[Début Avril 2044] 
Herschel n'a pas encore passé les sélections pour le Quidditch.

  Le professeur parle distinctement pour se faire entendre et comprendre par tous les élèves présents en ligne à sa droite comme à sa gauche. Si Herschel l'avouait, il dirait que ce professeur lui fait un peu peur, pas qu'il fasse terriblement peur, mais simplement parce que la prestance est presque écrasante et que les cicatrices sur son visage sont légèrement effrayantes. Mais finalement, Herschel trouve que c'est un bon professeur qu'il apprécie à sa juste valeur, après-tout il ne le connait pas, alors il ne va pas juger sa personne. Il juge simplement ses cours. Et il les comprend alors tout va bien pour lui. Même que ses cours passent très vite, alors ça prouve qu'il n'ennuie pas ses élèves, c'est à peu près la chose la plus importante. Depuis le début de l'année, ils ont apprit à voler, alors à cet instant, tous devraient plus ou moins être assez bons sur un balais, lui en tout cas l'est. Il n'a pas la grosse tête ou les choses comme ça, c'est simplement qu'il arrive à tenir sur son balais et à voler assez bien sans tomber ni même perdre l'équilibre, il a seulement un peu de mal quelques fois à rester droit dans les virages. 

  Alors quand le moment de voler commence, il est heureux de pouvoir montrer qu'il arrive à le faire assez bien malgré ses lunettes qui lui bouffent la moitié de la face. Il aimerait prouver que ce n'est pas à cause de ça qu'il ne pourrait pas être bon en sport. Certains le font, certains pensent vraiment que d'avoir des lunettes joue contre vous. Alors lui aimerait leur montrer que ce n'est pas vrai, même si c'est un peu compliqué de le faire quand on ne sort par vraiment de l'ordinaire et qu'on se contente de fondre dans la masse. Bien sûr, Herschel sait qu'il est différent, par la façon dont il agit ou s'habille, mais il se pense assez normal, assez paumé au milieu des gens. Il ne pense pas que c'est une mauvaise chose, il se sent parfait comme il est et il n'a pas envie de changer pour quelque chose qu'il ne serait pas. Il est assez bien dans sa foule. 

  Trop concentré sur son vol, il oublia une des règles importantes qui stipule qu'il faut faire attention à son entourage quand on vole, et c'est sûrement pour cela que le manche d'un de ses camarades s'écrasa sur le sien et qu'il tomba en arrière, s'écrasant deux mètres plus bas sur son coccyx avec un grognement de douleur. Ses lunettes tombèrent et il gémit de mécontentement. Il ouvrit lentement les yeux et passa ses mains sur son corps, pour voir s'il avait mal quand il tapait quelque part. Sa cheville lui faisait très mal mais il savait que l'infirmière saurait réparer tout ça assez facilement. Il remit comme il pu ses lunettes sur son nez, observant son camarade à terre également à quelques pas de lui.

  -Ça va ?

Le balais, ça le connaissait.
Il avait beau ramer loin derrière en histoire de la magie, Saul avait le balais dans sa poche et il était hors de question qu'il se garde ça pour lui. Ainsi, depuis le début du cours, le gamin montait, piquait, tournait, les yeux quasi fermés et un petit sourire en coin, frôlant les jeunes tremblant sur leurs balais. Un peu bancal aux arrêts mais vite rétabli. Maman avait dit "Modestie" mais là, son honneur était en jeu!

Et puis, pris d'un élan d'assurance, il s'était élevait un peu plus haut, un peu plus loin, pour clamer à la ronde un "Un, deux, trois... SOLEIL!" des plus enjoués.
Puis ça n'avait pas tardé. Chacun l'avait suivit et le gamin était aux anges, slalomant entre chaque balais, un rictus malin sur le visage, pour dénicher le pied qui se balançait un peu, la main qui reprenait sa prise. Et tout fier, il repartait chantonnait la formule à donner vie aux statues du ciel.

Le petit Lion se pavanait depuis quelques minutes déjà, se faisait plus stricte, plus diable, avec tous ces balais à un doigt de gagner. Maman disait "Constance" mais maman n'était pas marrante. D'un coup de balais, il chassa le souvenir en se retournant. Maman, Papa, sa cabane dans le jardin, ils lui manquaient mais ce n'était sérieusement pas le moment. Son sourire toujours épinglé à la face, il reprit en grinçant, dos tourné.

-Un, deux trois... Sol-AAAAAA Merlin!!

Ça le prit par l'épaule avant de l'envoyer valser en toupie vers le sol. Par passage saccadés, il voyait les élèves les plus proches passer en trombe leur ligne d'arrivée avant de se tourner vers lui, déconcertés. Lui n'avait bien sûr rien vu venir, les yeux fixés sur le manche de son balais. Un peu comme une étoile filante. Quand on regarde le ciel de nuit, et qu'elle passe, ne laissant que son souvenir et les cris d'exclamation après son passage. Jamais d'image nette, jamais le temps de vraiment savoir ou bien en souvenir, quand déjà elle s'est éteinte. Et là, le souvenir imprégnait sa rétine. Une étoile filante toute de flamme, toute rousse. Il connaissait la poussière de sucre roux qui l'accompagnait.
Ginger.
Apparemment mais ce n'était pas exactement le temps de jouer les détectives. Si les premiers instants flottèrent comme au temps arrêté, le reste fusa au plus vite. Cette fois-ci, il n'eut pas le temps de voir grand chose mais son dos percuta quelque chose *-un lutin??* que le manche de son balais envoya droit vers le sol dans le même élan. Et puis le balais lui échappa, lui, tomba.
Boum.
Par terre.
L'éclair partit de ses chevilles pour aller exploser dans sa tête. L'idiot, il avait eu le réflexe d'attérir sur ses pieds avant se trébucher et s'écrouler sur le sol. Mais la chute n'avait pas été longue. Le choc n'avait pas eu de gros impact sur ses jambes, juste de quoi lui arracher une légère grimace... Par contre, le lutin avait volé libre plus longtemps. D'ailleurs plus il le regardait, plus il ressemblait à un Serdaigle déjà vu...

-Ça va ?

Le lutin venait de parler.
Mais pas "lutin", patate! Tu viens de jeter un élève à terre!!
Ooooh Merlin!! Le gamin se releva et trébucha jusqu'aux pieds du rouquin à lunettes, relevant par la même occasion qu'il n'avait rien de cassé. Un pantin désarticulé avec un nid d'Augurey sur la tête... voilà ce qu'il était!

-Oh oui oui, moi ça va! Oh je suis désolé! Je... je ne sais pas comment ça s'est...

Passé? Si si! L'étoile rousse a disparue?
Un coup d’œil rapide autour pour repérer Leo. Trop rapide. Tout à fait inutile. Il revint aussitôt à l'aiglon.

-T'as rien de cassé? T'as pas l'air très bien... Oh, vraiment, je suis navré...

Ah... les manières resurgissent Saul...
Un autre regard autour, pour trouver le professeur, de l'aide peut-être.
Regard qui s'arrêta aussitôt sur une étincelle tout près.
Ginger.

Tornade rousse dévalant les escaliers trois par trois, coup de vent passant la porte, poursuivant sa course à l’air libre en direction du terrain d’entraînement, c’était Leo, un sourire digne d’un soleil sur la  face parsemée de taches de rousseur. 
Arrrg fichue robe, la gamine s’encoubla dans les pans de sa cape. D’habitude, cela valait un torrent de jurons, mais à cet instant, la bonne humeur avait le dessus. En effet, c’était l’heure du cours de vol, son cours, son élément, temps de se pavaner devant les autres, de montrer son talent. Si cette matière était un vrai moment de gloire pour Leo, le reste l’était d’autant moins. Fesses clouées sur les bancs inconfortables, la fillette n’écoutait pas, s’ennuyait à mourir, et tirait la seule occupation du fait de perturber le cours. Mais un tel manque de discipline coûtait cher: abonnement aux mauvaises notes, cinq points en moins pour Gryffondor, cette phrase, l’anglaise l’avait entendue un nombre incalculable de fois et entraînait le mécontentement des autres élèves de sa maison. Les cours de vol étaient un vrai soulagement.
Le sourire toujours planté sur son visage, Leo écoutait les consignes et enfourcha son balai au signal du professeur. Mr. Saunders était - trop badass comme gars - si l'on cite Leo. Grand, peau d’ébène et dreadlocks, cicatrices lacérant une partie de sa figure, témoignant de son passé, et bien qu’il paraissait quelque peu intimidant, c’est surtout d’intérêt et d’admiration dont faisait preuve la Gryffondor à son égard. Un tel homme devait avoir une histoire extraordinaire... 
Leo s’éleva dans les airs.

Merde non! Quelques instants auparavant, son balai pourfendait encore l’air frais d’avril à toute allure, le vent sifflait dans ses oreilles, sa cape détestée flottait derrière elle manière Superman. Leo avait jeté un coup d’oeil par dessus son épaule pour voir où en étaient les autres, regard satisfaisant: elle était devant, mais fatal. 
Soudain, cette silhouette était apparue devant elle. La fillette pouvait entendre dans sa tête la voix off Collision dans trois, deux...Bref, pas le temps d’ y penser. Dents serrées, Leo tira sur le manche de son balai pour monter en chandelle, mais heurta l’épaule de son camarade. Paf. Déséquilibrée, elle s’accrocha à son balai, perdit le contrôle de l’engin volant qui tournoyait dans les airs, le sol s'approchait de plus en plus, Ouf. Juste avant le choc, elle parvint à se stabiliser à nouveau. Les entraînements avec l’équipe de Quiddich et  les coups de cognard, ça se valait. 

Leo leva les yeux. A son grand mécontentement, la ligne d’arrivée avait été franchie, mais aucun signe du gryffondor qu’elle avait percuté. Le regard bleu de Leo balaya le terrain, avant de s’arrêter au sol non loin d’elle. La fillette reconnut le garçon, c’était Saul Lingtomn. Et il avait osé apparaître devant elle. Furieuse, les yeux lançant des éclairs,  Leo lui cria:
T'es sérieux mec, j'allais gagner! Je sais, t'as fait exprès, tu voulais pas que j'gagne.
Qu'est-ce que ça lui faisait chier. Elle allait se détourner, boudeuse, quand sont regard se posa sur une deuxième personne dans l'herbe. Un rouquin de Serdaigle qui avait l’air un peu plus mal en point. Leo l'identifia rapidement: Hershel, celui avec le nom d'grand-père. Toujours énervée, elle en profita pour répandre sa mauvaise humeur.
Et lui? Comment ça s'fait qu'il s'retrouve écrabouillé par terre? T'sais pas voler ou quoi, Herschel!
 

    Quand on y pensait, la scène avait été assez violente. Il se trouvait dans les airs, ne s'en sortait pas particulièrement mal même s'il n'était pas plus doué que d'autres et la seconde d'après, il se retrouvait par terre, la cheville en désordre et n'avait même pas le temps de répondre à quelqu'un semblant gentil qu'il se faisait pourrir par quelqu'un d'autre à qui il n'avait jamais parlé mais qui se permettait de lui parler comme s'ils étaient ennemis de longue date. Ce n'était pas le cas ! Et il n'avait pas d'ennemi, juste des amis et des connaissances plus ou moins sympathique. Que faisait-elle ? Cela n'avait aucun sens. Ce n'était même pas lui qui l'avait bousculé et c'était encore moins elle qui était le plus blessée et pourtant elle réagissait comme si quelqu'un avait tué son meilleur ami. Gagner n'était pas si important, si ? Sachant qu'aucune note ne dépendait de ça et qu'ils n'auraient de toute façon pas eu de récompense à par le fait d'avoir eu un entraînement supplémentaire sur un balais. Vraiment, il ne comprenait pas pourquoi elle hurlait. Personne ne lui avait jamais expliqué la gentillesse ? Lui, dès le début, avait toujours su que, plus que gagner, c'était s'amuser à participer qui était le plus important et que, même si on perdait mais qu'on avait eu très envie de gagner, il ne fallait pas pour autant rejeter sa frustration et sa colère sur Les autres, que ça ne servait de toute façon à rien à part vous faire passer pour la méchante. Il se releva avec mal. Pourquoi à chaque fois que ça se passait, il finissait blessé ? Il n'était pas en sucre, non plus ! 

    -Merci S...Saul, ça va, je sais pas si c'est cassé, dit-il en pointant son poignet, mais je pense pas, et pis ça passera vite, le temps d'un voyage à l'infirmerie ! Il se tourna vers l'autre et s'arrêta quelques secondes. Pas Hestia, c'était celle qui savait pas dire son prénom, pas Kirsty, c'était la mal élevée, mai qui ? Ginger, celle qui perd des points presque tous les jours. Leo ! Et toi Leo, t'as oublié de regarder devant toi, d'abord, et pis je suis pas tombé tout seul et d'abord, t'aurais rien gagné à la fin donc ça sert à rien de s'énerver. Tu vas bien ? C'tait cool c'que t'as fais sur ton balais. 

    Même si les gens sont méchants, Herschel, sois gentil, essaie toujours de l'être parce que ça leur montre qu'ils peuvent réagir autrement avec toi et que c'est pas grave d'être en colère. 

Ah... pas contente la comète...
Ça n'était pas bien compliqué à deviner vu ce qu'elle venait de leur envoyer en pleine face à tous deux. M'enfin, comme à l’accoutumée, les pics traversèrent le gamin comme s'il avait été de la fumée. Ça remuait mais ça ne faisait absolument pas mal. Mais oui, ça remuait pas mal. Sûrement aussi les séquelles du tourbillons. S'apprêtant à répondre tout aussi vivement, Saul papillonna plutôt des paupières, tentant de dégager le flou qui venait recouvrir le monde.
Ok ok, du calme...
Comme pour remplacer la défense partie en fumée (c'est donc le cas de le dire...), le lutin à lunettes se redressa sur ses jambes de terres cuites, un peu brinquebalant. Bah! Ils étaient au moins deux sur ce bateau de tempête à tanguer joyeusement... M'enfin le front était refait et il attaquait!
Le rouquin, après l'avoir gentillement remercié, apostropha la comète et Saul bien décidé à épauler son coéquipier minute hocha vivement de la tête pour-
...quoi?!
Il prenez de ses nouvelles. Oui bah c'était ce que c'était! Les yeux grands ouverts, le gryffon fixait le lutin. C'était ça la contre-attaque? Le gamin ferma les yeux, achevé, quand l'autre félicita l’ennemi. Argh, coup fatal. Un homme à la mer.
Il les rouvrit pourtant pour jeter un regard à Ginger, voir comment il réagissait. Son regard tomba soudain sur un détails pas encore remarqué et pourtant énorme. Cette enflure n'était même pas blessée!! Pire peut-être même! La gamine semblait ne jamais avoir heurté le sol et elle se tenait droite, fière, hautaine. C'en était de trop. La boule de feu dans le ventre du gamin s'embrasa d'un coup. Ignorant totalement la tentative de paix de l'aiglon (veuillez l'excuser) Saul dégaina au côté du drapeau blanc.

-Eh mais elle se calme un peu Ginger? Dis, tu étais censé me dépasser. Pas me foncer dessus!

Si le drapeau continuait de s'agiter, le gamin n'en vit rien et brandit un peu plus haut l'arme guerrière.

-Et puis ça va mademoiselle! Pardon si sa majesté à du descendre de quelques niveaux mais j'ose remarquer que votre robe n'en a pas été salie! Ça à l'air d'aller hein?

Ah bah les manières éclataient au grand jour! Mais le feu avait tout embrasé, il ne restait plus que les racines. Un peu penché en avant par la force de ce qu'il lançait, Saul laissa son regard prendre feu avec lui.

Leo cligna des paupières. Deux fois, le temps que l’info atteigne son cerveau et face le tour des quelques neurones connectés. Le compliment qu’Herschel lui adressa dégoulina comme du miel sur la fillette. Un  petit sourire apparaut sur le visage de Leo, qui ne tarda cependant pas à redisparaître. L'orage n’était pas encore terminé.  Même si le ciel s’emblait s’éclaircir légèrement du côté du Serdaigle, les nuages noirs de Leo ne s’étaient pas encore vidés à satisfaction. Elle grogna. Un éclair traversa son regard. 
Alors comme ça c'est ma faute! 
Qu'est-ce qui lui prenait de la corriger. La tempête reprit.
Bien sûr qu'c'était cool. C'est pas pour ma jolie tête que j'suis dans l'équipe. 

En fait, c'êtait ça le principal problème. Voler n'était pas automatiquement synonyme de Quiddich, de compétition, vitesse, force et de brutalité. Leo peinait de l'admettre. C'étaient ces aspects du jeu qui le rendaient tellement attractif. Tout ça, c'était son monde, des choses qu'elle savait faire. Une réelle obsession. En tant que plus jeune membre, la gamine voulait prouver aux autres qu'elle aussi savait le faire. Constamment, chaque fois qu'elle enfourchait le bout de bois volant. Alors, le niveau des cours de vol n'était pas assez élevé. En avril, ils s'amusaient toujours à un deux trois soleil. La rouquine avait toujours repoussé cette pensée dans un coin de son esprit, pour profiter un max de ce cours. En fait, Hershel avait tout faux. Si elle n'aurait rien pu gagner, elle avait tout à perdre. Pas seulement des points. Son poste de remplaçante. Et surtout, la seule heure qui se rapprochait du bonheur. 

Leo ferma les yeux. L'attaque de l'aigle valait peut-être de la compote, n'êmpêche qu'elle s'était directement infiltrée par une faille de sa carapace. Se reprendre. Elle avala sa salive, pressa les lèvres ensembles et souffla un bon coup, releva la tête, guerrière, avant de rouvrir les paupières. Son regard iceberg se posa sur Saul, qui avait sorti les armes. Ses paroles étaient bien plus durs, mais il ricochetaient sur l'armure de Leo sans faire d'autres dégâts qu'attiser la foudre.
Ah oui, te dépasser, hein? Tu t'es retourné alors que t'avais même pas fini de dire la fichue phrase. Et pis, t'aurais pu t'décaler aussi! Et j'me fous pas mal de la robe, c'est des incapables dont j'ai ras l'bol ! 

Elle soutint son regard. Quatre prunelles bleues qui s'affrontaient. La fureur était palpable des deux côtés, et toute cette énergie semblait maintenir tous les autres à distance.