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27 juin 2020, 12:58
Quand la pomme devient acide  OS 
Dans l'ombre de tes yeux, j'ai trouvé les plus beaux mensonges
Emmêlés comme des nœuds, et mon cœur, est-ce que t'y songes?
Tu dis que la lune brille en bleu, et qu'les mers sont asséchées
T'inventes tout ce que tu peux, et j'dois croire que tu veux m'aimer?
J'suis pas dupe, et même les fleurs de ma jupe
S'envolent haut, quand tu craches tes mots
J'suis pas dupe, Pomme


Rosscarbery, 25 juin 2042

J'ai fêté mes 11 ans il y a trois jours. Et pourtant depuis un an, la fête a quitté la maison.
Papa aussi a quitté la maison, il est parti en Argentine pour de nouvelles recherches. Il est rentré trois ou quatre fois depuis. Et je vois bien que ça rend triste maman, elle passe beaucoup de temps dans son bureau, enfermée et seule. Et moi, j’attends, patiemment. J’attends un sourire, un mot, J’attends le retour de papa.
Et ce retour, c'était hier. Alors, ce midi, je suis aux anges. Mamy Susan a préparé un rôti et une tarte aux pommes pour le dessert. J'en salive d'avance.
Alors, je suis assise sous la pergolas couverte de lierre, qui nous protège des rayons intenses du soleil. Ma robe blanche à fleurs rouges est en accord avec la nappe, rouge elle aussi.
Le repas s'est déroulé calmement, plein de regards et de tensions, je n'y prête pas vraiment attention. En tout cas, j'essaie de ne pas m'inquiéter quand je vois le sourire crispé de maman. Mamy et Papy, sont là aussi, souriant, trop même... Papy passe son temps à me faire des bisous sur la tête, comme lorsque j'étais petite et qu'il voulait me consoler de m'être écorché un genou. Et même si cette tendresse déborde, elle fait du bien, alors je ne m'en plains pas.
Papa est assis à côté de moi, je lui souris, j'essaie de capter chaque seconde qui nous ont séparés, chaque fragment de son visage et de son odeur. Comme si je devais garder ces instants gravés, loin dans ma mémoire, de peur qu'il ne disparaisse de nouveau.
Alors que j'observe son profil, son nez légèrement tordu, sa barbe mal rasée, une odeur sucrée vient titiller mes narines. Le dessert. Mamy arrive avec la tarte aux pommes, encore tiède. Ça sent bon. Je jette un coup d’œil complice et gourmand à tante Lizzie, je sais que nous avons la même passion pour la tarte aux pomme. Mamy sert des part dans les assiettes en porcelaine ornaient d'épis de blé dorés. Elle me tend une assiette, et j'ai franchement hâte de laisser fondre cette pâte et la compote de pomme qui la tapisse sur ma langue. Alors que je met la première bouchée de ce plaisir sucré dans ma bouche, papa pose sa main sur mon bras et tourne sa tête vers moi.
Je le regarde, attendant de savoir ce qu'il va dire. Après un silence qui semble durer une éternité, il ouvre la bouche et les mots qui en sortent ont du mal à trouver le chemin de mon cerveau.

- Gabriella, aujourd'hui tu es grande. Et bientôt, tu commenceras ta vie d’adolescente. Alors, tu apprendras que le monde n'est pas celui que tu crois, qu'il n'est pas si différent du monde dans tes livres. Comme tes héroïnes, tu n'es pas une jeune fille ordinaire. Gabriella, tu es une sorcière .

Ma bouche s'ouvre en grand, comme celle de tante Lizzie qui en recrache l'eau qu'elle a dans la bouche. Je ris en la voyant s'essuyer le coin des lèvres. Mais ce rire, ce transforme en sourire, puis ce sourire disparaît à mesure que mes yeux croisent les yeux pleins de larmes de maman. Qu'ils croisent les mains liés de Papy et Mamy, serrées si fort que leur doigts en deviennent blanc, couverts par les larmes qui s'écoulent des yeux de Papy. Je ne comprend pas. Alors je regarde la seule personne capable de m'expliquer. Papa. Son regard est baissé, mais même à travers ses cils, je vois le sérieux et la tristesse. Non ce n'est pas une blague. Mais si ce n'est pas une blague, c'est quoi ? Mon cerveau refuse obstinément de comprendre.
Alors, je prononce le seul mot que ma bouche arrive à formuler :

- Quoi ? 
Papa relève ses yeux bleus océan sur les miens et commence à parler. Mais en fait je n'entend pas, ou plutôt je n’écoute pas. En fait, ses mots qui forment une phrases n’ont pour moi aucun sens "sorcière, Écosse, Poudlard, magie, baguette, partir, école... "
En fait, les seules choses qui acceptent de fonctionner chez moi sont mes yeux, qui sondent chaque regard qu'ils rencontrent. Et chacun de ces regards est triste, emplis de larmes, mais extrêmement sérieux. Alors je m'efforce de reporter mon attention sur papa. Je le coupe dans sa tirade.

- Comment ça une sorcière ? Pourquoi tu dis ça ? Comment tu sais ça ? C'est n'importe quoi, ça existe que dans les histoires...
- Parce que je suis un sorcier, comme ta grand-mère Margaret et ton grand-père William. Et comme tous mes ancêtres. Parce que le monde est différent de ce que tu imagines. Parce que, ça n'existe pas que dans les contes. Tout un monde nouveau s'ouvre à toi Gaby ! Ajoute-t-il avec un sourire, alors que tout le monde pleure.
- Et toi, tu le sais depuis quand ?
- Depuis toujours.
- Et vous ? Ajoutais-je en tournant la tête vers le reste de la famille.
- Tes dix ans. Me répond papa, les autres semblant incapables de prononcer le moindre mot.
- Donc vous m'avez menti ? Pourquoi ? Pourquoi me le dire maintenant ?
- Parce qu'en septembre, tu entreras au collège de magie Poudlard, en Ecosse.

Son sourire disparaît, certainement en écho à mon propre visage. Moi j'ai juste envie de vomir. La pomme sucrée dans ma bouche, a laissé la place à l'acidité qui me fait grincer les mâchoires.

☆ 3ème année RP ☆
Ma Fiche
L'Ombre s'attache à un être, avant que les ténèbres ne la fassent disparaître...