VLAM

Fronçant les sourcils Ivy leva brusquement la tête de son livre. La porte du dortoir avait claqué d'une telle force que la fillette n'aurait pas été étonnée de la voir étalée au sol, totalement hors de ses gonds. Heureusement pour la porte, elle semblait saine et sauve si on excluait les larges rayures dont elle avait été ornée au fur et à mesure des années.  Le fauteur de troubles (qui en réalité était une fautrice) était maintenant affalée à la manière d'une larve sur un lit avec une autre Serdaigle à disserter des bienfaits de la crème anti-pustules wouldrick'n wizzard .

Levant les yeux au ciel, la fillette ferma d'un geste brusque son livre, le lança sur sa table de nuit et sortit en trombe de la chambre. Elle n'avait pas claquée la porte, non. Cependant il est possible que cette dernière ait légèrement tremblé sur ses gonds.
Satisfaite en entendant à travers la porte les deux dindes du dortoir lâcher des piaillements indignés, la rouquine descendit quatre à quatre les marches menant à la salle commune, manquant au passage de terminer la descente sur les fesses. La pièce était bondée. Assis au coin du feu les aiglons travaillaient, riaient entre amis, jouaient à la bataille explosive ou bien tentait de jouer des tours aux autres. Ivy entraperçu Solal gober des dragées de Bertie Crochue avec d'autres Serdaigle. En temps normal elle serait aller le rejoindre pour sans doute pour tenter de les lui faire avaler par le nez ou bien dans un jour de bonté discuter tranquillement.

Mais elle venait d'apercevoir par la fenêtre la neige qui tombait à gros flocons. C'était les premières neiges de l'année et il était hors de question de rater une sortie dans le parc. Toute irritation balayée par la perspective d'une bataille de neige, la fillette enfila précipitamment ses rangers usées jusqu'à la corde et ne prit même pas la peine d'attraper au passage une veste.
Dévalant à toute vitesse les escaliers elle dut se retenir plusieurs fois de foncer dans les troupeaux de limaçons qui lui bloquaient le passage. Après avoir traîné derrières plusieurs groupes de gastéropodes, elle arriva enfin dans le parc.

Autour de la deuxième année , ce n'était que bousculades et rires surexcités.  Tout en continuant d'avancer, elle leva le visage et reçut en pleine figure une flopée de flocons glacés. Lâchant un rire, elle tenta tant bien que mal de les essuyer. A plusieurs reprises, elle évita de peu des projectiles enneigés. Elle entreprit de former une boule de neige et visa sans ménagement un troisième année qui passait en courant. Sa cible atteinte elle se cacha précipitamment derrière un arbre pour éviter toutes représailles. Mais l'élève se contenta de secouer la tête étonné avant de poursuivre sa course effrénée. Il devait être pressé. Ou stupide. Ou alors sans doute un peu des deux.

Satisfaite de son raisonnement, elle s'apprêtait à repartir en direction du lac quand une masse informe de bras, de neige et de cris dévala la pente à toute vitesse pour venir arrêter sa course juste au niveau de ses chaussures dans un braillement assourdissant. Levant un sourcil, Ivy tenta de remettre ses neurones en place pour comprendre comment ce drôle de tas avait-il put atterrir à ses pieds. Au moment où elle commençait à se demander si l'étrange créature qui était affaissée devant elle était en fait une nouvelle espèce rare super rare, cette dernière s'assit dans un petit grognement. Après mûre réflexion, elle ressemblait quand même sacrément à un humain cette masse de neige. Trop stupéfaite pour aider l'élève (car oui elle en était sûre maintenant, c'était un humain) à se relever elle se contenta de lâcher la première remarque qui lui passa par la tête:

"Tu te prends pour un bonhomme de neige?"

Sitôt les mots sortit de sa bouche, elle se rendit compte que sa question bien que posée sans une once de méchanceté était d'une stupidité sans précédent. Du pur Ivy.
*Bravo championne*

Une paire?
Y'en a pas deux?...
À nouveau, Saul se frotta les yeux et les silhouettes vacillantes se rassemblèrent en une seule et même paire de chaussures.

- Tu te prends pour un bonhomme de neige?

Le Gryffon renifla et se redressa sur ses coudes, fixant le Soleil qui venait de lui parler. Une moue dubitative se dessina sur son visage rougit par la neige.
Tiens... y'avait que les nuages tout à l'heure. Mouais, c'est vrai ça. Qu'est-ce qu'il faisait ici celui-là? Il me parle à moi? Froncement des sourcils. Depuis quand ça parle un Soleil?
Les questions mêlées à son esprit sans-dessus-dessous ressortirent en un grognement inarticulé.

- K... Kwa?...

Commençant sérieusement à se fatiguer de cet état, le Gryffon se redressa en vacillant et se secoua, aspergeant le Soleil au passage. Débarrassé de la lourde poudreuse, droit sur ses guibolles et les idées remises en place, Saul faisait face à sa méprise. Il laissa échapper un petit rire devant la jeune fille qui lui faisait face. Sûrement une seconde année mais surtout dont la tête était ornée d'une ample chevelure rousse.

- Pardon... J'ai cru que tu étais un Soleil.

La réflexion était sortie toute seule, Saul espérait qu'elle ne se vexerai pas. D'ailleurs...
Elle a bien dit bonhomme de neige?
Maintenant debout, le gamin devait surtout avoir l'air d'un vieux sapin surmonté d'un nid d'Augurey. Il n'osait pas imaginer l'aspect de sa chevelure incoiffable après cette chute mais préféra passer une main pour les remettre en ordre (au possible).

- Alors non, je ne joue pas au bonhomme de neige. Et il crut utile de préciser sur un air de ce-n'est-absolument-pas-ce-que-tu-crois. Je teste si la zone est pas trop dangereuse.
Owii c'est bien ça, ça fait sauveur de l'humanité!
Faudrait pas que quelqu'un se fasse mal en jouant ici...

D'ailleurs son épaule le lança quand il désigna la pente.
Il revint finalement à la fille, notant qu'elle lui était totalement inconnue. Seul indice lui permettant de se retrouver, son écharpe bleu et bronze, couleurs de Serdaigle.
La maison de Lyra.
Lyra la pimbêche, Lyra l'intello. Celle qui s'était toujours opposée à ses sorties nocturnes.
Oui mais elle ne l'avait jamais dénoncé. Parce que Lyra était aussi tout ce qu'il y avait de plus protecteur. Lâche, exaspérante... mais protectrice.
Il regarda mieux la rousse devant lui. Elle connaissait Lyra, elle? Elle avait pas l'air de lui ressembler...

- Et toi? T'es venue faire quoi?

En parlant il s'était baissé pour ramasser un peu de neige et modelait distraitement une boule lisse et compact en attendant la réponse. Saul décida alors que seule la réponse à cette question lui dirait dans quelle direction lancer la boule. Dans ses yeux, une étincelle de malice s'alluma et il fixa la jeune fille qui lui faisait face.

Le bonhomme de neige contemplait maintenant bêtement Ivy, encore tout sonné par sa descente en roulé boulé. Il semblait actuellement avoir la prestance d'une goule, et ne put d'ailleurs émettre qu'une espèce de bruit étrange inarticulé.
Désarçonnée, la Serdaigle tenta tant bien que mal de décrypter son "Qwa" peu évocateur.
Est-ce qu'il entendait par là: "Qwa un bonhomme de neige, moi?" ou alors "Qwa c'est quoi un bonhomme de neige?" (vu son état cela n'aurait pas étonné la rouquine), ou encore "Qwa comment je suis arrivé là moi?", ou bien même "Qwa pourquoi il fait aussi froid?" (ce à quoi la fillette aurait répondu que c'était sans doute parce qu'il avait environ 80% du corps recouvert de neige).

Plongée dans ses intenses réflexions, elle ne se rendit compte que le garçongoule s'était relevé qu'après l'avoir entendu balbutier quelque chose à propos d'un soleil. Alors comme ça, il l'avait confondu avec un soleil?
Étonnée, elle attrapa entre son pouce et son index une épaisse mèche rousse. On l'avait déjà comparé à une lionne mais jamais à un soleil. Elle trouvait ça plutôt drôle en y réfléchissant bien. Laissant un sourire amusé traverser son visage, elle reporta son attention sur le garçon qui lui expliquait maintenant d'un air  expert qu'il "testait la zone".

"Vos conclusions inspecteur?" lâcha-t-elle, sourire en coin, un sourcil levé.

Il semblait plus jeune qu'elle et sa frimousse ne lui disait rien, ce devait sans doute être un première année. Quant à son air espiègle, ses cheveux en bataille et son écharpe rouge/or, ils ne laissaient aucun doute sur sa maison. La même maison que May.
Âgée de cinq ans de moins que sa cousine, Ivy ne parlait que peu à May depuis l'entrée à Poudard de cette dernière, pour le première fois, leurs années d'écart s'étaient faites ressentir.

Bon alors ils s'étaient maintenant officiellement présentés: le soleil et le bonhomme de neige, parfait.
Reste à savoir désormais ce qu'ils allaient faire de cette information et ce qu'ils allaient faire tout court.
Le regard malicieux que lui lança le Gryffondor maintenant complètement réveillé et la boule de neige "discrètement formée" qu'il tenait en main, répondirent de eux-même à la question que la fillette s'était intérieurement posé.
Amassant distraitement une petite montagne de neige à l'aide de son pied droit, Ivy fit mine de réfléchir, une petite moue plaquée sur la face.

"Hum... tout pareil j'inspectais le périmètre pour voir si on pouvait grimper sans danger à cet arbre" fit-elle en désignant du menton le châtaignier juste derrière les deux enfants.

Machinalement le garçon lança un regard à l'arbre, et profitant de ce moment d'inattention, elle se baissa le plus rapidement possible, attrapa une pleine poignée de neige qu'elle lança sur le premier année avant de courir se cacher derrière l'arbre, manquant au passage de se vautrer en beauté.

Il n'y avait pas à dire, le ninja Wild était tout de même drôlement efficace.

La fille-soleil avait l'air de le croire. D'ailleurs elle le prenait très au sérieux! Tout fière de lui, Saul la regardait jouer avec la neige à ses pieds. Sa naïveté était à son comble...
Bientôt t'en aura pas que sur tes bottines...
La boule devenait de plus en plus ronde, de plus en plus belle entre ses doigts et Saul se demanda même s'il ne valait pas mieux garder celle là intacte et se forger des projectiles avec une autre poignée de neige. D'ailleurs, celle-ci continuait de voleter tout autour.
Tous les éléments étaient là.
Une journée bien commencée, de la neige et des flocons, des enfants...
L'esprit de Saul n'était comblé que par la couleur et la lumière. Une naïveté enfantine avait passé devant ses yeux un philtre ne laissant l'atteindre que les rires et la beauté.

- Hum... tout pareil j'inspectais le périmètre pour voir si on pouvait grimper sans danger à cet arbre.

Lui rendant un hochement de tête professionnel, Saul suivit le doigt du regard. Il s'apprêtait à lui faire part de son avis avec un ton de voix plus grave quand quelque chose vint lui exploser dans l'oreille.
Naïveté...
Un cri lui échappa.
Instinctivement, sa main libre se porta à la partie touchée alors qu'il se retournait pour faire face à son attaquante.
Elle est passée où?
Le philtre avait changé dès que la boule de neige l'avait percuté. Tandis que les couleurs revenaient à leur teinte habituelle, les arbres autour grandirent, la neige s'épaissit et le Soleil se transforma en ennemi de toujours.
La neige voleta de tout côté quand, d'un mouvement vif de la tête, le Gryffon analysa le terrain, cherchant la fille. Ses yeux se plissèrent, sa position changea tandis qu'il préparait sa boule de neige sur le côté de sa poitrine. La neige laissait voir une trainée de pas irréguliers jusqu'à l'arbre qui l'avait trahi. Le rictus malicieux de gamin refit surface.
Je te tiens l'Aiglonne...
Marchant lentement dans les traces de la fille pour faire le moins de bruit possible, Saul s'avança vers le châtaignier tel un renard traquant la souris, rapide et silencieux. Arrivé assez près de l'arbre, il laissa tomber le silence et bondit dans un giclement de poudreuse derrière lui, balançant son projectile par la même occasion, la langue entre les dents.

- Trouvé!!

Et puis, batifolant comme un chien heureux dans la neige, il fit un écart de l'autre côté de l'arbre, prêt à attaquer la fille dès qu'elle sortirait d'un côté avec une nouvelle boule qu'il s'empressait d'assembler.
Un flocon vint se loger sur le bout de son nez. Le fronçant en rigolant, le garçon loucha sur ce petit bout de lumière qui fondait doucement sur son nez rougit.
Les flocons.
Ils recouvraient maintenant le sol de partout. La forêt, le château. Tout n'était plus que blanc lumineux. Oui, ça brillait et ça faisait briller les yeux. Et ça, ce n'était pas un philtre, ce n'était pas la magie. C'était la réalité. La belle réalité. Celle qui s'offrait à chacun, un feu pour réchauffer les cœurs de tous ceux qui voulaient bien voir.
C'est beau la neige...
Ouais c'est beau. Ça fait naitre les rires.

15:32
RAS



Cachée derrière son arbre, le ninja Wild tentait tant bien que mal de calmer sa respiration, la calant sur le battement de son cœur.
Mauvaise idée.
Après sa course poursuite (enfin sa course tout court, mais course poursuite ça faisait plus classe), son cœur battait à un rythme effréné, martelant contre sa poitrine, comme s'il voulaient s'en échapper. Ce qui en soit n'était pas spécialement une bonne nouvelle, les gnous au Kenya pouvait sûrement entendre le vacarme qu'il faisait.
C'était un beau jour d'hiver, assez ensoleillé, mais sec. Le nez d'Ivy était aussi rouge que ceux que portaient les clowns pour amuser les enfants, et de petits nuages de vapeur s'échappaient de sa bouche à chaque respiration. Lizzie devait sûrement faire des bonhommes de neige à l'heure qu'il était. En imaginant sa petite sœur coller de travers une carotte sur la face du Gryffondor, ses sourcils constamment froncés laissèrent place à un fugace sourire.

Quelques secondes passées, la respiration haletante de la fillette semblait s'apaiser, et avachie contre le tronc du châtaignier elle dut se retenir à grande peine de ne pas lâcher un  "ouf" de soulagement. Cependant grâce à ses réflexes naturellement aiguisées et ses aptitudes hors du commun, elle réussit à ne laisser échapper qu'un faible soupir.
Après tout c'était un ninja, sans doute le meilleur de son bataillon (si on excluait Solal), bien que la fillette ne sache absolument pas si un ninja appartenait ou pas à un bataillon. Pour tout dire elle s'en fichait pas mal, c'était un ninja et elle devait faire preuve de dis-cré-tion.


15:33
Bruits de pas en direction de la base


Finalement pas si discret que ça le ninja Wild.
Écarquillant les yeux, Ivy se colla contre le tronc, espérant peut-être qu'en adoptant cette posture, elle pourrait se camoufler dans le décor. Malheureusement les pas se faisaient de plus en plus proche et ses vêtments ne semblaient pas vouloir se fondre dans l'arbre. Tous muscles tendus, elle se tenait prête à fondre sur son assaillant avant de lui faire manger de la poudreuse. Cependant les bruits de pas s'étaient tus.
Levant un sourcil elle se tenait prête à déguerpir lorsqu'une masse glaciale s'écrasa lamentablement sur son front en un meuglement de joie du bonhomme de neige. Elle était à découvert!
Amassant une pleine poignée de neige, elle sauta sur ses deux jambes, bondit hors de sa cachette, et sans plus de cérémonie se jeta sur son assaillant.

"Banzaïïï"

Elle eut juste le temps de songer au fait qu'il était quand même sacrément bizarre d'avoir pour cri de guerre un  nom d'arbre avant de sentir son centre de graviter chuter.
Le Soleil et le bonhomme de neige étaient maintenant tous deux avachis dans la poudreuse, les quatre fers en l'air, une petite colline de neige sur le sommet du crâne du Gryffondor.
*Hum, le soldat Wild perd en précision captain*
Se redressant en tailleur, elle contempla encore sonnée le garçon la tête à moitié enfouie sous la neige, ce qui eut le mérite d'arracher un éclat de rire à la fillette. Il ressemblait un peu à un de ces oiseaux tombés du nid comme ça avec ses cheveux en pétard et son air déboussolé.

"Tu fais un très beau piaf comme ça." le complimenta-t-elle avant de se redresser totalement pour garder un avantage dans la bataille.

Cette fois-ci, quand la chevelure rousse apparu, le gamin était prêt.
Tu vas mordre la poudreuse, Soleil!
Ah ça! Il était prêt. A esquiver une nouvelle boule de neige il était totalement prêt. Une boule de neige.
Pas une fille apparemment dénuée de délicatesse. Pris par surprise, le jeune garçon ne put qu'attendre le choc. Deux mains vinrent s'appuyer sur ses épaules, juste après un nuage de neige et il bascula en arrière en hurlant. Durant quelques secondes, il ne vit que les reflets roux de la fille-soleil à travers la neige qui volait maintenant de partout puis ce qu'elle avait jeté retomba.
Contre le sol froid, Saul contempla un instant le ciel, blanc. Blanc délavé, comme une couverture qu'on avait tendu au dessus du monde.
Puis un éclat de rire fusa dans le silence et le Gryffon adressa un regard étonné à la fille. Tâche colorée d'un paysage si blanc.

- Tu fais un très beau piaf comme ça.

Le rire était communicatif et Saul le repris avec joie, bien content qu'on le compare à ceux qu'il admirait. Malgré tout en position d'infériorité, il se secoua et s'éloigna un peu à reculons de la fille-soleil, non sans lui avoir par mégarde envoyé d'un coup de pied malencontreux, de la neige en pleine face. Elle même était d'ailleurs recouverte de neige et Saul ne tarda pas à relever celle qui était accrochée en masse aux sourcils de la fille.

- Toi tu vieillis avant l'heure!

Et sur ce, il battit énergiquement des pieds puis ce ne fut que neige. Neige à gauche, neige à droite...
Au milieu de son brouillard, le gamin ramassa une énorme poignée de neige et se releva d'un bond, fixant le brouillard.
Brouillard.
Un frémissement le secoua et son sourire s'effaça un instant. Une décharge le parcouru du haut de sa nuque jusqu'au bout de ses doigts qui se crispèrent aussitôt sur la balle blanche et pendant un instant, son cœur sembla disparaître. De ses yeux effrayés, il parcourait le mur de neige qui retombait lentement, très lentement...
Là!!
Il se retint à la tâche rousse flottant, floue, quelque part derrière le gris, comme à une lumière dans le noir d'un cauchemar. Et l'étincelle se ralluma. Le souffle de vie reprit. Ses muscles se bandèrent à nouveaux tandis que son cœur reprenait son rythme rassurant. Saul arma son bras, et tira droit sur la lumière, sautant de l'autre côté du mur de brouillard qui, déjà, se redisposait sur le manteau blanc de la terre d'Hiver, un cri de guerre aux lèvres.

Lumière, Soleil.
Il la dépassa en courant sans la lâcher du regard, il ne voulait plus se perdre dans le brouillard. En son fort intérieur, il priait même pour qu'elle ne disparaisse pas. Il ne voulait pas se retrouver seul au milieu du brouillard. Seul tout court en fait. Seul. Si proche de Saul. Mais maman l'avait dit, et puisqu'elle l'avait dit, c'était vrai et parfaitement vrai. Une lettre peu tout changer. Tout. Saul n'était pas seul. Le Soleil l'accompagnait dans le brouillard et la neige sur son visage n'y changeait rien. Alors il sourit, et une réserve de neige à la main, il demanda.

- Dites-moi Grand-mère Soleil... auriez-vous un nom? Le piaf est curieux de savoir.