C’était aujourd’hui le premier jour des vacances de Noël pour les élèves de Poudlard, mais le professeur d’Astronomie avait quitté le château dès samedi matin, à la première heure. Il avait transplané de Pré-au-Lard jusqu’à Londres, moyen le plus commode pour voyager entre son lieu de travail et l’appartement dans lequel il avait vécu toute son enfance. 
Lorsqu’il était arrivé, ses parents lui avaient préparé un délicieux repas. Sa petite sœur, elle, arrivait aujourd’hui.
Ce fut avec surprise qu’Oliver accueillit aux alentours de midi un vieux hibou décrépi. À l’une de ses pattes était accrochée une enveloppe grise, sur laquelle était soigneusement écrit à l’encre violette : « Oliver Briggs ». Le hibou repartit aussitôt d’où il était venu, et le professeur quitta la fenêtre pour venir s’installer dans un vieux fauteuil classique, en tissu. Tout en observant la lettre, il s’écria :

« Hermès ! Peux-tu m’apporter une tasse de thé ? Un temps. S’il te plaît. »

L’elfe accourut aussitôt avec la requête d’Oliver, tasse accompagnée de petits gâteaux. Hermès était d’une gentillesse sans égal, et le jeune homme l’oubliait parfois. Buvant une première gorgée, il ouvrit d’un coup sec l’enveloppe, et sortit le parchemin qui se trouvait à l’intérieur.

Amy et Scott
Seront heureux de vous convier au vin d’honneur célébrant leur mariage
Le 16 juillet 2044 à partir de 17h,
Au château d’Inverlochy

Merci de confirmer votre présence ainsi que l’éventuelle présence d’une personne vous accompagnant avant le 1er mai 2044.

N’hésitez pas à me demander des informations supplémentaires à la rentrée.
Amy

Au fur et à mesure de sa lecture, il s’étonnait de plus en plus. Certes, sa collègue lui avait parlé brièvement de ses fiançailles l’été dernier, mais c’était la dernière chose à laquelle il s’attendait : être invité au vin d’honneur. Il avait un peu de temps avant le 1^er mai pour se décider s’il irait ou non à cet événement. Il but une autre gorgée de thé, et, sans faire exprès, une goutte tomba juste au moment où il retournait le parchemin, qui s’écrasa sur une des photos qu’il y avait au dos. *Mince*. Il décida de laisser passer quelques jours.

Chère Amy,

Je vous remercie d’avoir pris le soin de m’envoyer ce faire-part. Je serai présent parmi vous pour le vin d’honneur de votre mariage. Je ne serai pas accompagné.

Chaleureusement,
Oliver

Simple et sobre. Professionnel. Oliver plia le parchemin en quatre, le glissa dans une enveloppe sur laquelle il avait écrit « Amy Holloway », et accrocha le tout à la patte de Cronos, le hibou de ses parents. Il lui indiqua où aller, et ce dernier prit son envol dans les rues de Londres.

Kristen avait pesé le pour et le contre pendant plus longtemps qu'on ne l'aurait cru. La politesse aurait voulu qu'elle accepte cette invitation avec plaisir ; et même si Kristen n'était pas particulièrement proche d'Amy - c'est le moins que l'on puisse dire -, elle s'avéra être touchée par l'intention. Elle lut plusieurs fois l'invitation, donc, et la tendit enfin à Aude.

« Qu'en penses-tu ? »

Kristen, pensive et une main sur le menton, observa sa propre fiancée lire la lettre, comme un connaisseur étudierait un oiseau particulièrement rare et beau. Elle guettait les moindres mouvements de son visage : sourcils, lèvres, même plissement de nez, cela dans le but unique de pouvoir prédire une demi-seconde avant qu'elle ne la donne la réponse de sa compagne. Aude souriait. Elle allait dire qu'il fallait y aller.

« Ça ne se refuse pas. »

Bingo.

Ce n'est pas que Kristen cherchait un prétexte pour ne pas y aller. Quand elle voulait faire ou ne pas faire quelque chose, elle n'avait pas besoin de prétextes. Si elle n'avait pas voulu, elle aurait simplement répondu un merci-mais-non-merci, un peu sophistiqué et suffisamment alambiqué pour avoir l'air courtois. En l'occurrence, elle se posait plutôt raisonnablement la question. N'était-ce pas risqué ?

« Ne crois-tu pas que cela pourrait poser problème, au vu des derniers articles de la Gazette à mon sujet ? S'il arrivait quelque chose par ma faute... »

Si l'on apprenait que Kristen était là-bas, si l'on venait lui chercher des ennuis au beau milieu du mariage d'Amy ? Cela risquerait de très légèrement "gâcher la fête"...

Aude observa Kristen, l'air surpris.

« Est-ce que quelqu'un t'aurait jeté un mauvais sort ? Depuis quand tu te préoccupes de ce qui pourrait arriver par ta faute ? »

Se sentait prise au piège comme une enfant qui vient de faire une gaffe, Kristen la regarda, incrédule.

« Cette baguette est à toi et toi seule. Tu peux vivre comme une ermite et te cacher de son pouvoir, mais dans ce cas tu peux t'en débarrasser dès cet instant. Ou tu peux continuer de vivre comme tu l'as toujours fait, la tête haute, alors seulement tu en seras digne. »

Stupéfaite, Kristen l'était toujours quand il s'agissait d'Aude. Peut-être était-ce pour cela qu'elle l'aimait tant : Aude avait toujours le don de dire ce qu'il fallait, sans détour et, plus important, elle en avait le droit. Elle était en position pour. Kristen quitta son air stupéfait et sourit, expirant un petit rire moqueur.

« Tu as très envie d'aller à ce vin d'honneur, n'est-ce pas ? »

Lui rendant son sourire, Aude répondit :

« Ça me changerait des malades. »

Pensant alors qu'Aude ferait de l'ombre à la mariée, elle pencha la tête sur le côté et plongea son regard dans le sien, puis le descendit un peu, s'imaginant quelle robe sa fiancée porterait. Il fallait admettre que Kristen aimait beaucoup sa robe avec la fente sur le côté, mais elle estimait être la seule à avoir le droit de la voir - car jalousie, ton nom est bien trop joli. Détachant difficilement son regard des courbes d'Aude, Kristen se redressa et alla jusqu'à une table où se trouvaient un encrier et du papier à lettres.

Chers Amy et Scott,

C'est avec plaisir qu'Aude et moi-même serons présentes au vin d'honneur de votre mariage.

Merci pour cette invitation, et mes plus sincères félicitations,

Kristen

Elle relut sa lettre et soupira en pensant qu'Aude se trompait : on pouvait refuser une invitation à un vin d'honneur de mariage, surtout si les raisons de ce refus étaient si logiques que celles de Kristen. En revanche, Kristen, elle, ne pouvait rien refuser à celle qui partageait sa vie. Et ce, peut-être en dépit du bon sens.

Confortablement installée devant la cheminée de ses appartements, la jeune professeure de potions savourait le calme ambiant : les vacances de fin d'année étaient là et les élèves avaient été libérés. A moins que cela ne soit leurs professeurs... Soufflant sur sa tasse de chocolat chaud qui, définitivement était vraiment trop chaud, Magdaléna réfléchissait aux prochaines semaines et plus particulièrement à Noël : devait-elle, ou non, se rendre chez son frère, comme celui-ci lui avait demandé il y a maintenant une dizaine de jours. Certes, ils avaient repris contact mais la marche était un peu haute au goût de Magda... Surtout qu'il s'agissait d'une fête on ne peut plus familiale... Grimaçant de façon fort peu élégante, la jeune femme se leva de son fauteuil, décidant, une fois encore, de... ne rien décider pour l'instant.

Alors qu'elle allait commencer à rassembler ses affaires afin de se rendre à son appartement de Londres, elle fut stoppée dans son élan par un bruit reconnaissable entre tous pour un sorcier : « tap, tap, tap tap tap ». Curieuse, la jeune Espagnole s'empressa d'ouvrir à l'oiseau messager et récupéra sa missive. Ayant rempli sa mission, le jeun hibou moyen-duc décida d'aller se restaurer dans la gamelle de Milo, sourd aux miaulements indignés de ce dernier.

« Chut, Milo... Laisse-le tranquille ! Puis, l'enveloppe grise toujours en main, Magdaléna s'asseya de nouveau dans son fauteuil. Qu'avons-nous là... ? Oh... mais !? Amy et Scott... vin d'honneur... mariage... ».

Continuant à lire l'invitation, Magdaléna commença à sourire, heureuse. Bien-sûr son côté légèrement fleur bleue n'y était pas pour rien mais la jeune femme était surtout sincèrement heureuse pour sa collègue et touchée par son invitation. Invitation que la jeune femme se permettait d'observer sous toutes les coutures. Grain, couleur, épaisseur : tout y passait et, à évidence, rien n'avait été choisi au hasard... Songeuse, la jeune professeure reporta son attention sur le lieu prévu pour la réception :

« Le château d'Inverlochy... Ca ne me dit rien mais, si tu veux mon avis Milo : on est loin d'un mariage à la bonne franquette, comme on dit à Beauxbâtons... Ca me donnera une bonne excuse pour faire du shopping à Londres! Par-fait! Oh... Mais ils sont adorables sur leurs photos... »

En effet, ayant retourné le carton d'invitation, Magdaléna observait maintenant les photos choisies par le jeune couple et l'immobilité de ces dernières ne tarda pas à lui donner une idée. Enfin décidée, la jeune femme se saisit rapidement d'un parchemin vierge, de sa plume et sa plus belle encre :

Chère Amy, Cher Scott,

Je suis très touchée par votre invitation et c'est avec joie que je serais parmi vous le 16 juillet.

Je serais accompagnée de mon frère, Antonio.

Je vous souhaite tous mes vœux de bonheur.

Amicalement

Magda

Une fois rédigée, la lettre fut immédiatement mise dans une enveloppe et la jeune femme se rendit aussitôt à la volière afin d'emprunter un hibou de l'école.Alors que le hibou s'éloignait, Magdaléna espérait ne pas avoir fait d'impair : lorsque l'on demandait « l'accompagnant », on sous-entendait souvent le mari, le petit-ami... et non le frère. Une discussion avec Amy permettrait d'expliquer la situation : Magdaléna la jugea indispensable, d'autant plus qu'elle avait quelques questions, disons, d'ordre vestimentaire à poser à la future mariée ! Ne restait plus à la potionniste qu'à informer Antonio de ses plans : une activité qui promettait de lui prendre le reste de l'après-midi...

Le traiteur qu’ils avaient choisi pour le mariage leur avait fixé un nouveau rendez-vous en janvier. En effet, le couple n’avait pas réussi à se mettre d’accord sur deux des plats proposés lors du rendez-vous de décembre. Ils avaient demandé conseil aux parents d’Amy, puis à la mère de Scott, et ils avaient fini par décider de re-manger les mêmes plats. Cette fois-ci, ils arriveraient peut-être ENFIN à se mettre d’accord.

L’entrée, elle, avait été validée. Une entrée de crudités et une entrée de poisson. C’était pour le plat que ça se gâtait. Scott et ses sales goûts de riche. Il tenait absolument à ce que le plat soit composé d’un… Comment ça s’appelait déjà ? Morceau de bœuf de Kobé, un animal venant du Japon dont le prix de la viande au kilo dépassait largement les 300 livres Sterling.

« Vous savez madame, l’animal est massé au saké, n’est pas stressé, c’est ce qui donne à la viande cette texture et ce goût si subtil ».

« Ah oui, donc c’est le saké et le non-stress qui font qu’on paiera trois fois plus cher notre menu ? Alors que la moitié des gens n’ont plus faim après le vin d’honneur ? »

Le chef-traiteur n’avait alors pas pipé mot et était retourné en cuisine alors que Scott lui adressait un regard noir. Un sourire satisfait apparut alors sur les lèvres d’Amy, elle savait qu’elle avait gagné. Il n’était pas question d’argent, il était surtout question de bon sens. Faire venir cette viande de si loin, la cuisiner pour que vingt personnes seulement finissent par la manger ? Inutile. Un très bon morceau de bœuf serait amplement suffisant.

« Tu n’auras qu’à l’acheter pour toi, le bœuf de Kobé. Qu’en dites-vous Elena ? N’est-ce pas plus rationnel et écologique de prendre de la viande qui vient de bien moins loin ? »

« Ou alors vous pourriez ne pas prendre de viande du tout ? Si vous souhaitez partir dans une démarche un peu plus écologique, ne pas mettre de viande au menu serait très intéressant ».

« Pourquoi pas ? On pourrait faire un double-plat. Si certains veulent de la viande, on met la viande, et sinon c’est sans viande ? Scott ? »

« Oui pourquoi pas ! Mais dans ce cas-là, on prend le Tournedos, et j’en démordrai pas ».

« Allez d’accord, va pour le tournedos ».

Le repas, ok.

Un dimanche où aucun des deux ne travaillait. Fêter la Saint Valentin, ce n’était pas trop leur truc. L’idée d’avoir une « fête des amoureux » alors que si l’on s’aimait, la fête était tous les jours, n’était pas vraiment dans leur conception de la vie de couple. Néanmoins, ils allaient s’offrir un petit cadeau symbolique, histoire de. Amy avait acheté une rose rouge et avait décidé de lui offrir un dîner dans le nouveau restaurant trois étoiles de Londres, où elle avait réservé pour le samedi suivant. « Cadeau symbolique » qui lui avait quand même coûté un bras. Mais quand on aime, on ne compte pas ?

On ne pouvait pas dire qu’Amy aimait les cadeaux. Bien sûr, elle était toujours touchée qu’on ait pensé à elle et elle ne les refusait pas pour ce même motif, mais le fait de dépenser de l’argent pour elle la rendait un peu mal à l’aise. Par contre, cela ne la dérangeait pas d’offrir aux autres, comme le costume complet et les trois tenues de ville qu’elle avait acheté et offert à Sigmund alors qu’il avait refusé qu’elle le fasse. En plus d’insupportable, on pouvait ajouter « têtue » à la longue liste de traits de caractères de la rousse.


Après un petit-déjeuner assez copieux, ils s’échangèrent les cadeaux, assis sur le canapé. Scott fut ravi du cadeau d’Amy, lui qui adorait les bons restaurants. Amy reçut un sublime bouquet de roses rouges, et deux petits paquets, l’un plus lourd que l’autre. Le premier, plus lourd, était une boite à musique qui jouait le début du Clair de Lune de Debussy¹ . La rousse rit lorsqu’elle reconnut l’étiquette du deuxième cadeau. Elle ouvrit rapidement la boîte qui contenait ledit cadeau, à savoir une nuisette beige en soie. Amy lui fit un grand sourire avant de répondre.


« Je vais aller l’essayer, au cas où elle ne serait pas à ma taille… Tu viens ? »

Elle lui fit un sourire entendu. Finalement, le dimanche n’était pas toujours le pire jour de la semaine, surtout lorsqu’on reçoit et qu’on offre des cadeaux.

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¹ : Jusqu’à 4.01