Mis-Juin 2044

Siam était au cinquième étage, elle se demandait pourquoi les élèves la regardaient tous. Elle mit un moment à réaliser que voir une petite première année se promener avec une grosse boite à la forme étrange sur le dos n'était pas courant.

Cette boite n'était pas une boite ordinaire, a commencer par le fait qu'elle contenait quelque chose de tout à fait extraordinaire aux yeux de Siam. Cette étrange boite servait à protéger un violoncelle... Son violoncelle.

Ignorant les regards appuyés de ses camarades, Siam arriva finalement au quatrième étage. Elle ouvrit la porte de la salle de répétition qu'elle connaissait maintenant par cœur. Elle pris un petit tabouret, sortit son violoncelle et son archet de sa house, elle passa un peu de colophane sur son archet, elle sortit la pique et s'installa.

Les doigt de la main gauche de la jeune fille se positionnèrent automatiquement sur les cordes, au niveau de la touche. Sa main droite pris l'archet et celui-ci se posa sur les cordes, au dessus du chevalet.

Siam ferma les yeux et actionna ses doigt et son archet, elle ne savais pas vraiment ce qu'elle jouait, mais au bout de quelques secondes, elle reconnut le son qui sortait des ouïes de son violoncelle. C'était un morceau qu'elle avait appris à jouer il y a deux ans, alors qu'elle prenais encore des cours...

Comme toujours, la musique la transportait, la mélodie douce et triste de ce qu'elle jouait l'emportait dans un autre monde. Elle n'était plus à Poudlard, elle n'étais plus au Royaume Unis, elle n'était plus sur Terre... Elle nageait dans un océan de notes et de musique...

Lorsque le morceau arriva à sa fin, Siam hésita un instant à le continuer un peu à sa guise, mais, si elle adorait l'improvisation, elle respectait les œuvres et n'allaient pas inventé une suite. Elle fit donc retentir la dernière note et rouvrit les yeux.

Elle posa le front contre son violoncelle et là, elle vit entrer un jeune garçon.
Il avait une peau assez pâle qui contrastait avec ses cheveux bruns foncés, ses yeux avaient chacun une couleur différente, l'un était vert, l'autre était gris...

Bouleversée par cette apparition soudaine à laquelle la jeune fille ne s'attendait vraiment pas, elle se leva d'un bond de son tabouret, son violoncelle à la main, manquant de se planter son archet dans l’œil...

@Isaac Avery

Poudlard n'avait pas manquée d'être agitée ces derniers temps. Il fallait dire que la panique était présente en de nombreuses personnes, et celles secouées n'étaient pas rares. A vrai dire, Isaac n'était pas de ces personnes, il n'était pas enclin à faire des crises de panique, mieux valait garder son calme plutôt que de laisser exploser ses émotions. Néanmoins, entre le nouveau gouvernement et son père dont il ne connaissait que trop bien les penchants, il fallait l'avouer, il n'était également pas la personne la plus rassurée qui soit. Comme à son habitude, il marchait d'un pas rapide dans les couloirs du château, et perdu dans ses pensées, il avait bousculé plusieurs personnes en chemin. N'étant pas d'humeur à faire une longue tirade d'excuses, il se contentait d'un simple "Pardon." sans même regarder la personne. Il avait envie d'hauteurs, de prendre l'air, il était bien contrarié et ces troupeaux d'humains partout autour de lui l'agaçaient. Il serait bien allé dans sa salle commune, après tout, qui aime donc se rendre dans les sous-sols ? Néanmoins, cette vue était bien trop familière. Cela faisait une année scolaire qu'il s'y rendait tous les jours, et tout ce qu'il souhaitait à l'heure actuelle, c'était d'être seul et sentir le vent, pas de voir un décor familier. 

Il était au premier étage, et venait de poser un pied au deuxième. Et dire qu'il avait bien failli y passer en début d'année à cause de ce même escalier qu'il venait de monter, cet incident semblait si dérisoire à présent. Il continua néanmoins son chemin sans prêter attention à cette vue possiblement mélancolique, montant les étages un à un précipitamment. Une fois arrivé au quatrième, il fut brutalement stoppé dans son élan quand un petit attroupement d'élèves s'était pointé devant lui, l'obligeant ainsi à les contourner. Ce dernier lui permit d'entendre un son. Il s'arrêta. Une mélodie.. Vu la musique, il n'y avait pas de doute qu'il s'agissait d'un instrument à corde. Sûrement pas un violon ou un alto, elle était bien trop grave. S'agissait-il d'un violoncelle ou d'une contrebasse ? Maintenant qu'il y pensait, il était vrai qu'au quatrième étage se trouvait la salle de répétition. Il s'était toujours demandé quelle en était l'utilité, puisqu'en tant que sorciers, il suffisait d'utiliser la magie pour que les instruments se jouent d'eux-mêmes. Cela faisait si longtemps qu'il n'avait pas écouté de musique, qu'il n'avait pas entendu un instrument. Maintenant qu'il y pensait, cela faisait presque depuis le décès de sa mère.

La musique était douce, grave, et bien que triste, semblait dégager comme un soupçon d'espoir, une lueur de gaieté. Se mêlant ainsi aux actuels états-d'âmes d'Isaac, celui-ci se dirigea instinctivement vers la salle de répétition, oubliant son agacement. Il jeta un regard discret dans l'ouverture de la porte, voyant ainsi qu'il s'agissait d'une jeune fille aux longs cheveux blonds attachés en une tresse, une jeune fille qui était emportée par la mélodie tandis que celle-ci résonnait dans la pièce. Une fois le morceau terminé, Isaac entra dans la salle, puis applaudit calmement... Avant de s'arrêter presque immédiatement en voyant la surprise de la jeune fille et sa possible maladresse. Il sourit.

« C'était une belle mélodie. » Il tourna son regard vers les différents éléments de la salle, ne l'ayant jamais observée avant. Ses yeux se posèrent alors sur un instrument massif, imposant : un piano. Il se dirigea vers ce dernier puis l'ouvrit délicatement avant de retirer et de plier le tissu déposé sur les touches. Il le posa ensuite sur l'instrument, et se mit à pianoter quelques notes de sa main droite. « Je n'avais jamais envisagé la musique comme un échappatoire, mais peut-être qu'elle pourrait l'être. » Il leva son regard vers la jeune fille, puis s'assit. « Tu m'accompagnes ? Pour de simples arpèges pour commencer, il faut que je m'échauffe haha. »

Le jeune garçon se mit à applaudir quelques secondes mais s'arrêta rapidement. Siam ouvrit la bouche, voulant dire quelque chose mais elle se rendit compte qu'en fait elle ne savait absolument pas quoi dire. Elle referma sa bouche et le garçon sourit, elle se rassit sur son tabouret et le garçon pris la parole :

-C'était une belle mélodie.

Siam hocha la tête, le garçon se dirigea alors vers le piano, l'ouvrit et posa ses doigt sur les touches. Il reprit :

-Je n'avais jamais envisagé la musique comme un échappatoire, mais peut-être qu'elle pourrait l'être.

Il s'assit sur le tabouret du piano et regarda Siam qui demeurait silencieuse, son violoncelle à la main, il demanda :

-Tu m'accompagnes ? Pour de simples arpèges pour commencer, il faut que je m'échauffe haha.

Le petit rire du garçon réveilla la jeune fille, si elle restait muette, il allait la prendre pour une folle. Siam sourit et montra son approbation dans un regard puis elle positionna ses doigt sur la touche, tandis que son archet se posait sur les cordes. Elle attendit que le garçon commence à faire quelques arpèges pour l'accompagner un peu au hasard...

Le garçon jouait plutôt bien, enfin de ce qu'elle avait vu pour l'instant, elle se demandait ce qu'il avait voulu dire lorsqu'il avait annoncé qu'il ne considérait pas la musique comme un échappatoire... Alors cela signifiait t'il qu'il considère ça comme une corvée ?
Une corvée ? De la musique ? Siam n'avait jamais vu ça comme ça mais en effet, si on ne prend pas de plaisir à jouer, on ne peut pas s'échapper...

Lorsque les arpèges furent finies, Siam finit par prendre la parole :

-Attend ! Comment tu t'appelle ? D'où viens tu ? Enfin je veux dire, tu es qui quoi ?

Siam se serait frappée pour avoir dit ça, quelle stupidité, nan mais vraiment....

Il s'agissait là de simples arpèges, mais il vit que la jeune fille arrivait tout de même à improviser et le suivre. La majorité des personnes aurait probablement refusée, ne se sentant pas suffisamment compétentes pour le faire. Cette Serdaigle devait avoir confiance en ses capacités pour l'avoir suivie, ou alors réellement aimer la musique, c'était ce que se disait Isaac en tout cas. Il pencherait néanmoins plus pour la seconde option, puisqu'il semblait y avoir de réelles émotions lorsqu'il la surprit à jouer précédemment. Ils continuèrent ainsi une une bonne dizaine de minutes, puis il conclut. Et ce fut l'instant d'après qu'elle lui posa une multitude de questions. Elle semblait paniquée. Des personnes font des crises d'angoisse à chaque minute en dehors de cette salle à cause de tous les événements qui se produisent à l'extérieur, et elle, elle panique parce qu'elle pense qu'il allait s'en aller rapidement. C'était assez comique pour le coup, et il en avait bien besoin. Il rit légèrement en levant la tête vers elle, la regardant par-dessus le piano.


- Ne t'inquiète pas, je ne vais nul part.. Pour l'instant. Et puis, c'est pas très poli de demander l'identité d'une personne sans se présenter avant.

Son sourire s'emplit de malice tandis que ses yeux se plissèrent, le voilà qui reprenait ses piques de taquinerie. Il commençait à réellement se détendre, mais se demandait intérieurement s'il en avait le droit. N'était-il pas justement l'un de ceux qui ne le devaient pas, au vu de sa famille ? Il soutint son regard un court instant, puis finalement se dit qu'il réfléchirait à tout ça plus tard. La culpabilité ne le mènerait nul part, alors autant profiter de ce court instant de repos. 

- Je m'appelle Isaac Avery, et je suis un élève de première année à Serpentard comme tu peux le voir à mon uniforme. Puis, toujours avec ses manies taquines, il continua à donner des informations inutiles sur sa personne. Mon groupe sanguin est B, je suis né à Little Hangleton et j'y ai grandit là-bas. J'ai une petite-soeur du nom de Selena, et je pense d'ailleurs qu'elle se rendra à Serdaigle, comme toi. Tu veux savoir autre chose ? Et il lui sourit jovialement, un beau sourire innocent qui était là dans le simple but de lui lancer un pique de moquerie.

Bon, sans conteste, la façon dont elle avait demandé le nom du garçon était malpolie... Mais elle aussi pouvait lui faire remarqué que, rentrer dans une salle ou quelqu'un joue et s'incruster au piano n'était pas très poli non plus. Elle allait répliqué d'une façon loin d'être gentille lorsqu'elle remarqua une lueur de malice dans les yeux du jeune homme.

Elle garda alors le silence sans quitter des yeux le garçon qui reprit, de manière plutôt insolente qu'il s'appelait Isaac, qu'il était à Serpentard et plein d'autres informations d'une importance assez peu cruciale. Il demanda ensuite si elle souhaitait savoir autre chose.

Siam foudroya le dénommé Isaac du regard, alors que celui-ci souriait, semblant visiblement s'amuser de la situation. La petite blonde soupira, cela ne servait à rien de répondre et de toute façon elle n'avais pas de bonne répartie à lui lancer à la figure. Elle reprit la parole avec un petit sourire :

-Ok, ok, c'est bon... Tu as gagné ! Moi je m'appelle Siam et je ne connais pas mon groupe sanguin au cas où ça t’intéresserait. J'ai un grand frère moldu et j'avais une petite sœur aussi. Tu veux savoir autre chose ?

Elle s'interrompit puis, se rendant compte que à la base c'était elle qui l'avait agressé avec ses questions et qu'elle n'avait pas fait preuve d'une très grande délicatesse les deux fois ou elle avait ouvert la bouche, elle reprit :

-Excuse-moi... Avec toutes ses histoires et tout ce qui ce passe en ce moment, je suis un peu trop sur le défensive.

Elle fit une petite pose, pour réfléchir et repris :

- Tout à l'heure tu as dit que tu ne considère pas la musique comme un échappatoire... Mais aime-tu vraiment jouer ou est-ce une corvée pour toi ?

Pour la fillette, son violoncelle avait toujours été là pour la consoler. En fait, lorsqu'elle ressentait trop de colère, elle jouait et la colère disparaissait. Lorsqu'elle était triste, elle jouait et tout paraissait tout à coup beaucoup plus supportable. Elle ne voyait pas, il est vrai, à quoi un instrument pouvait bien servir a part à se sentir mieux...

Alors elle avait un grand-frère moldu.. Elle ne devait pas être rassurée par les temps qui courent. Mine de rien, chaque élève de Poudlard était directement impliqué dans cette histoire de nouveau gouvernement, bien que certains n'y accordaient d'importance sous prétexte qu'ils étaient "jeunes", et n'étant pas né-moldus, "en sécurité". En revanche, elle n'avait pas dit qu'elle a une petite-soeur, mais parlait belle et bien au passé, comme si elle n'en avait plus.. Cela signifiait-il qu'elle était décédée ? Etant moldue également, peut-être s'était-elle faite avoir..? Le regard d'Isaac gardait sa pointe de malice et ne laissait transparaître son doute, mais au fond, il espérait que ce n'était pas le cas. Lui-même avait une petite-soeur à laquelle il tenait énormément, c'était peut-être même pour elle qu'il allait être en faveur de ce nouveau gouvernement.. L'imaginer décédée n'était tout simplement pas une option, c'était inconcevable, inimaginable, et il s'assurerait personnellement que ça n'arrive pas, parole d'Avery. 

- Il n'y a pas de mal, ne t'inquiète pas. Je t'ai un peu cherché, en même temps.

Il ricana légèrement, avant d'être pris au dépourvu. Ah, il ne s'attendait effectivement pas à se faire poser cette question, même si maintenant qu'il y pensait, elle était complètement anticipable. Il leva son regard un instant, semblant réfléchir à la réponse qu'il devait apporter. Il était certain qu'il ne s'agissait pas d'une corvée, après tout ça ne le dérangeait pas de jouer, mais aimait-il ça pour autant ? La musique était ce qui le liait à sa mère, alors il semblait naturel qu'il apprécie mais depuis son décès, il n'y avait plus de plaisir, il y avait simplement des mélodies, des notes, des sons, des rythmes, des partitions. En fait, peut-être s'en fichait-il ? En jouer ne le dérangeait pas, et le faire avec sa mère l'amusait, ni plus ni moins. 

- Je ne sais pas vraiment..  A vrai dire, je n'y avais jamais pensé jusque là. 

Et c'était vrai, son esprit était bien plus occupé par ses lectures en avance des programmes d'Histoire de la Magie et de Défenses contre les Forces du mal, par des histoires sur de grands sorciers ou même sur la légilimancie qui l'intéressait particulièrement, ainsi que pour la magie noire.. Bien qu'il s'abstiendrait de dire ce dernier point à haute voix.

- Qu'est-ce que tu aimes, toi, dans le fait de jouer du violoncelle ?

Peut-être pourrait-il ainsi se donner une idée de ce qu'est ce plaisir, peut-être aimait-il cela mais il ne s'en rendait tout simplement pas compte à cause du manque d'intérêt ? Mais quand il jouait, il le faisait sérieusement et ne tolérait pas l'échec.. Maintenant qu'il y pensait, ce sujet était peut-être plus complexe que ce qu'il pensait.

Ce qu'elle aimait ? Tout. Sauf la corne qui s'était formée sur le bout de ses doigt a force d'appuyer sur les cordes. Mais c'était dérisoire.

Ce que Siam ressentait, elle ne savait pas comment l'expliquer à Isaac sans passer pour une folle. En fait parfois elle-même avait du mal à mettre des mots sur ce qu'elle ressentait. "Certaines émotions sont plus fortes que n'importe quelle belle paroles" disait parfois le père de la jeune fille. Pourtant, Siam se risqua à expliquer ce qui lui plaisait :

-Ce...C'est dur à dire. Il y a tellement de choses merveilleuse dans le fait de jouer du violoncelle... Un des trucs les plus importants pour moi c'est que, quand je joue, je suis la seule responsable de ce qui sortiras de mon violoncelle et que je peux en faire ce que je veux. Je peux choisir le son qui sortira et la façon dont il seras joué.

Elle fit une petite pose, incertaine de ce qu'elle s’apprêtait à dire mais pourtant...

-En réalité, j'ai le sentiment que la même note peux avoir des significations émotionnelles différentes suivant ce que je veux en faire, de cette note.

Au fond d'elle, maintenant, elle en était sure.

-Et puis quand je joue, j'aime tout simplement sentir les cordes sous mes doigt, l'archet sous ma main et l'odeur de la colophane aussi. Et la musique, j'aime écouter la musique. Celle des autres ou la mienne.
Voilà.

Siam regarda ses pieds, ce qu'elle disait était bien faible par rapport à ce qu'elle aurait voulu dire, expliquer. La petite blonde commençait à avoir mal à la tête et elle n'en pouvait plus. Elle n'en pouvait plus de s’inquiéter en réalité. Pour ses parents. Pour son frère. Pour elle aussi, elle devais se l'avouer.

La jeune fille se secoua, elle était en pleine conversation et elle n'allait pas laisser un petit mal de tête venir l'énerver.

Isaac l'écoutait, peut-être même plus attentivement qu'il ne le laissait paraître avec son attitude dégagée. Il la regardait hésiter avant de continuer à décrire certaines sensations, sûrement là la manifestation de sa gêne quant au fait d'exprimer à haute voix son ressenti intérieur. Ou du moins, d'une fine partie. Et il tentait d'imaginer, d'assimiler ça à des sensations qu'il aurait lui-même éprouvé quand il s'était mis au violon.. Rien. Il n'avait que les bases du violon, mais ne savait pas en jouer, il n'avait pas de passion particulière concernant cet instrument à corde qui lui permettrait de comprendre les sensations que la jeune fille entretient avec son violoncelle. Alors il reposa délicatement ses doigts sur quelques touches blanches du piano, l’effleurant comme si elles allaient se détruire au moindre touché trop abrupt. Il leva son regard vers la Serdaigle, elle semblait perturbée. Peut-être que parler de ces sensations avaient éveillé une certaine mélancolie chez elle ? 

Ses yeux passèrent de la jeune fille blonde aux touches aussi blanches que sa peau, et sa main gauche vint rejoindre la droite sur le clavier. Il posa ses doigts dessus, un à un mais fluidement, tous sur des touches soigneusement choisies. Il fit de même avec son pied droit qui vint se poser sur la pédale de droite. Et il appuya. Et il joua. Sa main gauche répétait les mêmes notes encore et encore au début, tandis que la droite venait harmoniser par une mélodie plus libre et détachée, tandis que son pied appuyait à certains moments, en fin et début de mesure pour laisser quelques notes résonner alors que d'autres s'y mêlaient. 

Il s'agissait du morceau qui pouvait avoir le plus de symbolique dans ceux qu'Isaac connaissait. Il s'agissait du dernier morceau que sa mère lui avait appris, de celui qu'il avait appris le plus rapidement, d'un morceau qu'il voulait maîtriser plus que les autres. A vrai dire, il ne se souvenait même plus de la partition, ses doigts bougeaient machinalement sur le piano, comme si ils se souvenaient de cette mélodie et, que par instinct, se dirigeaient là où ils avaient leurs places. Alors il pensa à sa mère, à ses cheveux aussi bruns que les siens, à ses yeux verts qui pouvaient être les plus méprisants tout comme les plus compréhensifs qui soient, à sa musique.. A elle. Et il était mélancolique... Mais cela n'avait rien à voir avec le fait d'aimer la musique, d'aimer jouer, il ressentait, voilà tout. 

- Non, je ne sais pas. 

Lorsque les premières notes du piano résonnèrent dans la pièce, Siam ferma les yeux. C'était, d'après elle la meilleure manière d'apprécier une musique. La jeune fille ne connaissait rien au piano mais la mélodie était magnifique. Elle aimait tellement la musique et ce morceau...

Quand Isaac termina le morceau, elle garda les yeux fermés, dans l'espoir de laisser les dernières notes résonner dans sa tête encore quelques secondes. Une voix, celle du garçon pris la parole :

-Non je ne sais pas.

Siam hocha la tête, pour signifier qu'elle comprenait plus ou moins ce qu'il entendait par là, puis les mots s'échappèrent d'elle sans qu'elle le décide :

-C'était tellement beau...Je..J'ai beaucoup aimé...

Elle avait sans doute l'ai niaise avec sa déclaration qui auraient pu être juste des paroles en l'air mais, la jeune fille savait qu'elle ne mentait pas. Elle avait vraiment aimé le morceau d'Isaac, et celui-ci l'avait joué avec intensité et, elle sentait des sentiments, sans savoir lesquels, cachés derrière la mélodie.

Pourtant d'après la réponse de Isaac, il ne semblait pas convaincu que jouer puisse être source d'émotions. Elle voulait savoir si il aimait écouter, elle avait une idée.

Sans réfléchir, Siam replaça son violoncelle entre ses genoux, repris correctement son archet et commença à jouer. Comme chaque fois, elle ferma les yeux, elle décida de jouer du Bach. Le morceau n'était pas particulièrement facile et elle devait se concentrer. Mais au bout d'une minute, ses mains jouèrent pour elle sans qu'elle ai besoin de leur dire quoi faire.

Elle décida d'ouvrir les yeux, sans pour autant cesser de jouer, elle regarda Isaac, ce qui l'obligeait à tourner légèrement la tête. Elle sourit et termina son morceau, la note finale, en double corde retentit dans la pièce et ne sachant que faire d'elle même, elle resta en position, sans jouer.

Beau ? Peut-être que c'était le mot, il ne le savait pas vraiment. Cette musique lui avait toujours semblé surchargée, mais peut-être qu'aux oreilles des autres, la mélodie de la main droite permettait d’alléger le tout, de l'harmoniser. Peut-être pourrait-il un jour tenter de créer sa propre version de cette musique, avec différents accords. Quoiqu'il en soit, il fut sorti de ses pensées par le son d'un violoncelle. Il en fut légèrement surpris même, et bien que ne le montrant pas car se contrôlant. Il était souvent perdu dans ses pensées depuis qu'il était dans cette salle, des pensées inutiles, divagantes. Etait-ce dû au calme ? A cette fille ? Ou à la musique peut-être ? Il n'était pas du genre à perdre son attention, mais il fallait le reconnaître, ce n'était pas la première fois qu'il le faisait en moins d'une heure. 

Son regard croisa celui de la jeune fille, puis comme s'il s'agissait là d'un signe, il ferma à son tour les yeux. Il écouta les notes lui parvenir jusqu'aux oreilles, imaginant cette Serdaigle la jouer, changer d'environnement, ils changeaient de lieux. Même si elle était fière de sa condition de sorcière, Nona Avery appréciait particulièrement la musique classique moldue, alors Isaac avait grandi avec elle. Ainsi, il reconnut Bach, même s'il avait une préférence pour Tchaïkovski. A vrai dire, il ne les connaissait pas tout non plus, uniquement Beethoven, Bach, Mozart, Chopin, Rachmaninoff, Schumann et Tchaïkovski, ainsi que leurs plus grands morceaux, mais l'intégralité de sa culture musicale s'arrêtait là, avec quelques morceaux de films moldus que sa mère avait appréciée. Cette culture était entièrement issue de cette dernière, elle ne lui avait transmis que ce qu'elle même appréciait, et par conséquent il devait sûrement manquer nombre de talentueux compositeurs. Il ne savait rien des autres style de musique, à condition qu'il les ait déjà entendu ne serait-ce qu'une seule fois, ni même des traditionnels chants pour enfants. 

Quand la dernière note retentit, il attendit qu'il n'y ait plus aucun son avant de rouvrir les yeux, voyant cette fois le doux sourire de la violoncelliste. Il ne savait pas s'il devait lui sourire en retour, alors il en esquissa un léger, très léger se voyant à peine, puis baissa presque aussitôt la tête. Que devait-il dire, que c'était beau aussi ? Non, elle devait sûrement attendre autre chose de sa part. Il n'arrivait pas à réfléchir, ou peut-être n'en avait-il pas envie pour le moment. Il ne faisait que ça, encore et encore, en plus d'analyser les gens et tout ce qui les concerne. Il ne s'en rendait pas compte lui-même, mais cela était fatigant à force. Alors peut-être pourrait-il ne pas avoir besoin de dire quoi que ce soit ? Elle lui avait dit qu'une même note pouvait avoir plusieurs significations sentimentales différentes.. Alors peut-être que là pourrait se trouver son moyen de communication ? Il ne pouvait plus réfléchir aux mots qu'il devrait dire, ou plutôt, ne le voulait plus. 

Alors il leva son regard sur elle à nouveau, puis après l'avoir regardée dans les yeux, ce dernier se posa à nouveau sur le clavier de son instrument. Et il se mit à jouer un morceau d'un film moldu, un film qui concernait une certaine personne ayant sauvé des juifs en faisant croire qu'il les exploitait durant la Seconde Guerre mondiale. Bien qu'il ait vu le film, son jeune âge ne lui avait encore permis d'en comprendre le caractère exceptionnel, il le trouvait spécial et magnifique, voilà tout. Peut-être qu'en le regardant à nouveau après s'être informé sur cette période de l'Histoire moldue lui permettrait de mieux le comprendre, mais ce n'était pas ce qui l'intéressait pour le moment.

 S'il y avait bien quelque chose qu'il appréciait chez les moldus et qu'il leur reconnaissait, c'était ce talent de composer. Le reste, il s'en fichait, ne voulait même pas en entendre parler. Peu lui importait. Mais cette faculté de créer était belle et bien la seule chose qu'il leur reconnaissait. Puis vint le moment où le morceau se finit, il leva délicatement ses mains du piano, gardant ses yeux posés sur les touches, ne disant rien et ne bougeant pas. Après un moment, il finit enfin par lever son regard vers la jeune fille. Allaient-ils continuer longtemps ainsi, à jouer un à un des morceaux ?