Enora n'était pas dans la meilleure des humeurs. Son cours d'histoire de la magie avait été annulé sans qu'aucune raison ne soit donné à sa classe alors qu'elle avait passé la soirée de la veille à s'avancer pour le prochain chapitre. L'air quelque peu renfrogné, la jeune fille parcourait donc l'école pour aller déposer son livre au dortoir et peut-être se reposer un peu avant son prochain cours. La nuit avait été courte.
D'un pas pressé, elle naviguait entre les groupes d'élèves, trop occupés à discuter pour faire attention à elle. Plusieurs fois, elle manqua de se prendre un coude dans les côtes ou bien de se faire marcher dessus. Aux heures de changements, il y avait décidément beaucoup trop de gens en dehors des salles de cours et il était difficile pour les plus menus de se promener sans problème. Enora commençait à se demander s'il n'aurait pas mieux valu attendre quelques minutes avant de se diriger vers son dortoir. Cette petite pause lui aurait au moins permi de souffler un peu après la nouvelle de l'absence non justifiée de son professeur d'histoire de la magie. Peu importait à présent puisqu'elle était déjà dans le bazar. 
L'aiglonne ajuste la bride de son sac sur son épaule et resserre sa prise autour du livre qu'elle tenait entre les mains. Elle traversa un petit hall aussi bondé que le couloir qu'elle venait de quitter. Elle avait vraiment hâte d'enfin pouvoir s'asseoir dans son lit. 

Noah marchait tranquillement dans les couloirs du château. Son sac à l’épaule, lourd de livres, il se dirigeait vers son prochain cours. Le flot d’élèves discutant, riant entre amis, en attendant leur professeur, était impressionnant. À cet instant là, Noah pensa qu’il avait de la chance d’être grand, et plaignît ceux qui étaient petits. Secouant la tête, il s’obligea lui-même à se souvenir de sa prochaine leçon. Pourtant, son cerveau refusa d’obéir. Il ne parvenait pas à concentrer. Pris d’une migraine à force d’essayer, il se tint la tête en se frottant les yeux. Chose qu’il n’aurait pas dû faire.

Noah sentît son torse percuter quelque choses. Ouvrant les yeux, il vit une jeune fille lui faire face. Il la détailla longuement, passant des son visage, ses cheveux bruns et ses yeux marrons, à sa taille. Puis, Noah ne put s’empêcher de penser qu’elle petite. Relativement petite. Plus petite que lui.

« Elle est vraiment trop petite. »

Noah ne se rendit compte qu’il avait parlé à haute voix, que quand il sentit les mots dépasser sa pensée pour traverser ses lèvres. Il ne savait s’il devait s’excuser ou non d’avoir dit cela. Enfin, se disant qu’elle n’avait sûrement rien entendu, à cause du vacarme ambiant, il fit mine de continuer son chemin, lui faisant un signe désolé de la main.

Son esprit focalisé sur le lit bien douillet qui l'attendait, Enora ne vit qu'à la dernière minute le grand ténébreux. Il fallait dire qu'il était planté au milieu du couloir et qu'il n'avait même pas essayé de s'écarter de son chemin. Elle le percuta légèrement, réussissant par miracle à ne pas le frapper de plein fouet. Dans la manœuvre, elle laissa tomber son livre dans un bruit sourd. L'aiglonne soupira avant de s'accroupir pour récupérer l'ouvrage d'histoire de la magie. Tandis qu'elle le prenait entre ses mains, une voix s'élèva au-dessus d'elle. 

- Elle est vraiment trop petite.

Trop étonnée par ses paroles pour le moins incongrues, Enora n'en croyait pas ses oreilles. Elle se redressa doucement et serra son livre contre sa poitrine. Elle chercha ensuite le regard de celui qu'elle avait percuté comme pour vérifier s'il était bien l'auteur de cette phrase blessante mais l'élève s'éloignait déjà. Le signe de la main qu'elle perçut comme plein de dédain lui confirme pourtant qu'il était bien celui qui avait prononcé les mots honteux qu'elle avait entendus. 
Elle devint rouge de colère. Sous prétexte qu'il avait quelques centimètres de plus, il se permettait de faire une remarque sur sa taille ? Mais qui croyait-il être ce grand dadais ? Loin d'être intimidée, Enora le poursuivit dans le couloir :

- Désolée, je crois avoir mal entendu. Qu'est-ce que tu as dit ? demande-t-elle le plus calmement possible. 

La jeune fille était bien déterminée à lui faire savoir le fond de sa pensée. 

Noah partait déjà à grandes enjambées vers son prochain cours, déjà en retard. Son esprit vagabondait, d'une pensée à l'autre, son mal de tête reprenant. Il avait complètement oublié le petit incident arrivé quelque temps plutôt. Pourtant, lorsqu'il sentit que quelqu'un le suivait, ses pas égalant les siens, il baissa les les yeux, sourcils froncés. La jeune fille qu'il avait percuté le poursuivait, ses yeux marrons luisants de colère. "Oups.. Je crois que je l'ai énervée.." Noah eut grande peine à retenir son rire, quand il entendit les paroles de la fille. Elle avait sûrement entendu ce qu'il avait dit. Pourtant, il n'en avait pas honte, ce n'était que la vérité après tout. Il essaya de garder son calme et son sérieux, mais ses son regard se fit amusé malgré lui.

"J'avais dit que t'étais petite."

Il baissa les yeux encore plus, comme pour illustrer ses propos et sourit. Lui faisant un autre signe de la main, et cette fois décidé de repartir avant d'arriver vraiment très en retard à son prochain cours, et d'écoper une retenue, il se détourna d'elle et tenta de se frayer un chemin entre les élèves.

"Je suis désolé, mais j'ai un cours auquel je me dois d'assister ! Je t'abandonne ici, tu pense pourvoir t'en sortir ?"

Il lui lança un regard désolé, quoique rieur, fit mine de partir.

Le grand ténébreux assumait donc ses mauvaises paroles. La jeune fille n'en croyait pas ses oreilles. Les Gryffondor n'avaient pourtant pas la réputation d'être des écervelés tellement imbus d'eux même qu'ils se fichaient de blesser ceux autour d'eux. Enora avait donc du tomber sur la perle rare. Quelle veine ! 
Alors qu'il lui parlait, elle scrutait son visage, persuadée de l'avoir vu quelque part. Sa taille trompeuse lui avait d'abord fait penser qu'il n'était pas en première année comme elle et pourtant, elle l'avait bien aperçu en cours. Enora se sentit soudainement moins timide et tout à fait prête à en découdre. 
Il n'empêchait que les dérobées successives de l'impoli lui laissaient penser qu'il n'était pas si fier que ça de la remarque qu'il lui avait faite. Ce n'était cependant pas une raison pour que l'aiglonne laisse passer pareil comportement. Aussi, alors qu'il se retourne, elle lui lance :

- Ne t'en fais surtout pas pour moi. Ma petite taille ne m'empêche jamais d'assister à un cours ou bien de faire preuve d'un minimum de politesse. En revanche je me demande si toi ça va ? pose-t-elle ironiquement. Il semble que l'altitude due à ta ô combien grande stature fait qu'il n'y a plus assez d'oxygène qui arrive à ton cerveau. La concordance des temps et la bonne conduite ont l'air d'être deux concepts qui t'échappent complètement à présent. J'espère que ces dégâts ne sont pas irréversibles, ajoute-t-elle avec une mine faussement inquiète.

"Ou pas en fait" pensa-t-elle. 

Contente de sa tirade, elle attendit que le jeune homme lui réponde avec un grand sourire sur les lèvres. Enora espérait bien lui causer du retard s'il avait bien un cours auquel assister. Ce serait amplement mérité !