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12 sept. 2015, 11:20
Qui ne sait pas voler est risible  PV 
En ce beau et joyeux jour, les maigres rayons du soleil transperçaient les quelques nuages fiévreux qui flottaient dans l'air printanier et subtil pour atterrir sur le terrain de Quidditch. L'herbe encore trempée par la rosée délicate du matin semblait d'autant plus verte qu'elle était joliment mise en évidence par les faibles rayons, et l'infinie étendue qu'était le ciel donnait à ce jour de mars une salvatrice allure de paix.

En réalité, malgré les élucubrations employées pour décrire cette journée, il n'en était rien de plus qu'un matin aussi banal que tous les autres. Enfin, non. Ce début de journée avait quand même quelque chose d'un peu spécial ; Joy s'était levée aux aurores pour tenter d'apprendre à voler. Bien sûr, elle avait assisté aux cours de vol obligatoire, mais là ça n'avait plus rien à voir. En cet instant, elle était seule, et le destin de ses membres fragiles étaient entre ses seules mains. Il ne tenait plus qu'à elle de ne pas se briser trois côtes. Et pourtant, Dieu savait que c'était mal parti.

Parce que non seulement Joy n'avait jamais ressenti l'envie particulière d'apprendre à se servir d'un balai, mais en plus de ça, elle avait le vertige. Et croyez-moi, le manque de motivation plus la peur, ça ne fait jamais un condensé aux bons revirements. Mais sa décision était prise. Elle allait profiter du fait que personne ne soit là pour apprendre à voler. Bon, elle ne finirait pas dans un match de Quidditch, ça c'était sûr, mais au moins, elle serait digne d'être une sorcière. Parce que tout bon sorcier SAIT voler, c'est bien connu.

Après avoir emprunté un vieux balai de l'école, elle calma sa respiration et se dit que de toute façon, il n'y avait pas de quoi s'inquiéter. Elle était seule, libre de se poser quand elle le voulait, et le fait qu'elle ne sache toujours pas comment faire n'était qu'un détail insignifiant, pas vrai ? Après une très brève hésitation, elle empoigna le balai et tapa du pied sur le sol pour s'envoler. Trop vite. Et trop haut. Beaucoup plus haut que nécessaire. Elle n'avait aucune idée de comment agir. Devait-elle se pencher ? Comment atterrir ? Joy avait entendu maintes et maintes fois que de nombreux sorciers se plaisaient à voler, et aimaient réellement ce sport, mais n'était-ce pas qu'une légende urbaine ? Tandis que mille questions fourmillaient dans sa tête, elle n'avait qu'une seule envie, c'était de descendre.

Le balai n'en faisait qu'à sa guise, et la fillette n'arrivait absolument pas à le contrôler. Ça tournait, descendait, montait, tournait encore, à droite puis à gauche, elle effleurait les gradins, en bref, elle faisait n'importe quoi. Elle tenta de se calmer du mieux qu'elle le pouvait et de se remémorer ses cours. Tentant de suivre les instructions pourtant simples que lui avait données sa professeure, elle se pencha légèrement en avant et, pour son plus grand bonheur, retrouva enfin le chaleureux et inestimable contact avec la terre ferme. On disait parfois que les Serdaigle étaient souvent dans les nuages, et bien moi, je vous l'assure ; Non, les Serdaigle n'ont pas tous la tête dans les nuages.

Mais alors qu'elle avait l'intention de ranger le balai vétuste à sa place et de retourner récupérer un peu de sommeil réparateur en salle commune, en tentant tant bien que mal d'oublier ce désastreux essai, Joy aperçut une silhouette à quelques pas d'elle. Une silhouette qui arborait un petit sourire moqueur et qui fixait intensément l'aiglonne de ses yeux gris. Alors comme ça, quelqu'un l'avait vue ? Et, en plus de se moquer d'elle, cette ô combien adorable personne n'avait même pas tenté de l'aider ?

Énervée, Joy posa son balai à terre et se dirigea vers la jeune fille qu'elle eut le déplaisir de reconnaître aussitôt. Rose Adams, de Serdaigle, dans le même dortoir et année qu'elle. Enfin, quand je dis déplaisir, ce n'était pas que Joy avait des antécédents avec elle, non. Au contraire, jusqu'ici, elle l'appréciait plutôt pas mal. C'était une fille qui semblait réfléchie et calme, tout pour lui plaire. En fait, elle avait juste été déçue de voir qu'une fille comme elle pouvait se moquer des autres.


« Tu trouves ça drôle ? » lâcha enfin Joy quand elle fut arrivée à la hauteur de l'autre Serdaigle.

Bon, si elle s'était adressée à quelqu'un d'une autre maison ou de plus vieux qu'elle, elle aurait sûrement mis plus de gants. Mais là, elle n'avait pas particulièrement peur de Rose, et il fallait dire qu'elle l'avait bien énervée.


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Si tu veux le code pour ma couleur, c'est celui-ci : 70686B ^^

Les gens du pays pensent que la vie est belle ici. La vie est belle, oui, mais quand on la rêve.
16 sept. 2015, 14:35
Qui ne sait pas voler est risible  PV 
Ainsi – ce qu'on nommera grossièrement et sans se préoccuper de la cruelle absence de fondement de ce terme – le destin amena Rose à retourner au terrain de quidditch à peine quelques semaines plus tard. Comme une démarche de réconciliation, en quelque sorte. Et l'histoire voulut que le jour et l'heure de cette démarche vinrent se confondre avec un autre programme, dont la scène se tenait malgré tout au même endroit : l'entraînement laborieux d'une certaine Joy Wedenjack, véritable Serdaigle dans l'âme à n'en pas douter, une gamine posée dont la tête ne déplaisait décidément pas à Rose... ou autrement dit, une copine potentielle, mais ça, c'est ce qu'elle pensait avant de rencontrer en bonne et due forme sa camarade. Si vous me permettez un minuscule bond dans l'avenir – un saut de grenouille me paraît une belle métaphore... non ? – la première réaction, et donc, le premier aperçu de la véritable et antipathique Joy étonna beaucoup Rose. Elle pensait réellement pouvoir s'entendre avec cette fille. C'était instinctif, vous me suivez ? L'impression fugitive que l'équation pourrait fonctionner, que mille tonnerres de mille sabords, ça collerait !

Mais je m'égare.


« Tu trouves ça drôle ? »

Bam. Prends toi ça dans les dents, sale reste de tarte à la mélasse rassie, et qu'on en parle plus. Certes, j'y vais un peu fort, mais c'est là un bon moyen de retranscrire la manière dont Rose voyait la situation, et ce qu'elle ressentait à la façon dont Joy l'avait remballée. Pour une broutille, en plus ! un minuscule sourire en coin, légèrement mesquin je ne peux le nier, mais de là à s'emballer comme ça ? Elle n'y allait pas un peu fort, la Weden machin-chose ?

Alors que Rose s'asseyait dans les tribunes, un livre à la main, et constatait que venir ici était en fait complètement ridicule, réconciliation ou pas, elle aperçut une silhouette entrer sur le terrain, un balai datant vraisemblablement de la Révolte des Gobelins à la main. Elle plissa les yeux, reconnut rapidement la cape brodée de bleu des Serdaigle. Dedans, Joy, seule. Que venait-elle donc faire ici ? Elle ne faisait pas partie de l'équipe, à moins qu'elle ait été recrutée récemment, ou absente du premier, et sûrement dernier, entraînement auquel Rose avait assisté. Le mystère ne plana pas bien longtemps : la demoiselle était en fait venue pour s'entraîner. Et, à en juger l'absence d'habileté avec laquelle elle volait, il y avait du boulot.
*Ça doit être pour ça qu'elle y va seule...* comprit Rose, à qui cette pensée arracha un sourire amusé, et, je l'admets, quelque peu moqueur.

Sur quoi elle s'était brutalement faite apostropher par Joy, dont l'amour propre, visiblement très précaire, semblait avoir pris un coup dans l'aile.


« Ouais, mais vu comment tu montes sur un balai, y aurait plutôt de quoi pleurer, se braqua instantanément Rose. »

Elle le regretta presque immédiatement ; certes, Joy n'y était pas allée de main morte non plus, mais toutes deux auraient pu se passer de cette dispute, pas vrai ?
Les yeux gris croisèrent les yeux bleus. Bleu ciel très exactement. Une lueur de défi dans le regard.

« L'art de l'écrivain consiste surtout à nous faire oublier qu'il emploie des mots. »
16 sept. 2015, 15:39
Qui ne sait pas voler est risible  PV 
Visiblement, Rose n'avait pas beaucoup apprécié son ton cassant. Pas étonnant, quand on y réfléchit, mais Joy n'aurait pas cru qu'elle renchérirait si méchamment.

« Ouais, mais vu comment tu montes sur un balai, y aurait plutôt de quoi pleurer. »

Bah tiens, tu m'en diras tant. La sympathie qu'avait naturellement éprouvé Joy pour sa camarade de maison venait de voler en mille morceaux ; oubliés les sourires polis quand on se croise dans la salle commune, cette fille-là, elle avait envie de la baffer. D'accord, elle n'avait pas employé un ton très sympa avec Rose, mais ce n'était pas une raison pour lui répondre un truc pareil. Joy fronça les sourcils avec un regard noir tout en se demandant quelle était la meilleure façon de réagir. Elle n'était pas impulsive, et l'idée de répondre avec une pique ne lui paraissait pas des meilleures. D'autant plus que, même si ça ne la ravissait pas de devoir l'avouer, Rose semblait avoir de la répartie ; elle venait d'ailleurs de lui faire une jolie démonstration de ce talent.

Envenimer la situation, donc, n'était pas une option des plus plaisantes selon Joy. Et puis c'était vraiment trop dommage ! Tous ses efforts réduits à néant en moins d'une minute. Elle qui avait jusque là tout fait pour éviter de se faire des ennemis et rester en relation cordiale avec tout le monde, voilà qu'elle allait commencer à s'engueuler avec une élève de sa propre maison. Mais elle n'allait pas non plus sortir son plus beau sourire en demandant bien gentiment à Rose de l'excuser. Surtout qu'elle n'avait rien fait de mal.

Restait donc un seul et unique choix possible ; celui de n'être ni trop méchante pour éviter de s'en prendre plein la tronche, mais ni trop gentille non plus pour éviter de devoir ravaler sa fierté de pauvre gamine de onze ans. En clair, il fallait trouver une réplique claire, concise, qui n'énerverait pas Rose davantage sans pour autant faire passer Joy pour une faible. Exercice plutôt difficile étant donné les circonstances dans laquelle se trouvait la petite blonde, mais on fera avec.


« Tu fais mieux, je suppose ? » répondit finalement Joy sans détacher son regard de la fillette en face d'elle.

Pour parler honnêtement, elle n'était pas au meilleur de sa forme. Son entraînement, certes court mais intense, l'avait épuisée, tant mentalement que physiquement. Son souffle était encore un peu haché, et la différence avec Rose, tranquillement installée dans les tribunes, était frappante. Cette dernière tenait un livre à la main et Joy ne put réprimer sa curiosité ; elle pencha légèrement la tête pour tenter d'apercevoir le moins discrètement possible la couverture du bouquin que Rose avait apparemment eu l'intention de lire.

En fait, Joy était tout simplement en train d'essayer d'attirer l'attention de Rose sur autre chose que les paroles imbéciles qu'elle venait de lâcher. Effectivement, il y avait de très grandes chances pour que la fillette aux yeux gris fasse mieux qu'elle sur un balai. La provoquer ainsi était tout bonnement stupide, et si Rose acceptait le défi — ce qu'elle allait malheureusement sûrement faire —, Joy se retrouverait une fois de plus complètement ridicule.

Les gens du pays pensent que la vie est belle ici. La vie est belle, oui, mais quand on la rêve.
03 oct. 2015, 13:00
Qui ne sait pas voler est risible  PV 
On ne va pas se le cacher, Rose était plutôt fière de sa répartie. En oubliant qu'elle venait de casser assez méchamment une fille avec qui elle aurait pu merveilleusement bien s'entendre, sans parler des répercussions fâcheuses que cette réplique risquait de créer. Espérons que cette joute verbale n'allait pas s'éterniser, parce que bon, si la Serdaigle avait eu une poussée d'inspiration subite, elle n'était pas passée maître dans l'art d'envoyer promener ses congénères non plus. Pour être honnête, elle avait beau être satisfaite de ne pas s'être laissée marcher sur les pieds avec une classe certaine, se bagarrer n'était clairement pas un hobby non plus.

« Tu fais mieux, je suppose ? »

Voilà que les choses se corsaient. Certes, c'était plutôt culotté de la part de Joy de lancer un tel défi, vu l'état pathétique dans lequel elle se trouvait, il n'empêche qu'elle avait osé. Et Rose, de son côté, se voyait mal offrir une démonstration de son absence de talent : elle avait du voler sur un balai une fois dans sa vie, deux à tout casser... et n'avait pas la moindre envie que cela se sache. Quant à faire preuve d'auto-dérision, n'en parlons pas ! ce raccourci ne lui vint même pas à esprit. Or, elle devait bien trouver un échappatoire à ce guêpier, sans quoi la situation risquait fort de tourner à son désavantage ; et ça, pas question !

Elle observa Joy à la volée, jaugea ses joues encore rouges et sa respiration fluctuante. Peut-être avait-elle ses chances. Leur niveau devait être le même, mais vu l'épuisement criant dont témoignait la fillette, le combat était d'ores et déjà déséquilibré. En faveur de Rose, forcément, qui, alors qu'elle ouvrait la bouche, remarqua le regard de Wedenjack fixé sur son livre. Elles parlaient balai, et voilà que la demoiselle s'intéressait soudain à son roman ! Peut-être était-ce simplement de la curiosité, mais enfin, c'était bizarre non ? En revanche, il n'y avait pas de doute, toutes deux avaient en commun leur affection pour les livres : Rose l'avait déjà aperçu maint fois un bouquin entre les mains dans la salle commune.

La première année réfléchit. Et si elles pouvaient passer à côté de cette battle ridicule ? ça valait peut-être mieux, tout compte fait. Joy n'était peut-être pas aussi sympathique qu'il ne paraissait, mais s'envenimer davantage n'était pas une solution.


« Ça doit pas être difficile, mais comme tu peux le voir, je suis venue ici pour lire, pas pour relever des défis... Elle allait dire "stupides" mais ravala ce dernier mot. Même si elle le pensait un petit peu. »

« L'art de l'écrivain consiste surtout à nous faire oublier qu'il emploie des mots. »
04 oct. 2015, 09:51
Qui ne sait pas voler est risible  PV 
Dans la vie, tout arrivait pour une raison ; que ce soit une mauvaise chute, une bonne note, une rencontre, ou même une piqûre désobligeante d'une abeille. Selon l'intime conviction de Joy, rien n'était dû au hasard. Alors comment Diable avait-elle pu se retrouver dans cette situation, en train de se violenter verbalement avec une fille qu'elle portait dans son estime il y a un jour à peine ? Qu'est-ce qui avait fait qu'elle en vienne à briser toutes ses valeurs morales pour en arriver là ? Questions auxquelles elle rêverait de trouver une réponse satisfaisante.

Mais nous n'en étions pas là ; Rose Adams, ainsi donc devenue méchante sorcière au nez crochu dans l'esprit de la petite Joy, ne semblait pas encline à accomplir sa bonne action de la journée. Si ça avait été le cas, peut-être aurait-elle eu la décence de mettre une fin à cette joute verbale. Et la plus grosse imbécilité de cette histoire, fut certainement le fait que Joy non plus, ne faisait pas preuve de suffisamment d'intelligence pour arrêter la dispute.

Ah, ce que les enfants pouvaient parfois être bêtes.


« Ça doit pas être difficile, mais comme tu peux le voir, je suis venue ici pour lire, pas pour relever des défis... »

À l'entende de l'énième réflexion sur sa capacité médiocre à voler, Joy roula des yeux. Oui, on avait compris qu'elle ne savait pas se tenir sur un balai. Décidément, Rose était vraiment méchante. Et pour couronner le tout, elle n'avait même pas le culot de lui faire une démonstration de ses probables exceptionnels talents en vol. Parce que oui, nul doute fut que si Rose était si vaniteuse, c'était bien parce qu'elle savait voler au moins cent fois mieux qu'elle. Et dans l'esprit de Joy, Rose apparaissait comme quelqu'un de vraiment orgueilleux. Allez savoir pourquoi, d'ailleurs. Mais étrangement, elle avait depuis quelques minutes une forte tendance à lui trouver tous les défauts du monde.

Il n'empêche qu'en cet instant précis, Joy était face à un choix cornélien. Que devait-elle faire ? Continuer la bagarre, malgré ses regrets, ou bien tenter de changer de sujet, ma foi très subtilement, en parlant du livre que Rose tenait entre ses petites mains pâles ? Certes, Joy se rendrait encore plus ridicule en choisissant cette option, mais n'était-elle pas plus profitable aux deux fillettes ici présentes ?

Un pur dilemme donc, auquel Joy s'autorisa quelques secondes de réflexion. Finalement, elle trancha pour... les deux. Hors de question de passer du coq à l'âne, ça démontrerait clairement à Rose qu'elle avait gagné, mais hors de question également de ne pas tenter de sauver son ancienne vie, celle où elle n'avait ni problèmes ni ennemis.


« Donc tu te moques de moi, mais quand je te demande de prouver que tu fais mieux, tu refuses ? Quel courage. Au fait, il est bien ce livre ? »

Merci merci, les applaudissements ne seront pas nécessaires ; cette réplique était sans doute l'une des plus stupides que Joy ait jamais prononcé de sa vie entière. Elle qui ne voulait pas montrer à Rose qu'elle avait envie d'arrêter cette dispute parce qu'elle se sentait mal à l'aise, c'était complètement raté. Mais le pire avait peut-être été son intonation ; sur le début, elle avait continué d'un ton agressif, puis s'était directement radoucie en posant sa dernière question.

À ce stade, il serait peut-être plus profitable à Joy de s'enfuir en courant.

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04 oct. 2015, 15:31
Qui ne sait pas voler est risible  PV 
La réponse légèrement bancale de Rose sembla plonger son interlocutrice dans une drôle de réflexion. Qu'allait-t-elle lui pondre encore ? Comptait-elle réitérer son challenge idiot ? à moins qu'elle ne se décide, après mûre observation, à lui ôter son livre des mains et à s'enfuir avec ? On pouvait s'attendre à tout avec cette fille. Certes, elle n'était sans doute pas assez allumée pour agir avec tant d'impulsivité et aussi peu de raison, mais agresser ses camarades sans autre motif qu'un inoffensif sourire en coin, ça, elle en était parfaitement capable. Et cette réaction disproportionnée ne la troublait visiblement pas le moins du monde, puisqu'elle persistait avec un entêtement remarquable dans cette lancée. D'un côté, Rose voudrait bien mettre un terme à cette dispute ridicule, mais d'un autre, elle refusait tout nettement de se laisser étouffer par l'intarissable mauvaise foi de Joy, qui rétorqua :

« Donc tu te moques de moi, mais quand je te demande de prouver que tu fais mieux, tu refuses ? Quel courage. Au fait, il est bien ce livre ? »

La situation prêtait bien à un haussement de sourcil – vous savez, d'un seul sourcil, avec un air d'incompréhension et légèrement dédaigneux à la fois – mais Rose n'étant pas dotée de cette faculté exceptionnelle, elle se contenta, pour toute réponse, de lui lancer un regard de travers. Peut-être n'était ce qu'une impression, mais Joy elle-même semblait se rendre compte de l'absurdité de sa propre réponse, tant par ses paroles que par le ton employé, d'abord acerbes, avant de virer inexplicablement vers quelque chose de presque sympathique. Ça n'avait pas de sens, enfin ! Elles étaient en train de se bagarrer, et voilà que la première année embrayait d'un coup sur une thématique complètement différente ! Sans oublier d'y aller de sa petite pique, bien entendu.

Pourtant, Rose croyait comprendre où voulait en venir la Serdaigle. La demoiselle restait certes susceptible, elle était loin d'être stupide, c'était une évidence. Elle n'était pas capable de faire le dos rond après s'être faite si violemment rembarrer, ce qu'on peut aisément comprendre, mais malgré tout, on aurait dit qu'elle tentait... de passer à autre chose. Avec une bonne dose de maladresse, on ne peut le nier, mais oui, l'intention y était. Quant à la raison qui poussait Joy à abréger ainsi ce cirque, mystère. De toute façon, aucune logique ne semblait agiter le cerveau de cette fille, et ça, Rose avait pu le constater depuis l'instant où elle s'était faite apostropher.


« Ça va, il est pas mal, mais je l'ai acheté d'occasion et y a des tâches suspectes sur certaines pages... je te passe les détails, dit Rose après un court silence, dérision et rancœur enchevêtrés en un curieux mélange. »

Elle éluda volontairement le sujet du balai. Ça n'aurait fait que les mettre toutes deux dans l'embarras ; et, contre toute attente, les choses semblaient s'arranger, alors autant repartir sur une meilleure pente, plutôt que de s'enfoncer bêtement dans cette dispute stérile... pas vrai ? Elles n'étaient pas prêtes de devenir les meilleures amies du monde, mais ce statu quo, c'était quand même mieux qu'une inimitié pareille.

« L'art de l'écrivain consiste surtout à nous faire oublier qu'il emploie des mots. »
04 oct. 2015, 19:20
Qui ne sait pas voler est risible  PV 
C'est ainsi donc que Rose Adams, qui n'avait pourtant rien demandé à personne, se retrouva dans une situation qui devait lui paraître irréelle. Alors que quelques secondes plutôt, elle était à deux doigts de se tirer les cheveux avec une autre Serdaigle — ah, des preuves de solidarité inter-maisons comme ça, on n'en fait plus ! —, celle dernière venait de lui demander le moins naturellement du monde si son livre était intéressant.

Et il fallait bien avouer qu'au delà de la honte qui emplissait tout son être, il restait un soupçon de curiosité à Joy. Comment Miss Je-me-la-pète-et-je-fais-tout-mieux-que-tout-le-monde allait-elle donc réagir suite au brusque changement de sujet de la petite blonde ? En fait, deux choix plausibles fourmillaient dans la petite caboche de la fillette aux yeux bleus. Soit Rose laisserait encore une fois son orgueil prendre le dessus, laissant ainsi de côté la misérable tentative de Joy qui visait à sauver leur amour propre ; et elle se rendrait ainsi encore plus détestable qu'avant — ce qui, je vous l'accorde, relèverait d'un exploit mondial, étant donné la bassesse où Rose se trouvait dans la hiérarchie des gens sympas que Joy avait instaurée dans sa tête —. Ou alors, elle ferait preuve d'une étonnante gentillesse, et écourterait la dispute. Et ce qui serait vraiment magnifique, ce serait qu'elle évite de se moquer de Joy ou de répliquer avec une remarque sarcastique, comme elle savait si bien le faire. Et contre toute attente, Rose n'était apparemment pas aussi butée que ça, étant donné la presque amicale réponse qui s'échappa de sa bouche.


« Ça va, il est pas mal, mais je l'ai acheté d'occasion et y a des tâches suspectes sur certaines pages... je te passe les détails. »

Elle avait beau cherché, Joy ne parvenait pas à déceler ne serait-ce qu'une pointe d'ironie dans la réplique de... De qui, du coup ? Pouvait-elle encore la nommer telle une affreuse méchante digne de la sorcière dans Blanche-Neige — et dans la tête de Joy, il n'y avait vraiment rien de pire que la sorcière de Blanche-Neige — ? Ou devait-elle dorénavant tenter de remonter Rose dans son estime ? Chose qui, en fait, était assez aisée, quand on connaissait la répugnance que Joy avait à l'encontre des disputes.

Quoi qu'il en soit, il était désormais de son devoir de continuer sur sa lancée et de se montrer, même faussement, sympathique. Alors c'est parti les amis, Miss Wedenjack va vous faire une démonstration de ses talents de réconciliation, alors accrochez-vous bien.


« Je vois... » dit Joy avec un léger, presque imperceptible, sourire. Il ne fallait pas trop lui en demander quand même. « Ça raconte quoi ? Ça a l'air intéressant. »

Mesdames et messieurs, en exclusivité pour vous, la démonstration orale de la définition d'hypocrisie ! Enfin, on aura beau dire, Joy était quand même contente que ce fâcheux incident n'ait pas pris des proportions énormes. Avec un peu de chance, du haut de ses onze ans, elle n'arriverait pas en salle commune avec la peur irrépressible de croiser Rose Adams, son ennemie de toujours, sachant que « toujours » est ici bas synonyme de cinq minutes.

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28 oct. 2015, 15:35
Qui ne sait pas voler est risible  PV 
« Je vois... grimaça Joy, ça raconte quoi ? Ça a l'air intéressant. »

Rose plissa les yeux à la vue du sourire forcé de sa camarade, à qui ce simple geste semblait lui coûter un bras, et son âme avec. Qu'est ce qui lui prenait, tout d'un coup ? Il y a quelques secondes à peine, elle s'échinait à désamorcer leur dispute naissante, ravalait sa susceptibilité en tendant la main, terriblement maladroitement certes, mais tout de même ! et voilà qu'elle lui servait sur un plateau un rictus digne d'un film de série B, sans pour autant interrompre son incompréhensible numéro. Alors quoi ? La première année songea, non sans amertume, que même un devin digne de ce nom ne saurait prévoir ne serait-ce que vaguement l'attitude de Joy. Ce pouvait tout autant être une demande en mariage, une démonstration de claquettes qu'un chapitre argumenté sur Philippe, son botruc apprivoisé. Le panel de possibilités était tel, l'éventail si considérable, qu'elle doutait être en mesure de prévoir une réponse et une attitude adéquates pour chacune d'elles.

L'idéal, bien sûr, ce serait d'entrer dans la caboche nébuleuse de Joy, et d'y farfouiller jusqu'à trouver un semblant de logique à ce comportement irrationnel ; or, si l'on omet le fait que cet acte ruine tous les principes de morale fondamentaux, Rose n'était pas Legilimens, ni même n'avait entendu parler de ce don ; impossible de décrypter la mystérieuse conduite de Wedenjack, donc. Seulement, il ne faut pas oublier que d'un autre côté, la Bleue craignait de se faire des idées. Peut-être extrapolait-elle, peut-être tirait-elle des plans sur la comète qui n'avaient pas lieu d'être ; si ça se trouve, sa camarade était réellement sincère, et simplement pas très à l'aise. C'était possible aussi, après tout. Tandis qu'elle, elle était là, à soupçonner Joy sans autre motif qu'une vulgaire impression... Comment savoir ? Et surtout, que faire ? passer outre, ou le contraire ?


« C'est une jeune sorcière super intelligente, mais qui a des parents odieux... et du coup, bah, ils l'enfoncent sans se rendre compte qu'elle a un vrai don, et la seule personne qui le remarque, c'est son institutrice
Reducio
Disons qu'un auteur sorcier, sans grande imagination, aura repris un des livres de Roald Dahl ^^
, tenta d'expliquer Rose, agacée de s'emmêler les pinceaux devant cette fille. »

Désireuse d'écourter cette conversation, elle fit mine de reprendre sa lecture là où elle l'avait laissée. Elle n'avait aucune idée de comment réagirait Joy, bien évidemment, mais elle espérait secrètement que l'aiglonne s'en retourne batailler avec son balai.

« L'art de l'écrivain consiste surtout à nous faire oublier qu'il emploie des mots. »
05 nov. 2015, 17:30
Qui ne sait pas voler est risible  PV 
C'était le retournement de situation total ; le ciel était vert et l'herbe bleue, les flammes étaient un peu trop froides et l'eau pas assez mouillée, les Gryffondor étaient les gens les plus calmes au monde et les Poufsouffle les plus méchants ; Rose Adams et Joy Wedenjack avaient une conversation qui ressemblait plus ou moins à une interaction civilisée. Si l'on omettait les grincements de dent, les regards de travers, les réponses vaseuses et peu naturelles, on aurait presque pu dire que les deux fillettes entamaient là un semblant d'amitié. En réalité, Joy tentait tant bien que mal d'enfouir sa susceptibilité contraignante au fond d'un trou creusé à l'aide de ses remords et de sa honte, et elle était juste soulagée que Rose la suive dans sa démarche. Même si en réalité, il fallait avoir une sacrée mauvaise foi pour ne pas reconnaître que la première année aux yeux gris n'était pas du genre chercheuse de problèmes. C'était tout à son honneur, vous dis-je.

Cela étant dit, on aura beau vous jurer que tout allait bien et que les deux gamines ne s'en finiraient pas haineuses, qu'elles n'auraient ni quelques cheveux arrachés par une main pâlotte appartenant à une propriétaire bien énervée, ni lèvres en sang ayant fait la rencontre malencontreuse d'un poing incontrôlable, nul ne pouvait nier qu'un malaise était bel et bien présent. Dans les gradins, et sous le ciel toujours aussi bleu et dégagé, une gêne certaine s'était accaparée de Joy, qui ne savait plus où se mettre. D'un côté, il aurait été tout à fait justifié de se dire que la meilleure solution restait encore celle de partir sans plus faire d'histoire, mais ça aurait jeté de l'huile sur le feu. Déjà que Ros'garce, puisque tel était le surnom attribué à celle-ci et qui devrait normalement sonner comme une moquerie puérile dans vos oreilles, ne portait à l'évidence pas la petite Écossaise dans son cœur, il aurait été mal vu de partir en se montrant aussi polie que les politiciens qui se tapaient presque dessus à la télévision.

Alors contre toute attente et contre toute volonté, l'aiglonne était restée, et elle attendait désormais la réponse de Rose, la fixant de ses yeux bleus. À tous les coups et avec un bras à couper misé, la Bleue qui se tenait toujours sagement assise, son livre salvateur sur les genoux, ne devait pas être bien plus à l'aise et heureuse que Joy. Si elle avait également fait des efforts pour détourner la conversation, elle devait sans doute prier Merlin pour que la première année se casse d'ici et tire son plan avec son balai. Ou alors peut-être espérait-elle aussi que Joy parte, se noie dans le Lac et ne revienne jamais. Qui savait quel genre de scénarios odieux Ros'garce était capable d'aller s'imaginer ? De toute façon, et même si c'était pour faire plaisir à Miss Monde en personne, il était hors de question que la Serdaigle aux yeux bleus aille rendre une petite visite au calamar géant. Heureusement, Rose embraya sur un sujet bien différent.


« C'est une jeune sorcière super intelligente, mais qui a des parents odieux... et du coup, bah, ils l'enfoncent sans se rendre compte qu'elle a un vrai don, et la seule personne qui le remarque, c'est son institutrice. »

Puis elle baissa les yeux pour se plonger à nouveau dans son bouquin. Ah carrément. Et dire que Joy s'était évertuée à rester sur place et à faire des manières pour que Madame ne se sente pas vexée, voilà comment elle était injustement récompensée ; par une ignorance feinte et qui l'aurait certainement blessée, si son amour propre n'avait pas été déjà saccagé il y a plusieurs minutes. Franchement ? L'aiglonne n'aurait pu prévoir pire comme réaction. Elle faisait exactement comme si elle n'était pas là, et en se concentrant ainsi uniquement sur son livre pourri, Rose disait clairement à Joy qu'elle voulait qu'elle s'en aille et qu'elle arrête de l'importuner. Mais vous apprendrez qu'on ne vire pas une Wedenjack comme une malpropre, et que la première année était à l'apogée de sa vexation. Alors comme ça, Rose voulait qu'elle parte ? Mais dans ce cas messieurs dames, Joy va s'asseoir à un ou deux mètres d'elle, juste pour bien faire comprendre à Madame-je-retourne-à-ma-lecture que personne ne lui dicterait ce qu'elle devait faire ! À part les grands, évidemment.

Et devant le ridicule de la situation, Joy ne put se retenir d'esquisser un petit sourire, même pas moqueur ou provocateur. Elle se trouvait juste un peu stupide, et ça la faisait marrer.

Les gens du pays pensent que la vie est belle ici. La vie est belle, oui, mais quand on la rêve.
22 déc. 2015, 20:22
Qui ne sait pas voler est risible  PV 
En désespoir de cause, Rose avait tenté une ultime stratégie : feindre de retourner à ses occupations, indiquant gentiment à Joy qu'elle aussi était invitée à reprendre le cours de sa vie insipide, de préférence loin, très loin d'ici... (Entre nous, si elle pouvait être catapultée dans une galaxie voisine, c'était encore mieux.) De toute façon, aucune des deux n'avait intérêt à poursuivre cette stupide discussion, qui les exaspérait autant l'une que l'autre ; en agissant ainsi, la jeune Adams ne faisait que leur offrir une issue favorable à toutes les deux, sans avoir à passer par un crêpage de chignons ou une ridicule joute verbale. Et pourtant, il y eut un instant de flottement ; Joy, qui ne bougeait pas d'un pouce, et Rose, le nez dans son livre, incapable de se concentrer sur les mots imprimés s'étalant juste sous ses yeux. Pour sa défense, comprenez que se plonger dans un bouquin alors qu'une pauvre cruche vous observe sans dire un mot, comme attendant que le ciel lui tombe sur la tête, n'est pas des plus confortables – et c'est un euphémisme.

Ces quelques secondes s'étirèrent avec une lenteur exaspérante. On aurait dit que quelqu'un, ou quelque chose, se plaisait à dilater le temps avec un plaisir sadique, se délectant sans doute de la gêne palpable qui enflait entre les protagonistes. Il faut dire que la situation frôlait le ridicule : une gamine qui se met à ignorer superbement sa camarade, sans aucune raison apparente et avec une imprévisibilité folle, relevait du non-sens le plus complet. Le plus triste, c'est qu'elles auraient sûrement pu devenir amies, si les choses n'avaient pas aussi mal démarré entre elles. Malheureusement, après tout ce qu'elles s'étaient balancé à la figure, la perspective d'une amitié se réduisait à vitesse grand V, jusqu'à ne plus former qu'un point minuscule à l'horizon. Bah, tant pis. Elle ne perdait sûrement pas grand chose, de toute façon.

Alors que tout espoir semblait perdu, l'ombre menaçante de Wedenjack s'éclipsa enfin, arrachant un mince soupir à Rose. Même si elle en mourrait secrètement d'envie, elle s'abstint de sauter de joie : inutile de se provoquer de nouveau, ou leurs chamailleries ne prendraient jamais fin. Elle avait assez vu l'Autre, avec son visage renfrogné et ses cheveux plus gras que blonds, son nez tout bossu et ses yeux d'un bleu cruellement terne. Pis, elle n'avait pas le moins du monde l'envie d'entendre de nouveau cette voix nasillarde de sainte-nitouche ; rien que le fait d'y penser, l'énervait au plus haut point. Remontée à bloc, elle leva la tête, rien que pour le plaisir de voir Joy s'éloigner des gradins.

Sa satisfaction fut de courte durée.

Croyez le ou non, Wedenjack n'était pas en train de quitter les lieux. Oh, non. Elle se tenait tranquillement là, à quelques mètres à peine, drapée de son semblant de dignité, sans doute à l'apogée de son orgueil et avec l'intime conviction qu'elle faisait ce qu'il fallait. Or, elle avait tout faux. Rose soupira, de manière appuyée cette fois. En vérité, elle ne savait que faire. Elle en avait assez des sautes d'humeur de Joy, assez de sa susceptibilité à deux noises et de ses réactions incompréhensibles. Tout ce qu'elle voulait, c'était mettre un terme à ce fiasco, ne plus avoir à calculer l'Autre et oublier tout ce cirque, l'enterrer dans les tréfonds de sa mémoire et ne plus y repenser. Oui, elle en avait marre. Elle était venue ici pour lire, et voilà qu'elle en était là, à se disputer stupidement avec une pauvre fille, une Serdaigle en plus ! Et encore. Était-ce réellement ça, se disputer ? Une bataille tacite, faite de piques mesquines et de provocations implicites ? Quoique ce soit, elle n'en voulait plus.


« Vu que t'es trop bête pour me laisser tranquille, j'vais y aller. A plus. »

Et, passant devant Joy, le regard droit devant elle, l'aiglonne descendit précautionneusement des gradins. Ne manquerait plus qu'elle trébuche devant elle, tiens.

« L'art de l'écrivain consiste surtout à nous faire oublier qu'il emploie des mots. »