La tête bien calée sur son coude, son carnet ouvert, bien cachée derrière une pile de livres sélectionnés de manière peu orthodoxe. Elle avait décidé de choisir tous les livres dont le titre possédait le mot hibou ou oiseau. Elle avait fait une pile et l’avait posé sans plus y toucher sur la table. Elle crayonnait sur son carnet ouvert à la première page. Sous les traits qui prenaient place sur la page blanche, se dessinait le hibou de son père, Buho. Elle avait apporté des pinceaux et une petite palette d’aquarelle qui avait vécu bien des choses. L’étiquette qui entourait l’étuit à la base n’était plus, les coins étaient colorés par des pigments que la fillette ne parvenait plus à enlever et sa couleur blanche avait quelque peu viré au blanc cassé à force de l’utiliser. Mais elle n’avait rien de mieux pour faire des couleurs à Poudlard.

Elle leva les yeux vers sa pile de livre qui lui paraissait un montagne infranchissable vu de là, avachie sur le bois ciré. Elle souffla sur une mèche qui lui barrait le visage, une nouvelle qui c’était échappée de son chignon. Elle n’avait pas fait grand-chose de sa journée pourtant libre et elle espérait que ce rendez-vous avec Deryn illumine cette journée. Mais elle ne doutait pas du capital amusement de cette activité. Ses yeux remontèrent alors le long de la pile de livres. *Quoi que…*

Aliénor fit la moue avant de soupirer bruyamment ce qui lui valut un « chut » qui venait de l’autre côté de la grande bibliothèque.

-Grand-mère.

Murmura-t-elle pour elle-même. Elle n’avait pas vraiment l’habitude de venir ici et les gens qui réagissaient comme ça au moindre bruit ne lui donnaient pas du tout envie de rester. Encore plus si le bibliothécaire venait dans le coin, là, c’était fini elle décampait aussi vite qu’un vif d’or ! Elle ne savait pas si elle allait être d’une grande aide, mais bon elle était là et il était bientôt l’heure, Deryn allait débarquer d’une minute à l’autre, si elle était à l’heure bien entendu. Mais Aliénor n’avait pas vraiment de doutes sur ça, elle avait l’air d’une fille bien élevée, du moins de ce qu’elle en avait vu à la volière et en salle commune quand elles ont encore abordé leur nouveau projet. C’était certainement l’enthousiasme de la fillette qui avait poussé Aliénor à être ici en avance aujourd’hui.

Elle reposa la mine de son crayon sur le papier pour continuer son esquisse, dessiner les ombres et chaque plume, ça risquait d’être long, mais dessiner était loin d’être une corvée pour la fillette. Cette situation lui rappelait un peu quand elle avait passé du temps ici pour étudier les dragons pour leur projet avec son ancien ami. *Non ! On y pense surtout pas !*

Les traits de son crayon se firent un instant plus insistant, mais elle arrêta vite d’appuyer comme une folle sur sa mine. Ce crayon avait bien plus de valeur que ses états d’âme vis-à-vis de ses quelques amitiés perdues Poudlariennes.

A seize heure pétantes, Deryn fit son entrée dans la bibliothèque. En ce dimanche froid et humide, elle s'était habillée confortablement en vue de passer du temps plus ou moins immobile plongée dans les livres; un vieux jean qu'elle portait depuis l'été passé, une bonne paire de chaussette en laine et son pull de Noël. Ce n'était plus vraiment la saison mais il était vraiment pratique avec sa grande poche sur le devant pour glisser tout son bazar et sa capuche pour se protéger des courants d'air frais. Elle s'était tressée les cheveux avant de partir mais quelques mèches sortaient déjà par-ci par là.

Comme à son habitude, Deryn était de bonne humeur. Elle aimait profiter de chaque chose qu'elle faisait et se délectait des sensations qu'elle rencontrait au fil de ses journées. La bibliothèque c'était une odeur, celle des livres avec … un peu de poussière mais aussi des bruits, le murmure des étudiants parfois ponctués par quelques rires étouffés et le bruit des pages qui se tournaient, des crayons qui grattaient le papier. Si elle préférait courir à travers champ, elle n'en appréciait pas moins ces petits plaisirs d'intérieur. C'est donc avec un grand sourire qu'elle se mit à la recherche de sa nouvelle camarade d'enquête ornithologique, Alienor.

Après avoir piétiné un peu près de l'entrée, elle repéra la troisième année plus au fond et se dépêcha de la rejoindre en sautillant presque pour la saluer gaiement. Recevant des ronchonnements des tables alentours elle baissa d'un ton et se mit à chuchoter en s'installant à côté d'elle.

"Comment vas-tu ? Tu es déjà au travail ?"

Avisant la pile de livres elle se mit à rire tout bas.

"Et bien… C'est pour nous faire un mur de protection tout ça ? On pourrait les disposer pour laisser des petites meurtrières…"

Aussitôt dit, aussitôt fait, elle disposa les livres pour former un petit mur en laissant des petits espaces pour surveiller discrètement toute la bibliothèque. Elle avaient maintenant l'impression d'être sur un chemin de ronde en papier relié. Une phrase d'un de ses professeurs lui revint en tête : le savoir vous protégera… Peut être qu'il faudrait envisager de construire une muraille de livre autour de Poudlard. Trêve de plaisanteries ! Balayant ses idées loufoques d'un revers de main, la première année leva les yeux au ciel face à ses bêtises et se saisit d'un des livres. Pour être plus à l'aise, elle ôta discrètement ses chaussures et replia ses jambes en tailleur sur sa chaise Bon cherchons donc la tête en coeur de ce rapace... Alienor a dit hier "chouette effraye" ou un truc du genre. Avant de commencer à feuilleter son livre, elle s'autorisa à regarder le dessin de sa camarade.

"Il est joli ce hibou. Tu le dessines comme si tu le connaissais par cœur. Tu le connais vraiment ou tu improvises ?"

La fillette était perdue entre ses pensées et l’hypnotisant tracé de son crayon sur le papier de son carnet. Elle sursauta quand la voix de Deryn lui parut plus forte que ce qu’elle aurait pu l’imaginer. Aliénor leva les yeux vers sa cadette et arqua un sourcil quand elle lui demanda si elle avait commencé le travail. Les yeux de la fillette se posèrent sur la pile de livre avant que sa camarade ne commence à les réorganiser à la manière d’un rempart fortifié. Aliénor s’amusa de ce geste et la regarda faire en souriant lui tendant parfois les livres qu’elle laissait derrière elle. Réaliser cette petite muraille avait eu pour effet de réveiller la petite Delphillia et de la sortir de sa sorte de léthargie dans laquelle elle plongeait quand elle se concentrait sur ses dessins.

Une fois le mur de livres terminé, Aliénor s’abaissa pour regarder au travers d’un des trous l’élève qui était dans la rangée d’en face, ce n’était pas une mauvaise idée et c’était bine plus amusant que d’empiler ses livres de manière conventionnelle. Deryn attrapa un livre avant de questionner Aliénor sur son dessin. La troisième année regarda son œuvre qui n’était pas si mal à ses yeux et son sourire diminua tout en restant tout de même sur son visage.

-C’est Buho, le hibou de mon père. Buho ça veut dire hibou en espagnol.

Elle ne le reverrait pas d’aussi tôt avec tout ce qu’il se passait dans le monde extérieur. Ca attristait un peu la fillette mais au moins maintenant elle savait que ses parents n’étaient plus à l’autre bout du continent. Ils allaient bien, ils étaient à Bristol, c’était parfait.

-Je ne sais même pas de quelle espèce de hibou il est, un truc basique je pense, il est passe partout ce hibou, un peu comme les Delphillia, on nous remarque pas toujours au premier abord mais on ressent notre absence.

Aliénor envoya un sourire à Deryn avant de regarder le titre du livre de la fillette.

-J’ai pris un peu de tout ce qui traitait d’oiseau hein… Je ne suis pas très douée pour les recherches à la bibliothèque. Tu cherches pour la chouette de la dernière fois ? Effraie ?

Elle posa son crayon entre les pages de son carnet avant d’attraper un des livres du dessus de la muraille. Ce serait tellement simple s’il y avait une formule magique pour chercher dans un livre, parce que bon, c’est un peu barbant. Aliénor survola le sommaire cherchant le moindre rapprochement avec les chouettes effraies, elle était quasi certaine d'elle pour le coup, pour une fois qu'elle connaissait une race...

Deryn avait plongé dans son livre à la recherche de son précieux rapace avec sa tête en forme de cœur mais la réponse d'Aliénor la fit sourire et ressortir momentanément de son volume.

"Ce serait rigolo ça aussi… Savoir dire hibou ou chouette dans toutes les langues… Si j'ai une chouette, je l'appellerai "Kaouenn" tiens. Ca veut dire chouette en breton. Mon oncle m'a appris à parler un peu en breton en même temps qu'à mes cousines."

Elle avait trouvé la page qui l'intéressait, la chouette effraie. Mais la phrase de sa camarade la fit abandonner son ouvrage une deuxième fois. Elle regarda Aliénor surprise tandis qu'elle lui expliquait avoir pris tous les livres parlant d'oiseaux. Ca expliquait la taille de leur muraille mais ce n'est pas ce qui avait fait réagir Deryn. Aliénor avait commencé à feuilleter un livre quand la première année repris la parole.

"On ne vous remarque pas… ça dépend où ! Sur le terrain l'autre jour, on ne voyait que toi… Et l'attrapeur aussi… Enfin… surtout quand il a attrapé le vif d'or. Votre gardien aussi il est fort... Enfin... en fait vous êtes tous impressionnants. Mais toi on ne pouvait te rater en tout cas, on avait l'impression que tu étais à tous les bouts du terrain en même temps."

Elle reprit sa lecture en cherchant crayons et carnet pour prendre des notes tout en murmurant ce qu'elle lisait : L'effraie des clochers aussi appelée Dame Blanche… Tu m'étonnes, elle m'a foutu une de ces trouilles l'autre jour… Son nom vient du mot latin "ossifraga" signifiant "briseur d'os"... Hum, très rassurant… Devient effraie avec l'influence du verbe "effrayer"... Oui, c'est assez cohérent…

Deryn cessa de parler et se mit à écrire les informations qu'elle estimait nécessaire pour reconnaître ou s'occuper de l'oiseau.

L'Effraie des clochers

La femelle (34 à 40 centimètres) est plus grande que le mâle (32 à 38 centimètres)
avec une envergure d'un mètre à un mètre dix pour les deux.
Cet oiseau possède un masque blanc en forme de cœur.
Le dessus du corps est gris cendré à brun jaune avec tes tâches blanchâtres bordées de noir.
L'iris de l'œil est noir.
Ces oiseaux se montrent peu en journée mais le peuvent.
Espérance de vie : 8 ans.
Son cri est un

"Un khrûh rauque et strident. Mais non c'est plutôt un…." Deryn s'arrêta, ferma les yeux un court instant pour réfléchir et commença à imiter le cri effrayant qui avait retentit à quelques mètres d'elle pendant les vacances. Le pauvre brun qui se trouvait assis en face recommença à râler. Visiblement les cris de chouette Effraie de l'aidait pas dans ses devoirs. Deryn cessa aussitôt de chuinter et observa le garçon par les meurtrières en haussant les épaules.

"C'est un ronchon celui-là non ? Je pense qu'on devrait un jour, enfin plutôt une nuit aller à la volière pour écouter leur cri et savoir les imiter. Ce serait classe de parler "hibou", le hululangue ?"

La fillette releva les yeux de son livre en souriant à la remarque de sa cadette elle avait visiblement, tout comme elle, cette capacité à se déconcentrer en peu de temps. Cela avait causé quelques problèmes dans la scolarité mais pas plus que son incapacité à gérer ses sentiments. Mais elle y travaillait et elle était en bonne voie. Mais jamais, au grand jamais elle n’aurait le courage d’apprendre le mot hibou dans tout un tas de langues, déjà qu’elle avait eu du mal avec l’espagnol, encore aujourd’hui d’ailleurs, elle ne le pratiquait presque plus.

-Breton…

Aliénor n’était pas vraiment férue de géographie, elle savait que c’était en France mais de là à ce qu’il y ait une langue ? Elle haussa les épaules en levant les yeux au ciel avant que ceux-ci ne retombent sur le papier du livre qui trainait devant elle et qui n’avait visiblement rien à voir avec les hiboux ou oiseaux nocturnes en tout genre. Elle le referma lasse et reprit son crayon en main pour jouer avec.

Le compliment de Deryn ne fit que confirmer ce qu’avait dit Aliénor. Sur le terrain ce n’était pas elle qui mettait des buts ou attrapait des balles, elle n’avait aucune influence sur les points, tout ce qu’elle faisait c’était agir dans l’ombre pour aider au mieux son équipe. Les aider à marquer des points et donc gagner. Elle n’attrapait pas le vif d’or et ça lui allait très bien. Ce rôle de batteur qui n’était peut-être pas celui de prédilection de la fillette lui allait finalement très bien. Elle protégeait ses coéquipiers et c’est tout ce qui importait pour elle.

-Merci, c’est vrai que cette année on se débrouille bien.

Elle ne voulait pas tellement plus s’engager. Le Quidditch était un jeu complexe et on n’était jamais à l’abris d’un retournement de situation. D’autant plus qu’il y avait de très bons joueurs dans les autres équipes, les Hel’s n’étaient pas au bout de leurs peines.

Deryn reprit visiblement sa lecture et les quelques images que vit passer Aliénor semblaient être de bon augure. Des oiseaux, des hiboux, des chouettes. Deryn s’arrêta à la page de la chouette Effraie. Aliénor approcha sa chaise afin de mieux voir l’illustration et commença à dessiner sur son carnet la chouette. Ses grands yeux noirs, sa tête si particulière, ses traits lisses et si joliment arrondis… La camarade d’Aliénor semblait prendre des notes quand elle s’arrêta. La petite Delphillia continua son croquis écoutant d’une oreille distraite ce que disait Deryn. Mais elle releva la tête vivement quand elle commença à imiter le cri d’une chouette. Aliénor émit un petit rire en se cachant derrière leur montagne de livres alors que le brun de l’allée d’en face commençait à râler.

Soudain une idée arriva dans l’esprit d’Aliénor alors qu’elle détaillait l’image de la chouette Effraie. Elle l’avait là sous toutes les coutures, ce n’était pas bien complexe de s’imaginer l’oiseau en vrai devant elle. Après tout Aliénor réussissait sans peine avec le corbeau parce qu’elle le dessinait sans cesse. Un sourire en coin apparut sur le visage d’Aliénor et elle chercha les yeux de sa partenaire de hibou. Elle avait une idée lumineuse, mais ça pouvait faire mal si elles se faisaient chopper. Mais peu importe, Aliénor commençait à avoir bien trop l’habitude de passer outre toutes les règles.

-Tu veux lui donner une bonne raison de râler et en même temps étudier les hiboux ? Regarde ça.

Aliénor ferma les yeux comme lui avait appris Miss Field pour canaliser ses émotions et ne pas se laisser aller dans l’excitation de ce qu’elle allait entreprendre sans même avoir l’accord de sa camarade. Une fois plus calme, elle encra son regard sur le livre inutile qu’elle avait devant elle. Se remémorant ses cours de première année et les quelques fois où elle avait réussi ce sortilège, elle sortit sa baguette avant de prononcer :

-Avifors.

Le livre changea doucement de forme puis de texture, des plumes claires prirent la place de la couverture qui s’élevait doucement. Le tout s’arrondit pour donner vie à une chouette effraie.

Aliénor ne put retenir un grand sourire de satisfaction en regardant la chouette un peu perdue qui baladait ses grands yeux noirs sur les deux fillettes puis les livres derrière elle. La petite Delphillia retenu un cri de joie en observant l’animal vivant devant elles. Elle approcha doucement une main et la chouette passa sa tête avec envie sous les doigts de la troisième année.

-Regarde, elle est en vrai, c’est trop bien ! Caresse-là.

Son chuchotement en était à peine un tant elle était ravie de son idée. Idée qui pourrait vraiment leur attirer des soucis, mais peu importe, plus rien n’avait d’importance mis à part cette chouette.

Deryn était bouche bée. Aliénor venait de faire apparaître une chouette, une vraie chouette effraie sur la table de la bibliothèque. La première année ne pu s'empêcher de commencer à pouffer tout bas. Cette situation était des plus improbables. Elle était en chaussette, cachée derrière une muraille de livres avec une chouette effraie... Si Monsieur Aldermaston arrivait, ça n'allait pas du tout lui plaire, mais alors pas du tout. Mais sa camarade maîtrisait plus ou moins l'animal non ? C'était bien le principe d'Avifors, on peut contrôler l'oiseau qu'on fait apparaître. Au pire on lancerait le contre-sort. C'était quoi déjà le contre-sort... Probablement Reparifragex.

Deryn posa doucement livre, carnet et plume. Elle n'arrivait plus à détacher les yeux de l'oiseau qui se trouvait devant elle. Ce rapace était vraiment beau. Elle retrouvait là le regard qui l'avait fasciner pendant les vacances de Noël si ce n'est que ce spécimen là semblait beaucoup moins agressif pour le moment. Elle glissa la main dans sa poche. En bonne Poufsouffle, elle avait prévu quelques réserves pour l'après-midi bibliothèque. Elle sortit un cookie, le cassa en deux et le tendit doucement à la chouette qui inclina bizarrement la tête sur le côté en claquant du bec sur le biscuit.

"Est ce que je peux essayer aussi tu crois ?"

Elle déchira une page de son carnet, sortit sa baguette et observa l'oiseau qui se trouvait devant elle. La petite brune essayait de se rappeler les conseils de son professeur de métamorphose lors de leur dernier cours : visualiser l'aspect avec précision.

"Avifors."

La feuille se transforma en deux mini chouettes à peine plus grandes qu'une main.

"Ah oui... Il faut aussi penser à la taille et au nombre... Je me suis déjà faite avoir en cours l'autre jour."

Elles n'étaient pas aussi réalistes que celle d'Aliénor, loin de là mais Deryn les trouvaient adorables avec leurs petites tâches en forme de "L" sur les ailes. Les deux petits volatiles se mirent à voleter autour de leur grande sœur qui les observaient en réalisant des tours complets de la tête. Deryn ne put s'empêcher de rire tout bas devant cette scène.

"Je crois que je n'avais jamais fait de recherches aussi passionnantes dans cet endroit. Mais, heureusement que tu as pris la moitié des livres de la bibliothèque et la table la plus au fond de la salle. "

Elle tendit la main vers un des petits oiseaux et l'attrapa délicatement au vol. Il tenait dans la paume de sa main. En souriant elle lui caressa le ventre. Ses petites plumes de papier était toutes douces. C'est à ce moment que la grande chouette se mit à imiter Deryn. Enfin non, elle se mit à chuinter, produisant approximativement les mêmes bruits étranges que la première années quelques minutes plus tôt.

A la surprise de la fillette, qui avait un certain doute, Deryn ne s’offusqua pas de la voir métamorphoser un live en hibou au beau milieu de la bibliothèque. Décidément cette fille était une perle rare, pas peur de se faire prendre, prête à tout pour passer un bon moment et découvrir des choses. Aliénor gardait tout de même une pensée pour la chouette qu’elle avait fait apparaitre. Si elle perdait totalement sa concentration elle risquait de perdre le contrôle de l’oiseau. Et ce n’était pas vraiment une bonne idée vu le lieu et les diverses possibilités que pouvait avoir le volatile pour se planquer en hauteur et qu’Aliénor ne puisse plus rien faire.

Elle fut stupéfaite de voir sa cadette réussir ce sortilège du premier coup même si ses oiseaux étaient miniatures. La troisième année sourit à Deryn en regardant les petits piafs qui voletaient autour de sa chouette grandeur nature. Décidément, Aliénor n’aurait jamais pensé pouvoir faire ce genre de chose dans une bibliothèque. Deryn salua l’initiative de la fillette qui avait prit une tonne de livres et d’avoir bien choisi sa table. Quand d’un coup, une voix s’éleva de l’autre bout de la salle, enfin non, de l’autre bout de l’allée plutôt.

-Hey vous pouvez pas vous la fermer un peu?!

Aliénor fronça les sourcils et se leva d’un coup sec ce qui fit sursauter sa chouette, mais peu importe. Comment il osait leur parler comme ça, il était obligé de les alpaguer comme de vulgaires animaux ? Même si elle faisait des efforts, la petite Delphillia restait une personne sanguine, la réaction ne pouvait donc pas se faire attendre et elle ne pouvait pas être des plus cordiales. Mais c’était lui qui avait commencé !

-Qu’es t’as toi, laisse-nous bosser en paix !

La chouette qu’avait fait apparaitre la fillette hulula de plus belle ce qui fit tomber le regard de celle-ci sur l’oiseau, le fusillant du regard. Aliénor ne ce n’était absolument pas rendu compte de la force de sa voix quia avait certainement raisonné dans toute la bibliothèque. Seule sa chouette lui fit prendre conscience que le taux de décibels de la pièce avait augmenté en flèche. Et là, silence, comme le calme avant la tempête. Une goute de sueur froide coula le long de la colonne vertébrale de la fillette, elle sentait que quelque chose arrivait.

-Deryn, je ne le sens pas…

Crier dans la bibliothèque était certainement le meilleur moyen pour attirer ce fichu bibliothécaire. Aliénor était figée debout dans l’attente de ce qu’il allait se passait, attente qui dans son esprit durait des heures mais qui en vrai ne représentait qu’une faible poignée de secondes. De longues secondes, mais des secondes.

Deryn sursauta quand sa camarade se dressa sur ses pieds.

Qu’es t’as toi, laisse-nous bosser en paix !

Deryn pouffa malgré elle. Etaient-elles réellement en train de "bosser"... Après tout, oui, parfois le travail et le loisir peuvent être très proches. Disons qu'aujourd'hui, elles alliaient travail de recherche en créatures magiques et entrainement pratique à la métamorphose. C'était un sacré programme pour un dimanche après-midi de janvier.

Malheureusement, Deryn n'était pas la seule à avoir sursauté. Les deux petites chouettes, totalement paniquées venaient de prendre leur envol vers le haut d'un rayonnage. Oups… Le brun d'en face suivit les oiseaux avec de grands yeux avant de redescendre son regard vers la table des filles. Qu'avait-il dit déjà pendant le cours… Les métamorphoses sont temporaires et… Le cri du grand modèle empli le silence soudain de la bibliothèque.

Deryn, je ne le sens pas…

Ah... Faire des bêtises (si on considère que réaliser des travaux pratiques dans une bibliothèque est une bêtise) Deryn était toujours partante mais se faire pincer... Le moins souvent possible serait le mieux. C'était quoi d'ailleurs les punitions à Poudlard ? La première année n'en avait aucune idée. Vite il fallait agir. La petite brune savait qu'en génréal, dans ces moment là, elle était plutôt efficace. Se concentrer et pârer au plus urgent. Surement une habitude prise en aidant ses parents avec des animaux parfois plus que récalcitrants. Elle se redressa pour essayer de repérer ses oiseaux mais croisa seulement le regard mauvais de leur voisin d'en face qui se levait et prenait la direction de l'accueil avec un sourire sur les lèvres.

"Zut, zut, zut..."

Elle avait toujours sa baguette en main mais ses petits volatiles étaient devenus invisibles. Son regard tomba sur la grande chouette toujours posée sur la table à côté d'elle. Aliénor semblait guetter l'arrivée du responsable des lieux. Deryn pointa sa baguette sur le bel oiseau.

"Désolée mais là, ça devient urgent. On se reverra peut être."

Il y avait deux sortilèges qu'elle maîtrisait parfaitement, Reparo et Reparifragex. Il faut dire qu'elle avait eu l'occasion de s'entrainer plus d'une fois. Elle se remémora la couverture en cuir verte que tenait Aliénor dans ses mains quelques instants plus tôt.

"Reparifragex"

L'oiseau disparut. Deryn, à la fois déçue et ravie de ce spectacle se saisit de livre qui venait de refaire son apparition. Il y avait de drôles de plumes comme incrustées sur la quatrième de couverture. Elle souleva la pile et le glissa en plein milieu de la muraille. Aliénor, pourrait surement arranger ça après, pour le moment, le maximum de preuves devait disparaître. Ses oisillons étant toujours hors de vue mais à priori bien silencieux quelques part, elle se rassit priant pour que ses créations demeurent bien cachés et saisit sa voisine par la manche en chuchotant.

"Assieds-toi et dessine. Tu as déjà fait du théâtre ? Parce que là je crois qu'il va falloir être bonne actrice."

Elle se remit à prendre des notes comme si de rien n'était en glissant à nouveau ses pieds dans ses chaussures au cas où une évacuation rapide soit nécessaire.

Tous les sens en alerte, le pouls qui atteignait des sommets, quelques perles de sueur sur ses tempes. La petite Delphillia avait déjà été bien plus reluisante. Elle bénissait Deryn de retransformer son hibou si rapidement en livre, même si quelques plumes se battaient encore entre les pages. Mais c’était assez discret. A demi-assise sur sa chaise, les yeux de la fillette fixait le bout de l’allée, les mains posées sur la table, le temps c’était comme arrêtait alors qu’un silence soudain pesait sur la bibliothèque. Aliénor regarda les livres disposés devant elles. Il y en avait trop, elle ne pourrait pas les ranger assez vite si elles voulaient partir c’était maintenant.

Des pas brisèrent le silence et d’un coup, le cerveau de la fillette se remit en marche. Si elles restaient là, elles allaient se faire avoir et elles risquaient gros. Aliénor n’avait pas vraiment envie de se faire prendre cette fois. Elle jeta un regard vers sa camarade avant de prendre une grande inspiration.

-On part.

Aliénor se leva définitivement et contourna la table pour attraper son sac puis, après avoir vérifié que la première année ait elle aussi récupéré ses affaires elle lui fit signe de la suivre. Aliénor avança jusqu’au bout de l’allée et jeta un œil à ce qu’il se passait dans l’allée principale. Elle vit le bibliothécaire avancer vers elles. Le cœur de la fillette s’emballa de plus belle quand soudain, quelques allées plus loin, on entendit un léger bruissement d’ailes puis un livre tomber suivit d’un hululement stridant. Le bibliothécaire tourna dans l’allée, c’était le moment. La petite Delphillia attrape le poignet de sa camarade.

-Cours et t’arrête pas.

Surtout, qu’elle ne s’arrête pas. Elle partit en trombe, courant de toutes ses forces en direction des portes de la salle. Elles pouvaient y arriver, la troisième année en était certaine. L’espoir pouvait la porter dans toutes ses conneries et la plupart du temps récemment ça marchait. L’adrénaline, sa condition de sportive, ses grandes jambes, un peu de tout cela mais Aliénor doubla sans difficulté Deryn, elle priait pour que la fillette soit une sportive aussi, au moins un minimum, que le bibliothécaire ne les rattrape pas.

Aliénor arriva aux portes qu’elle ouvrit à la volée avant de regarder où en était Deryn. Elle maintenait la porte ouverte pour que sa cadette puisse passer plus facilement. Le bibliothécaire les avait certainement entendu courir, tout le but était qu’il ne les reconnaisse pas. Après tout, de loin, en courant, elles étaient deux brunes tout ce qu’il y a de plus banal. Quelle chance d’avoir u physique passe-partout parfois.

Aliénor indiquât à sa camarade d’accélérer d’un geste de main, elle ne devait pas relâcher ses efforts maintenant, elle était si près du but. Une fois que la fillette passa la porte, Aliénor laissa le bois user de son poids pour se refermer. Aliénor attrapa l’épaule de sa camarade.

-Continue.

Et elle se remis à courir, moins rapidement certes, mais son pas était toujours soutenu. Une fois dans les escaliers, Aliénor emprunta le premier venu, puis le second qui se mit à pivoter sur lui-même. Elle s’engouffra dans un couloir au hasard et repris son souffle une fois à l’abris. Quand Deryn l’eut rejointe, elle la laissa se reprendre un moment avant de lui sourire de toutes ses dents.

-Bravo, je crois qu’on est traquilles.

Elle tendit sa main pour que Deryn puisse taper dedans en signe de victoire, victoire face à ce ronchon de bibliothécaire et de se crétin de l’allée d’en face. Certainement que si on lui demandait quelque chose il les dénoncerait, mais peu importe, là elles savouraient leur faible victoire.

Deryn avait réellement repris son travail comme si de rien n'était. C'était un peu une spécialité chez elle de passer du coq à l'âne. Elle aurait bien relacer ses chaussures mais ne souhaitait rien faire de suspect. Des bruits de pas se firent entendre, quelqu'un allait arriver, plus de doute possible.

-On part.

Quoi ? Là maintenant ? Mais… Aliénor avait déjà rassembler ses affaires. Deryn bondit sur ses pieds et fourra carnet et crayons pèle mêle dans son sac. Tandis que la troisième année se dirigeait vers le bout du rayonnage, Deryn prit une seconde pour glisser ses lacets dans ses chaussures, pas le temps de faire un nœud. Un bruit d'ailes et un cri retentit dans la bibliothèque. Oups… Les mini chouettes avaient dû atterrir quelques part. Elle sentit la main de sa camarade se fermer sur son poignet puis la relâcher en lançant.

-Cours et t’arrête pas.

Aliénor partie en trombe. Deryn allait s'élancer à sa suite mais une tour du château de livres s'écroula devant elle, propulsée par un livre vert tentant de déployer ses ailes. Mince alors c'était vraiment n'importe quoi cette histoire. Elle se rendit compte qu'Aliénor avait déjà disparu. Elle attrapa le bouquin avant qu'il ne parvienne à se dégager totalement. Au point où elle en était, autant l'embarquer, ça ferait une trace en moins de leur méfait. D'un bon elle enjamba les livres et s'élança à la suite de la brune.

La première année dépassa à toute allure un rayonnage apercevant deux filles et un bibliothécaire les bras en l'air cherchant à capturer une petite boule de plumes. Elle accéléra encore apercevant Aliénor qui passait la porte. Elle franchit à son tour l'entrée à toute vitesse et continua à courir dans le couloir. Les deux filles ralentirent doucement l'allure continuant de trotter côté à côte jusqu'à s'estimer hors d'atteinte.

-Bravo, je crois qu’on est tranquille.

Deryn était à bout de souffle, les joues en feu. Elle posa ses mains sur ses cuisses pour récupérer, pliée en deux. Haletant elle déclara en montrant le livre qu'elle tenait serré contre elle.

- Il essayait de... s'échapper... Je crois... que tu devrais ...lui rendre sa forme initiale...

Elle tapa ensuite la main que lui tendait sa camarade de lecture avant de commencer à rire de bon cœur.

- Je crois, enfin, je suis sûre que je n'avais jamais fait des recherches aussi actives à la bibliothèque. On y retourne quand ?