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21 oct. 2019, 16:01
 Solo++  Contrôler le venin des ASPICs
A


Reducio
Durant les ASPICs, Circéia erre, médite. Entre deux examens, elle promène son enveloppe et repense à tout ce qui a été. Les milliers de mots, les bonnes notes, et les quelques moins bonnes. Se demandant le temps qu’ils passent non pas à corriger mais à créer, construire, animer. Elle leur sait gré de ce qu’ils font. Et si parfois elle a eu mal en lisant des commentaires prouvant qu’elle avait mal fait, mal conçu, mal osé… si des maux sont nés des mots, elle sait qui ils sont. Alors, comme Circéia se vide la tête chaque soir durant ses ASPICs, Circéia se vide les doigts pour ne pas trop en faire. Les devoirs portent mal leur nom. Ils sont d’abord un droit, elle ne l’oublie pas et c’est la raison pour laquelle elle donne toujours, toujours, le meilleur. Ce temps s’achève bientôt, ce solo est le geste d’une baguette qui donne à voir les pétales de candeur. Il est trop tard pour freiner le temps. A tous mes professeurs.


Jour 1 : Clepsydre interminable…

Cet après-midi-là, j’avais déjà rempli à ras bord mon chaudron personnel de travail. Il faut se rendre compte de ce que sont les choses si on veut les réaliser entièrement. Sans début ni fin. Un cercle ininterrompu de savoirs, de recherches personnelles ; des réflexions et une quête permanente de ce que l‘on peut trouver de pertinent pour ne pas être dans le banal, l’éculé. Apprendre, participer, mémoriser, échouer, se relever, recommencer… Un défi sans issue autre que l’obligatoire relance dans une adversité constante. Comme une partie d’échecs qui vous épuise et vous condamne à repartir du début par le jeu temporel d’une journée n’en finissant pas de recommencer. Telle est l’accumulation, il faut s’y plier sous peine de ne parvenir à rien. C’est une abnégation, un renoncement, aux autres et à soi. Le prix, non pas du succès… juste le renforcement.
J’aurais pu quitter l’école, après les BUSEs, et même en début de septième année, quand nous avions été agressées Ivanovna et moi, dans ce Londres désormais si lointain. J’ai préféré, pour des raisons de sécurité, quelle ironie, demeurer ici. Par moments je me demande si je ne serais pas plus en harmonie loin de tout ce travail harassant.  L’impression d’avoir fait au mieux sur ces deux premières épreuves mais est-ce vraiment ce qu’ils attendent ? Je n’en sais plus rien et je chasse de moi ces idées-là. Je ne cèderai pas au doute, il constitue le plus abominable des venins. Je dois rester concentrée et penser à me reposer l’esprit pour pouvoir, cette nuit, dormir confortablement. Demain est un autre jour et il faudra être aussi déterminée qu’aujourd’hui.
Je suis venue près du lapacho, cet arbre dont toutes les filles parlent un jour avec un trémolo dans la voix. Moi, il ne me fait pas frissonner, ou si peu. Bientôt, de toute manière, je ne serai plus là. Il ne restera que les professeurs, et leurs nouveaux élèves. Ils sont à jamais un point fixe pour ces êtres en train de devenir magiciens, sorciers, humains doués de ce que l’on ne peut conceptualiser si l’on est moldu. Le lapacho… faisons le nécessaire et il frissonnera, comme un chat adorant les caresses sur son dos, à devoir s’en retourner pour stopper les chatouilles. Oui, ils seront encore là à l’avenir, dans cette salle que je ne connais pas, dans leurs bureaux et tous ces lieux que l’on n’imagine pas, qu’ils ont créés avec la magie qui est aussi la leur propre. Je suis devant le lapacho, étonnée de constater que je n’aurai rien fait comme tous les autres. Et qui voudrait de moi ?... Mais je suis bien ici, la fraicheur du soir descend progressivement et je ne pense plus à ces parchemins de quatre mètres qu’il faut remplir de ce savoir devenu instinctif au fil des ans. Je suis comme étonnée de ne rien sentir de plus. Nous sommes finalement peu nombreux et les élèves de mon année sont peu bavards. Aucun n’est jamais venu me voir, est-ce ma maison qui les rebute ? Les soubresauts politiques ? Suis-je à ce point pestiférée ? Je perds le fil de mes pensées. Etrange divagation, repos et inconsistance. Pour une minute avoir le droit de me laisser aller. A quoi pensent-ils en corrigeant ? Sont-ils fiers de nous ? Fatigués ? Plein de soucis qui les assaillent sans qu’ils ne puissent jamais en voir la fin ? Ils nous remplissent de travail comme nous les couvrons de parchemins. Cycle du temps, brutalité consommée, tortures nécessaires, échanges des fluides. Je voudrais savoir grimper aux arbres sans aucun artifice. Etre un aigle, les ailes fourbues d’un vol interminable. Avoir le choix.
Ce soir, je me vide la tête, ni salle sur demande, ni rien requérant un effort. Je rêve, éveillée, à ce que je serais si j’étais une autre. Et je suis pleine, de tout ce qu’ils m’ont donné, à voir et à apprendre. Le temps est la sagesse.

Les manières fragiles
Tes yeux noirs
et mon souffle.

Diplômée de l’ISDM => naturellement charismatique.
Vivre sans faire de mal à personne qu'à moi-même...

12 nov. 2019, 18:51
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S



Jour 2 :… que l’on remplit de savoirs…

Il est beau cet arbre. Je commence à l’aimer, un peu. Il suffit qu’on vous ouvre l’esprit, une fois suffit, le hasard, la destinée. Une rencontre. Sur les tables de mes années d’apprentie, j’ai laissé des gouttes de sang, des rouleaux entiers de parchemin, un savoir embryonnaire, un savoir maladroit, tout juste guidé par un regard adulte, par moments. Et encore. Des savoirs, encore et toujours, poussières de runes, épices dans la potion. Une incantation, un sort de protection, des milliers de dates, une étoile, un songe modlu . Le vent dans mes cheveux. Et des centaures par centaines autour de moi.
J’ai conscience d’avoir été gavée mais je n’ai jamais protesté car il faut en passer par une phase de remplissage, tout simplement parce que notre corps en est capable ; je le sais, je l’ai expérimenté. De mes années de petite enfance je me rappelle toutes les combinaisons échiquéennes conduisant à la victoire ; la Ouest-indienne, la Pyrke, même les plus extravagantes… Alors une fois que l’on est rompue à ce genre de gymnastique, on peut à peu près tout se permettre. Une seconde nature, si au moins l’on accepte l’effort. Et là, ce n’est pas donné à tout le monde. Car, il faut le savoir, la réussite passe par là, et cela, seuls les plus endurants l’ont assimilé. Il faut, en plus du reste, accepter la peine qui précède le triomphe. Et encore, je n’aime pas ce mot. Les honneurs, je les laisse aux Gryffondors qui aiment tant se pavaner en public. Nous ne devrions pas être ainsi répartis, c’est passé de mode, une antiquité qui ne fait que nous enferrer dans nos habitudes les plus rongées du monde sorcier. Dans une journée de femme, on prend au moins une décision importante inspirée par chaque maison…Que suis-je vraiment ? De tout là-haut, je suis sûre qu’ils me soufflent chacun une réponse différente. Je ne suis pas Serpentard, je ne suis pas de Poudlard, j’ai en moi leur savoir mais je suis moi. Et en grande partie eux, qui au quotidien m’ont encouragée, guidée, corrigée… Mes professeurs, qui ont été au-delà de la transmission du savoir. Ils ont planté en moi un peu de ce qu’ils sont. Je les sens m’inspirer, me tenir la main par moments. Aucun n’est russe il est vrai. Mais ils sont moi et je suis eux. Je crois même que je suis à eux. Je leur dois ces questions sans réponses immédiates, ces raisonnements droits, complexes, ces théories mystiques et cette limpidité du réel, de l’avéré. Cette traque incessante de ce qui est faux, du combat qu’il faut mener contre le mensonge, l’ignorance, l’enfermement.  Des faits mais aussi des émotions, cet instant où ils rougissent en pensant à quelque chose qu’ils ne peuvent pas nous dire. Pas encore. Ils nous protègent. Et demain, le sort aura disparu, je serai enfin libre. Libre mais en danger. Aujourd’hui j’ai encore tremblé face à des questions que je maitrisais. Mais en me demandant pourquoi tout paraissait aussi facile. Ce n’est pas normal. Il va bien  arriver un moment où je vais caler, ce n’est pas possible autrement. Entre temps, je suis à nouveau là, et s’il fait un peu froid, ce n’est pas grave. J’ai mis un vêtement en velours que m’avait offert ma sœur. De là où elle est, je lui dois bien ça. Au moins une pensée à celle qui a pris sur elle la misère familiale le temps de leur régler leur compte. Pendant que moi j’apprends et suis en passe de combler d’honneurs ma famille désintégrée par l’ambition d’un seul. Mon père, ce salaud. Si seulement je pouvais exercer sur lui mes talents futurs, ceux que je prépare avec fureur et abnégation, la justice implacable d’une fille ainée rancunière à mourir. C’est ainsi, je ne puis aller contre ce que je suis, et que rien ici, ni personne, n’aura pu infléchir. Simplement car ils ne m’ont vu qu’au travers des lignes que je rédigeais pour eux. Une machine. Voilà ce que je suis pour eux tous. Et mes élans ne sont rien à leurs yeux. Ils ont pourtant existé, et par deux fois. Un jour, sur une musique, lors d’un bal. J’ai tellement aimé me laisser aller à respirer. Ces yeux-là étaient me vrais yeux, pétillants d’un noir rubis. Et une après-midi, dans un café ridicule, à attendre le néant. Oui, j’ai eu par deux fois le sentiment d’exister. C’est fugace, impressionnant de fidélité à soi-même, dérisoire. Le savoir est aussi une sorcellerie, savoir se regarder dans les yeux sans se mentir. Je suis une sorcière.


Des feuilles tombaient,
cheveux blancs de
novembre. Les rides.

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22 nov. 2019, 08:05
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P

Jour 3 : …spécifiques et puissants…


Qui peut se prévaloir d’une relation particulière ? Aucun d’entre nous n’a les faveurs exclusives d’un professeur. Parce que tous ont en eux cette noblesse qui les rend imperméables à nos enveloppes changeantes. Ils sont le point fixe de nos attentions, nos bonheurs comme nos cauchemars. Ce soir, j’ai une forme de déliquescence, rien ne s’est passé comme il l’aurait fallu. Je vais échouer. Il suffit parfois d’une poussière, une pensée lors de l’incantation et hop, on perd le fil. Pourquoi ai-je été si… distraite ? Je le sais, au fond de mon coeur je le sais. Il était là, dans le jury, à me regarder. Et même s’il faisait tout pour ne pas m’impressionner, il était là. Cela a suffi à me faire perdre pied. Juste le temps d’une petite erreur. Je suis persuadée que tous l’auront remarqué, mon…non, je ne veux plus en parler. Ces élans-là sont parfaitement impossibles à laisser dans le voisinage immédiat de la magie. Je ne dois pas penser à autre chose, ces affaires sont une distraction que je refuse. Elle m’éloigne de mon but. J’aimerais pouvoir flâner, penser à autre chose, distraire mon esprit de ces questions. C’est sans doute à cela que servent les amis.  Etre seule, c’est bien aussi. .. L’une des choses que je n’aurai pas à apprendre l’an prochain. Où que je sois, il me sera facile de reproduire ce que je vis déjà, et que j’ai largement entretenu, non pas la solitude, ni même l’individualisme… le mot me manque…Retranchement pourrait convenir, et serait même plutôt vrai. Suis-je introvertie ? L’ascèse… Je ne sais plus. Mes pas modifient le temps d’un instant l’humidité du sable autour d’eux mais dès que je laisse le lieu derrière moi, il redevient comme avant. Cette trace inexistante me plait. L’idée de ne pas avoir modifié le monde, ni profité de lui. Avoir été de cet univers, sans le ponctionner en quoi que ce fut. Un principe physique comme disent les moldus. Rien ne se perd… et moi, je me transforme en quoi ces jours-ci ? Littéralement, face à lui, quelle élève ai-je été aujourd’hui ? M’a-t-il maudite ? Admirée ? Calomniée ? Est-il demeuré neutre ? A-t-il donné le coup de pouce nécessaire à ma réussite ? A quoi pensent-ils durant un examen ? Ils doivent s’ennuyer, à entendre cent fois les mêmes choses. Quoique les parties pratiques sont très liées à nos choix. Ce sont plutôt les parchemins qui doivent les ennuyer à mourir. Je ne sais pas… peut-être moins durant les ASPICs, un certain resserrement a été opéré, par choix des uns ou renoncement des autres. Mais quand même. Cela ne doit pas être drôle tous les jours de faire passer des examens. Sont-ils tous d’accord sur les exigences ? Sont-ils tous au courant de ce qu’est un apprenti sorcier de nos jours ? Sommes-nous les mêmes qu’il y a vingt ans ? Qu’était la vie à Poudlard l’année de la deuxième guerre sorcière ? Ce devait être odieux, surtout pour les Serpentards ayant des désaccords avec le ministère de Jedusor… ces « malgré eux » ont dû souffrir beaucoup. Et on n’en parle pas.

De retour dans ma chambre, une fois ma sortie au bord du lac effectuée, je laisse mes livres de côté. Si je mets le moindre nez dedans pour vérifier si j’ai bien fait, cela va m’angoisser encore plus pour la suite. J’ai sans doute fait des erreurs. Et ai la possibilité de faire mieux demain. Particulièrement demain. C’est un jour essentiel. Alors je m’allonge. Ma condisciple me demande si j’ai réussi. Je lui dis que oui, sans exulter. Pas d’arrogance entre nous, cela serait inutile et nous nous connaissons bien. Les chances sont même plutôt grandes que nous travaillions un jour au ministère dans le même domaine de compétence… Une fille bien… mais un peu en difficulté avec les potions. Le jour où elle a tenté un filtre d’amour, tout le monde est tombé chez Serpentard amoureux du professeur d’études des runes. Cela avait fait un sacré pataquès à l’infirmerie… je ne me rappelle plus de grand-chose mais les descriptions que nous font régulièrement les autres maisons nous font toujours autant rire… Cette ambiance me manquera-t-elle ?

Les arbres
naissent des graines
et les graines des arbres.

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27 nov. 2019, 15:44
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I


Jour 4 : …, concentré de pouvoirs…

Demain j’en aurai fini. C’est à la fois une grande nouvelle et un regret. Presque. J’ai un peu l’impression de ne plus être moi. Dans la pénombre du soir tombant, je croise des amoureux, un ou deux écervelés de Première année. Et moi, qu’ai-je retenu de ces années ? Où la magie se niche-t-elle dans ce corps que j’habite, sans le comprendre comme partie intégrante de mon être ? Ce bras est à moi, cette baguette est la mienne, ces émotions qui se fixent à chaque sort lancé, comme autant de vérifications qu’elle est toujours présente en moi. Un concentré. Il me donne l’impression de se déplacer comme si j’avais un lézard tatoué sur la peau, allant comme il veut et selon son consentement. Une poupée animée par une somme de pouvoirs la submergeant. Je suis un chaudron, la force, le changement et les ressentis, l’étoile, le centaure et cette brindille sur le feu. Un être différent, un courant d’air,  un caillou peint. Et je suis tout ce qui n’a pas été étudié, ne demandant qu’à s’exprimer par elle-même, enfin. Le château a changé, le monde est en révolution, intensive. Et quelle sera ma place ? Je ne redoute pas ces modifications, il suffit de penser à la Russie. S’il le faut, je fuirai, je sais très bien le faire. Ici, j’ai  appris.
Mais fuir n’est pas un but, je veux être utile à la magie, lui rendre ce qu’elle m’a donné. Et plus encore. Un jour, je serai plus puissante qu’eux, et pas seulement car ils auront pris de l’âge. Juste du fait de ma volonté, de ce que j’aurai accompli. Pour elle. La plupart des enfants travaillent pour rendre leurs parents fiers de cette chair patiemment entretenue. Moi pas. Si j’avais à choisir, je ferais ce qu’il faut pour leur faire honte. Et d’ailleurs, le simple fait de choisir le bien est une façon de faire injure à leur mémoire. Leur mémoire… sont-ils à ce point morts pour moi que je puisse le dire ainsi ? A peine. C’est la cruelle réalité. Poudlard éloigne très vite les parents de leurs enfants, et c’est au bénéfice d’une seule et même entité. La magie. En fait, je crois que nous sommes ses esclaves. Etrange constat. Poudlard est Azkaban. Ce pouvoir n’est qu’une farce, nous n’avons au final aucune latitude, juste la nécessité de reproduire ces pouvoirs à nous donnés par le cosmos. Je vois la lune, presque pleine, intense et magnifique. Pourquoi donc refusé-je d’enfanter ? C’est un mystère que peut-être cette nuit élucide. Je veux quitter le cycle, interrompre cette dépendance. En tout cas je ne souhaite pas y participer. Est-ce à dire que je ne vais jamais aimer ? A quoi cela ressemble-t-il, aimer…Il se pourrait bien que cela soit une dépendance de plus, un fil à la patte supplémentaire, une corde. Je ne me vois pas dépendre d’un être extérieur. Mais si je sombre… serai-je capable de résister ? Aimer sans la douleur du manque ? Aimer par amour pur, rayonnant de la joie sans défaut… a quoi nous servent-ils, ces pouvoirs, s’ils n’ont de but que la destruction, le pouvoir, le chaos ? je ne suis pas naïve. Mais pas agressive. La justice est la délimitation de mon être le plus intime. Ici, c’est chez moi, et tu n’y entreras que si je le veux bien. Nébulosités. La différence intervient là. La magie s’est invitée avant que je n’aie le choix. Toi, tu n’es qu’une pièce rapportée, un élément du tout mais pas le tout. Je peine à imaginer comment les choses s’expliquent. Pourquoi des nés moldus, pourquoi des cracmols, et pourquoi des sang-pur. Après toutes ces années, c’est encore un mystère. Et si nous parvenions à modifier les choses ? Pour que chacun puisse en bénéficier ? Partager… suis-je vraiment une Serpentard ? Suis-je même un tant soit peu magique ?

Les mains se croisent
et s’emmêlent.

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01 déc. 2019, 16:00
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C


Jour 5 : …dirimants.

Cette fois, après toutes ces heures passées assise, debout, à genoux, dans les eaux du lac ou à dos de créature plus ou moins recommandable… c’est fini. Je viens de sortir de mon dernier examen à Poudlard. Je ne saurais estimer ma réussite. Tant de questions, d’épreuves, c’était interminable. Je vais être diplômée. Un honneur. Je le ressens comme tel, sans vouloir les honneurs, j’en perçois le poids, une force contraignante me relie à eux tous. Je n’ai pas choisi mais la destinée m’a mise là où je devais être. J’ai la boule au ventre à l’idée de partir. Le danger me guette, et pas seulement celui des menaces actuelles, je pense aux baguettes rouges, à cette fuite parentale jamais pleinement élucidée.  Quelles est donc la place de mes études dans ce chemin que sera ma vie ? Sentiment de l’inutilité, esprit de lassitude, l’envie de partir loin, ne jamais revenir. Le Chili n’est pas le bout du monde, il me faut une destination plus lointaine encore. C’est un abîme que cette vie à nous donnée et dont on ne sait pas quoi faire. Je vais être… une adulte… Quel grand mot… avoir un enfant c’est devenir adulte, gagner ses propres gallions honnêtement c’est devenir adulte. Mais avoir terminé sa formation… n’est qu’une étape. En fait, telle que je me vis, je ne suis qu’une coquille vide. Un creux. L’intuition de ce qu’il manque prend la forme d’une clairvoyance que je me refuse à nommer. C’est un effroi que d’y penser, une crainte horrible et un désir irrésistible. Encore faudrait-il s’en donner les moyens. Mais qui… qui pourrait être à ce point inconscient ? Non, je préfère encore mon état actuel, ce… confort. Il est tellement facile de taire ses sentiments, de les garder pour soi. En guise d’émotion, on renvoie une image de raideur, le meilleur moyen de ne pas avoir à se justifier de ce que l’on est. Assez vite, personne ne fait plus l’effort de venir vers vous, le meuble présent sur le siège, un coussin de plus, tout au plus animé d’une puissance sans relief. La magie est pourtant là mais elle est étiolée, comprimée, dépouillée de ce qui fait sa beauté, la couleur sans l’éclat, l’étoffe en est absente.

Il me manque le modèle, celui que l’on voudrait tous voir nous entourer, nous choyer, nous construire tranquillement dans le calme d’une chaumière accueillante. Poudlard ne peut que nous remplir de savoirs, de choses utiles mais dénuées de l’essence. Il parait au point où j’en suis arrivée que le plus important est la chaleur humaine, les sentiments. Ce mot que je ne peux pas prononcer, comme un serment inviolable que mon cœur refuse de rompre. Parce qu’il ne le peut pas. Parce qu’il ne sait pas comment faire. Je n’ai pas ce pouvoir. Seule je suis impuissante.  Pourquoi donc elles n’ont rien à faire et il leur tombe dans les bras le diamant. C’est d’une cruauté sans nom. Je sens souvent en moi ce sort appris, que l’on voudrait dire impardonnable. Combien de fois ai-je eu envie de l’essayer sur ces bécasses ? Je suis mauvaise, incapable de me réjouir du bonheur des autres, par le seul égoïsme de ne pas avoir ma part. Les gens de mon âge ne voient rien quand les adultes comprennent et font toujours un sourire, même s’ils savent en toute conscience que cela est inutile, éphémère. J’ai reçu un mot gentil d’une professeure, tellement touchant. Je le garde en moi et sent bien que la clé est quelque part, alentour. Mais il n’y a rien d’autre que cette lueur. La complainte de l’augurey. Et pourtant il ne pleut pas. Sauf peut-être à l’intérieur. Alors c’est donc qu’il le voit, le sent et comprend. Me comprend. Voilà pourquoi, d’un coup, je pleure. Il a compris ce que j’étais, ce que je suis. Et il chante pour moi, expulsant ce  mal être, il m’exorcise, me fait signe. L'oiseau intérieur parle et me pousse à évacuer le trop plein. La rivière, l’océan. J’ai fini mon travail, je ne suis plus rien, je suis vide.

Prendre
soin

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