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07 août 2020, 15:06
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17 JUILLET 2045
Londres
DÉLIVRANCE


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*Bordel.* C’était une journée folle, une journée enivrante, pleine d’appréhension et de tendresse. Une journée qui aurait fait bondir tout être humain jusqu’au ciel, aller toucher la Lune, voir plus loin que Jupiter. Une journée miracle, bonheur, si somptueuse qu’elle en faisait jalouser plus d’un. Une belle matinée de juillet, comme il en existait si peu en ce monde. Le ciel était d’un bleu limpide, sans tâche d’un blanc duveteux pour détruire sa perfection. Une minuscule brise venait rafraîchir l’air équatorial, qui laissait les êtres suffocant. Les rues de la grande capitale étaient bondées des corps transpirant, anesthésiés par la chaleur de cette matinée d’été. Dans le petit appartement en plein milieu de Londres, seul un petit ventilateur adoucissait l’air ambiant alors que fenêtres et volets étaient fermés, plongeant les trois pièces dans une lumineuse obscurité. La pièce principale était d’une simplicité presque déconcertante. Elle avait pour seuls meubles un canapé-lit arrangé sur le côté droit de la porte d’entrée, une petite table basse en bois au centre, décorée d’un vase vert contenant six fausses fleurs en tissus, déjà abîmées par le temps. De l’autre côté se trouvait une minuscule étagère où l’on pouvait à peine mettre trois livres. Les murs étaient tapissés d’un papier peint d’un rose de mauvais goût, et d’un tableau représentant la Famille Royale au grand complet.
La petite table avait fini dans un coin, laissant la place à un matelas de fortune que le propriétaire vous avez gentiment donné. Il était inconcevable pour Papa que vous dormiez ensemble, et il avait bien fait comprendre qu’il ne te laisserait pas le lit. Mais au fond cela ne te dérangeait pas vraiment. Non, ce qui aurait le plus révolté Maman était le sol jonché de vêtements sales, de canettes de bière vides et d’emballages de pizza. Tu n’osais bien évidemment faire aucun commentaire, évitant les foudres de ton Père.
Près de l’étagère se trouvait une porte qui menait à la cuisine. Elle aussi n’était pas belle à voir, l’évier rempli d’assiettes et de couverts, le robinet ne laissant filer qu’un faible jet d’eau. Il n’y avait pas de lave-vaisselle, et encore moins de four. De toute façon, Papa avait toujours la flemme de faire à manger, et préférait commander des choses froides ou préchauffées. Une troisième porte, au fond de la cuisine s’ouvrait sur la salle de bain. Pas de baignoire, une simple douche fermée seulement par un rideau blanc et dont le carrelage était jauni et crasseux. Presque collé, se trouvait des toilettes et un lavabo décoré d’un miroir, juché un peu trop haut pour toi.
A vrai dire Papa avait prit l’appartement le moins cher qu’il avait trouvé, dans un immeuble délabré et près à tomber en ruine. Même son vieux chez-soi en Irlande paraissait bien plus accueillant que cet endroit. Il n’avait jamais eu vraiment d’argent, mais à cet instant plus que jamais sa pauvreté te faisait frémir. Le peu qu’il gagnait était vite dépensé dans les bars ou les jeux d’argent, mais il arrivait parfois qu’il te donne quelques pièces pour aller t’acheter un pain au chocolat.


Cela faisait quelques jours que vous étiez venu en Angleterre. Après ton retour de Poudlard, Maman avait eu vite fait de se débarrasser de toi, et le lendemain, tu étais chez ton père. Il ne paraissait pas des plus heureux de t’avoir dans les pattes pour tout le mois de juillet, et faisait tout pour te voir le moins possible. Mais voilà qu’un appel lui fit redonner le sourire bien assez vite. Il en riait presque, brandissant quelques billets sous ton nez, alors qu’il criait de son haleine puant l’alcool.


- Une promotion ! T’y crois gamine ? J’vais pouvoir l’faire mon séjour peinard !


Si content qu’il avait rapidement appelé Maman pour qu’elle vienne te récupérer. Bien entendu, elle avait refusé, déjà bien loin de l’Irlande avec ce salop de Walter. Il avait longtemps hurlé dans le combiner avant de jeter le téléphone contre un mur. Après, il a bu. Beaucoup. Et dans la nuit, il est venu tambouriner à ta porte, te réveillant d’un coup. *On part.* Qu’il t’a dit. Et alors que le soleil se levait à peine, sa vieille voiture roulait déjà loin de Cork. Et te voilà à présent, allongée sur le vieux matelas, alors que le bruit de l’eau coulant te revient de la salle de bain. Et tu souris. Comme jamais tu n’as souri.

Go away chicken ! Alison M.
Éloge à la Charogne.

07 août 2020, 19:23
 Solo  120 battements par minutes  ++ 
Tu rirais presque. Emplie d’un bonheur indescriptible qui te prend dans le ventre, te fait sentir si légère. Et tu souris, encore et encore, jusqu’à ce que tu n’en puisses plus. Mourante de bien-être. Tu aimerais que jamais cette sensation ne disparaisse, ne s’échappe loin de ton Être et que les larmes ne reviennent. Que plus rien ne soit comme avant et que tes yeux brillent toujours plus fort, jusqu’au Néant.
Les mains posées sur ton ventre, tu le sentais se soulever rapidement au rythme de ta respiration. Prises d’une grande excitation, ton cœur battait la chamade, comme le furieux galop d’un sombre cheval. Rien que de penser à cette journée, tu laissais passer un gloussement de joie, qui bien vite vint s’éteindre après que ta main eût recouvert ta bouche. Pas un bruit. Ne pas laisser éclater son ravissement. Tu allais la voir Elle, qui déjà te manquait si fort. Celle aux cheveux d’or et aux yeux océan, tu avais cette si désagréable impression que cela faisait une éternité que vous ne vous étiez pas vu.
Quand Papa et toi étiez arrivés à Londres, tu avais tout de suite pensé à Elle. Ruby. Ici, dans cette grande ville, maintenant si proche de toi. Rusée comme tu es, tu avais attendu quelques jours et que Papa soit presque ivre mort pour lui demander la permission. Tu savais que dès qu’il aurait dit oui, ce serait trop tard, et voilà qu’après un échange ponctué de ses grognements et de ses lents mouvements de bras, il avait finalement accepté. Tous les jours depuis, tu t’étais arrangée pour lui rappeler sa promesse, un petit sourire au coin des lèvres.
Et le voici donc, ce jour, si grandiose. Et voilà que l’eau s’arrête, alors que tu te redresses pour t’asseoir en tailleur sur le matelas. Quelques minutes passent, et enfin il entre dans la pièce, habillé des mêmes habits qu’hier, et sûrement avant-hier. Malgré la douche, un nuage odorant l’accompagne, mêlant cigarette, alcool, essence et vielle pierre. Il s’assoit sur le canapé-lit et enfile ses bottes de chantier, alors qu’il te jette un coup d’œil irrité.


- P’tain tu souris toi, maint’nant. C’est parce qu’on va voir ta copine là ? Comment qu’elle s’appelle déjà ? Ouais non, en fait je m’en fou de comment elle s’appelle. C’est une sale sorcière, comme toi, hein. Tu l’as rencontré dans ton asile, avec tous les autres tarés comme toi. J’te préviens, j’te dépose devant ton parc et après j’me casse.


Tu ne bronches pas, laisses filer les mots. Mais tu ne peux t’empêcher de te crisper à l’évocation de Ruby, alors que ton sourire flanche avant de s’éteindre. Ne pas montrer sa joie. Ne pas… Ne plus. Il finit de se préparer, alors que tu te lèves, récupères un petit paquet à côté de toi, déjà prête à partir. Il prend ses clefs de voiture et se dirige une dernière fois vers la cuisine. Ouvrant le minuscule frigo calé misérablement dans un coin, il prend deux canettes, en ouvre une alors qu’il te tend l’autre. Tu la prends à bout de doigts alors que la première est vidée en quelques secondes. Il appelle ça « le p’tit remontant du matin » et tu ne peux pas dire que ce n’est pas mauvais, car il est toujours très content après ça.
Il referme enfin la porte derrière vous, et reprend la deuxième canette avec un petit sourire, qui comme toujours te réchauffe le cœur. Tu dévales les marches à sa suite, alors que le vieil escalier grince si fort qu’on le croirait prêt à se briser à tout instant. En bas, la ruelle est déserte, alors que vous marchez silencieusement dans l’ombre des immeubles jusqu’à la rue principale. L’épave vous attend sagement, de sa couleur rouille et de ses nombreuses cicatrices. Ton père l’avait acheté d’occasion bien avant ta naissance, et elle faisait bien pitié à voir, avec son capot complètement cabossé, ses portières abîmées et son toit recouvert entièrement de crottes d’oiseaux. Certains se demandaient comment cette antiquité arrivait encore à rouler.

Tu t’assois à l’arrière, comme à ton habitude, alors que Papa essaye tant bien que mal de faire démarrer la voiture. Après quelques crachotements, le moteur fini par ronfler, et voilà qu’elle s’engage sur la route. La fenêtre grande ouverte, tu laisses entrer le souffle chaud et les bruits de la ville. Tu regardes défiler les passants et les immeubles, alors que Papa sifflote.





Tout est calme.


Si apaisant.



Papa a l’air heureux.


Reste sur tes gardes, ne sait-on jamais.



Tout est doux.


La ville se lève.



N’est-elle point belle ?


Il me tarde de la prendre dans mes bras.



De voir son sourire.


Elle.



Rien qu’Elle.


Décris-moi.



La vie paraît douce, le terne est devenu pastel. Je ne vois que les sourires sur les visages, son sourire. Les rires fous, les rires joie, son rire. Les yeux amours, éclat de Galaxie, ses yeux. Elle. Juste… Elle. Rien… Elle. Sans… Elle. Tout… Elle. Elle. Elle. Elle.


Tu l’aimes.



Non. Je sais pas. Pas comme ça.


Et Papa ?



Papa.


Tu le vois ?



Oui. Il est devant, il chantonne. Ça faisait longtemps. Il paraît. Heureux. Il paraît. Lui. Papa ? J’ai pas l’droit. Logan. Faut l’appeler Logan, pas Papa. Comme Maman, il aime pas. Heureux. Tout paraît si beau, est-ce que je le mérite vraiment ? Tout ce bonheur ? Il me brûle le cœur.


J’sais pas. Sûrement, Gamine.



J’crois qu’il me parle.


Qui ?



Papa-qu’on-doit-pas-appeler-Papa.


Est-ce que tu entends ce qu’il raconte ?



Non. Le bonheur m’a rendu sourde. Je n’entend plus que la douce cacophonie du vent, je ne sens plus que la caresse d’un rêve éveillé. Je suis coupée du. Monde. Bien loin, sans doute sur une autre. Planète. Brillant dans un éclat de. Ruby. Si explosante de vie, pourtant je ne vois que la. Mort. Elle se rapproche, silencieuse d’abord. Et puis, plus vite. Si. Vite. Sans. Vie.


Quoi ?



Ne la vois-tu pas ? Devant. Regarde devant. C’est fou comme Elle arrive vite, on ne la vois pas venir. Pas le temps d’un cri que déjà Elle nous. Foudroie.





- Papa !






Il n’a pas entendu.
J’crois qu’il souriait.
Il me regardait.
Et il en a oublié la route.
J’crois qu’il était heureux.
*Gamine...*
Chut, écoute le Silence.
Écoute la Mort.
*T’en va pas.*
C’était atrocement beau.
C’était Nous.
*Revient vite.*
Il a oublié.
Et moi, je souriais.

Go away chicken ! Alison M.
Éloge à la Charogne.

09 août 2020, 15:34
 Solo  120 battements par minutes  ++ 
Ce post peut être choquant, aussi abstenez-vous de lire si vous êtes sensible.



C’était comme si tu avais plongé dans un Trou Noir. Affreusement noir. Il faisait sombre, tellement que tu n’apercevais même pas le bout de ton nez. Il te semblait que ton corps flottait, loin du monde, dans l’Infini de la Vie. *Ou de la Mort.* Tu ne savais plus. Incapable de dire où était le haut et le bas, la droite et la gauche. À vrai dire tu ne savais même pas si tes yeux étaient ouverts ou fermés, si ton corps ne s’était pas dissous quand tu étais passée dans l’Intersidéral, ou que tu étais toujours entière après cette folle escapade. Tu ne sentais plus rien, et tu n’aurais su dire si tu étais blessée ou non. Enfermée dans une bulle, coincée dans l’Univers si sombre de tes rêves.
Et puis, il y a comme une voix. Une voix grave, si rauque, tellement puissante. Elle semble venir de loin, si loin. Sans doute à l’autre bout de cette étrange sphère de vide. Et là, tu le sais, t’as ouvert les yeux. Tu sens tes cils clignoter, tenter de capter la moindre lueur, mais il fait toujours aussi noir. En même temps que les yeux farfouillent, le cou se tord, s’étire, fait pivoter la tête dans tous les sens. Mais le noir a tout bouffé. Le noir a tout noyé. Et il semble t’emporter. Alors tu luttes, tente de remonter le courant invisible, et tes bras s’éveillent, suivi de tes mains. Les doigts remuent, les mains se trémoussent et les bras s’étendent. *Chais pas nager.* Tu secoues le tout dans tous les sens, et cela semble marcher, car tu te sens propulser vers l’avant.
Et la voix revient, elle chuchote, discrète. *Par là.* Tu suis la voix, qui semble se rapprocher, devient plus audible. Elle te semble si familière, alors que tu nages vers elle. *Papa ?*


- En fait, j’préfère quand tu souris. Quand tu fais la gueule, tu ressembles à tous ces cons sur Terre. Ils sont jamais contents, râlent pour rien, foutent le bordel. ‘Fin, moi aussi j’souris pas souvent, j‘souris pas aux gens, mais c’est parce que j’les aime pas. Toi non plus, t’aimes pas les gens, hein ? On est pareil, au final. Tel père, telle fille. Non ? Et pourtant, là, tu souris. Parce que tu vas voir cette fille, là. Si elle te fait sourire, alors c’est qu’c’est la bonne. ‘Fin, c’est c’que disait ta grand-mère. Ta mère, elle m’a fait sourire. Mais elle m’a fait hurler aussi. Et j’aime pas hurler. C’pour ça qu’on est plus ensemble, tu sais ? Le son d’un klaxon retentit, alors que la voix s’énerve. Mais tu vas bouger connard ! Elle se tait, semble reprendre sa respiration. Mais toi, t’es une fille. Donc tu peux pas être avec une autre fille, s’pas compatible. ‘Fin tu sauras quoi, quand t’auras trouvé le bon. ‘Fin… Mais qu’est-ce que je raconte moi ! T’es trop jeune pour ces conneries. En plus l’amour, c’est que d’la merde. Tombe pas dans son piège. Sinon tu souriras plus jamais. Eh, tu m’écoutes ? Ashley ? Putain, mais répond quand on t’parle ! Ashley ! Ashl...


La voix semble résonner, coupée dans son élan. Et quand le dernier écho disparaît, le silence vient de nouveau t’enrober. *C’était quoi ?* Papa. *C’est c’qu’il disait quand j’écoutais pas ?* Avant l'impact. Papa. *C’pas vrai, il dirait jamais ces choses là.* Papa. *‘Fin j’crois.* Papa.
Mais soudain, ça t’aspire, ça t’secoue. Ça s’emballe avec violence, ça tourne dans tous les sens. Comme un rire gras. Comme une explosion. Comme un dernier battement de cœur. Et le voile se dévoile.











T’ouvres un œil. Ta tête est collée au siège de devant, alors que tes bras gisent misérablement sur les côtés. La ceinture te fait mal, compresse ta poitrine et te scie la gorge. Tu réussis à soulever l’une de tes mains, qui vient repousser ta tête du siège. Elle paraît lourde, alors que tu te redresses, d’ailleurs une douleur éclair vient la traverser. Tu gémis, relève la tête et contemple les dégâts. La vitre toujours ouverte laisse échapper des cris effrayés, alors qu’au loin résonne des sirènes assourdissantes. *Faut faire l’point.* Ton regard se dirige vers tes mains, qui semblent à peine écorchées. Encore complètement sonnée, tu essayes de te concentrer sur ce que tu ressens, détecter la moindre douleur. Mais tu n’as mal nul part, aucun membre ne semble manquer à l’appel et pas d’os brisés en mille petits morceaux. Pourtant, les battements de ton cœur ne semblent pas vouloir se calmer. Quelque chose cloche, quelque chose ne va pas.
Tu passes ta main sur ton visage, tout en fronçant les sourcils. Quand tu la regardes de nouveau, elle est recouverte d’une substance épaisse d’un rouge bordeaux. Tu fixes ta main, sonnée, avant de lâcher d’une voix tremblante.


- Logan, j-je s-saigne...


Le sang te donne envie de vomir, et tu détournes le regard en vitesse. Tu passes une seconde fois ta main, tente de repérer la brèche. Ton doigt frôle la chair juste en dessous de ton œil gauche, alors que tu lâches un sanglot de douleur. Tu suis la profonde trace du doigt, qui remonte jusqu’à ton œil, avant de le dépasser et monter sous ton arcade sourcilière. *Merde.* La plaie continue de saigner, alors que tu clignes des yeux. Pourtant, ta vision est gênée par quelques obstacles saignant. L’œil droit semble allez au mieux, alors que tu essayes d’enlever le sang qui s’écoule devant l’autre. Mais la périphérie reste la même, et tu as beau essayer d’enlever le liquide, le noir reste présent. Alors tu comprends.


- Logan, j’vois p-plus d’un o-œil ! J’vois p-plus ! J’crois qu-que chuis a-aveugle d’un œil !


Tu sanglotes, complètement perdue. Tu ne sais plus quoi faire, la main devant l’œil mort. Ta respiration se fait tremblante, alors que peu à peu la peur te prend. Tu fouilles de ton œil valide l’habitacle, regardes devant et aperçois le pare-brise explosé, la voiture emboîtée à un énorme camion. Et puis tu aperçois le corps. *Papa.* Affalé sur le volant, et qui ne bouge plus d’un pouce. Tu ne comprends pas, laisses passer un instant avant de murmurer un « Logan ? » d’une voix enrouée. Mais il ne réagi pas, sans doute n’a-t-il pas entendu ? Sans doute, se repose-t-il, après cet impact ?


- P-papa ?


Il ne faut pas, Gamine ! Mais tu n’en a plus rien a faire, des règles, à présent.


- Pa-papa…


Alors, c’est la fin, c’est ça ? Lui aussi, il va partir, t’abandonner ? Comme les Autres. *Papa est pas comme les Autres.*


- Papa !


Et tu continues à sangloter, attendant sans doute qu’on vienne te rechercher. Tu te sens déjà si fatiguée, et Lui s’en est allé. Il a même pas dit au revoir. C’que ça peut être mal-poli, un mort. Où va-t-il, d’ailleurs ? Où s’en va-t-il, avec ce sourire aux lèvres, ce putain de sourire. Il voulait pas ça, hein ? Il y est pour rien. Les morts sont toujours innocents du malheur des Hommes.
Il ne verra pas tes pleurs. Il n’entendra pas tes peurs.
Et tu as oublié.
Alors qu’il souriait.











Papa. C’était fou n’est-ce pas. Papa. C’était nous, tout ça. C’était beau, là-bas. Juste Toi. Et encore Moi. Toujours Moi. Papa. Papa ? J’avais une question pour Toi. C’était tout simple, un mot ; Pourquoi ?
La vie ne voulait plus de Toi. La vie en avait marre de tes défauts et de tes putains d’idéaux. Elle en pouvait plus, de t’entendre hurler, de te voir détruire tout ce qui t’entourait.
Dis-moi. Je lui en ferais baver, à cette foutu vie. Je lui ferais regretter tout ce qu’elle t’a fait subir. J’la ferais cracher du sang, lui ferais si mal pour qu’elle comprenne. Je hurlerais de vie, j’la mettrais à genoux et la ferais embrasser mes pieds. Je la réduirais au Rien, et prendrais sa place sur le trône. J’vivrais putain ! J’vivrais pour Toi. Tout ce que tu n’as pas encore eu le temps de faire, j’le ferais. Tout l’air que tu n’as pas pu respirer, je l’avalerais avec fureur. Tout ce que tu n’as pas encore vu se noiera dans le cosmos de mes prunelles clair. Et quand enfin je te rejoindrais, quand j’aurais tout fait, tout vu, tout entendu, je viendrais te le raconter de vive voix. Je te parlerais du monde. Des perles qu’il referme et de ses moments de bonheurs intenses que j’aurais vécu. On rira bien tous les deux, en se rappelant la Vie. Et on s’effondra dans le Néant. Ensemble.
Mais en attendant, je vais me relever, ou du moins ramper. J’y arriverais, j’le ferais pour Toi. Mon cœur battra avec acharnement, au rythme de ton souffle silencieux. Maintenant, je sais. Maintenant, je vais vivre. C’est promis. A jamais. Je vivrais.


~FIN~

Go away chicken ! Alison M.
Éloge à la Charogne.