Irisia était pensive… Après avoir discuté avec l’un de ses professeurs, Rhys Saunders, la rousse réapprenait à croire en elle et à ses capacités. Son assiduité aux cours et aux rendus des devoirs revenait au beau fixe, et sa colère avait tendance à disparaître plus facilement. Ce n’était pas ses comparses qui iraient s’en plaindre : l’irlandaise avait tendance à être imbuvable quand cela n’allait pas dans sa petite tête. Mais là, pour le coup, ça allait mieux… Un peu, certes, mais mieux quand même, ce qui rendait les choses supportables pour tout le monde.

Les mains dans les poches, le regard perdu vers le Lac du Parc, Irisia inspira profondément avant de marcher vers le terrain d’entraînement, jouant avec le petit jouet qui reposait au fond de sa poche. Si elle était moins effrayée et fatiguée de ses cauchemars, la rousse avait quand même des problèmes de confiance en elle et plus le temps passait, plus elle appréhendait le match qui arrivait à grande vitesse. Serait-elle une bonne équipière ? Le précédent match lui avait servi de leçon, serait-elle meilleure dans celui-là ? Serait-elle digne de son équipe, de sa maison ? Que de questions, que d’incertitudes, que d’angoisse…

Foulant l’herbe gelée du terrain d’entraînement, Irisia regarda une nouvelle fois les anneaux en s’adossant contre ceux d’en face, se mordillant les lèvres en fronçant les sourcils. Une fâcheuse habitude qui était née en elle à la suite de cette défaite cuisante… S’asseoir là et regarder les anneaux, parfois pleurer et crier, souvent silencieuse et déprimée, toujours quand il n’y avait personne pour l’observer… Les poings serrés dans ses poches, son écharpe remontée jusqu’au nez, la rousse soupira une nouvelle en remontant ses jambes pour se tenir chaud. Elle n’avait pas envie d’aller dans les vestiaires ou la réserve des balais, elle ne voulait pas rentrer non plus ceci dit… Bien qu’étant samedi et qu’ils n’avaient aucune charge ou obligation, il y avait un peu trop d’élève absolument partout à son goût. Alors qu’ici, elle était tranquille…

Sortant son jouet, elle déplia ses doigts pour le laisser apparaître alors que son regard se plissa, ses iris refléta le doré du petit vif d’or. C’était un cadeau de Grand-Père Eden. Oui c’était le modèle enfant, celui qui ne s’éloignait pas à plus de deux mètres de l’empreinte magique à laquelle il était lié, celui qui ne dépassait pas un mètre de haut et qui volait trois quart moins vite que l’original en match, mais ça restait un vif d’or quand même. Irisia pencha la tête en regardant les ailes se déplier et s’agiter avant de faire s’élever l’objet au-dessus de sa main… On avait presque l’impression que c’était un être vivant heureux de sortir pour une promenade tiens !

Irisia soupira lourdement en le regardant voleter autour d’elle, l’effleurant du bout des doigts. Une vision qui lui rappelait les nombreuses tentatives avortées lors de son premier match… Une larme roula sur sa joue alors qu’elle renifla peu gracieusement, faisant rebondir le jouet sur le bout de son doigt.

Le cœur silencieux alors qu’elle était recroquevillée au pied d’un anneau, Irisia essayait de ne pas réfléchir alors qu’elle s’amusait avec un jouet que Grand-Père Eden lui avait offert. Mais les choses étaient pourtant là : malgré le temps, la patience de ses amis, la compréhension de son professeur de vol, la rousse ressentait toujours une incertitude et un doute qui lui rongeait les entrailles. Elle avait reprit son activité scolaire mais quand elle avait son balai en main, l’angoisse l’assaillait et distillait son poison dans le creux de son oreille, se transformant en une brume glacée qui lui pétrifiait l’échine. Elle n’était peut-être finalement pas si sûr que ça d’être un bon élément pour son équipe… Il suffisait de voir le dernier match pour le comprendre de toute façon…

Tout à ses pensées, une larme roulant sur sa joue alors que ses yeux brillaient de celles qu’elle peinait à garder en elle, Irisia se tourna vers la source du bruit qui arrivait vers elle : quelqu’un marchait vers elle, écrasant l’herbe gelée.

« Que... »

Une voix douce et hésitante qui l’interpellait et s’excusait. Reniflant en secouant son visage, elle frotta ses mains sur ses yeux pour le regarder, rougissant de honte alors qu’elle reconnut la personne qui se tenait face à elle.

« Non c’est moi… T-tu t’entraînes c’est ça ? »

Celo Venesi, attrapeur des Serdaigles, un joueur de Quidditch qu’elle trouvait beau, encore plus quand il était dans les airs, très impressionnée par ses prouesses. Son idole d’école de Quidditch… Et lui qui devait rien comprendre et qui la voyait morveuse et reniflante… Elle était ridicule.

« J-je… Euh… Je réfléchissais aux matchs et euh j’ai pas fait attention… Je savais pas que le terrain était réservé... »

Se mordant les lèvres, elle se frotta les mains sur ses genoux avant de tendre la main pour attraper son Vif, un bref sourire hésitant aux lèvres.

« Je suis Irisia MacLynn de Serpentard et tu es Celo Venesi de Serdaigle. J’ai vu ton match… Je suis très impressionnée, j’ai beaucoup de respect de toi… On peut dire que je suis fan de toi… »

Irisia rit doucement en tirant une de ses boucles, sincère mais gênée de s’être fait découvert dans cet état, honteuse même et toujours défaite par la tournure de ses pensées.

« Je… Je peux te regarder t’entraîner ? Je te promets de me faire toute petite… Tu ne remarqueras même pas que je suis là... »

Sa voix mourant sur ses lèvres fines et pincées, Irisia avait les yeux baissées sur ses pieds, se dandinant, mal à l’aise et toujours démoralisée. Peut-être qu’en le regardant s’entraîner elle deviendrait meilleure… Pourvu qu’il lui dise oui...

Elle qui pensait que personne ne viendrait avec un froid piquant pareil, la voilà devant son modèle de Quidditch, reniflant peu gracieusement et les yeux rouge et gonflés par ses larmes… Vous parlez d’une bonne impression vous après ! Il était donc venu s’entraîner alors mais sans réserver le terrain, ce qui expliquait pourquoi il était devant elle maintenant… Irisia l’aimait bien, il semblait vraiment drôle et malin. Un vague sourire aux lèvres alors qu’il venait de lui répondre, elle enroula ses doigts autour de son Vif qu’elle enfouit dans la poche de son manteau, lui parlant de l’admiration sincère qu’elle avait pour lui.

« Je suis réputée pour mes bêtises alors question bon comportement… »

Elle laissa un petit rire perler sur ses lèvres alors qu’elle essuyait les dernières larmes de ses yeux clairs.

« Tu as attrapé beaucoup de viffet en plus du vif d’or et tu es vraiment très agile sur un balai, une vraie flèche. Tu es un très bon attrapeur et j’aimerais beaucoup avoir autant de capacité que toi... »

Irisia sourit doucement alors qu’il rougissait à ses compliments, continuant de tortiller distraitement une boucle. Il était vraiment mignon et gentil… Mais elle avait vraiment été impressionnée par son match contre les poufsouffles et elle aurait aimé être aussi prodigieuse que lui pour le coup contre les gryffondors…

S’il était habillé c’était qu’il allait s’entraîner. Bien. Cherchant un peu de courage malgré qu’elle serrait les poings en fixant ses pieds, la rousse osa lui demander s’il accepterait qu’elle reste pour le regarder jouer, croisant les doigts et les orteils pour qu’il accepte. Peut-être apprendrait-elle de lui, peut-être serait-elle meilleur quand elle verrait un vrai attrapeur jouer ?

« Oui j’aimerais le regarder… S’il te plaît... »

Il avait l’air hésitant et pensif… En même temps, s’il refusait elle ne pouvait que le comprendre : le prochain match des serpentards était contre les serdaigles donc d’un point de vue stratégie et secret, ce n’était peut-être pas adéquat. Et sa décision la fit soupirer doucement en baissant les épaules : il ne voulait pas qu’elle le regarde discrètement… Compréhensible mais elle aurait aimé qu’il dise le contraire… Se mordant les lèvres, déçue, elle serra son bras contre elle en hochant la tête.

« D’accord, j’ai compris… Quoi ?! »

Sursautant en se redressant, Irisia le fixa avec des yeux écarquillés par la surprise. Comment ça elle allait s’entraîner avec lui ?! Mais enfin elle était pas douée, une vraie catastrophe… Pourquoi voulait-il qu’elle s’entraîne avec lui ?! Le regard brillant d’incertitude, la rousse finit par accepter et hocha la tête : il souriait et semblait sincèrement ravis donc… Cela ne pouvait être qu’une bonne idée n’est-ce pas ? Esquissant quelques pas hésitant, l’irlandaise se retourna vers lui pour vérifier qu’il était bien sûr de lui avant de se rendre dans les vestiaires des verts. Puisqu’il était sûr de lui alors qu’elle se lance…

Inspirant profondément, elle retira son manteau et son uniforme pour enfiler sa tenue de Quidditch, serrant les lacets et ses protections avant d’enrouler ses mèches dans un chignon étroit et bien serrée pour que ses boucles ne la gênent pas durant cet entraînement improvisé. L’image que le miroir lui renvoyait l’angoissa un peu et ce ne fut pas mieux quand elle frôla le bois du manche de son balai. Mais Celo comptait sur elle après tout… Légèrement tremblante, elle l’empoigna et quitta les vestiaires pour le rejoindre sur le terrain, s’avançant vers lui avec un pâle sourire aux lèvres. Tout se passera bien… N’est-ce pas ?

Face à lui, l’observant, elle commença à s’échauffer aussi pour être prête, bougeant sa nuque pour espérer faire fuir son stress qui rôdait et grondait autour de son cœur.

Au chaud dans les vestiaires des Serpentards, Irisia réfléchissait. Bien qu’elle nouait avec soin ses protections, la rousse se demandait si c’était vraiment une bonne idée dans le fond… Elle avait été une telle catastrophe lors de son premier match qu’elle se demandait bien si Celo réalisait vraiment ce qu’il lui avait demandé… Oh bien sûr, elle travaillerait dur pour ne pas le décevoir et le faire regretter d’avoir proposé de s’entraîner ensemble. Mais quand même… Et ce qu’elle voyait dans le miroir ne l’encourageait aucunement… Sans oublier l’angoisse qui monta un peu plus alors que ses petits doigts blanc serraient le manche de son balai.

… Celo comptait sur elle. Elle ne le décevrait pas.

Déterminée malgré son stress, Irisia noua sa crinière avant de sortir des vestiaires, lui offrant un sourire hésitant en se rapprochant de lui pour commencer à faire des étirements et des échauffements, le copiant pour se rassurer. A milles lieux du trouble de l’autre attrapeur, la rousse se concentra et bougea sa nuque pour se délasser. Quand elle entendit sa voix s’adressant à elle, l’irlandaise leva ses yeux clairs vers lui avant de hocher la tête en lui souriant de nouveau.

« Vas-y. Je te rejoins très vite. »

Étirant son dos et ses hanches, elle échauffa son bassin et ses épaules, soufflant doucement pour reprendre son sang-froid et le contrôle de ses émotions, tâchant de remplacer l’angoisse par la détermination et le plaisir de voler en une si formidable compagnie. Quand elle se sentit suffisamment prête, Irisia enfourcha son balai et serra ses doigts autour de son balai, soupirant longuement en hésitant avant de décoller pour de bon. La rousse ne pouvait décemment pas renoncer et battre en retraite.

S’élançant avec force dans les airs, le vent sifflant dans ses oreilles alors qu’elle fermait les yeux en inspirant profondément, ses cuisses serrant le bois pour garder son équilibre. Cette sensation indescriptible lorsque l’on était en vol… Son cœur s’apaisa et un sourire commença à éclore sur son visage alors qu’elle se sentit peu à peu légère à mesure qu’elle montait dans les cieux. Le match avait été un désastre, le Quidditch n’était peut-être pas pour elle… Mais ce qu’elle ressentait ne la trompait pas : sa place était dans les airs.

Rouvrant les yeux, elle fixa ses améthystes vertes sur son partenaire du jour, le regard étincelant de reconnaissance et de joie alors que les brumes de l’angoisse se dissipèrent peu à peu.

« Je suis tout à toi Celo ! Que veux-tu qu’on fasse maintenant ? »

Frissonnante d’appréhension, Irisia se rapprocha de lui en se redressant sur son balai, étirant ses bras sans le quitter du regard, le souffle rapide.

Ce fut une séance vraiment merveilleuse et une telle symbiose entre eux deux! Le cœur apaisé et l'esprit dans les nuages, la rousse était triste de ne pas pouvoir davantage continuer avec lui... Mais on l'attendait en salle commune. Le remerciant abondamment une fois au sol, Irisia lui offrit un sourire éblouissant avant d'aller au vestiaire se changer pour rentrer au château.