Les MacTairdelbach attendirent de longues minutes durant devant le wagon, que toutes les petites têtes blondes disparaissent, avant de s'offrir une dernière embrassade, loin des regards du tout venant.

Le pas hésitant, Fiss finit par monter dans le train, accompagné de sa valise, que son père prenait soin de faire léviter non loin derrière sa progéniture.
Ce dernier, une fois dans le wagon, se retourna et jeta un dernier regard au seul parent qui a pu l'accompagner jusqu'ici, un bref instant, avant que celui-ci ne rompe le contact visuel et ne parte, regardant droit devant lui, souhaitant laisser à la chair de sa chair, le visage d'un paternel ne montrant nul signe de tristesse, ayant l'air heureux de voir son fils découvrir ce qui lui a été caché des années durant.

Fiss prit sa valise, et avança dans un wagon, puis un autre, puis un autre, s'arrêtant à chacun des compartiments, caressant l'espoir d'en trouver un dans lequel le nombre d'enfant le mettrait à son aise.
Au bout de quelques minutes, il s'arrêta, puis un très léger sourire se dessina sur son visage; un compartiment, dans lequel on pouvait voir l'intégralité des banquettes, sans le moindre de ses congénères pour venir perturber ses pensées!

Il allait pouvoir, le plus tranquillement du monde s'asseoir et s'enfermer dans ses pensées, repensant à ces derniers jours chez ses parents, redoutant son arrivée à l'école de Poudlard, observant le paysage et savourant les ultimes instants de silence (si l'on exclut le bruit du train) avant de devoir se confronter à la cohue du débarquement, cet instant ou tous ceux qui mirent tant de temps à entrer dans un vacarme assourdissant devraient sortir du train, dans un laps de temps certainement bien plus restreint qu'au moment de rentrer..!

Fiss finit par entrer dans le compartiment, s'asseoir près de la vitre, puis placer sa valise à côté de lui, sur la banquette, avant de s'abandonner à ses songes, regardant par la fenêtre du train probablement sans même voir ce qu'il se passe de l'autre côté, tant ses pensées, ses appréhensions, prenaient le dessus sur tout le reste.

Fiss était perdu dans ses songes lorsque, dans un léger sursaut, le bruit des doigts d'Alice sur la porte le fit revenir à lui.
Il se retourna, puis découvrit avec plaisir qu'une seule personne était derrière la porte, et de par les dires de cette dernière, ce n'est visiblement pas l'un de ces sauvageons à la voix portante qui s'esclaffait en accompagnant leurs "discussions" de mouvement amples et erratiques, accompagné par ses camarades agissant de manière similaire, à l'instar de beaucoup de jeunes de son âge, à l'entrée du train.

Bien que vaguement sur ses gardes, il prit son courage à deux mains, et de son air le plus assuré face à une inconnue à qui il n'a encore jamais eu l'occasion de parler, il l’accueillit chaleureusement d'un timide:

N.. Euh.. Oui, je.. oui bien sûr, installes-toi!

Il rougit très légèrement, puis, en quelques fractions de secondes regarda Alice, puis sa valise, puis la banquette face à lui, puis Alice, puis sa propre banquette, puis Alice, puis la valise de cette dernière, avant d'esquisser un léger sourire tout aussi poli que gêné, tout en tirant frénétiquement sur les moumoutes dépassant de son pull en laine beige avec ses index et pouces, avant de les dévider jusqu'à ce que celles-ci, victimes de l'adresse d'un enfant lambda et du fait que celui-ci n'a que faire de ce que ses mains font machinalement, tombent sur le sol du wagon.

Je.. Je m'appelle Fiss..

- C'est très aimable à toi, merci.

Alice sourit, et entra dans le compartiment qu'elle ferma aussitôt. Déjà qu'elle allait devoir voyager avec quelqu'un, hors de question d'accueillir une personne de plus. Elle souleva sa valise du mieux qu'elle put, et la déposa sur la banquette.
Alice déboutonna son grand manteau et le retira, consciente que le voyage allait être long. Elle fit de même avec son bonnet, libérant alors sa chevelure d'argent. La jeune sorcière arrangea ses boucles entre ses doigts, histoire de ne pas ressembler à une sauvageonne. Quand elle retrouva un semblant de prestance capillaire, elle reposa ses yeux sur le garçon aux cheveux noirs.

- Fiss ? répéta Alice. Enchantée de faire ta connaissance. Je m'appelle Alice. Alice Sangblanc.

Elle lui sourit à nouveau, avant de s'asseoir sur sa banquette. Elle déposa son manteau et son bonnet sur sa valise. Son regard se posa sur la fenêtre du compartiment. Elle chercha un moment son père, mais la foule était épaisse. Mais elle avait l'espoir d’apercevoir le crâne blanc de son père. En vain. Alice dût se résoudre à abandonner. Elle reporta alors son attention sur le garçon en face d'elle. Elle l'observa un instant, avant de demander:

- Tu es en première année?

Sa question ressemblait d'avantage à une affirmation qu'à une interrogation. Alice reposa ses mains sur ses genoux rassemblés, ses yeux fixés sur Fiss.

- Enchanté aussi, je.. Oui, ce doit.. C'est ça, je prends ce train pour la première fois.

Première année, voilà un terme qu'il n'avait jamais entendu, lui qui étudia des années durant chez lui, en compagnie de sa famille.
Fiss observa brièvement par la fenêtre la raison des regards portés de sa nouvelle interlocutrice vers l'extérieur, avant de revenir à elle, cherchant un sujet de conversation quelconque, afin de ne pas couper la discussion comme un goujat sans raison valable; il n'avait pas été élevé comme ça.

-J'espère ne rien avoir oublié.. D'habitude, je suis à la maison, si j'oublie quelque chose, je vais le chercher dans ma chambre, mais là...

En finissant sa phrase, Fiss se rendit compte que celle-ci n'était pas d'un grand intérêt, il réfléchit une fraction de seconde, puis se relança:

- Tu sais comment ça se passe, là bas? Tu y es déjà allé?

Fiss avait reprit ses esprits depuis l'arrivée d'Alice, voilà une question acceptable! Son teint perdit sa rougeur d'il y a quelques instants, il entrouvrit sa valise, puis y glissa sa main, avant d'effleurer un paquet de caramels mous, qu'il hésita à sortir, de peur de se sentir forcé d'en offrir, ou pire, de voir sa nouvelle voisine de compartiment quémander! Mais maintenant, que faire? N'aurait t'il pas l'air d'être avare, en ressortant vide sa main de sa valise.
Tout en regardant tantôt partout et nulle part, tantôt Alice, il farfouilla jusqu'à sortir un livre dont il ignorait tout, afin de donner l'impression qu'il cherchait celui-ci.

Il refixa Alice, posant l'ouvrage (un livre de mythologies expliqué aux enfants, trouvable chez les moldus) à côté de lui.

Observa le regard d'Alice se tourner vers son ouvrage, et se sentit quelque peu mal à l'aise.

- C'est ma première année, répondit-elle avec détachement. Et tout ce que je sais de cette école, c'est ce que tout le monde en sait. Enfin, je suppose. J'ai lu à nouveau ''L'histoire de Poudlard'' pendant ces vacances. Tu l'as certainement déjà lu au moins une fois, non ?


Était-ce une manière de faire comprendre à Fiss que ce qu'il venait de sortir de son sac n'avait pas le moindre intérêt? Qu'il s'encombrait là d'ouvrages qui ne lui servirait à rien, ou pire, qui l'amènerait à perdre son temps, à prendre du retard sur les autres? Deviendrait t'il un boulet pour sa future maison?
Il observa la boîte d'Alice, puis vint en lui une peur soudaine: La baguette, SA baguette, où est t'elle? L'avait t'il oublié, où l'avait t'il rangé?
Il commença a farfouiller à nouveau dans son sac, retournant ses affaires préalablement rangées correctement, ne prêtant plus que vaguement attention à sa voisine.

- [...] je serai à Serdaigle [..] blablabla [...] la réflexion, aussi. L'érudition...

Il l'avait retrouvé! La boite, au fond du sac, cachée sous ses vêtements, eux mêmes cachés derrière ses nombreux ouvrages.
Il ressortit celle-ci puis répondit à Alice:

Je l'ai lu, oui, toutefois.. Je ne pense pas qu'un livre datant d'il y a presque 300 ans puisse me préparer à ce que je verrai à Poudlard.

Il observa la baguette d'Alice, puis regarda la sienne, puis à nouveau celle d'Alice, admirant les détails de cette dernière, puis retournant à la sienne, qu'il sortit à son tour de sa boîte.

Sa baguette était bien plus simple, et à la fois, donnait l'impression d'être plus réfléchie; d'un bois de couleur commune pour cette matière; très fin, comme l'oblige l'épaisseur naturelle de l'aubépine, quant à son pommeau, celui-ci donnait l'impression d'avoir été étudié pour que la moindre excroissance ait son utilité.
Fiss tenta alors de la prendre de différentes manières, (en prenant grand soin de la faire se mouvoir avec la plus grande délicatesse, de peur que quelque chose n'en sorte malgré lui), afin de comprendre l'utilité de chaque détail de ce pommeau.

Il revient à Alice:

Serdaigle? De toute façon, quelque soit ta maison, tu pourras rester comme tu es.
Excuses moi mais, la manière dont tu dis ça, j'ai... Enfin j'ai l'impression que tu voudrais être chez eux non pas pour te retrouver avec des élèves comme toi, mais pour montrer aux autres ce que tu es.


Fiss regretta presque aussitôt d'avoir dit ça, ayant l'air d'agresser verbalement Alice, il reprit, souriant en coin:

-De toute façon, quelque soit la maison où tu iras, si l'on t'y envoie, c'est que ce sera la bonne pour toi, même si tu ne le sais pas encore; mon père m'a dit que le choixpeau ne se trompait jamais.

- Je l'ai lu, oui, toutefois.. Je ne pense pas qu'un livre datant d'il y a presque 300 ans puisse me préparer à ce que je verrai à Poudlard.

Alice releva ses yeux d'or blanc sur Fiss lorsqu'il s'adressa à elle. Elle haussa les sourcils, scandalisée. Bien sûr que l'ouvrage de Garius Tomking pouvait les préparer ! Encore fallait-il en capter les informations nécessaires ! Mais d'où venait ce ...
Alice interrompit le cours de ses pensées en le voyant l'imiter avec sa baguette. Enfin, avec si peu d'habilité qu'il paraissait impossible que ce garçon provienne d'une famille de sorcier. C'était très certainement un né-moldu. Alice en était persuadée. Elle fronça un instant les sourcils, referma sa jolie boîte et reporta son attention sur l'extérieur.

- Serdaigle ? entendit-elle peu après. De toute façon, quelque soit ta maison, tu pourras rester comme tu es. Excuses moi mais, la manière dont tu dis ça, j'ai... Enfin j'ai l'impression que tu voudrais être chez eux non pas pour te retrouver avec des élèves comme toi, mais pour montrer aux autres ce que tu es.

Montrer aux autres ce qu’elle est ? Qu’est ce que cela voulait dire dans sa bouche ? Alice sentit le rouge monter à ses joues. Elle était prête à répliquer, mais Fiss reprit presque aussitôt, un sourire au coin des lèvres :

- De toute façon, quelque soit la maison où tu iras, si l'on t'y envoie, c'est que ce sera la bonne pour toi, même si tu ne le sais pas encore. Mon père m'a dit que le choixpeau ne se trompait jamais.

Alice ne répondit pas, la bouche légèrement pincée. Elle ne lui adressa pas un regard, ses petites mains tenant fermement sa boîte à baguette.
Alice finit par reporter son attention sur lui, ses pommettes légèrement rosées.

- Avoir confiance en ses qualités n’est aucunement un mal, dit elle avec le reste d’assurance qui lui restait. Il est stupide de ne pas vouloir les montrer aux autres.

Elle replaça une mèche devant sa joue, voulant cacher sa gêne occasionnée par les précédents mots de Fiss. Il n'avait pas l'air d'être un vilain garçon, pourtant. Ça non. Elle n'avait pas rencontré beaucoup d'autres enfants jusqu'à maintenant, mais suffisamment pour se faire un avis. Lui, il n'avait pas l'air méchant. Alice commençait à redouter de rencontrer des enfants avec un mauvais fond, si tous les « gentils » étaient comme lui...

Alice n’ajouta rien de plus pour le moment, observant le paysage défiler par la fenêtre de leur compartiment. Ses ongles coupés court tapotaient sa boîte dans un rythme semblable à celui du train sur les rails. L’ennui commençait à la gagner.

Alice finit par se relever pour ranger sa boîte dans sa valise. Elle en profita pour sortir sa robe de sorcier, qu’elle déplia et secoua avant de l’enfiler.

- J’ai hâte que le chariot de friandise passe, dit-elle enfin en ajustant son col. J’ai une faim de loup.

Alice posa enfin ses yeux sur Fiss, avec un léger sourire aux lèvres. Se faire des amis. Il fallait qu’elle se fasse des amis.

Ou au moins, qu’elle essaye.

Fiss regarda ailleurs une fraction de seconde en voyant les joues d'Alice rougir, il l'avait froissé, et n'en était pas fier. Il n'avait à son sens rien à particulièrement se reprocher, et repris ses activités, lorgnant sur sa baguette, se demandant comment cela pouvait fonctionner, par quel procédé un morceau de bois, en fin de compte, pouvait permettre d'envoyer quoi que ce soit de "magique".

- Avoir confiance en ses qualités n’est aucunement un mal, dit elle avec le reste d’assurance qui lui restait. Il est stupide de ne pas vouloir les montrer aux autres.

Fiss haussa un sourcil, puis pinça sa joue droite avec ses dents. "Sa manière de parler, son orgueil.. De par ce que j'ai lu et entendu, je la verrai plus chez les Griffondor, ou les Serpentard.. Enfin, je ne suis pas un choixpeau" se dit t'il, haussant les épaules.
Il revint à sa baguette, puis à ses pensées.. "Et pourquoi lui? En quoi est t'il différent des enfants qu'il voyait par la fenêtre de chez lui? A t'il simplement découvert ce don que les autres ont aussi en eux sans le savoir? Est t'il vraiment privilégié?"

- J’ai hâte que le chariot de friandise passe, dit-elle enfin en ajustant son col. J’ai une faim de loup.

Un chariot de friandise?

Fiss fût brusquement expulsé de ses songes! Alice, comme par hasard, venait d'invoquer cette envie de friandises, à tous les coups, elle avait vu dépasser les caramels de ce dernier lorsqu'il cherchait sa baguette, et cherchait à lui en soutirer poliment!
Il avait rencontré une personne de son âge avec qui il arrivait à parler, et ne voulait pas passer pour un égoïste auprès d'elle, mais.. En même temps, cette façon de demander, ne pouvait t'elle pas le lui dire clairement?
A t'elle vraiment vu les caramels? Était-ce un pur hasard? Est-ce le bruit du sachet qui lui a fait penser à des friandises?

-J'ai des caramels si tu veux ! vint échapper de sa bouche, à son grand regret, qu'il réussit parfaitement à ne pas montrer.
Il commença à farfouiller dans sa valise le paquet de sucreries qu'il avait bien vite attrapé dans celle-ci, le temps d'afficher un sourire forcé sans qu'il n'ait l'air de l'être, afin de ne pas passer pour quelqu'un ayant l'air de donner un rein.

Une fois une mine heureuse et souriante affichée sur son visage, il sortit son sachet, l'ouvrit, et le tendit en direction d'Alice.