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25 mars 2018, 19:36
 RPG   PV  La princesse qui détestait les châteaux
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MEI


Mei n’aimait pas Poudlard et Poudlard le lui rendait bien. Peu importe où elle essayait d’aller, Mei se retrouvait piégée par la cartographie changeante du château. Depuis le temps qu’elle était là, les toilettes avaient changé six fois d’emplacement, l’entrée des sous-sols ne lui était apparue qu’un mardi après-midi, et bien qu’elle les ait longuement étudiées de loin, jamais, encore, elle n’était parvenue à atteindre la moindre tour.

Ce château lui cherchait des poux, elle en était convaincue. Aussi quand, pour la énième fois, elle se retrouva perdue au beau milieu d’un carrefour donnant sur quatre longs couloirs — dont aucun ne ressemblait d’ailleurs à celui qu’elle venait tout juste d’emprunter — Mei ne se donna pas la peine de se creuser la cervelle. Si ces maudites pierres voulaient lui rendre la vie dure, qu’elles le fassent ! Elle se vengerait le moment venu.

Et le moment de la vengeance vint, sous les traits d’un garçon empoté courant comme si tout le poids du monde reposait sur ses épaules affaissées dans un concerto de breloques secouées. En la voyant, l’empafé fut si surpris qu’il s’emmêla les bâtons et renversa une bonne partie du contenu de son sac sur le sol dans un bruit assourdissant.

Mei suivit des yeux le chaudron qui roula jusqu’à son pied.

« Ça te dérange si je te l’emprunte ? »

Le garçonnet s’empourpra un peu plus. Mei leva les yeux au plafond. Les anglais devenaient vraiment bizarres dès qu’on se mettait à leur parler.

« C’est à dire que… je-je suis en retard pour mon cours de potions, bredouilla l’autre. Le professeur Xarinez va me tuer si j’arrive sans mon chaudron… tu-tu comprends ? »

« Tu préfères que je te maudisse sur dix générations ? »

L’avantage quand on venait de loin comme elle, c’est que les autres ne savaient pas de quoi vous étiez réellement capable. Le rondouillard capitula en bredouillant deux ou trois excuses que Mei ne comprit pas puis il rangea ses babioles dans son sac et reprit sa route cahin-caha. Mei aurait pu le suivre, mais elle l’aurait mal vécu. Elle n’était pas le genre à abandonner face à un tas de vieilles pierres moisies. Elle était bien trop fière pour ça.

Le chaudron retourné, Mei posa tranquillement ses fesses dessus et sortit une pomme de sa belle robe de soie rouge. Elle hésitait. Elle pouvait invoquer la vieille grenouille qui lui servait de créature-de-lien pour qu’elle l’aide à retrouver la sortie. C’était moins pire que de suivre un élève de Poudlard. Mais le problème avec les vieilles grenouilles, c’est qu’elles étaient aussi vaniteuses qu’elle ; et ça, Mei ne le supportait pas.

Dévorant sa pomme morceau par morceau, elle attendit un déclic, un mouvement de résignation du château, mais c’est un bruit claqué de cape dont elle hérita.

« Hey ! Comment vous faites pour vous repérer, ici ? Ce château est complètement fou ! »

Le son de sa voix se brisa contre les pierres saillantes, comme si elles essayaient d’en atténuer l’écho tandis que les bruits de cape prenaient une amplitude si inattendue que Mei se demanda si elle n’avait pas poussé le défi un peu trop loin. Sentiment qui s’évapora dès lors que ses yeux rencontrèrent ceux de Kristen Loewy.

« Ha madame la sorcière noire, vous tombez bien ! Votre château veut ma mort. »

LES CONTES DE L'ŒIL
(En vadrouille jusqu'au 3 janvier inclus)
25 mars 2018, 21:44
 RPG   PV  La princesse qui détestait les châteaux
  Depuis l’arrivée de la délégation chinoise, les élèves étaient tous surexcités. Il fallait l’admettre : Kristen était plutôt fière de son petit effet. Elle espérait également que les liens entre Zhuangyán et Poudlard se resserreraient et que les élèves de son école s’ouvriraient à la culture et à la magie chinoise.

  Elle revenait de la bibliothèque de Poudlard, et plus particulièrement de la réserve, au moment de cette histoire. En fait, elle avait eu besoin de renseignements sur un sorcier au nom extravagant qui avait voyagé en Grèce au cours du XXe siècle et qui avait proposé une relecture hautement intéressante de l’évocation des morts de l’Odyssée. Elle s’était permise d’emprunter cet ouvrage et retournait à son bureau quand elle entendit un véritable cri de cœur : son château, apparemment, était fou. Kristen s’arrêta un instant, amusée à l’idée qu’un élève s’était encore perdu dans les méandres des couloirs, puis reprit sa marche.

  C’est alors qu’elle vit Mei Ling, de l’école du Dragon, les fesses plantées sur un chaudron retourné. Elle haussa un sourcil et s’avança un peu plus. Cette gamine l’avait déjà intriguée lors de sa prestation d’arrivée. Parmi les trois champions de Zhuangyán, c’était probablement celle qui avait le plus retenu son attention, en dépit du flamboiement du garçon et de la grâce de l’autre petite fille. Mei Ling était comme un écho déroutant.

  Ni bonjour, ni formalités. Aucun filtre. « Madame la sorcière noire »… Kristen s’interrompit net et dévisagea la fillette. Certes, il y avait la barrière du langage : Mei devait avoir quelques difficultés avec la langue pour interpeler la directrice de Poudlard de la sorte. Devait-elle ce petit nom à ses vêtements noirs ? Malheureusement, Kristen en doutait, mais elle ne voyait pas ce que cela pouvait vouloir dire d’autre.

« Je vous demande pardon ? interrogea-t-elle, un peu confuse. »

  Presque instinctivement, elle lança un regard par-dessus son épaule, puis à gauche, puis à droite. C’était le grand vide. Elle fit quelques pas de plus et se retrouva vite à hauteur de la petite chinoise. Ses yeux vissés dans les siens, elle dit :

« Curieuse façon d’interpeler les gens, vous ne trouvez pas ? »

  Et, observant le siège de Mei, elle ajouta :

« Et curieuse façon de se défendre d’un château qui veut votre mort… Assise au milieu de ses couloirs, sur... un chaudron. »

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26 mars 2018, 11:13
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Les règles de bienséance étaient aussi chères à Mei qu’un soleil radieux pouvait l’être à un lombric. Les deux vivaient mieux sans. Mei n’avait pas poussé avec un catalogue de règles comportementales sous le nez ; elle ne les aurait de toute façon pas digérées. Ceci explique pourquoi l’idée de se lever à l’approche de la directrice de Poudlard ne lui effleura même pas l’esprit. Son cerveau tournait déjà à plein régime et la pomme qu’elle tenait dans la main n’était plus qu’un trognon dépouillé de la moindre fibre.

« Ça sera lui ou moi, répondit-elle en se massant la nuque — c’est que garder les yeux en l’air lui faisait drôlement mal derrière la tête. Si je recule devant un vieux tas de pierres, je reculerai devant tout ensuite. Ça non. »

Mei ne maitrisait pas tout à fait la notion d’incident diplomatique, mais elle avait une vague idée de la tête que tirerait le Doyen si l’une de ses meilleures élèves finissait emmurée. Ça lui donnait un sacré avantage sur le château, elle en était convaincue.

Il plierait. Elle ne lui laissait pas vraiment le choix.

Et puis maintenant que la directrice était là, il ne pouvait vraiment rien lui arriver, sinon on l’accuserait d’avoir maltraité ses invités et ça, ce n’était pas une accusation qu’on aimait dans le monde des directeurs. C’était comme une limite à ne pas franchir. Mei n’avait donc plus qu’à saisir l’opportunité de clouer le bec au château, lui montrer qu’elle connaissait bien la directrice.

« Si vous n’êtes pas une sorcière noire alors vous êtes quoi ? »

Mei était persuadée que maintenant toute l’attention du château était fixée sur elle. Elle pouvait le sentir à l’absence de bruit, c’était comme lorsqu’elle tendait l’oreille pour saisir une conversation à travers une porte. Mei connaissait bien les vieilles choses. Elles avaient toutes un gros côté curieux.

« La vieille grenouille l’a senti, je l’ai senti, ça fait beaucoup. Et puis regardez votre main, c’est une main de sorcière noire. Je le sais, ma grand-mère en a deux comme celle-là. »

Mei avait le sentiment d’avoir marqué un point. Elle fit disparaître le trognon de pomme et sortit un carré de tissu de sa poche pour se nettoyer les mains. Sa nuque lui faisait toujours affreusement mal. C’est qu’elle n’avait pas encore baissé une seule fois les yeux.

LES CONTES DE L'ŒIL
(En vadrouille jusqu'au 3 janvier inclus)
26 mars 2018, 22:15
 RPG   PV  La princesse qui détestait les châteaux
    La directrice de Poudlard plissa les yeux, se demandant si Mei comprenait vraiment ce qu’elle était en train de dire. Pouvait-elle affirmer si simplement que sa grand-mère pratiquait la magie noire, du haut de ses onze petites années ? Savait-elle seulement ce que cela impliquait ?

  Deux des grands-parents de Kristen avaient été des Mangemorts. Sa mère ayant toujours soigneusement évité le sujet, Kristen n’avait pris connaissance que très tard ses origines de ce côté de la famille : son grand-père maternel, qui répondait au nom de Volesus, avait été tué par un troll lors de la bataille de Poudlard de 1998, tandis que sa grand-mère avait pris la fuite après la défaite de Voldemort. Son corps fut retrouvé quelques années plus tard dans la Manche. Et il y avait de cela quelques mois (même s’il lui semblait que c’était hier, tant les flashs horrifiques étaient encore présents dans sa mémoire), Kristen avait affronté un homme qui prétendait être l’héritier spirituel de Voldemort, et qui était peut-être même pire que lui.

   Laissant ces vagues pensées de côté, elle observa sa main couverte de cicatrices, la fit tourner, comme si elle la découvrait pour la première fois. Son regard hurlait avec ironie : « oh, mais c’est vrai, quelle surprise ! » et sa bouche formait une ligne intéressée. Kristen abaissa le bras et offrit un sourire salé à la petite Mei.

« Ah… que puis-je faire contre les accusations d’une petite fille et d’une vieille grenouille, après tout ? »

   Les mains sur les hanches, elle se pencha jusqu’à atteindre la hauteur du visage de la petite chinoise et dit :

« Imaginons que vous ayez découvert mon terrible secret… Il faudrait que je trouve un moyen de vous faire taire, et qui sait ce qu’une sorcière noire dans mon genre oserait faire pour préserver son honneur. »

    Elle sortit sa baguette et la posa sur la joue de l’enfant.

« Vous couper la langue suffirait-il ? »

    Elle remonta sa baguette vers sa tempe.

« Ou devrais-je aussi effacer tous vos souvenirs…? »

    Kristen se redressa et rangea sa baguette. Désormais loin d’être inquiète, elle était plutôt amusée par l’audace de cette enfant. De toute évidence, Mei se sentait intouchable. Exactement comme Kristen au même âge – c’était un sentiment qui avait d’ailleurs eu du mal à la quitter. Après la témérité provoquée par ce sentiment de toute-puissance enfantine était venue la lassitude de constater que personne n’osait effectivement détruire cette impression. Aujourd’hui encore, Kristen ne se sentait proche que de ceux qui osaient dire et faire, qui avaient le caractère adéquat pour se poster face à elle, les deux pieds vissés au sol et un éclair de défi dans le regard. C’était peut-être une explication à ses drôles de fréquentations - et à sa réaction face à l'insolente Mei Ling.

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28 mars 2018, 10:37
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Mei encaissa les menaces de la directrice de Poudlard avec beaucoup de sérieux. Elle ne broncha pas, ni de l’extérieur ni au plus profond d’elle-même, car rien n’était en mesure de l’intimidé, pas même l’exceptionnelle aura magique de cette sorcière noire. Ce n’était pas sans raison que le Doyen Xixia avait abandonné toute idée de remontrance dans son cas. C’est que ce cas était particulièrement désespéré, voir tout à fait irrécupérable. Mei était née pour ne pas plier, comme d’autres naissaient pour vivre le dos courbé.

Son sérieux céda avec le recul de Kristen Loewy. Mei l’observa longuement, les lèvres pincées comme deux portes qui refusaient de s’ouvrir devant un invité un peu trop envahissant. Son visage prit progressivement une belle couleur rouge, puis, n’était plus capable de contenir les sursauts de son être, Mei éclata de rire en manquant de tomber de son chaudron. Son rire tranchait outrageusement avec sa caboche de petite diablesse. C’était là le rire cristallin d’une enfant qu’on aurait presque pu adorer. Presque.

« Vous êtes très drôle… comme si c’était un secret ! »

Comme beaucoup de monde, Mei riait rarement mais quand ça se déclenchait, il fallait en général une bonne minute avant que ça retombe. De fait, le rire de Mei retomba, mais en même temps que lui poussait des sourcils froncés par une contrariété.

« Attendez… c’est vraiment un secret ? demanda-t-elle, soupçonneuse. »

Face au silence de Kristen Loewy, la mâchoire de Mei se décrocha.

« Ne me dites pas que vous ne recevez pas d’offrandes ? »

L’idée que la directrice de Poudlard se payait sa tête lui traversa l’esprit, mais très vite la réalité la rattrapa : ce n’était pas une farce.

« Mais… »

Mei était sidérée.

« … sans les sorcières noires il n’y a plus aucun équilibre ! »

Elle se renfrogna et jeta un regard dégoûté autour d’elle.

« Pas étonnant que ce vieux tas de cailloux ait perdu la tête, marmonna-t-elle. »

C’était la première fois qu’elle était confrontée à une situation aussi absurde. Au fond d’elle, Mei se sentait attaquée par cette situation incompréhensible. C’est quelle était la descendante d’une longue lignée de sorcières noires par sa mère (ce gêne magique ne se transmet que d’une mère à sa fille au Vietnam.) Comment pouvait-on, où que ce soit dans le monde, garder secret cet héritage ? Fâchée, Mei croisa ses bras sur une poitrine qu’elle n’avait pas encore et rumina :

« Sans ma grand-mère, il n’y aurait pas de Doyen Xixia, sans le Doyen de Xixia il n’y aurait pas de Tran Hồng Đào… sans sorcières noires, il n’y a pas de sorciers blancs, ce n’est pas compliqué à comprendre ! C’est la première règle du Jūn Shi ! »

LES CONTES DE L'ŒIL
(En vadrouille jusqu'au 3 janvier inclus)
29 mars 2018, 13:34
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  Les mains sur les hanches et un sourcil plus haut que l’autre, Kristen encaissa le rire de l’enfant avec autant de curiosité que d’étonnement. Très vite, l’intérêt de Kristen pour la petite augmenta et ses yeux pétillèrent de cette lueur propre aux occasions qui permettent de saisir le Savoir. La directrice de Poudlard voyait la fillette comme une source de connaissances sur sa culture dans laquelle elle espérait puiser, pour le vider jusqu’à ce que Mei Ling soit complètement desséchée.

« C’est un point de vue intéressant... Je serais ravie que vous m’en disiez plus sur la Magie de votre côté du globe et sur les aventures de votre Doyen. »

   Elle observa sa main abîmée un instant.

« Je me demande également quelles expériences votre grand-mère a menées. »

   Kristen jeta un regard aux alentours. Il n’y avait toujours personne, mais elle ne souhaitait pas être espionnée lors d’une conversation si sérieuse.

« Voyez-vous, ici, la magie noire est associée aux noms de sorciers qui ont répandu beaucoup de sang et de terreur. On préférerait que le Bien puisse exister sans le Mal, tout simplement. »

   Puisqu’elle était malgré tout trop ancrée dans sa culture anglaise, Kristen se permit d’ajouter :

« Néanmoins, je m’inquiète qu’une enfant de votre âge prenne ces questions à la légère. Cette magie est exigeante : il y a toujours un prix à payer. »

    Les conséquences de l’utilisation de la magie noire étaient toujours néfastes : elles pouvaient être sociales, cela se traduisait alors par un rejet de la société ; morales, la magie noire rongeait l’esprit et le cœur, brouillait les frontières entre le Bien et le Mal ; physiques, cela pouvait détruire partiellement le corps, ou du moins l’endommager.

« J’espère que nous aurons l’occasion d’en discuter en privé, à l’occasion. Dans une perspective de pure recherche. »

   Avec une gamine pareille, Kristen s'attendait presque à se faire envoyer balader, mais elle était malgré tout bien décidée à traquer le Savoir des asiatiques.

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29 mars 2018, 18:36
 RPG   PV  La princesse qui détestait les châteaux
La colère de Mei ne retombait pas, et certaines paroles de la directrice de Poudlard n’aidèrent pas. Mei n’arrivait  décidément pas à comprendre ce monde si étroit où tout était Bien ou Mal, en l’occurence nécessairement Mal quand il était question de magie noire. Elle avait envie de hurler que sa grand-mère, ses tantes, et ses cousines avaient sauvé des vies avec la magie noire, préservé l’existence d’innombrables vies innocentes, changé le destin de tellement de monde… quel Mal il y avait à ça ?

Aucun à ses yeux.

Le regard mauvais, la nuque toujours aussi douloureuse, elle foudroya Kristen Loewy. Si une chose l’agaçait plus que toutes les autres c’était bien qu’on la considère comme une petite idiote qui ne savait pas ce qu’elle disait. Mei savait toujours de quoi elle parlait, ou bien elle la fermait. Ce n’était pas plus compliqué que ça. Cette sorcière faisait fausse route. Elle était peut-être trop habituée au niveau relativement faible de ses élèves qu’elle en oubliait qu’on en formait de plus intelligents ailleurs.

« Je connais le prix à payer, dit-elle sèchement. »

Ne tenant plus sur place, Mei se leva et analysa les quatre possibilités de couloirs qui s’offraient à elle sans calculer Kristen Loewy. Sa présence avait beau peser sur elle de toute sa grandeur, Mei avait décidé de ne plus la regarder en face. Et puis, il y avait plus important : s’en aller, retrouver l’air libre, la pagode, son univers. Mais sa nature propre, cette nature revêche qui lui nervurait le coeur, ne pouvait retenir les paroles qu’elle brûlait de prononcer. C’était plus fort qu’elle. Elle le devait. Au moins par devoir de mémoire.

« Vous devez me prendre pour l’une de ses gamines sans cervelle qui peuplent en trop grand nombre les couloirs de votre école, mais je n’en suis pas une. Le ton est dur et amer. Ma mère a sacrifié sa vie pour que la tradition continue. C’est cher payé… »

L’air lui sembla plus frais dans le couloir à sa droite. Ses yeux lui piquaient. Mei décida que c’était ce couloir qui devait la ramener dehors — ce qui prouve à quel point son sens de l’orientation était désastreux.

Chaudron à la main, Mei s’éloigna du professeur Loewy mais se rappelant la tradition qu’on lui avait enseignée elle soupira et s’arrêta pour regarder les chaussures à talons noirs de cette drôle de sorcière noire par-dessus son épaule. Elle ne voulait plus croiser son regard pour aujourd’hui !

« Venez me voir à la pagode si vous voulez, un jour. Là-bas vous n’aurez pas à craindre qu’on vous entende… et puis elle est mieux élevée que ce château… »

Cette dernière remarque fâcha le château, mais Mei n’était pas le moins du monde intimidée.

« Vieux bouc, lâcha-t-elle à son encontre, une fois parvenue au bout du couloir. »

LES CONTES DE L'ŒIL
(En vadrouille jusqu'au 3 janvier inclus)
29 mars 2018, 21:12
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   La tension était palpable. Mei Ling était une bombe prête à exploser à tout moment. Mais elle était digne. Elle n’exploserait pas devant la directrice de Poudlard. Elle se réfugiait derrière un mur de froideur. Le contact visuel était brisé ; Kristen s’en désola mais continua à regarder Mei. Elle remettait en ordre ce que la petite lui disait. Ainsi, elle avait perdu sa mère… « pour que la tradition continue ». Kristen fronça les sourcils et se dit qu’elle aurait l’occasion de comprendre ce que cela signifiait réellement plus tard.

   Elle observa  avec un air impassible Mei qui s'éloignait et enfonça ses mains dans ses poches. Elle n’arrivait pas à trouver la jeune asiatique suffisamment insupportable pour être en colère ou même plus simplement vexée – peut-être, au fond, avait-elle quelque chose avec les enfants agréablement insupportables. Il n’y avait qu’à regarder Owen, son fils : le coup de foudre au premier regard pour cette mine boudeuse et révoltée. C’était aussi quelque chose qui lui plaisait chez Mei.

   Oui, elle irait la voir à la pagode. Très certainement. Tant pis si on l’accusait de faire du favoritisme, puisque de toute façon, ce seraient les épreuves qui parleraient – le gagnant ne serait déterminé d’aucune autre façon.

    Après le dernier coup de sang de Mei, la directrice de Poudlard dit d’une voix forte :

« Au contraire… »

    Elle fit quelques pas en direction de Mei, pour pouvoir parler moins fort, et ajouta :

« Je crois que vous êtes beaucoup trop intelligente pour votre propre bien. »

    Sans savoir si elle était regardée, elle sourit et baissa la tête.

« Il me tarde de vous voir concourir, Mei Ling. »

    Elle ouvrit le livre qu’elle avait emprunté à la bibliothèque, transplana et laissa la fillette se débrouiller avec ce vieux bouc de château.

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01 avr. 2018, 11:29
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Au contraire, je crois que vous êtes beaucoup trop intelligente pour votre propre bien… la voix du professeur Loewy tournait dans sa tête, et tournait encore plus fort à mesure que ses jambes se faisaient plus lourdes. Mei avait beau ne pas vouloir le reconnaître, elle était pourtant bel et bien perdue. Le professeur Loewy la trouvait peut-être trop intelligente, Mei devait bien se rendre à l’évidence qu’elle ne l’était pas assez pour sortir de ce château maudit. De plus, elle était incapable de se concentrer ne serait-ce que deux secondes, elle n’arrêtait pas de penser à sa mère, aux paroles du professeur Loewy, et aux picotements qui s’attaquaient à ses yeux.

« Les sorcières noires ne pleurent pas ! s’emporta-t-elle en s’arrêtant net sous une arche soutenue par une horde de vivets dorés en granit. »

Les picotements cessèrent, à sa grande satisfaction. Elle pouvait espérer remettre de l’ordre dans sa tête.

« Bon, et maintenant… »

Mei regarda autour d’elle : une petite cour en pierre sous une verrière à sa droite, un couloir droit devant elle, et un autre, décoré de portraits, sur sa gauche. Elle se gratta le nez et renifla. Elle n’était pas franchement aidée.

Soudain, une lumière s’alluma au coeur des ténèbres qui enrhumaient son esprit. Un sourire plein de malice apparut sur ses lèvres. Bien sûr qu’elle était aidée ! Comment n’y avait-elle pas pensé plus tôt ? Elle rit de bon coeur.

« Château, je crois que l’immense professeur Loewy verrait d’un très mauvais oeil que je ne retrouve pas la sortie. Et puis, elle m’aime bien, je le sais. Toi aussi tu dois le sentir. Et puis, je l’aime bien aussi, château. »

Quelque chose changea aussitôt dans l’atmosphère qui entourait la petite chinoise. L’air devint plus « léger », plus respirable, et surtout plus enclin à transporter des sons que Mei n’avait pas entendus jusque-là : des voix, des dizaines de voix qui provenaient du couloir aux portraits.

Son chaudron emprunté sous le bras, la petite chinoise s’y aventura et se laissa ainsi guidée par le volume des voix jusqu’à découvrir, non sans une immense satisfaction, qu’elles provenaient toutes du grand hall d’entrée par lequel elle passait tous les soirs pour dîner en compagnie du tout Poudlard.

Habillée de son plus bel air triomphal, Mei suivit le chemin de ronde qui dessinait une espèce de mezzanine entre le hall d’entrée et le premier étage pour descendre le grand escalier qui la ramena tranquillement aux grandes portes du château où elle laissa éclater toute sa joie de retrouver l’air libre. Elle avait vaincu la volonté du terrible château de Poudlard ! Elle se sentait prête à renverser toutes les montagnes qui se dresseraient sur son chemin durant la compétition magique !

[FIN]

LES CONTES DE L'ŒIL
(En vadrouille jusqu'au 3 janvier inclus)