Tom avait toujours été le bienvenu chez les Gallagher. En effet, étant donné que ses parents passaient littéralement tout leur temps obnubilés par leur travail, monsieur et madame Gallagher accueillaient avec plaisir le garçon qu'ils connaissaient depuis ses trois premières années. Ce domaine dans lequel il allait séjourner lors de ses vacances estivales était également le seul endroit sur terre où il pourrait consacrer la plus grande partie de son temps libre à sa meilleure amie, Clarke. D'ailleurs, l'Irlandais se sentait à la fois nerveux et excité à l'idée de la retrouver. D'un côté, excité car un temps fou s'était écoulé sans qu'il ne puisse ne serait-ce qu'admirer son sourire charmeur et ses yeux envoûtants, et d'un autre côté nerveux étant donné qu'il lui avait envoyé une lettre environ un mois auparavant dans laquelle il se mettait à nu, dans laquelle il livrait des sentiments enfouis depuis bien trop longtemps . Le masque était dorénavant tombé, et nul n'y saurait rien changer. Il ne pouvait plus nier, à présent : Les dés étaient jetés. La jeune fille, depuis le jour où elle eut reçu la fameuse lettre, continua à lui écrire en retour. Cependant, nulle allusion aux dires précédents du garçon n'y figurait. Que s'était-il passé ? N'avait-elle pas reçu la lettre qui lui était destinée ? Cela, il en doutait. Peut-être avait-elle tout simplement choisi d'oublié. Oublier ce qui avait sans doute été une erreur fatale. En tout cas, le jeune Taylor espérait que leur amitié en resterait intacte et sans séquelles.



Tandis que l'heure de prendre la voiture pour se rendre chez les Gallagher approchait, la maison entière était mobilisée pour être prêts à temps. A dix heures moins le quart, ils devraient être partis. Ainsi, Tom finissait activement de vérifier et boucler ses bagages, ses fidèles écouteurs, de petits objets moldus forts utiles, bien enfoncés dans ses tympans. Son père, lui, avait pour tâche de commencer à charger la voiture, tandis que sa mère, elle, veillait à ce qu'il ne manque rien à son fils. Bien que celle-ci fut très prise de par son travail, Tom n'en restait pas moins la prunelle de ses yeux. Elle tenait à lui bien davantage qu'il n'aurait pu l'imaginer. Cependant, elle n'était pas simplement sa mère. C'était aussi pour lui une sorte de conseillère. Lorsqu'il était enfant, le garçon lui racontait ses diverses problèmes et préoccupations en détails. Il sentait réellement qu'il pouvait tout lui dire. En revanche, Tom n'avait pas seulement grandi physiquement, mais également au niveau mental. En effet, celui-ci, au fil du temps, prit de petites manies telles que de mentir ne serait-ce que sur des petits sujets jugés selon lui inutiles ou inintéressants. Néanmoins, ces petites manies prirent très rapidement de l'ampleur pour parvenir au fait qu'il ne lui raconte que des bribes de ce qu'il se passait dans sa vie de tous les jours, ce qui, et il le savait bien, ne lui plaisait guère. Ce matin-là en particulier, Coleen monta les escaliers pour se rendre dans une sorte de grenier qu'ils avaient aménagé pour en faire une chambre à leur fils. De nombreux posters de d'équipes de football et de Quidditch figuraient sur les murs repeints en bordeaux. Un tel désordre y régnait qu'elle en eut du mal à ouvrir la porte qui grinça sur son passage.

- Toc toc, je peux entrer ? demanda t-elle en souriant.

En voyant sa mère entrer, Tom retira immédiatement ses écouteurs qu'ils plaça chacun derrière ses oreilles.

- Quoi ? Pardon, heu oui. Bien sûr, entre balbutia le garçon, apparemment surpris de sa visite.

Celle-ci poussa fermement la porte en dégageant d'un bref coup de pieds caleçons et chaussettes éparpillés au sol.

- Alors, tu te réjouis de retourner chez les Gallagher ? Tu as hâte de retrouver Clarke je suppose, elle a dû te manquer durant tout ce temps.

- Maman, sérieusement on en a déjà parlé. Je vois parfaitement ce que tu es en train de faire. Tu essayes de me faire cracher le morceau.

- Qu'est devenu le petit garçon qui me racontait tout en détails ? Mon chéri, je ne t'ai pas vu sourir une seule fois depuis que tu es rentré de Poudlard. Tu n'as pas de problèmes à l'école, j'espère ? Non ?

- Non, aucun, je ne veux pas que tu t'inquiètes pour moi maman, je sais me débrouiller seul répondit-il en lui prenant tendrement les mains Tout va très bien, je t'assure.

Quelques gouttelettes de pluie commençaient à s'abattre sur eux lorsque les derniers bagages furent chargés dans le coffre. Les Irlandais purent enfin entamer le bref trajet qui les attendait. En effet, le domaine des Gallagher se situait dans un petit bois voisin, juste à côté de Killarney. Assis sur la banquette arrière du la voiture, Tom lisait tranquillement un magazine de Quidditch tandis que ses parents, eux, bataillaient avec le GPS moldu qui était sensé leur indiquer la route à suivre. En lisant ce magazine, Tom s'aperçut su'il n'avait encore jamais songé à faire parti de l'équipe de Quidditch de sa maison, Gryffondor. En y pensant, pourquoi n'irait-il pas postuler si les inscriptions étaient ouvertes à la rentrée prochaine ? Et puis, la deuxième année, c'est une bonne année pour en faire parti étant donné que l'on a déjà une bien meilleure expérience en matière de magie comparé à l'année précédente. Le jeune homme écrasa son nez contre la vitre sur laquelle la buée commençait à se répandre lentement. Diverses couleurs défilaient sous ses yeux : Des traînées de bleu, de vert, de rouge, sans jamais pouvoir distinguer la moindre chose d'une autre.

Parfois, la voiture s'arrêtait à quelque intersection entre deux chemins de campagne. Peu à peu, celle-ci s'enfonçait plus profondément dans les bois sombres, jusqu'à ce que l'on ne distingue plus au loin qu'un petit point rouge. Rapidement, la route goudronnée ne devint plus qu' humble terre et feuillage. La symphonie des insectes résonnait et se filtrait à travers les branches des arbres de la forêt toute entière. Un peu plus loin, une grande clairière dans laquelle se trouvait une maison impressionnante : Le domaine des Gallagher. Pour la première fois, Tom eut l'étrange impression de ne pas avoir été présent pendant une éternité. C'était comme si les mois avait passé incessamment, sans que rien d'autre que son retour ne puisse intercepter cette fuite du temps.

Dans l'immense jardin qui s'offrait à eux, une petite balançoire légèrement cassée, sous un saule pleureur d'une taille impressionnante, demeurait toujours présente, même des années plus tard, et restait en tant que souvenir intacte. Plus loin vers le potager, perchée en haut d'un arbre, une petite cabane en bois qui paraissait particulièrement fébrile. Elle aussi, avait subi la fuite du temps, et cela était parfaitement visible aux yeux d'un être humain. Néanmoins, Tom, lui, n'y voyait que la cabane de son enfance, celle que lui et Clarke appelait autrefois la cabane aux murmures. Il refusait de croire que le temps fut coupable d'une telle chose, de briser les rêves et les croyances de l'enfant qu'il était encore quelques années auparavant.

Triste, nostalgique : désenchanté. Tels étaient les adjectifs adéquat pour définir l'humeur de l'Irlandais en découvrant les ravages du temps. L'ambiance elle aussi avait changé, et le garçon espérait qu'il n'en serait pas de même pour la prunelle de ses yeux, Clarke. Son caractère avait-il demeuré inchangé ? Ou bien, la gaieté et la joie de vivre qui l'habitaient autrefois avaient-elles elles aussi été corrompues par une chose qu'il ignorait ? En espérant de toutes ses forces qu'il n'en soit pas ainsi, le garçon se dirigea vers la demeure qui semblait avoir été inhabitée pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois. En effet, un tas de mauvaises herbes grimpaient contre les parois de la maison, tandis que lierre, lui, empêchait les fenêtres de s'ouvrir complètement. Tom délaissa ses parents qui partirent sans plus tarder, puis alla frapper à la porte, l'anxiété prenant le dessus sur tout autre sentiment. Les trois petits coups résonnèrent quelques instants sur le bois humide de la porte, comme une harpe que l'on aurait ensorcelée pour une obscure symphonie. Presque tout de suite après, une femme au cheveux noirs de jais qu'il connaissait bien ouvrit apparue sur le seuil de la porte avec une certaine animosité. Lorsque celle-ci reconnut Tom, elle devînt plus douce et déclara d'une voix fébrile :

- Tom ? Qu'est ce que tu fais ici ?

C'était la mère de Clarke. Apparemment, celle-ci paraissait quelque peu surprise de la venue du garçon.

- Bonjour Avery répondit Tom étonné de sa question Comment allez-vous ? Ma mère ne vous a pas prévenue que je viendrai ?

Appréhendant de plus en plus la situation, le jeune homme attendit la réponse de la femme qui arriva bien assez vite :

- Ah oui, suis-je bête ! dit-elle en s'efforçant de paraître joyeuse Entre mon garçon, entre ! Et..heu, oui voilà, ta nouvelle école de plaît ?

Pourquoi paraissait-elle aussi distraite ? Mais que diable lui cachait-elle ? Une chose était sûre, il ne tarderait pas à découvrir cette vérité qui lui faisait peut-être un peu peur. D'ordinaire, Tom ne voulait pas qu'on lui mente, mais plutôt qu'on lui dise franchement les choses. Là, c'était totalement différent : Il redoutait la dure vérité. Sans plus attendre, le brun pénétra dans la première pièce qui devait être le séjour. En effet, même à l'intérieur, tout avait changé : Les meubles n'étaient plus disposés de la même manière, le sol se couvrait d'une crasse inhabituelle dans la maison de riches personnes telles que les Gallagher, et pour finir, le plus déconcertant : Tous les cadres où les photos de famille étaient autrefois placées avaient été retirés.

- Vous êtes certaine que tout va bien, Avery ? Vous paraissez...distraite. Et où sont Clarke et monsieur Gallagher ? S'inquiéta t-il soudainement.

Sur ces mots, la femme tenta de contenir ses sanglots qu'elle libéra finalement. Elle alla s'asseoir d'un pas chancelant sur le canapé usé par l'âge, puis enfouie sa tête entre ses deux mains en sanglotant. Tom ne savait plus quoi faire, la situation lui avait complètement échappée. Tandis qu'il s'inquiétait de plus en plus pour l'intérêt de celle qu'il aimait, celui-ci insista :

- Où est Clarke ? Déclara t-il d'un ton plus catégorique en tentant d'empêcher un excès de colère et de nervosité.

Ne pouvant plus dire un seul mot de plus, la dénommée Avery indiqua de son index une porte dans le couloir adjacent à la cuisine. Presque en courant, Tom se dirigea vers celle-ci tandis que les larmes commençaient à lui embrumer la vue.

Dans le large couloir de marbre, seuls le bruit de ses pas, ou plutôt de ses enjambées, résonnait à travers la demeure. Le temps paraissait durer une éternité, tandis que des centaines questions se mirent à fuser dans la tête du garçon qui ne pouvait à présent plus retenir ses larmes. Ce phénomène était d'ailleurs assez étrange étant donné qu'il ne mesurait pas encore l'ampleur de la situation. Peut-être était-ce simplement un malentendu ? Se mit-il à espérer. Non, ça ne pouvait pas être ça. Toute cette mise en scène pour une chose banale ? Impossible, les Gallagher n'avaient pas cet état d'esprit : Quelque chose de grave avait du se produire. L'Irlandais parvint enfin devant cette porte qu'il avait probablement du ouvrir plus d'une centaine de fois auparavant. Sans perdre de temps, il la poussa brusquement, qui s'ouvrit dans un grincement sonore, redoutant le pire. Lorsqu'il entra, seul la luminosité du couloir éclairait cette chambre plongée dans les ténèbres de l'obscurité.

Au fond de la pièce, sur un lit aux draps défaits, une jeune fille aux cheveux blonds ondulés y était allongée, en silence : Clarke Gallagher. Recroquevillée contre ses genoux, le bruit de ses sanglots ne résonnait pas, mais Tom pouvaient néanmoins les sentir comprimer sa poitrine, comme lié à son âme-soeur. Il prit quelques instants pour l'observer, puis s'approcha d'elle prudemment : Il redoutait sa réaction. Parvenu à son couchage, Clarke n'avait toujours pas prononcé le moindre mot, ni esquissé le moindre geste, la tête tournée vers le mur. Sans attendre plus longtemps, l'Irlandais s'étendit tout contre elle, en l'enveloppant de son bras droit.

- Clarke ? Qu'est ce qui ne va pas ? dit-il dans un souffle

Sans prendre la peine de se retourner, celle-ci répondit dans un tremblement de sa voix :

- C'est mon père. Il y a eu un accident à la base militaire. Il...il ne s'en est pas sorti, il ne reviendra pas, continua t-elle.

Au fur et à mesure qu'elle parlait, ses mots semblaient lui déchirer les entrailles. Tom ferma les yeux le temps d'assimiler toutes ses informations, puis retint son ultime larme. Dorénavant, il savait. La vérité était parfois mieux que l'ignorance. Bien que cette pensée fut particulièrement égoïste, le garçon se sentait soulagé, soulagé que le mal n'est pas atteint l'être qu'il aimait, cela, il ne l'aurait sans doute pas supporté.

- Je suis désolé, Clarke. Je n'ai pas les mots. J'ai conscience que ce que tu dois ressentir, et je ne souhaite cela à personne. Après quelques secondes, il ajouta : Tu es très courageuse.

Sur ces mots, la jeune fille se leva brusquement jusqu'à parvenir à la porte où elle s'arrêta, sous l'incompréhension du garçon.

- Suis-moi, dit-elle d'un ton doux.

Sans bien comprendre pourquoi, les jambes de Tom se levèrent automatiquement, comme si son instinct lui soufflait de la suivre. En atteignant la porte, Clarke lui fit signe de s'arrêter et sortit d'une sorte de tissu noir de sa poche : Un bandeau. Confus, le rouge et or s'apprêtait à parler lorsqu'elle le coupa :

- Tu ne me fais pas confiance ?

Étrangement, ces mots le détendirent. Tel un pantin que l'on contrôlerait, le jeune homme ferma les yeux tandis que la jeune fille lui enfilait le bandeau noir autour de la tête, jusqu'à ce que sa vue ne fut plus que sombre chemin. Main dans la main, ils traversèrent le couloir, puis parvinrent au jardin dévasté que Tom reconnut grâce à l'odeur d'herbe fraîche que celui-ci dégageait. Toujours guidé par la main et la voix de Clarke, le garçon sentit devant lui un obstacle qui lui paraissait être une sorte d'échelle en bois. La fillette lui dit de grimper, ce qu'il fit en toute confiance. Il savait enfin où elle l'emmenait, la question était : Pourquoi ? L e jeune homme enjamba la distance entre la dernière marche et la plateforme, puis se releva. La fille aux cheveux blonds arriva derrière lui presque instantanément, puis prit la parole d'une voix mystérieuse :

- Tu sais où on est ?

Tom entendait les bruits de ses pas tournants autours de lui.

- La cabane aux murmures dit-il en souriant Comment ne pourrais-je pas m'en souvenir.

- Exactement. Tu te rappelles également de son utilité, je suppose ?

- C'est dans cet endroit que l'on se disait tous nos secrets, oui.

Bien qu'il ne put le voir, Clarke souriait. Néanmoins, ce sourire se révélait être empli de tristesse. Sans plus attendre, la jeune fille se positionna juste devant Tom. A présent, leur visage était tout près l'un de l'autre, si près que l'Irlandais en eut un frisson qui le fit rougir. Elle déposa sur ses lèvres un baiser qui dura plusieurs secondes, un baiser dont les deux enfants se souviendraient à jamais. Au bout d'un moment, leurs lèvres se séparèrent sous la volonté d'une seule personne, qui n'était évidemment pas Tom. Les yeux toujours bandés, le coeur du jeune homme fit des bonds de plusieurs mètres dans sa poitrine.

- Tom, je t'en supplie dit-elle en pleurant sincèrement, promet-moi de ne pas poser de question sur les raisons de ma décision.

En ignorant totalement de quoi elle voulait parler, il attendit simplement en craignant le pire :

- Oublie-moi. S'il-te-plaît, c'est mieux pour nous deux.

Cette fois ci, Tom arracha le bandeau de ses yeux et répliqua, les larmes aux yeux :

- Quoi ? Tu m'embrasses et tu me dis ça, sérieusement, Clarke ? rétorqua t-il à la fois triste et colérique. Pourquoi tu fais ça, pourquoi tu me donnes des faux espoirs ?!

La jeune fille semblait à présent être dépassée par la situation.

- Maintenant que mon père est mort, et que toi tu es dans ta nouvelle école, ma mère et moi avons décidé de partir vivre aux Etats-Unis. Tom, on ne se reverra plus ajouta t-elle

- Quoi, aux Etats-Unis ? Je quitterai l'école s'il le faut, mon avenir est au près de toi, Clarke !

- Non, Tom ! S'il-te-plaît, écoute-moi ! Ton avenir est là-bas, au près de tes nouveaux amis. Je suis sûre que tu vas devenir un grand sorcier, et tu le mérites. Mais, moi, j'ai besoin de me refaire une vie. Je suis complètement dépassée par les événements, comprend-moi ! Ce qu'il vient de se passer était la première et la dernière chose qui se passerait entre nous. Je suis désolée. Sache que tu as été la plus belle personne que je n'ai jamais rencontrée.

Sur ces mots dont les sonorités sifflaient encore et toujours dans la tête du garçon, la jeune fille quitta la cabane. Le lionceau jeta violemment la bandeau noir au sol, puis éclata en sanglots. La cabane aux murmures, dont le sens s'éclaircissait au fur et à mesure que le temps passait, avait été une fois de plus témoin d'un secret, un secret qui ne sortirait jamais de cet endroit. Elle avait finalement été témoin d'une amitié nouvelle, d'une amitié sincère, puis d'un amour impossible.