Fin de l'innocence
1er Septembre 2044, Midi
Découragée et incrédule, Eileen regardait l'horloge dans le salon de la maison de ses parents, à Ipswich. 12 heures précises, le Poudlard Express était en train de quitter le quai 93/4 et elle n'était pas dedans. Il emportait au loin ses camarades et elle allait rater la rentrée des classes. Quelqu'un s'apercevrait-il de son absence ? Elle espérait que oui mais, il fallait se faire une raison, ça ne changerait pas grand chose. Qui pourrait faire entendre raison à sa mère qui était plus résolue que jamais à oublier qui elle était et à faire en sorte que sa fille aussi ? Et d'ailleurs, les professeurs de Poudlard en auraient-ils quelque chose à faire ? Après tout, ils ne devaient pas être là pour forcer les gens à éduquer leurs enfants. En tout cas, c'est ce que la jeune rousse supposait alors oui, elle était complètement découragée. Qui pourrait bien lui venir en aide pour se sortir de cette affreuse situation ?
Quelques jours plus tôt, sa mère lui avait fait part de sa décision, du fait qu'elle ne retournerait pas à Poudlard pour sa sécurité. Vivre caché, comme des Moldus, voilà ce qui lui semblait la seule chose à faire et aucun des arguments d'Eileen n'avait pu faire mouche. Elle était suffisamment grande pour ne pas utiliser la magie par inadvertance, elle n'était donc plus un danger pour les autres ou elle-même. La décision était donc prise. Mrs Eastwood avait ainsi récupéré toutes les affaires "magiques" de sa fille et les avait mises sous bonne clé pour être sûre qu'elle n'essaierait pas de les reprendre. La Serpentard était piégée et ne voyait pas d'autre solution que de subir. Son mutisme n'y changeait rien, ni même son refus de manger. Sa mère était persuadée d'agir pour le mieux et qu'un jour, sa fille comprendrait.
Alors voilà, elle était là, impuissante, à regarder l'heure et ses espoirs s'envoler. Elle avait vraiment cru jusqu'à la dernière minute que sa mère se raviserait mais non. Elle ne pourrait jamais retourner à Poudlard, c'en était fini de ses rêves de Quidditch et certainement même que sa place serait rapidement donné à un autre, elle ne pourrait même pas devenir une sorcière à part entière. Au lieu de ça, dès le lundi, elle devrait prendre la route du collège pour faire une scolarité de Moldue. Comment allait-elle expliquer son absence de deux ans ? Et le retard qu'elle avait fatalement pris dans le programme scolaire ? Et si encore ça l'intéressait mais non, pas du tout.
12h05, c'en était définitivement fini pour elle. Jamais elle ne reverrait Poudlard.
Fin de l'innocence
5 Septembre 2044
Eileen se réveilla en sueur et en pleurs. Elle venait de faire le pire cauchemar de sa vie et peinait à réaliser que ce n'était que dans ses rêves. Mais était-ce réellement vrai ? Elle pouvait bien tenter de se rassurer, il faisait quand même douloureusement écho à sa nouvelle réalité.
Elle s'était retrouvée sur une des pirogues qui permettaient de traverser le lac entourant maintenant Poudlard. Un brouillard épais, sûrement pour rendre la tâche des manteaux noirs plus ardue s'ils cherchaient des renseignements, lui occultait la vision du château qu'elle aurait tant aimé voir pourtant. Elle ne savait pas trop comment elle était arrivée là mais une chose était sûre, elle était heureuse de retrouver sa place. C'est à ce moment-là qu'elle vit une ombre s'approcher d'elle. Elle était angoissante et la jeune fille se retrouva figée, incapable de faire le moindre mouvement. L'ombre ne dit pas un mot mais la désigna en secouant la tête. Elle lui mit alors dans la main un sceau aux effigies de Poudlard et à peine l'eut-elle saisi qu'Eileen sentit les effets du Portoloin. Elle hurla, s'agita en tout sens mais rien n'y fit et elle se réveilla dans son lit.
En proie à une crise d'angoisse, comme chaque jour depuis qu'elle avait raté le départ du Poudlard Express, la rouquine s'installa en tailleur sur son lit, alluma sa lampe de chevet et griffonna une énième lettre d'appel à l'aide qui rejoindrait les autres puisque sa mère refusait même qu'elle utilise OTaozoy. Aucune correspondance possible avec ses amis ou même ses professeurs, plus aucun matériel magique, pas même sa baguette, Eileen était vraiment prise au piège. Et si elle avait espéré rester dans sa chambre en ce jour de rentrée scolaire moldue, c'était compter sans sa mère qui avait décidé de l'accompagner jusqu'au collège. Evidemment, c'était tout ce dont l'adolescente avait besoin : aller dans une école où elle serait larguée par un programme qu'elle ne suivait plus, dans des matières qui ne l'intéressaient pas, à faire semblant d'être ce qu'elle n'était pas, et avec la honte suprême de ne même pas pouvoir s'y rendre seule. Elle essaya bien de faire croire qu'elle s'était planté une écharde dans le talon pour reculer le moment fatidique mais rien n'y fit.
A 8h30 pétantes, la jeune rousse était dans la cour du collège à attendre qu'on appelle son nom pour suivre sa nouvelle classe. Sans un mot, elle suivit le flot des élèves qu'elle ne connaissait pas, dans un établissement qu'elle trouvait moche et où elle se sentait une étrangère. Ce n'était pas possible, jamais elle ne survivrait à ce calvaire. Jamais. Elle trouvait les conversations des autres sans intérêt, leur monde fade comme si on l'avait privé de la couleur du jour au lendemain et qu'elle devait évolué dans un univers en noir et blanc. Les leçons auraient été données en chinois que cela n'aurait sûrement pas fait de différences pour elle alors elle se réfugia dans son carnet de dessin et entreprit de coucher sur le papier ses souvenirs de peur qu'eux aussi soient rattrapé par la réalité et qu'elle finisse par croire qu'elle n'avait que rêver être une sorcière.
Mots soulignés pour la cabane de Cristal - Mission 1 - Septembre 2019
Fin de l'innocence
19 septembre 2044
Deux semaines qu'Eileen allait tous les jours à l'école Moldue et il n'y avait pas un seul soir où elle ne s'enfermait pas dans sa chambre pour pleurer. Elle n'avait plus dit un seul mot depuis ce jour où sa mère lui avait annoncé sa décision. Depuis, tout se faisait en silence, à la maison comme à l'école. De toute façon, qu'aurait-elle bien pu dire ? Jamais elle ne ferait fléchir ses parents, elle le savait bien. Si le fait de la voir malheureuse, fuyant leur contact jusqu'à même refuser de se nourrir n'y faisait rien, ce n'était pas quelques mots qui changeraient la donne. Pour sa mère, c'était qu'une question de temps et son père n'osait s'en mêler, persuadé par sa femme que c'était pour leur bien à tous vu ce qu'il se passait dans leur monde. Quant à ses camarades de classe, ils avaient des discussions particulièrement inintéressantes et, de toute façon, ils l'avaient rapidement cataloguée dans la case des gens bizarres. Même ceux qu'elles avaient connus avant Poudlard. Il faut dire que sa scolarité "ailleurs" intriguait et que personne n'avait obtenu de réponses. La jeune fille était larguée en cours, au fond de la classe et ne s'y intéressait pas.
Et pour parfaire le tableau, il y avait ce hibou qui était venu se percher sur son bras en plein milieu de la cour entre deux leçons, attirant les cris de ceux qui avaient peur de ces volatiles. La rousse, elle, n'avait pas tiqué. Elle avait même eu sa toute première réaction, esquissant un léger sourire, alors qu'elle semblait ne rien ressentir, comme si elle était juste une automate. Elle avait très vite glissé le parchemin dans sa poche, sans que personne n'y voit rien et avait gardé cette bouffée d'espoir dans sa poche toute la journée. Elle était coupée de tout ce qui avait trait à la magie, sa mère récupérait systématiquement les lettres qu'on pouvait bien lui envoyer mais Mrs Eastwood pouvait être aussi vigilante qu'elle le souhaitait, elle n'avait rien pu faire contre l'oiseau arrivé en pleine journée.
Et c'est ce mot qui, somme toute, avait sorti Eileen de sa léthargie. Elle ne pouvait pas subir éternellement une telle vie, elle n'y survivrait pas. Ou deviendrait rapidement folle. Elle devait retourner à Poudlard coûte que coûte et même si elle n'avait aucune idée de la façon de s'y prendre, elle savait qu'elle ferait tout pour y arriver. Il lui fallait un plan et elle avait une petite idée en tête. Elle griffonna donc un mot sur un parchemin, prêt à être envoyé la prochaine fois qu'un hibou viendrait lui rendre visite. Cassandre... la jeune rousse était persuadée que la Poufsouffle pouvait l'aider. Ou en tout cas, ses parents. Mais pour ça, il fallait qu'elle puisse la joindre.
Ensuite, elle devait trouver un moyen pour récupérer toutes ses affaires et peut-être son frère accepterait-il de l'aider ? Lui était sensible à sa détresse, ça valait le coup d'essayer. Et en attendant, elle devait prendre son mal en patience.Cassandre,
Ma mère refuse que je retourne à Poudlard. Elle m'a confisqué toutes mes affaires et récupère toutes les lettres qu'on m'envoie. J'ai besoin d'aide.
Si j'arrive à rejoindre Sainte Mangouste, tes parents pourront m'y faire entrer ?
Envoie-moi ton hibou de réponse à mon école, c'est le seul moyen de communiquer.
Eileen