Cela faisait maintenant deux mois que Rafael était revenu à Poudlard, sa deuxième maison, et avait retrouvé tous ses camarades de Poufsouffle. Il avait eu la chance d’obtenir de bons résultats à ses BUSE, ce qui lui avait permis de continuer à suivre les cours qui l’intéressaient. Tout comme l’année précédente, l’adolescent avait reçu l’insigne de capitaine de l’équipe de Quidditch de sa maison, Poufsouffle. Il était déjà revenu s’entraîner sur le terrain de Quidditch quelques fois et avait déjà organisé les sélections de l’équipe. Beaucoup de Poufsouffle étaient venus pour tenter de décrocher une place dans l’équipe et Rafael avait recruté deux nouveaux élèves de troisième année pour jouer au poste de poursuiteur à ses côtés.

Il avait informé tous les membres de l’équipe que le premier entraînement aurait lieu ce samedi soir et il avait été heureux de constater en se levant que le soleil et le beau temps étaient au rendez-vous. Excité à l’idée de réunir toute l’équipe pour s’entraîner mais légèrement angoissé de se relancer dans cet exercice, Rafael avait décidé de venir sur le terrain bien plus tôt que prévu afin de se remettre à niveau et s’amuser un petit peu sur son balai. Il s’était avant tout assurer qu’aucune autre équipe n’avait réservé le terrain, il ne voulait pas être accusé d’espionnage et ne voulait pas croiser le capitaine de l’équipe de Serpentard avec qui les échanges étaient tendus depuis leur dernier match.

Il était presque quatorze heure quand Rafael traversa le parc en direction du stade de Quidditch, il avait l’impression d’être en fin d’année scolaire, beaucoup d’élèves étaient dans le parc à profiter du temps radieux sans se soucier de leurs devoirs et de leurs révisions. Son balai volant à la main, Rafael accéléra le pas, désireux de pouvoir grimper sur son balai et s’envoler. Il ne mit que très peu de temps à arriver sur le dit terrain et disposa ses affaires sur le coté sans prêter attention à ce qui se trouvait autour de lui. Il s’assura que sa cape était bien fermée et qu’il ne la perdrait pas en vol, se passa la main dans les cheveux et enfourcha son balai. Au moment où il allait taper son pied sur le sol pour prendre son envol il jeta un rapide coup d’œil sur le terrain et remarqua qu’il n’était pas seul.

A l’autre bout du terrain, il aperçut un adolescent qui semblait avoir le même âge que lui, les cheveux bruns soigneusement coiffés. Il se rapprocha de quelques pas tout en continuant son examen et après quelques mètres, il reconnut le garçon. Ils avaient déjà parlé ensemble quelques fois, Théophile était en effet en même année que Rafael. Ce-dernier s’arrêta alors, son balai dans la main droite, et détailla ce que son camarade de Serdaigle faisait. Après quelques secondes, Rafael comprit que le Serdaigle dansait. Il était impressionné de constater la grâce qui émanait du corps du jeune homme, il ne savait pas qu’il pratiquait ce sport et Rafael resta sur place sans mot dire en admirant les facultés de son camarade.

Théophile aimait l'automne et appréciait encore plus sortir durant cette période, les arbres étaient magnifiques et il avait toujours aimé marcher dans les feuilles mortes depuis qu'il était enfant. Cela pouvait le faire paraître légèrement gamin, mais il n'aurait pas apprécié changer cette vieille habitude. Tout était très carré dans sa vie, il avait du mal à laisser derrière lui ses habitudes qui apportaient une grande stabilité dans sa vie. C'était plus facile de garder les pieds sur terre et de ne pas avoir peur du lendemain s'il retrouvait systématiquement quelques petites choses qui lui permettaient de se souvenir du temps qui passait. Pour lui, ces habitudes étaient aussi importantes que le cycle du soleil pour prendre conscience que sa vie passait et qu'elle ne s'arrêtait pas. Il préférait danser dehors, alors l'automne et le printemps lui offraient de belles occasions de le faire. Il ne faisait ni trop froid, ni trop chaud et il pouvait admirer le spectacle que la nature lui offrait sans se soucier de tomber malade, d'autant plus que, ce jour-là, il faisait un grand soleil et le ciel était parfaitement dégagé.

Le parc était bondé, alors il était venu sur le terrain d'entrainement, espérant secrètement qu'il n'y avait pas d'entraînements de prévus parce qu'il n'avait pas vraiment envie de laisser la place à quelqu'un pour qu'il vole sur un balais. Il acceptait que certaines personnes apprécient vraiment ça, c'était même parfois impressionnant, mais il n'arrivait tellement pas à tenir sur un balais ou à trouver l'envie d'aller assister à un match de Quidditch, qu'au final, il était totalement perdu avec les personnes qui y jouaient, encore plus qu'avec les personnes dans l’ensemble.

Il dansait depuis bientôt une heure, cette fois-ci les yeux ouverts pour observer le paysage qui tournoyait dans ses couleurs rouges et jaunes autour de lui quand son regard s'agrippa à un corps qui s'approchait sur le terrain, balais à la main. Il fit une dernière pirouette en se maudissant intérieurement de s'apporter la poisse à penser à ce qui pourrait arriver et le déranger avant de s'arrêter et de poser ses mains sur son ventre, droit comme un piquet, pour observer le personnage devant lui. Il pouvait le reconnaître, il était certain, déjà, que c'était quelqu'un de son année parce qu'il ne connaissait qu'un seul capitaine de Quidditch à Poufsouffle, et c'était normalement Rafael. Ils ne se connaissaient pas vraiment, mais avaient déjà échangé quelques mots. Il leva la main au dessus de sa tête et l'agita de droite à gauche en espérant ne pas avoir l'air trop coincé, conscient que c'était souvent ça qui embêtaient les gens quand ils lui parlaient.

Rafael était partagé devant le spectacle qui s’offrait à lui. Il était à la fois admiratif de la manière dont le corps de son camarade bougeait avec grâce et beauté mais il était dans le même temps perplexe car ce n’était pas un sport qu’il voulait pratiquer. Rafael n’était pas du tout fait pour ce sport, il n’avait pas assez de beauté dans ses gestes pour pouvoir ce que faisait son camarade. Il aimait la vitesse et la sensation de liberté qu’il ressentait dés qu’il volait sur son balai. Il resta malgré tout quelques secondes à observer Théophile. C’est alors que celui-ci s’aperçut que quelqu’un était en train de l’observer au loin, il s’arrêta dans ses mouvements et regarda celui qui venait le déranger. Il sembla le reconnaître à son tour et balança sa main de gauche à droite en guise de salut. Rafael imita son geste qu’il accompagna d’un sourire.

Il décida ensuite de se rapprocher du jeune homme, laissant ses affaires là où il les avait poser quelques minutes plus tôt. Il fallut deux minutes complètes à Rafael pour rejoindre son camarade de Serdaigle. Il hésita quelques secondes à enfourcher son balai pour se rapprocher plus rapidement de Théophile mais il se retint malgré tout. Arrivée à quelques mètre du Serdaigle, Rafael renforça son sourire et entama la conversation.

« Salut Théophile désolé de t’avoir interrompu, je ne voulais pas te faire t’arrêter, je ne savais pas que tu étais sur le terrain. »

Rafael remarqua alors que son camarade ne paraissait pas très à l’aise, il ne le connaissait pas trop et ne savait pas ce qu’il pensait de cette interruption. Rafael avait toujours été spontané et d’un naturel ouvert aux autres. Il lui semblait normal d’aller à la rencontre des autres élèves et des personnes en général. Toujours avec le même sourire et l’envie de mettre à l’aise Théophile, le Poufsouffle ajouta:

« Je t’ai vu danser, tu te débrouilles vraiment bien, je suis incapable d’être aussi naturel, on s’est d’ailleurs moqué de moi au bal de noël l’an dernier. Il fit une petite pause et reprit: ça fait longtemps que tu danses ? Je ne t’avais jamais vu sur le terrain jusque là. »

Il se tortilla légèrement en grattant sa joue avec son ongle, gêné. Il rougissait, les yeux baissés au sol. La plupart du temps, on ne le complimentait pas pour son talent de danseur, surtout pas les joueurs de Quidditch. C'était peut-être un cliché mais beaucoup de joueurs en étaient. Habituellement, on venait le voir pour lui demander s'il était vraiment un garçon ou s'il était juste une fille maigrichonne et stupide. Il n'aimait pas les compliments, cela le rendait la plupart du temps très mal à l'aise : il ne savait jamais comment réagir à ça alors il rougissait juste et baissait les yeux avant de se gratter la joue. Mais Rafael était juste gentil, il n'y avait pas une once de moquerie dans son compliment : pas de sarcasme ou de méchanceté cachée. Juste un compliment avant un début de conversation. Peu de personnes lui parlaient, aussi. 

- Bonjour Rafael, merci. Je suis désolé d'être sur le terrain, tu étais là pour t'entraîner, non ? Dit-il en pointant du doigt le balais qu'il tenait. Je danse depuis 2014. D'habitude je danse dans le parc, ou dans une salle vide, mais le parc est bondé et les gens ne m'aiment pas forcément. Je t'ai déjà vu voler, je suis incapable de le faire, c'est impressionnant. 

Le vol n'était pas quelque chose qu'il appréciait. En fait, il était terriblement doué pour tomber de son balais ou voler à l'envers. Il n'avait aucun talent en vol et, surtout, il n'avait aucune grâce sur un balais. Ce n'était pas comme la danse : le vol sur balais montrait totalement les pires côtés des gens. Enfin, surtout de lui. Il se demandait s'il pourrait observer Rafael voler. Il n'aimait pas le vol mais c'était toujours impressionnant à observer. 

Rafael était suffisamment près de son camarade pour se rendre compte que le compliment qu’il venait de lui faire le faisait rougir. Cela n’avait pas était le but du Poufsouffle mais il savait que ce n’était pas contrôlable. Jusqu’à sa troisième année, l’adolescent était comme Théophile, il rougissait dés que quelqu’un lui adressait la parole. Le Quidditch avait été l’une des choses qui lui avait permit de s’affirmer et d’être moins timide et gênée. Voir la réaction du jeune garçon face à lui avait renvoyé Rafael quelques années plus tôt et il réfléchissait déjà à la manière dont il pouvait s’excuser et mettre son camarade à l’aise mais ce-dernier fut plus rapide que lui. Il sembla se ressaisir et pris la parole.

En écoutant son camarade parler, le Poufsouffle ne put s’empêcher de ressentir un petit peu de peine pour lui mais encore une fois il ne savait pas comment se rattraper. À l’écouter, le jeune homme n’était pas très aimé des autres, du haut de ses seize ans, Rafael ne savait pas réagir face à ce genre de parole. Il pensa à sa mère qui lui disait que parfois, il ne servait à rien de chercher des phrases toute faite et mal placée pour soulager les gens, les silences pouvaient avoir un impact plus fort. Ignorant si c’était la bonne solution, Rafael préféra passer sous silence cette partie de la réponse de Théophile.

« — Ne t’excuse pas pour ça, le terrain n’est pas à moi, et puis de toute façon, je n’ai pas besoin du sol pour m’entraîner au Quidditch!

Rafael sourit de nouveau à son camarade et réagit qu’à cet instant, bien trop concentré sur le début de la réponse de Théophile pour s’en rendre compte avant. Il venait de dire qu’il faisait de la danse depuis 2014, il devait être un professionnel après douze ans d’exercice. Le Poufsouffle pensa alors à sa petite sœur Mila qui avait aussi commencé à faire de la danse avant de rentrer à Poudlard. Il s’empressa alors de rebondir sur ce sujet.

— Tu as commencé la danse depuis 12 ans !? Tu étais hyper jeune ! Ma soeur aussi fait de la danse, peut-être que tu la connais. Mila, quatrième année à Gryffondor, ça te dit quelque chose?

Rafael attendit la réponse du jeune garçon mais il aperçut sa sœur avant de l’entendre. Talía savait qu’il était parti s’entraîner sur le terrain et n’avait pas mis de temp à le retrouver. Elle arriva très vite, en sueur et à bout de souffle et difficilement elle lui expliqua la situation:

— Raf’ ... C’est Mila ... Elle s’est encore ... attirée ... des ennuis! Dans le parc ... près du saule!

Elle avait bien du mal à lui expliquer la situation, elle avait du courir sans s’arrêter depuis le saule cogneur. Il leva les yeux au ciel, ce n’était pas la première fois que sa soeur se retrouvait dans ce genre de situation et il savait que si Talía venait, c’est que c’était important. Il se retourna vers le Serdaigle et avec un regard d’excuse il lui expliqua:

— Je suis désolé, Mila, ma soeur en fait encore des siennes, je vais aller voir ce qu’elle fait. J’espère qu’on se recroisera. Talía, prends ton temps, je la retrouverai, merci de m’avoir prévenu. »

Rafael ne prit pas le temps d’attendre une réponse de l’un ou de l’autre et s’empressa de se diriger vers le saule cogneur pour savoir ce qu’elle avait fait et l’aider à s’en sortir.