Décembre, un mois où tout est froid et chaud à la fois. C’est un mois de contrastes ou tout est possible. Même pour les moldus, la magie est possible en décembre. N’est-ce pas incroyable ? Aliénor aimait beaucoup l’hiver et surtout cette période joyeuse de Noël, ce sentiment que tout arrivait si vite, cette coupure dans l’école et aussi le fait qu’une année se termine. Tout ça mettait en joie la petite Delphillia qui passait malgré le froid toujours autant de temps dehors dans le parc à faire des bêtises ou à dessiner calmement. Elle aimait bien le parc, ces arbres, le ciel dégagé ou pas, les élèves pressés et cette vapeur qui s’échappait de ces lèvres pour s’évanouir un peu plus loin. C’est beau la fumée, ça danse, ça ondule jusqu’à partir vers d’autres cieux.

Aliénor avançait dans la neige encore fine d’hiver, elle allait en direction de la forêt interdite. Non, elle n’allait pas y pénétrer, elle n’avait pas le droit et cet endroit lui filait un peu la chair de poule. Un jour peut-être elle osera y mettre les pieds mais là, pour une fille de 12 ans c’était déjà assez que de s’en approcher. Mais elle venait surtout pour y trouver quelque chose. Son père lui avait dit qu’il y avait des botrucs dans les arbres de la forêt interdite et même à la lisière et qu’il en capturait quelques fois. Si son père avait réussi à le faire, elle pouvait elle aussi non ?

C’était son défi du jour, capturer un botruc. Elle ne voulait pas en faire un animal domestique non, mais juste l’observer de plus près lui donnera certainement des idées de dessin. Ces créatures sont quand même fascinantes, si petites et si courageuses, de vraies teignes. C’est tout sourire et sans vraiment se soucier de ce qu’il se passait autour que la fillette s’approcha des arbres à la lisière de la forêt. Elle s’arrêta un moment, observant cette immense étendue. Elle était comme attirée par cette forêt mystérieuse. Elle fit quelques pas en avant quand soudain, une silhouette blanchâtre ou translucide passa rapidement au loin. Aliénor eu un mouvement de recul et un frisson couru le long de sa colonne vertébrale. *Qu’es ce que…*

Aliénor secoua la tête de droite à gauche pour se remettre les idées en place, peut-être avait-elle rêvé ? Au moins ces ardeurs étaient remises en place, elle ne s’aventurerait pas là-dedans d’aussi tôt. C’est à ce moment-là, que sur la branche à côté d’elle, quelques feuilles se mirent à bouger. Aliénor reporta son attention sur celle-ci et remarqua une petite brindille mouvante. Voilà ce qu’elle était venue chercher, il y avait un botruc juste là sous ces yeux. Il était tout de même difficile à voir, ça se camoufle bien ces choses. La petite Delphillia fixait la créature, elle ne voulait pas la louper. Comme un félin qui guettait sa proie, Aliénor banda ces muscles, plia légèrement ces genoux avant de bondir presque sur la branche et attraper la petite chose. Mais la fillette se rata lamentablement et essaya de sa rattraper aux branches mais celle-ci commencèrent à craquer sous son poids. Aliénor ouvrit de grands yeux surprise avant qu’une branche cède totalement ce qui déséquilibra la fillette. C’est ce moment que choisi le botruc pour passer à l’attaque. Celui-ci grimpa sur les doigts de la fillette et commença à griffer son bras. Aliénor poussa un cri de surprise et essaya de se défaire de la bestiole qui s’accrochait à la piquer sur toute la longueur de son bras. La fillette se mit à tourner sur elle-même pour essayer de s’en débarrasser mais rien n’y faisait. C’est tenace ces bêtes-là.

Décembre, c'était l'arrivée du grand froid, c'était les pluies verglaçantes, c'était les rhumes, les grippes, et le dépérissement des plantes. Décembre, c'était la Saison des grosses doudounes bien fournies, des discussions discrètes au coin du feu, des chocolats chauds avec des marshmallows dedans, des livres lus enroulés dans un plaid bien confortable. Mais Décembre, c'était avant tout l'excitation, la convivialité, la joie, la chaleur au milieu des températures glaciales et Noël. Décembre, c'était la Saison favorite d'Euphemia!

Ce jour-là, après une grosse chute de neige, les élèves s'amusaient à l'intérieur, pour les plus frileux, et dehors, pour ceux qui aimaient s'occuper de leur âme d'enfant. La cour et le parc fourmillaient d'amis et de connaissances qui admiraient le paysage blanc, ou qui se lançaient des boules de neige. La petite androgyne eut beaucoup de mal à se tracer un chemin au milieu des batailles et des enfants qui couraient. Elle était tellement vêtue qu'elle ressemblait un peu au Bonhomme Bibendum, entre ses couches de vêtements, son gros manteau, et son écharpe. On voyait à peine ses yeux bleu glacier -qui était parfaitement de saison-, et encore, ils avaient très souvent devant eux l'objectif de son appareil photo. Elle prenait des clichés d'un peu de tout -un flocon qui tombe, des pieds qui courent, des sourires ravis des jeunes filles et garçons, le vol d'un oiseau au loin. Malheureusement, la plupart de ses sujets de photographie étaient bien au chaud sous la Terre, ou en train de subir un cycle particulier de mort et de renaissance. Elle avait tout de même réussi à prendre un cloporte ou deux, dans le château -mais ce n'était pas pareil, ces insectes étaient invincibles. Même si un météore frappait la Terre, elle était sûre qu'ils en resteraient toujours. Magnifiques petits bijoux de l'évolution.

La petite rouquine avait finalement réussi à fuir la marée d'élèves. A vrai dire, tout était toujours étrangement calme du côté de la Forêt Interdite. Les insectes cessaient de bouger, les feuilles cessaient de frémir, les oiseaux cessaient de chanter. C'était comme si le temps s'arrêtait pendant un instant, retenant son souffle. Ça avait quelque chose à la fois d'attrayant et d'effrayant. Et c'était sans doute mauvais qu'elle trouve cela attrayant avant de trouver cela effrayant. Mais ce genre de questions, elle était trop jeune pour s'en soucier. Elle avait encore le temps.

Elle inspira l'air frais. Elle se sentait si... Calme. Apaisée. Elle serra son Polaroid, et recommença à mitrailler tout. Quelque chose de fugace passa devant l'écran, et elle appuya trop tard pour le prendre. Peut-être un centaure? Non, il ne se baladait pas aussi près de l'école normalement. Elle haussa les épaules. Qu'importe, elle l'avait manqué. Elle s'approchait des arbres environnants, à la recherche de ses chères bestioles à six -ou plus- pattes. L'androgyne ne souhaitait pas non plus les déranger complètement. Juste un peu pour avoir de jolies photos de scolopendres sur fond de neige. Ou une petite larve, cachée au creux d'un tronc. Elle sourit à la pensée. Un cycle de mort et de renaissance. Elle aimait l'idée!

En zoomant, sur les feuilles plus hautes, elle remarqua que de petites créatures faisaient le pied de grue sur les branches, la toisant méchamment au sommet de leur trône d'écorce. Elle fronça les sourcils, tentant de se rappeler de leur nom. Elle prit des rafales de clichés, qu'elle rangeait dans son sac à bandoulière au fur et à mesure qu'ils s'imprimaient. C'était rare, de les voir de sortie. Botrucs! C'était ça, des botrucs! De jolis petits êtres protégeant leurs arbres. En zoomant sur un autre arbre, excitée par sa découverte,  ayant hâte d'accrocher des photos de botrucs dans sa chambre, elle aperçut grâce à l’œil de son appareil qu'il n'y avait pas que les petites créatures, dans ces arbres. Apparemment, il y avait aussi des blaireaux.  Qui se faisait attaquer. Zut.

Euphemia retira son appareil de devant ses yeux, pour pouvoir le voir d'elle-même. Effectivement, il y avait une Poufsouffle dans un arbre, qui commençait à s'approcher dangereusement du sol, et qui se battait contre un gardien des arbres. Elle ne savait pas ce qui la choquait le plus, et décida d'y réfléchir plus tard. La rousse essayait de se souvenir de ce qu'elle avait lu dans un manuel de Soins aux Créatures. Elle se dirigea vers un arbre non surveillé par une des bêtes protectrices, et cherchant partout sur l'écorce, au pied, dans un trou humide et pourri. Elle fut chanceuse, car elle réussit à en tirer trois petits cloportes. La rouquine essaya de ne pas penser au sort qu'elle leur réservait.

Elle courra vers l'arbre de Noël version écorce qui griffe et guirlande jaune et noire, et lança d'abord un cloporte en direction de la bagarre. Apparemment, ça ne suffisait pas à détourner son attention, et Phi paniqua intérieurement. Elle s'approcha plus près, pour pouvoir déposer un second insecte sur le tronc, et cette fois-ci, le botruc sembla parfaitement intéressé. Mais Merlin seul sait pour combien de temps. Elle s'éloigna rapidement.

"- Descends! Vite! Je n'ai qu'un insecte de secours!" lui cria-t-elle à pleins poumons.

Une mince pensée lui traversa l'esprit: elle aurait sûrement dû aller chercher un professeur, au lieu de spéculer sur sa mémoire. Cette fois-ci, ça avait fonctionné. Mais elle savait qu'il y avait peu de chance que ça fonctionne encore.

Elle voulait juste prendre des photos!

Alors que ces jambes se débattaient dans le vide, Aliénor avait comme une sensation de déjà-vu. Et oui, elle avait fait exactement la même avec cette histoire d’écureuil dans le parc, mais elle avait déchiré sa robe de sorcier. Elle n’apprendrait donc jamais de ces erreurs ? Peut-être bien un jour mais visiblement pas aujourd’hui. Le botruc semblait vraiment en colère contre le Poufsouffle, il ne cessait de lui planter ces piques qui lui servent de bras dans la peau et Aliénor l’agitait dans tous les sens pour essayer de s’en défaire. La fillette commençait à penser que jamais cette créature ne la laisserait tranquille. Mais toutes ces gesticulations l’avaient empêché de remarquer que quelqu’un d’autre était ici. Elle fut surprise de voir le botruc attiré par in insecte qui venait d’atterrir sur le tronc. Aliénor était tout aussi subjuguée que la créature qui avait élu domicile sur son bras. Elle resta fixée sur le cloporte qui courait maintenant sur le tronc sombre. Mais une voix la sortie de sa léthargie. Descendre ? Ok.

Aliénor lâcha sa prise et se retrouva sur le sol et sur les fesses, cette fois c’était bon elle s’état explosé le coccyx… Elle massa quelques secondes son arrière train avant de se rendre compte que le botruc l’avait suivi dans sa chute et qu’il était maintenant accroché à sa manche pendant dans le vide avec un air terrorisé. Aliénor approcha la manche de son visage pour pouvoir observer cette bestiole de plus près. Il était tout vert et avait une feuille sur la tête et de grands yeux pour sa taille. Aliénor sourit et alors qu’elle voulait reporter son attention sur sa sauveuse au vue de la voix, le botruc lui sauta sur le visage. Aliénor poussa un cri de stupeur et en moins de temps qu’il ne le faut pour qu’un vif d’or traverse le terrain, elle était débout les bras en l’air et se mettant des gifles pour se débarrasser de ce truc. Elle fit un grand cercle en courant puis revint vers sa sauveuse.

-Aide-moi t’as l’air de savoir t’y prendre vite !

Aliénor en oubliait toute politesse, mais elle avait un botruc accroché à son nez donc les politesses passaient au second plan. Elle agitait ces mains dans le vent comme si cela allait accélérer quelque chose. Non mais ce n’était pas possible, il n’y avait qu’elle pour se mettre dans des situations pareilles… Peut-être qu’après cette énième tentative elle allait arrêter de monter aux arbres pour voir des bestioles inutiles. Enfin tout est à voir, elle connaissait le sort pour l’expulser plus loin, mais elle n’allait pas tenter in Lashlabask sur son visage, trop risqué, leur donner des insecte était visiblement plus efficace et plus pacifiste.

L'expression sur le visage de Phi lorsqu'elle vit la Poufsouffle se laisser tomber n'avait pas de prix. C'était entre l’inquiétude extrême et le soulagement, avec un petit supplément de "Mais bon sang, qu'est-ce qu'elle fait?!".  Décontenancée, désopilée, la seule pensée qui traversa l'esprit de la petite rouquine fut "Dire que je pensais que seuls les Gryffondor étaient aussi idiots". Elle s'arrêta un instant sur cette affirmation. Oh, par Merlin, elle devenait comme sa mère, à critiquer les Gryffondor téméraires... Même si ce n'était pas loin de la réalité ne signifiait pas qu'elle avait le droit de poser un jugement sur eux. Et puis, apparemment, quelques blaireaux semblaient aussi prendre leur exemple. Elle soupira.

Elle voulut s'approcher de l'élève pour l'aider à se relever et à vite fuir -les Botrucs étaient des créatures extrêmement protectrices et extrêmement vengeresses. Puis l'androgyne aperçut que la bestiole s'était accroché à la manche de la brune lors de son vol plané. Oh non. Elle allait l'aider à s'en débarrasser en lançant l'autre cloporte qu'elle tenait dans sa main, mais cette stupide fille qui semblait chercher à se faire déchiqueter approcha la créature de son visage. Qui fit ce que n'importe quel animal énervé et apeuré pouvait faire dans une telle situation. Attaquer. Encore.

En observant la Poufsouffle paniquer et courir dans tous les sens, une vicieuse partie d'Euphemia murmura "Bien fait pour elle". Quelle idée avait-elle eu de monter dans un arbre? De déranger un botruc? De ne pas avoir de bon sens ou d'instinct de survie? Et puis, elle lui avait gâché sa séance photo! Elle secoua la tête. Ce n'était pas le genre de pensées qu'une gentille fille était censée avoir. Même si elle était exaspérée. A ce point-là, elle était plus inquiète pour la créature que pour l'humaine. Et cette dernière revint au triple galop, avec le petit bout d'écorce mouvant au nez, demandant son aide.

"- Chouette piercing..." murmura la rouquine en s'empêchant d'en rire.

Elle inspira une grande bouffée d'air, pour se concentrer. Elle savait comment agir, enfin, théoriquement. Elle n'avait pas à avoir peur. Dans le pire des cas, c'était la Poufsouffle qui était visée, pas elle. Elle mit donc sa peur de côté, et mit sa main juste en dessous du botruc, pour lui fournir un support stable. Elle ouvrit son autre main, en tenant le cloporte qui y était resté avec deux doigts. La créature semblait face à un cruel dilemme: continuer de lacérer le visage de l'intruse, ou accepter la délicieuse offrande?

Lorsque le botruc lâcha le nez de l'autre élève pour atterrir dans sa main, Phi s'empêcha de hurler de joie. Elle avait un botruc dans la main! Une créature magnifique, fantastique, et difficile de s'en approcher! Seul un couinement satisfait parvint à sortir de sa bouche. Doucement, elle éloigna la créature de la Poufsouffle pour l'approcher de l'arbre, tout en bougeant aussi le cloporte. Elle posa ensuite l'insecte sur le tronc, ce qui fit partir la créature à sa recherche.

Dans un élan de confiance extrême, elle prit la jeune fille par le bras, et l'éloigna prestement de quelconque arbre. Euphemia était ravie de son exploit, mais elle se méfiait de l'autre élève. Qui sait, elle avait peut-être encore pour idée d'aller se faire attaquer!

Elle entendit à peine la réflexion de l’autre personne qui était pourtant juste en face d’elle. En même temps, elle était bien trop occupée à loucher sur le botruc qui pendait devant elle. Au moins elle avait pu le voir de près même bien plus près que prévu. Mais c’est toujours comme ça avec Aliénor, elle agit avant de réfléchir, des fois elle se demande si le chapeau n’a pas hésité à l’envoyer à Gryffondor. Mais non, elle est très bien dans cette maison des jaunes et pour rien au monde elle irait autre part. Visiblement l’autre élève avait tout prévu et après quelques coups de regards sur le côté, celui-ci descendit gentiment de son nez. La fillette eu un mouvement de recul puis se massa doucement son nez quelque peu douloureux. C’est vraiment dingue ces bestioles ! C’est tenace jusqu’au bout ! Protéger quelque chose à ce point-là, c’est beau, ça lui fait penser à sa mère et à elle dans certains cas.

Mais avant qu’Aliénor ai pu dire quoi que ce soit, elle fût embarquée par le bras un peu plus loin. Par surprise elle laissa échapper un *Qu’es ce qu’* sans fin. Quand elle retrouva le total contrôle de son corps Aliénor se retourna vers son sauveur quelque peu violent.

-Merci mais pourquoi tu…

Et là c’était le bug. Aliénor bloqua littéralement sur la personne en face d’elle la fixant et l’analysant sous toutes les coutures. Ça ne se fait pas Aliénor. Eh oh, il y a quelqu’un là-dedans ? On ne fixe pas les gens ! La fillette cligna des yeux plusieurs fois avant de revenir sur terre. Mais c’était qui ça ? Elle ne savait pas mettre de nom sur cette personne, garçon ou fille, bonne question. Photographe visiblement. C’était très étrange pour la petite Delphillia de se retrouver dans cette situation. D’habitude, ce sont les autres qui bloquent sur ces yeux bicolores, mais là les rôles étaient inversés. Elle regarda les arbres d’où elle venait. Elle ne serait pas chasseuse de botrucs d’aussi tôt… Son père devait être mieux préparé. C’était leur plus grande différence, Cyril lui planifiait absolument tout lorsqu’il faisait des choses comme ça, Aliénor elle fonçait tête baissée. Ce n’est pas étonnant que son capitaine de quidditch l’engueule. Pauvre Rey…

Son attention retourna sur le photographe.

-Merci beaucoup, j’aurais dû réfléchir avant d’agir, l’histoire de ma vie… Mais…

Non, elle ne pouvait pas poser la question comme ça, c’était très gênant même si dans tous les cas après le déshabillage en règle qu’elle venait de lui faire, cette personne devait bien se douter que la fillette avait tiqué sur quelque chose. Aliénor comprenait ce genre de situations, et ça l’énervait avant de toujours répéter la même chose, mais au fur et à mesure, elle apprit à se présenter comme ça. « Aliénor, un œil de ma mère, l’autre de mon père » Ah les anomalies génétiques… Son regard se perdit dans le bleu presque translucide des yeux en face d’elle. Ils étaient magnifiques et magnétiques, on pourrait se perdre dedans. Et voilà qu’elle recommencer à fixer cette pauvre personne, vraiment les premières rencontres sont à revoir, elle est nulle.

Au début, Phi était en colère. Elle avait eu une peur bleue pour cette inconnue, et ne comprenait pas ses agissements. La jeune fille ressentait rarement ce genre d'émotions. Être énervée, désopilée, ou même exaspérée par quelqu'un, c'était des choses nouvelles. Et elle n'aimait pas vraiment. Ça la mettait de mauvaise humeur, et la faisait trépigner. Mais apparemment, ça faisait aussi disparaître sa timidité. Nerveuse, elle balançait d'un pied à l'autre.

- Merci mais pourquoi tu… Merci beaucoup, j’aurais dû réfléchir avant d’agir, l’histoire de ma vie… Mais…

La Poufsouffle semblait perplexe. Perdue? Peut-être. Pour quelles raisons? Peut-être qu'elle avait du mal à se remettre de sa péripétie. Ou peut-être était-ce du au fait qu'elle observait Phi sous toutes ses coutures. Au début, la rouquine n'avait pas remarqué, perdue dans son énervement. Mais ensuite, elle vit le regard vairon -comme un husky ou un berger australien!- de la jeune fille qui la dévisageait de long en large. Cela mit l'androgyne extrêmement mal à l'aise, ses oreilles prenant une teinte rouge pivoine. Elle tritura ses habits, lissa son pantalon, puis se gratta le coup. Qu'avait-elle de si intéressant ou perturbant?

La rouquine ne semblait jamais remarquer l'effet qu'elle pouvait faire. Elle était une parfaite petite tomboy, ce qui déjà avait tendance à attirer les regards curieux. Et là, tout de suite, elle avait une jolie paire de mirettes fixée dans la sienne. Elle s'éclaircit la gorge, et détourna son regard.

"- Tu pourrais faire attention, la prochaine fois. Les botrucs sont pire que des esprits vengeurs s'ils te voient comme une menace. Elle marqua une pause pour changer de posture, retournant dans son cocon de timidité. " Je, euh... Je m'appelle Euphemia. Première année, Serdaigle. Tu as de la chance que ce soit moi et non un professeur qui t'ait vu hm... Faire le cochon pendu dans cet arbre..."

Voir les changements d'attitude de Phi, c'était comme voir un petit papillon retourner dans son cocon pour redevenir une chenille. Ça n'avait que peu de sens, ce n'était pas pratique, et ça en disait long sur la confiance en elle qu'elle avait. Un petite mésange qui se cachait dans son nid!

Aliénor sorti de son voyage dans les yeux de sa camarade au moment où celle-ci ouvrit la bouche. C’était bien une voix de fille, la même que celle qu’elle avait entendu tout à l’heure dans l’arbre. C’est vrai qu’elle aurait pu faire plus attention, mais une fois qu’elle a une idée en tête elle veut la réaliser de suite. L’insouciance ou la stupidité l’ont mené dans cet arbre et dans cette position fort fâcheuse. La fillette ne put retenir un léger rire quand la Serdaigle lui parla de sa position dans l’arbre. C’est vrai que vu de l’extérieur cela devait être assez intriguant et étrange ? Oui ça devait être ça.

-C’est vrai que j’ai eu de la chance de tomber sur une photographe qui s’y connait en botrucs. Je suis Aliénor pour ma part, à Poufsouffle en deuxième année.

Un sourire illumina le visage de la fillette qui ne se rendait pas vraiment compte du soudain changement d’attitude de son interlocuteur. Elle était plutôt en train de se remettre de ces émotions et de revoir ce Botruc pendant devant son nez. Elle en rira encore longtemps.

Elle souleva sa manche pour constater les dégâts sur son bras. Elle était griffée d’un peu près partout, mais rien de violent ce n’était que superficiel. Aliénor secoua sa tête de droite à gauche pour se dire qu’elle ne s’y reprendra plus, enfin rien n’est sûr. Elle va avoir l’air maligne en rentrant en salle commune tout à l’heur si elle a les mêmes griffures sur sa tête. Mais bon tant pis elle racontera sa bataille face à un Botruc, qu’elle a perdue en plus, ça doit être un exploit.

-Mon père m’avait dit qu’il en capturait souvent, il devait être mieux préparé que moi et certainement juste meilleur.

La fillette rit avant de reporter son attention sur l’appareil photo que tenait la Serdaigle. Elle le pointa du doigt en souriant.

-Tu prends des photos ? T’en a eu des botrucs ? Si tu veux on peut retourner voir même si je ne pense pas être la bienvenue.

Elle tourna son regard vers la forêt puis l’image du spectre à l’intérieur fit courir en elle un vent froid très désagréable. Elle n’est pas du tout rassurante cette forêt.

-Quoi que, je vais peut-être les laisser tranquilles un moment.

La mention de "capturer" des botrucs la fit voir rouge. La plupart de ces créatures étaient souvent kidnappés, délogés, torturés, asservis. Les sorciers -et moldus ignorants- détruisaient leurs arbres pour en faire des baguettes. Elle jugeait donc qu'il était important de laisser ceux vivants encore en liberté tranquille. Elle serra sa mâchoire, et fronça les sourcils.

"- Pourquoi les capturer? Tu peux tout aussi bien les laisser tranquille. Tu as du lui faire extrêmement peur en montant à son arbre, il a sûrement cru que tu étais là avec de mauvaises intentions -et au final, c'était vrai. Ce sont des créatures fascinantes, mais elles ont aussi des sentiments. Pense à ça, la prochaine fois que tu veux déranger une créature: imagine la frayeur que tu aurais si un géant venait dans ton foyer et t'y arrachait."

En une fois, l'énervement lui donna un élan de confiance. Elle se rendit compte que c'était sûrement les sentiments que l'on avait lorsqu'on luttait pour une cause. Phi avait un amour passionné pour tout ce qui avait tendance à être délaissé -les plantes qui ne sont pas jolies, les animaux jugés laids, ou les insectes. Avec l’œil de son objectif, elle pouvait voir un monde plus beau, plus complexe, plus fascinant qu'avec ses propres yeux. Une chenille dans sa chrysalide, les épines frémissantes d'un sapin, un botruc endormi sur une branche. Là où beaucoup voyait du bizarre, du dégoûtant, ou du quotidien, elle y voyait de la beauté, un monde nouveau intrinsèquement complexe.

Elle soupira, et força ses épaules à se détendre, pour calmer ses ardeurs. Elle n'avait pas non plus envie de crier sur la Poufsouffle. Son père lui avait toujours dit d'être gentille et patiente avec les gens -même ceux qui agissaient comme des imbéciles. Qu'en général, il suffisait de s'expliquer calmement pour démêler une situation, ou pour leur faire comprendre un point de vue. Suite à quoi sa mère ajoutait parfois "Mais s'ils sont cons, ben ils sont cons.". Une philosophe, vraiment.

"- Oui, j'ai pu prendre quelques clichés..." Elle vérifia aussitôt, en cherchant les clichés les plus récents dans son sac. Une des photos qu'elle avait sous les yeux l'aurait fait éclater de rire si elle avait été seule. "... Je pense que tu ne vas pas aimer celui-là."

Elle tendit alors la photo mouvante vers Aliénor. On pouvait y voir l'arbre où les péripéties s'étaient déroulés, puis en zoomant, on pouvait y apercevoir la jeune Poufsouffle se débattre contre la brindille. Du grand art, entre la position grotesque de la jeune fille, et l'écart de taille absurde entre l'attaquant et l'attaquée.

Aliénor eu un mouvement de recul devant le ton de l’autre fillette. Elle ne savait pas vraiment comment régir. Elle ne voulait pas de mal à ce Botruc loin de là, elle voulait juste en voir un de près pour s’inspirer d’eux pour ces dessins. Non vraiment elle ne saisissait pas la réaction de sa camarade, on se calme Greenpeace. Bon ok, c’est sûr qu’elle aurait pu être plus délicate, plus préparée, plus réfléchie… Aliénor fixait la Serdaigle, elle comprenait son point de vue certes, elle savait bien que la créature avait réagi normalement, mais de là à réfléchir à tout ça avant de faire quoi que ce soit… Elle en avait déjà mal à la tête.

Elle haussa les épaules avec un sourire timide pouvant se traduire par un désolé qui ne sortirait pas de sa bouche par fierté et aussi parce qu’elle ne lui en devait pas à elle, mais plutôt au Botruc. La fillette suouffla avant de se reconcentrer sur son interlocuteur qui répondit positivement à sa question. Elle avait pu prendre des photos ? Mais c’est génial ! Aliénor ouvrit de grand yeux et un grand sourire illumina son visage, elle voulait voir ça !

La Poufsouffle arqua un sourcil quand Euphemia lui dit qu’elle n’allait pas apprécier la photo. Cette petite pique ne fit qu’augmenter la curiosité de la fillette qui se pencha sur le papier qu'elle agitait pour voir ce dont elle parlait. Elle ne put retenir un rire en posant les yeux sur la photo, en effet sa position était cocasse et on pouvait même apercevoir le Botruc mettre à mal la fillette. Elle releva ces yeux rieurs vers la photographe.

-Elle est collector cette photo, t’en aura pas souvent des comme ça ! Et c’est vrai que vu sous cet angle je ne paraissais pas très amicale !

Aliénor rit en faisant un pas en arrière pour ne pas heurter l’appareil. Un geste trop vif et elle pouvait l’envoyer valdinguer. Ce n’était pas vraiment une bonne idée. Donc la distance de sécurité est de mise.

-En tout cas c’est génial ton appareil, elles sont vachement belles tes photos. T’en fait depuis longtemps ?

Aliénor était toujours curieuse de tout quitte à en devenir envahissante pour certains. Mais elle ne se rendait pas du tout compte de cet effet et se retrouvait bien désolée après pour remettre à l’aise ces interlocuteurs. Elle faisait toujours tout pour mettre à l’aise les gens autour d’elle quitte à devenir ridicule. Mais le regard des autres sur elle ne la dérangeait pas plus que ça donc au final tout le monde y trouvait son compte.

La petite rouquine se contenta des frêles excuses non prononcées de la Poufsouffle. Après tout, elle avait au moins la décence de se sentir désolée, et cela apaisa l'androgyne un peu. Cela ne servait à rien de se mettre sur les nerfs pour si peu, et il fallait qu'elle se contienne mieux. Les gens ne savaient pas forcément tout, et ce n'était pas entièrement de leur faute.

Quand la jeune fille réagit avec le sourire à la photo, elle se sentait un peu plus détendue. Apparemment, Alienor avait un sens de l'humour -même quand il s'agissait d'elle. Elle appuya sur quelques boutons, et imprima de nouveau le cliché mouvant. Par habitude, et même si en soit ça ne servait un peu à rien, elle secoua le papier, et le tendit à la jeune fille.

"- Cadeau!" dit-elle avec un sourire satisfait. Elle aimait que les gens aiment ce qu'elle faisait, et elle se sentait toujours redevable. Un petit imprimé, ça ne faisait pas de mal, et elle avait encore beaucoup de papiers spéciaux dans sa malle. " J'en fais depuis mes 7 ans. Je n'ai pas un niveau professionnel, mais j'arrive à faire de jolis clichés parfois. "

Suite à quoi elle sortit de son sac et montra un échantillon de quelques-unes de ses photos récentes: un insecte courant entre les brindilles d'herbes découverte, des cloportes au fond du creux d'un arbre, un botruc semblant se reposer sur une branche. La plupart avait une certaine douceur, et reflétait parfaitement la nature endormie de cette saison. Elle aimait trouver un côté poétique à l'infiniment petit.

Phi n'était pas vraiment habituée à ce qu'on s'intéresse autant à elle. Elle faisait presque son maximum pour paraître effacée, invisible. Elle aimait le calme, et la sérénité. Et c'était sa façon de se protéger des ennuis -quelque chose que ses parents lui avaient transmis en la surprotégeant. Elle avait pour but de prendre son envol, mais n'avait aucune idée de comment. Elle avait souvent trop peur pour faire un pas en avant. Heureusement, sa curiosité la transportait un peu -mais celle-ci pouvait se montrer traitre, comme quand elle était indescriptiblement attirée par cette forêt pourtant interdite. Elle n'était pas le genre de personne qui restait dans ta mémoire à vie, mais plutôt celle qui servait de décor à celle-ci -celle qui était là, à quelques mètres, quand tu as essayé ton premier balai; celle qui a assisté à ton premier O en cours de Potions, celle qui écoutait discrètement quand tu racontais une histoire.

HJ: "On se calme, Greenpeace", t'as cerné mon personnage