Il faisait une température caniculaire en cette chaude journée de septembre, et la majorité des élèves était partie se baigner au lac. D'autres encore étaient descendus à Pré Au Lard ou tout simplement restés au frais dans leurs dortoirs. Cependant, cela ne concernait pas Elowen, bien qu'elle ait eu très envie de rejoindre ses camarades pour une partie de bavboules à l'ombre. Non, Elowen n' avait pas le choix, si elle voulait conserver sa moyenne, rester sérieuse aux yeux de son professeur et ne pas retirer de points à sa maison, il fallait qu'elle termine ce fiche devoir de potions avant demain, lundi, date butoire.

Cela faisait bien une heure que la jeune rouquine cherchait des informations au sujet des élixirs d'allégresse, ces potions hilarantes à l'odeur fraîche et acidulée, et qu'elle ne trouvait rien. Elle n'était d'habitude pas mauvaise en potions, mais ce n'était tout simplement pas son truc.

Malgré la chaleur et le peu de temps qu'elle avait passé dans l'enceinte du château, la bibliothèque était un de ses endroits préférés. Il y régnait une odeur de vieux papier et d'encre séchée qui l'enivrait, et les meubles étaient taillés dans du bois si ancien et précieux que tous avaient l'obligation de rester en admiration devant ce lieu chargé d'histoire. De plus, il y avait toujours très peu de monde, en tout cas dans le coin où elle se mettait. Il y avait une atmosphère tranquille et apaisante, qui lui rappelait sans doute la bibliothèque familiale.

"Fiou quelle chaleur, c'est incroyable de me forcer à rester là." Elowen enleva alors le plus de couches possible, restant ainsi en simple tee-shirt et short, espérant qu'aucun professeur ne viendrait la surprendre sans sa longue robe noire. Dans un soucis de bien faire, elle garda cependant sa cravate bleue et noire. Seule, la jeune fille commença alors à siffloter.

-Fû Fû Fû Fû Fû Fû Fû

Je n'ai jamais vraiment aimé le dimanche. Beaucoup ont ce jour en première place dans leur classement de leurs jours préférés. Hiérarchiser les jours de la semaine en fonction de nos affinités avec ces derniers est une activité comme une autre, mais j'ai tendance à préférer des activités bien plus cérébrales, de jour, de nuit, qu'il pleuve ou qu'il vente. Ou qu'il fasse une chaleur dite insoutenable selon la météo, comme aujourd'hui... Je sors de la volière, après avoir envoyé mon courrier à ma famille. Une lettre pour Grand-mère, une lettre pour Père, une lettre pour Mère, une lettre pour Tante Ailinn, et une lettre pour Elyon. Toujours dans cet ordre là. À chaque fois. Quand je ne lis pas des cours ou des livres, j'entretiens mes correspondances épistolaires. Ma vie sociale pourrait presque être entièrement faite d'encre et de papier. En parlant d'encre et de papier, je saisis la bandoulière de mon sac en me disant que par cette chaleur, la bibliothèque doit être particulièrement vide. Je ne réfléchis pas plus et me dirige vers le temple du savoir.

Sur le chemin, je croise peu de personnes
Mais ils ont tous troqué leur robe de sorcier pour une tenue plus à même d'apprécier l'été indien. Heureusement, aucun ne me dévisage parce que ma cravate est bien serrée et que je porte l'uniforme de Poudlard par cette chaleur... J'arrive finalement à la porte de la bibliothèque. Mon deuxième nid douillet ici. J'ouvre la porte et entre. L'odeur des livres et du papier s'empare de mes narines dès mon premier pas dans la pièce. J'adore ça. Il y règne un silence de cathédrale. J'adore aussi. Je ne perds pas de temps. Je dois profiter de ce dimanche pour prendre encore un peu plus d'avance sur les autres élèves. Je dois rester le meilleur !

J'arrive devant une des nombreuses étagères de la pièce et regarde les volumes manquants. Quelqu'un a dévalisé le rayon des ouvrages de potions. Heureusement, je suis à jour dans cette matière... Je continue mon chemin, regardant les étagères adjacentes...

- Défense Contre les Forces du Mal... Astronomie... Sortilèges... Ah ! Métamorphoses... Pourquoi pas ?

Je m'empare du plus gros livre de métamorphoses que je peux atteindre avec ma baguette. Le génie qui a inventé Wingardium Leviosa doit être fier de lui... Je saisis l'ouvrage et m'installe à une table non loin. Je risque de devoir prendre du rab de livres d'ici peu... C'est une fois mes affaires déballées, mes yeux plantés dans les pages jaunies par le temps et mon cerveau en transe sur la métamorphose que j'entends quelqu'un qui siffle dans la bibliothèque... Je lève les yeux discrètement et tousse une ou deux fois avant de parler.

- Il y a quelqu'un ?

C'est curieux, tout de même. Moi qui pensais être seul dans la bibliothèque, il s'avère que ce n'est pas le cas. Quelqu'un d'autre que moi a préféré l'océan de savoir au lac noir ? Je regarde dans la direction d'où venaient les sifflements et attends patiemment une réponse autre que l'écho de ma propre voix répétant ma question...

- Il y a quelqu'un ?

Elowen cessa alors de siffler, étonnée.
'Zut, je pensais être tranquille aujourd'hui, c'est mal parti, je suis déjà repérée !' pensa-t-elle.

La petite se cacha alors, se roulant presque en boule, son manuel de potions dans les bras. Si elle avait été vêtue de noir elle aurait été totalement invisible. Elle hésita presque à remettre la robe mais la chaleur l'en a vite dissuadé.

'Voyons voir, il faut que je révise la fabrication du Polynectar'
L'aiglonne ferma alors les yeux, tentant tant bien que mal de réciter les ingrédients, essayant de chuchoter pour ne surtout pas être déconcentrée si l'on la repérait.
-Se prépare en deux parties. Dans un premier temps je dois mélanger dans un chaudron en étain trois mesures de sisymbre, trois, non deux de polygonum et.... Non je sèche, j'y arriverai jamais !
Elle jetta alors un coup d'oeil à son livre, et soupira de désespoir.
'Et rien d'autre, ensuite je mélange!!'

Elowen en avait déjà plus qu'assez, d'habitude elle était plutôt douée dans les potions, c'est même une matière pour laquelle elle avait des facilités. Elle tenta alors de se trouver des excuses, accusant tour à tour la chaleur, la fatigue, le professeur... Après s'être encore trompée dans la récitation de sa recette, elle envoya le livre au sol, désemparée, après avoir vérifié qu'il ne risquait pas de s'abimer.

Elle a ensuite levé la tête et a étouffé un hoquet de surprise : deux magnifiques yeux bleus la regardaient fixement.