L'indienne ne se fit pas prier pour revenir dans son armoire, s'enfermant à l'intérieur, laissant à peine une petite ouverture pour voir l'extérieur. Elle devait s'accroupir pour rentrer en entier, mais la jeune fille n'était pas à sa première fois, trouvant rapidement une position confortable. La tête posée sur l'angle du meuble, les yeux fixés sur la fine ouverture de lumière dévoilant le couloir et Jenny, elle inspira et souffla plusieurs fois, lentement, reprenant sa concentration précédente...

Son esprit revint à Pad Buttercup, cet étrange jeune Gryffondor devenu la coqueluche de son dortoir récemment. En quelque mois elle avait appris à s'habituer aux bravades des dernières années, tout pétris de puissance magique et d'hormones, alors qu'ils pavanaient dans le salon comme des rois, riant fort, prenant de la place, ensevelissant les plus jeunes sous leurs histoires et aventures. En général, elle le supportait très bien, et écoutait avec attention. Chaque vieux et vieille Gryffon avait son histoire et ses aventures, et toute la vantardise nécessaire pour la raconter avec force couleurs. C'était toujours différent, toujours quelque chose de nouveau. Et puis Pad Buttercup avait débarqué. En deux ou trois semaines il était devenu la seule source de discussion de la maison, surtout auprès des garçons. Quand ils n'étaient pas en train de l'entourer pour tenter de se faire une place dans sa clique, ils parlaient avec enthousiasme de ses derniers hauts faits. La liste allait et allait encore, jours après jours, le Paddock ne semblant pas laisser plus de quelques heures passer avant d'accomplir quelque chose d'extraordinaire... Le dortoir avait passé toute la soirée d'hier à élaborer théories et grandes idées sur la manière dont il avait réussi à éviter cette bombe de peinture...

A ce sujet, l'indienne se demandait toujours comment Jenny avait pu passer à côté du bonhomme. Peut être était ce un biais de la part d'Aisha ? Peut être que la notoriété de Buttercup était concentrée chez les Gryffondors ? Elle savait que les autres maisons n'étaient pas insensible à son étrange charisme, mais c'est vrai que les Serpentards semblaient moins touchés par la chose. Elle avait plus ou moins décidé que c'était une affaire de gueguerre entre maisons. Mais peut être était ce le fait d'autre chose ? Se remémorant le château, elle savait que les Serpentards avaient leurs dortoirs dans les sous sols, à la stricte opposée des Gryffons. Peut être que sa notoriété se diffusait sur la distance ? Elle pouffa, pour elle même, trouvant étrange son raisonnement.

La jeune Gryffondor amena la flasque d'encre a ses yeux, tentant de sonder son contenu d'un noir d'encre à la faible lueur du couloir. Elle n'avait pas vraiment d'idée de ce qu'elle allait faire. Le menacer ? C'était la meilleure manière de se prendre un sortilège de la part d'un de ses acolytes. Lui jeter à la figure ? Ou plus proprement sur le corps ? Il allait encore l'éviter d'une manière ou d'une autre... Tourner comme une folle pour en éparpiller partout ? Elle pouffa en silence. Au moins ce serait amusant quelques minutes avant qu'il ne l'évite et qu'elle ne se prenne un sortilège... Elle ne savait pas ce que Jenny avait prévu. Elle savait juste qu'elle devait sortir de cette armoire en brandissant la flasque d'encre prête à faire un truc avec. Elle devrait se fier à ses réflexes, et ses talents d'improvisation.

Jenny changea de comportement, à l'extérieur. Aishani reprit son attention. Pad Buttercup devait arriver. L'indienne encagoulée ne voyait pas bien ce qu'il se passait. Par contre elle entendait beaucoup de bruits de pas approcher...

Après que tous soient passés. J’étendis au loin des voix, solitaires. Elles se rapprochaient de plus en plus. Ils ont tourné, au coin du couloir où moi et Aishani étions postés et là je l'ai vu. Buttercup ! Mon sang n'a fait qu'un tour je me suis armée d'un grand sourire et je me suis mise au milieu du couloir.

- Oh mon dieu ! Paddock en personne... oh est-ce que tu voudrais bien me signer un autographe ?

C'était là, le moment où Aishani devait débarquer. J'avais pris soin d'appuyer sur le mot.

En face je vis bien qu'il fût surpris par ma demande, mais il sourit immédiatement flatté. Sa petite amie, elle, me panca un regard noir resserrant son emprise sur le bras de son prince. Quand il vit Aishani sortir du placard son sourire s'éteint. Pas que la jeune fille soit laide mais les placards cachaient rarement des élèves encagoulés.

- Bon sang mais qu'est-ce que c'est que cette mascarade ? s'exclama la pimbêche.

Accrochée comme un bulot elle hurlait comme les mouettes et je devinait qu'elle avait le quotient intellectuel d'une huitre. Ce n'était pas un thon mais malgré tout elle me rappelait la faune maritime.
L'autre parla de sa voix nouvellement muée :

- Calme toi mon amour ! Ces jeunes...gens vont aimablement nous laisser passer.

Il avait hésité au moment de nous désigner, certainement à cause du déguisement d'Aishani qui ne laissais pas présumer son sexe. Le sourire qu'il me fit me donna envie de lui foutre une claque tant il était aimable. On comprenait presque pourquoi il était tant apprécié, c'était une chance de sourire aussi bien...

Mais je ne me laissais pas avoir par cet air doucereux. Il fallait maintenant mettre mon plan en œuvre. D'un air théâtral je haussais la voix "Ne bougez plus !"
Je glissais ma main dans ma poche et en sortit un boursouflet rose bonbon. Je vis leur regards s'attendrir légèrement alors que le miens devint plus sombre. Je tendis le boursouflet devant moi comme pour les inviter à le prendre mais avant qu'ils n'aient eu le temps de se demander si c'est ce qu'ils devaient faire j'ai serré fort ma baguette. Je l'ai tournée et abaissée prononçant avec fermeté une formule récemment apprise "Wingardium Leviosa"

J'ai laissé la créature inquiète s'élever jusqu'au plafond. Je l'ai regardée un sourire aux lèvres puis j'ai à nouveau regardé pad.

- Mon cher Pad... Si je laisse tomber ce boursouflet, il meurt. Tu es trop parfait pour le laisser mourir n'est-ce pas ? Mais si tu le sauve tu bouges, et si tu fais le moindre geste ma collègue si présente se fera un plaisir de vous arroser d'encre. Sort ta baguette et vous êtes arrosés.

La baguette toujours levé pour maitriser le boursouflet j'utilisais ma main gauche pour me saisir de bonbons explosifs.

- Si je lâche ces bonbons le bruit alerte la professeur qui est non loin et je me met au sol en hurlant que tu m'a lancé un Expelliarmus.

Il était techniquement impossible que Pad s'en sorte sans qu'un drame ne se produise. Il était coincé, j'en était convaincue, rien ne pouvait le sauver. Tout le monde était parti et nous faisions trop de bruit pour alerter qui que ce soit tant que les bonbons restaient serrés dans ma main.

Aishani se voulait menaçante, la fiole d'encre haute dans les mains, prête à la lancer telle une chasseuse sur sa proie. Elle dévisageait sous sa cagoule les deux sixièmes années, se tenant le bras.

Pad était un petit jeune homme, à peine plus grand qu'elle malgré son âge. Des traits simples, peu distinctifs et des cheveux mi longs gras et fins, qui lui tombaient dans un dégradé sombre le long d'un visage un peu effacé. Il était un peu rond, sans être vraiment gros. Il déparait énormément avec la haute reine de beauté à ses côtés, dont tout les traits d'une rare perfection semblaient percer Jenny d'une multitude d'éclairs. Mais là où sa compagne semblait prête à en découdre, mettant déjà la main dans sa poche sans se soucier du danger, Pad lui tapota simplement son bras enlacé avant de reporter son attention sur Jenny.

"Chiche."

Dit il simplement, avec les yeux et le sourire le plus narquois qu'il était possible d'imaginer. Sa compagne sembla se calmer, se redressant, plus haute à cet instant que le jeune homme. De si près, Lucrèce était princière, exsudant un charme quasi surnaturel, terriblement intimidant. D'un mouvement de tête, elle remis ses magnifiques cheveux en place, se contentant de pousser un soupir dédaigneux en direction des deux filles. Puis sans vraiment s'inquiéter, le couple s'avança ensuite avec sa compagne, se contentant de passer à côté des deux jeunes sorcières, restant bien éloignés de l'indienne. C'était le signal ! Aishani banda ses muscles, se préparant à tirer.

"Aïe !"

L'indienne fut pris soudainement d'un foudroyant mal de crâne qu'elle vint tenir d'une seule main en gémissant. Ce faisant, sa cagoule tourna légèrement, la plongeant subitement dans le noir. Paniquée, désorientée, elle lança la fiole d'encre dans la direction générale du couple. Avec de la chance ! Avec de la chance !



Des rires qui s'éloignaient. Aishani remit sa capuche dans le bon sens. Devant elle, plus de Pad et de Lucréce, mais une jeune Serpentard noire sous l'encre qui lui dégoulinait de la tête et du visage. Confuse, elle regarda les deux sixième année partir dans le couloir, déjà plaisantant entre eux sur ce qu'il venait de se passer, sans même leur lancer un dernier regard.

Cela avait été simple, rapide, et ravageur, à peine quelques secondes s'étaient passées. La tête vrillée par le mal de crâne qui terminait de s'installer, Aisha parti de l'avant pour tenter de rattraper le Boursouflet au cas où le sort ne soit plus maintenu. Son pied vint au contact d'une tache d'encre et glissa, la faisant tomber de l'avant, les mains en l'air pour un sauvetage d'urgence.

Quel fiasco, se disait elle en tombant sur le sol. Elle espérait ne pas avoir blessé Jenny avec tout les éclats de verre...

Rien ne se déroula comme prévu. Ils ne se préoccupèrent même pas de la santé du boursouflet...une créature aussi adorable ! Je ne lâchais cependant pas le sort qui le retenait en vie. Je serrais ma baguette et ne me concentrais que sur lui et lui seul.

Tout alla très vite. Aishani sembla comme danser douloureusement, encore une migraine peut être ? Si bien que l'encre finis pas exploser près de moi...sur moi. Je m'en trouvais aspergée , couverte de noir et de honte. Je soupirais longuement tandis que les autres s'en allaient sans manquer de me faire trébucher au passage. Je m'étalait, gémissais de douleur, et relâchais une fraction de seconde le sort. Mais je justesse je roulais sur le côté et retint l’animal en l'air tandis qu'Aishani se jetait sous son corps frêle pour le sauver.

Je laissais retomber la pression en faisant doucement descendre la créature sur le crâne de ma collègue. Elle fouina un peu avant de piailler quand je la saisis. Rapidement je la replaçais dans ma poche.

- C'est bon elle est sauve.

Je soupirais avec exaspération. La gryffon d'or avait raison ; résultait de notre intervention u_n échec cuisant. Comment faire le bilan d'un événement aussi vide de réussite ?

- Bon ben voilà... On a pas appris grand chose de plus...

Je regardais la jeune fille avec dépit. Que pouvait-on faire désormais ? Rien. Se séparer et se revoir plus tard.

- Je vais y aller, je devrait me laver au plus vite... Alors à demain ?

Mon affirmation sonna comme une question. Nous nous recroiserions mais peut être pas demain car après tout cet échec sonnait comme une fin... Nous devions peut être abandonner.

Je me relevais, sans même proposer ma main à l'autre, trop dégoûtée de voir mon assurance réduite à néant. Je remontais au dortoir, me douchais un long moment l'encre étant plus tenace que je ne le pensais. J’ignorais les remarques sur les tâches qui me couvraient et reposais le boursouflet emprunté ce matin sur le lit où je l'avais trouvé.

Je m'empressais de rejoindre les bras de morphée, plongeant dans mon lit avec une soif effrénée de rêves heureux.

o/O\o

Réveil brutal. Je me relève pantelante de sueur au creux de mon lit. Je secoue la tête de droite à gauche, je sens une présence mais je sais qu'elle n'est que le souvenir du rêve que je viens de quitter , terreur nocturne. Je rabat la couette sur mon visage apeurée, sort ma main et tatonne pour me saisir de ma baguette mon stylo et mon carnet. Je me met en tailleur et sur le livre relate les souvenirs qui me reviennent en flash de mon sommeil. Paddock...Sa chevelure grasse et son ventre. Une fiole...ou une gourde je ne sais plus bien. Et il bois, il bois, le bougre en imbibe sa carcasse avec régularité !
Je finis de noter, puis retombe sur l'oreiller, suant sans dormir jusqu'au lever du jour.

o/O\o

Alors qu'hier je pensais à l'abandon ce rêve me donne soudainement envie de retourner vers Aishani. Moi je comprend en quoi ce simple rêve est important, mon père m'a toujours dit que je devais faire attention aux terreurs nocturnes, les noter, les étudier. Jamais compris pourquoi mais souvent elles me disaient des choses vraies alors je notait.

Après avoir longtemps arpenté les couloirs je la trouvais et la hélais.

"Aishani !"

Je m'approchais d'elle à pas vis et lui attrapai l'épaule.

" Faut que je te raconte ! Non...faut que je te demande plutôt... Pad machin, tu l'as observé non ? T'as déjà remarqué qu'il aimait bien les gourdes ?"

"Ouais... A demain Jenny..."

Cela n'avait pas marché. Encore une fois, tout les efforts avaient été vains. Aishani enleva sa cagoule, s'étirant en regardant la silhouette désabusée de Jenny s'éloigner. Elle amena la main dans sa poche secrête, avant d'en ressortir une bouteille d'eau en plastique, un remêde préparé en prévision de l'échec d'aujourd'hui. Elle le bu en réfléchissant, repassant dans sa tête ce qu'il venait de se passer. Jenny ne le savait pas, mais il y avait eu quelque chose d'inédit à la tentative d'aujourd'hui.

C'était la première fois qu'Aishani tentait une action directe sur Pad Buttercup. Jamais elle ne s'était exposée aussi près. Jamais elle n'avait tenté d'entrer en communication avec lui. Juste parce que son intuition lui disait que c'était une mauvaise idée, elle n'avait pas pensé que peut être, elle aurait pu en apprendre quelque chose.

Elle s'éloigna dans les couloirs, s'enlevant sa cape et sa cravate verte, les fourrant à l'abri dans sa poche sans fond. Pad Buttercup n'avait même pas esquissé le moindre signe d'inquiétude à leur attaque. Il connaissait l'issue avant même que tout ne se passe. Cela perturbait la jeune fille. Il ne pouvait pas savoir... Surtout, il avait tout de même exprimé de la surprise, plus que de la peur. Ce n'était donc pas de la préparation... C'est bizarre, parce qu'elle se rappelait avoir entendu un truc à ce sujet plus tôt dans la semaine... La jeune fille sortit son carnet pour en relire ses notes.

Elle ne remarqua même pas être arrivée devant la Grosse Dame avant que la haute voix de Soprano ne l'interpelle.

"Où est votre cravate, jeune fille ?♫"

Aishani fouilla sa poche pour en sortir la cravate rouge, bafouillant une excuse.

"Elle me gênait pour respirer, je me suis dit que cela ne poserait pas de problèmes..."

"Rappelez vous que les apparences comptent, jeune fille. Une Gryffondor se doit d'être toujours présentable. Il en va de l'honneur de notre maison. Mot de passe ?"

"•••••••••••••"

"Vous pouvez entrer. Et prenez donc exemple sur notre très cher Pad Buttercup voulez vous ? On vient de me dire qu'il a reçu de nouveaux éloges de Madame Xarinez pour l'élaboration de la plus efficace potion de beauté qu'elle n'ait jamais vue. Un vrai exemple pour ses pairs ♫"

Voila ! C'était ça ! Pad, avant toute cette affaire était un jeune prodige de la préparation de potions ! En tout cas c'était ce que disaient les commères de son dortoir. Pas qu'Aishani n'en sache quoi que ce soit, elle s'arrangeait le plus souvent avec une de ses collègues pour qu'elle verse discrètement la moitié de son chaudron dans le sien. Qui diable avait eu l'idée de mettre les cours de Potion aussi tôt dans la journée. L'indienne avait besoin de ses dix heures de sommeil !

La jeune Gryffondor entra dans son dortoir pour vaquer au reste de ses activités de la journée.



Tout est connecté. Que ce soit par le lien de causalité, le rapprochement quantique, les différentes théories unificatrices ou la simple approche holistique, on arrive toujours à lier quelque chose à quelque chose d'autre. Imaginez voir ces connections, les sentir, les éprouver des sens. A quoi cela ressemblerait ? Pour Aishani, une part de ses rêves semblaient toujours prendre la même forme. Des images aléatoires, des sons, des souvenirs, se retrouvaient liés ensemble par un fil. Ces fils se montaient en réseaux, puis en trame dans l'espace infini de ses rêves. Cela faisait maintenant plusieurs mois que son esprit errait dans cet espace, sans en comprendre réellement le sens, ni une quelconque direction. Par simplification, elle avait décidé de l'appeler la Tapisserie.

Aishani errait chaque nuit à la surface de cette Tapisserie, son esprit gravitant autour d'une trame de sensations particulières, dont les fils se nouaient autour de choses singulières, importantes. A partir de là, la jeune indienne distinguait inconsciemment les trous dans la trame, l'irrésolution de ses connexions. Parfois elle en ressortait une sensation plus importante, un sens de direction spécifique. Mais ce soir encore, comme beaucoup d'autres soir auparavant, un immense trou noir gravitait à une certaine distance d'elle, avalant les nœuds et les fils, sans se soucier de la destruction qu'il laissait dans son sillage. Elle en avait déjà vu à l’œuvre, des trous noirs similaires, sporadiques, présents tout au plus l'espace d'une nuit. Mais c'était la première fois qu'elle en voyait un persister de cette manière... A chaque fois qu'elle tentait de s'en approcher, elle se réveillait en sursaut, prise de violentes migraines. Elle avait rapidement appris à l'éviter...



"Aishani !"

L'indienne était descendue dans le grand hall, venant de terminer une conversation passionnante sur un match de foot prochain et s'apprêtant à sortir pour profiter d'une petite heure de pause entre deux cours. Elle se retourna vers la voix, accueillant Jenny avec le sourire.

La question la pris de court. Elle ne retint pas une grimace d'amusement.

"Il sort bien avec la grande Lucrèce Belvédère. J'imagine que quitte à aimer les gourdes, autant s'enticher de la reine d'entre toutes."

Fière d'elle même, l'indienne pris le temps d'apprécier sa bêtise avant de reprendre un air plus sérieux.

"Mais maintenant que tu le dis, je me suis rappelé hier d'une anecdote à son sujet : le Buttercup est un petit génie des potions. Même avant sa nouvelle renommée, il était, parait-il, l'un des grands espoirs de la professeur... J'avoue je n'y connais pas grand chose. Ça te fait penser à un truc ?"

Je rigolais à la boutade de ma camarade. Gourde était en effet le mot qui décrivais le mieux Lucrèce. Cette fille était tout ce qu'il y avait de plus superficiel et il était clair que Pad sortait avec elle pour sa beauté reluisante plus que pour son intelligence. Je ne comprenait pas pourquoi certains s’entêtaient à préférer la beauté superficielle à la réelle beauté des choses et des gens... Jamais moi même je ne pourrais supporter l'idée de n'aimer qu'un corps.

Un génie des potions.... Tout s'alliait dans ma tête. Et ce rêve, qui revenait sans cesse...Je cherchais, fouillais, en quête d'une information... Quelque chose m’échappait mais quoi... Fiole, récipient, potion. Quoi ? Non... Ce ne pouvait pas être... Je devais absolument m'assurer que ma théorie avait ses chances d'être vraies. J'avais notamment lue quelques histoires de sorciers se dissimulant de leur réelle identité en buvant une potion régulièrement pour en garder l'effet constant.

- Je réitère ma question, porte-il une fiole ou un récipient auquel il boit une à plusieurs fois par jour ? C'est un maître des potions et les potions se boivent...

Je trépignais me balançant d'une jambe sur l'autre dans l'attente d'une confirmation. Je levais soudainement la tête en entendant des voix derrière nous mon cœur accélérant brutalement. Mais fausse alerte, ce n'étaient qu'un groupe de sedaigles en plein débat virulent... D'ailleurs les gryffondors n'avaient nullement chercher à me retrouver, leur vengeance devait être mon échec, cela devait leur suffire.

Je respirais lentement pour me calmer et arrêter de secouer ma tête de droite à gauche. Personne ne nous écoutait et nous ne disions rien de mal après tout. Mais malgré le pseudo-courage que je montrait j'avais moi aussi peur qu'en exposant mon visage je dusse faire face à des représailles.

Je me demandais comment expliquer à Aishani ma théorie sans passer pour une idiote qui croit en ses rêves. Dire la vérité ne mènerait à rien, je devais simplement attendre qu'elle ait avec moi ce déclic. C'était de plus en plus évident, Pad n'était pas aussi talentueux de nature. Quelque chose tenait en éveil la part formidable de lui et ce quelques chose paraissait clairement être une potion. Un bon élève qui saurait voler avec discrétion aurait en fouillant les placards de poudlard de quoi confectionner n'importe quelle potion possible d’apprentissage à Poudlard. Restait à réfléchir pour trouver laquelle il utilisait, si elle était interdite et si il en avait une dose suffisante pour encore un moment. Car après tout ce que nous voulions c'était l'arrêter... Pas par jalousie non, mais parce qu'Aishani le voulait. Moi je ne savais pas vraiment pourquoi elle tenait tant à ce qu'il arrête son cirque, mais je supposait que ces raisons étaient bonnes... Ma confiance en elle était aveugle, elle devait m'accorder la sienne à son tour.

La remarque d'Aishani sembla illuminer Jenny, qui devint soudainement très concentrée sur ce qu'elle disait. Aishani écarquilla les yeux de surprise. C'était si important que ça qu'il soit un petit génie en potion ?

La Serpentard lui reposa la question, avec une inflexion différente. L'indienne plissa les yeux, tentant de se rappeler. Non, elle ne l'avait jamais personnellement vu boire à une fiole quelconque. Elle l'avait suivi pendant une petite semaine, et avait bien remarqué qu'il avait pas mal de manies... Mais boire des potions ne semblait pas en faire partie... Il avait une drôle de manière de paraitre nonchalant ceci dit...

Hmm ?! Attends voir... Aishani regarda en coin Jenny, tout en tentant de mimer cet étrange geste. Amener sa main à sa bouche, pousser sa tête en arrière en souriant... Amener sa main à sa bouche... Non sa paume... Et pourquoi la passer autour de sa bouche ?.. Oh ! La chemise ! Il devait avoir un truc dans la manche de sa chemise !

Aishani refit le mouvement, vérifiant ses dires. Oui. Oui oui ! Une éprouvette pouvait largement tenir dans la chemise, sous la cape de sorcier. C'était discret et facile à atteindre avec un peu d'expérience en prestidigitation... Pourquoi ne l'avait elle pas vu plus tôt...

"Je crois bien qu'il boit un truc, oui... Plusieurs fois par jour, il cache ça dans sa manche droite..."

Elle amena ses yeux à la rencontre de ceux de Jenny.

"Tu crois que c'est une potion ? Mais quel genre de potion peut rendre les gens héroïques ? Si ça existait vraiment, tout le monde en boirait !"

Aishani ne comprenait pas. Surtout, une partie d'elle même n'avait vraiment pas envie d'y penser. Qu'une potion soit la cause de la soudaine popularité du Gryffondor indiquait que quelque chose de puissamment magique était en jeu. Quelque chose de si magique, que même ici, les sorciers étaient sous son influence. Pourquoi !? Comment un tel pouvoir pouvait il exister à disposition d'enfants, pas même suffisamment matures pour se rendre compte du mal qu'ils pourraient faire avec. La seule réalisation de tout ça suffisait à sidérer l'indienne d'une terreur sourde qu'elle tentait avec vigueur de garder enfouie. Ce monde magique et tout ses outils destructeurs étaient d'un danger impossible, inconcevable pour une moldue comme elle. Comment diable pouvaient faire toute cette population pour vivre dans cet état de joie béate dont elle était témoin chaque jour de sa scolarité. Ce chateau ne cachait même plus les squelettes dans son placard...

L'indienne repoussa ses pensées, se concentrant sur Jenny. Elles devaient faire quelque chose, dans tout les cas. Les profs n'agiraient pas sur de simples suppositions. Ses camarades étaient tous sous le charme et ne l'aideraient pas... Elles étaient seules à pouvoir faire quelque chose...

Jenny avait une idée. Aishani espérait que c'en était une bonne...

Si il buvait quelque chose et qu'en plus il le cachait c'était bingo. Quand on cache quelque chose ce n'est jamais bon signe, le jeune homme était soit alcoolique soit consommateur d'un liquide dont il ne voulait pas dévoiler l'existence. Lequel était désormais la question qui se posait.

Je regardais Aishani agitée de sentir que je tenais une piste. Je fût étonnée qu'elle n'y ait pas pensé plus tôt, elle était pourtant si ingénieuse... Il était probable qu'elle fît trop concentrée sur ses pièges pour prendre le temps de réfléchir à la possibilité d'une origine magique au problème. Je lui fit un sourire contrit et sortit mon calepin de mon sac.

- Attends...

Dans ce petit calepin s'entassaient des tonnes d'informations et de remarques qui me paraissaient importantes et que je trouvais au fil du temps dans les livres, dans la bouche des autres ou encore dans des journaux. J'avais une liste de tout les sortilèges que j'avais pu découvrir jusqu'ici et une de toute les potions, je devais avouer que celle des potions était bien plus courte mais elle contenait tout de même plus d'une trentaine de potions différentes. J'avais trouvé la plupart d'entre elles dans les livres des programmes de chaque années disponibles à la bibliothèque.

Je parcourait des yeux la liste, répertoriant mentalement les possibles candidates au rôle de "potion permettant d'avoir autant de succès et de chance". Potion de force...mmh ce n'était pas de la force qu'il utilisait. Aiguise méninges, pourquoi pas...mais il n'y avait pas que de l'intelligence dans ses actes au contraire... Potion vieillissante qui lui donnerait assez de maturité pour... non il ne fallait pas de la maturité pour esquiver une bombe de peinture.

- AH !

Le cri m'avait échappé sans que je le veuille. Après avoir sourit désolée de mon eureka bruyant j'avais lu le peu d'informations que j'avais sur cette parfaite candidate que j'avais trouvé.

- Félix félisix...filicis, non Felicis est le nom d'une potion qui donne à celui qui la consomme une chance extraordinaire, sa préparation dure 6 mois... Wow, il faut vraiment être accro pour passer six mois sur une potion pour au final ne gagner qu'une estime de soi qu'on ne mérite pas et qui risquerai de s'effacer dès lors que ses réserves se finiront.

Je guettait avec attention les réactions de la gryffondor. Si j'avais visé juste cela se dessinerait sans doute immédiatement sur son visage. Quant à Pat, je n'avait aucune idée de la raison pour laquelle il pourrait prendre la peine de préparer cette potion simplement pour un peu de gloire et l'histoire d'amour la moins honnête possible. De plus si il s'en servait régulièrement il n'hésiterais pas à en prendre pour ses examens et ça c'était grave car considéré comme de la tricherie.

Aishani croisait les bras, la tête légèrement sur le côté. Sur son visage se dessinait toute l'expression de la sidération.

"Sang noir, t'es sérieuse... Une potion de chance ? Ca expliquerait beaucoup de trucs, mais de la chance en bouteille... Ce genre de choses existe vraiment..."

L'indienne frissonna perceptiblement, serrant ses bras contre son corps, rattrapée par sa phobie magique. Son esprit carburait à toutes les possibilités malsaines que ce genre de truc pouvait offrir... Cela faisait un peu moins d'un mois que Pad avait "de la chance" et était devenu la coqueluche de sa maison. Il s'en contentait pour l'instant, mais même six mois de préparation n'était pas difficile à reproduire, donné l'opportunité. Et de la chance en bouteille lui en apporterait foison...

"Oh mon dieu, nous DEVONS l'arrêter..."

La phrase était sortie toute seule de sa bouche, alors que son visage était encore tétanisée dans une expression horrifiée. Ce n'était plus une question de migraines ou d'anomalies dans la tapisserie. Il en allait de l'ordre même des choses. Aishani amena sa main à sa tempe, tentant de calmer le vertige qui la prenait soudainement. Son esprit voyait le millier de choses possibles à faire avec une telle chance. La liste ne s'arrêtait pas... Son coeur battait à tout rompre, et elle haletait. Fermant les yeux avec force, elle s'obligea à réfléchir à une solution, à une issue positive à tout ça... Oui... Il leur fallait un plan.

"... Ok... Ok... Soyons logique une seconde..."

Elle réouvrit les yeux, tentant de prendre une posture déterminée, ses mains toujours fermement ancrées dans ses bras, les jointures blanches de tension.

"Imaginons que c'est bien une potion, et pas quelque chose d'autre. Ca veut dire qu'il en a une réserve quelque part, et vu qu'il n'est pas stupide, un atelier avec une autre fournée en préparation. Cela laisse peu de places à l'improvisation. Je ne vois que deux solutions : Soit il a un espace privé en salle des potions. Ce qui m'étonnerait... Soit il possède un atelier privé quelque part. Suffisamment discret pour qu'il puisse conserver à l'intérieur ses préparations en attente... Et je sais exactement le type d'endroit en question..."

Aishani reporta son regard vers Jenny, tapotant sur sa poitrine. Elle savait que Jenny savait ce dont elle parlait... Une étincelle soudaine dans son esprit lui fit écarquiller les yeux de surprise. Si le premier était possible, alors le second aussi. Elle savait comment trouver cet atelier privé... Enfer ! L'ébauche de son plan était totalement tiré par les cheveux... Elle en souriait d'excitation... De ces sourires présageant du pire comme du meilleur... Ses yeux pétillaient lorsqu'ils revinrent vers la jeune Serpentard.

"J'ai une idée complétement stupide, Jenny... Du genre, vraiment, vraiment stupide..."

Je laissais paraître une moue intriguée devant l'empressement paniqué d'Aishani. Il n'était pas compliquer de comprendre que pour elle les choses qui se produisaient étaient graves. Moi je ne trouvais pas si grave ni si étonnant qu'un élève soit tenté d'utiliser une telle potion, après tout qui résisterai à la tentation de se voir affublé de tout ses lauriers et d'une chance presque indécente ? Ce n'était pas de la jalousie qui provoquait chez la gryffondor de tels spasmes, c'était autre chose, colère ou peur peut être, mais la jalousie ne faisait en rien réagir ainsi...

Je continuais à l'écouter, désormais elle semblait en proie à une grande réflexion. Moi ,impatiente, je laissais soupeser mon poids d'un pied sur l'autre poussée à me mouvoir par la hâte de savoir ce qui passait par la tête de ma collègue.

Enfin j'eu une explication tout à fait convenable de son avis. Si la potion était si longue à préparer et si il en avait une réserve continue c'était bien qu'en plus de la stocker il la préparait. Et pour cela il devait avoir besoin d'un lieu propice à la préparation des potions mais qui en plus soit à l'abri des regards, soit un lieu clos, abrité des intempéries, inconnu aux yeux de tous et qui puisse accueillir des feux magiques, stocker des ingrédients et des chaudrons. Soit beaucoup de facteurs, un endroit qui me parut à moi impossible à trouver. Mais quand on était chanceux on trouvait facilement ce genre d'en droit qui nous sert comme on le souhaite...

- Et quel est ce type d'endroit ? Je soupçonnerais les cachots mais...

Les cachots étaient déjà occupés par des élèves souhaitant s’entraîner à l'art des potions, soit trop peux discrets, et ne parlons pas du fait qu'il y ai à cet étage la salle de potions et la salle commune des serpentards, si il s'y tramait quelque chose quelqu’un finirait forcément pas le voir.

Enfin j'arrêtais mon continuel balancement pour prendre une posture fix à l'entente des mots "idée stupide". Je savais bien de quoi Aishani était capable... Et l'une de ses idées qu'elle trouvait elle même stupide, ce devait être réellement stupide... J'hésitait longuement avant de lui poser la question, pas si sûre de vouloir me lancer dans des aventures incontrôlables. Mais finalement la curiosité l'emporta et je m’intéressais à son idée, priant pour que celle-ci n'aille pas à l'encontre du règlement.

- Tant que ce que nous faisons n'est pas interdit, ce n'est pas stupide... Mais à ton ton je devine que c'est vraiment stupide... Dis moi toujours, je t'aiderais si je la juge convenable... Ou même je t'aiderais quoi qu'il arrive en fait, je suis trop curieuse d'avoir le fin mot de cette histoire.