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06 mai 2020, 05:41
 Privé   RPG++  Rains of Castamere  A.N 
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3 mai 2045, vers 8h30
Poudlard
Salle de répétition


Une lame, un poignard dans le cœur… Une douleur lancinante enserre ta poitrine… Comme une lame d’épée qui te laboure les entrailles, les déchiquetant par à coup. Puis le froid qui t’enserre de son étreinte morbide. Qui appuie de ses doigts rachitiques sur ta gorge, tu as besoin d’air, tu inspires, mais l’air ne vient pas. Lui aussi te fuit… Lui aussi… Ton monde s’est écroulé, tes certitudes se sont ébranlées, ton château s’est effondré. Tout n’est plus que ruine, désolation, amas de cendre de boues et d’organes mis à nu. Tout n’est que violence, douleur, pleurs, larmes. Dans un cycle éternel, tu ne ressens rien, ni le froid, ni la solitude, juste cette douleur.

Cette douleur, la douleur… Le mal qui te ronge, te dévore, te déguste comme on le ferait pour du bon vin. Mais tu n’es pas du bon vin ! Tu es toi ! Mais est-ce que ce toi à encore un sens, une raison d’être. Rien n’est moins sûr. Plus rien n’est sûr, pas même ta propre passée, ni ton présent et ton futur n’est rien. Absent, inexistant. Une ardoise que l’on avait effacée à l’encre de sang.

Douleur, larme, tristesse… Larme, tristesse douleur. Tu ne ressens que ça, tu ne t’autorises à ressentir que ça. Ah que tu mourrais d’envie d’étriper ce foutu volatile qui t’as apporté la lettre ce matin… L’étriper et le jeter aux flammes, c’était cruel… Rien à foutre ! Tu n’en avais rien à faire, rien à cirer… Tu n’es plus qu’une pauvre petite coquille vide, rongé par l’acide, dépourvu de sens, de sentiment. Immoler ce foutu hibou ne t’aurait posé aucun cas de conscience. C’est lui le responsable… Lui ! Et personne d’autre ! La vie de ce hibou n’était qu’éphémère, rien ne dure dans ce monde pourri ! Les hiboux, les guerres, le bonheur. Rien, Néant, Rideaux ! Le bonheur. Tu ris jaune, tu ris d’un rire gras, disgracieux, un rire moqueur. Quelle belle ânerie ! c’est un ramassis d’idioties qu’on utilisait pour faire miroiter l’impossible. Le bonheur était vain, une chimère humaine ! Rien de plus ! Tes pensées étaient confuses, tu bouillonnais d’un trop plein de rage, de violence, de colère. Envers elle, lui, mais surtout toi ! Trop bête, trop idiot, tu l’avais vue venir. Oui, mais même si l’on voit venir la vérité… La claque fait toujours mal.

Eh ! quel claque tu as pris sur la figure ! Le genre de claque qui marque et qui ne s’efface pas. La gifle du siècle, tout cela mêlé à cette lame qui te remuait les entrailles et labourait tes chaires ne faisait que renforcer cette envie de vomir qui ne te quittait plus. Vomir ta haine, cracher ton désespoir, exalter tes pleurs… À quoi bon pleurer ! Ça ne servait à rien, la tristesse attisait la haine, la haine enflammait la tristesse. Un véritable cercle infernal…

Quelle belle connerie, l’Amour ! L’amour de quoi ? Du travail ! Une connerie… L’amour de son prochain, tu parles dès qu’il peut, il n’hésitera pas à te rouer de coups alors que tu es au sol. Ton sang pulse à travers tout ton corps, peut-être allait-il s’échapper du trou dans la poitrine… Tu pouvais bien crever la bouche ouverte dont il ne s’en soucierait pas à partir de maintenant… Quelle bande d’hypocrites, de tartuffard… La croisière de décembre, c’était pour quoi ? Se débarrasser de toi… Qu’ils aillent au Diable, tous ! Absolument tous ! On t’avait écarté, comme on écarte un moucheron, un indésirable… Tu ne valais pas mieux que ça… Tu n’étais plus qu’une boule… Une boule de rien, de néant de vide. Insensible, comme enfermer dans un cocon sanglant.

Tu exultes, tu cries silencieusement, personne ne t’entend, de toute façon tu es seule ici… Seul face à toi même, ce torchon encore dans les mains… Pas de cheminée. Merde ! Tu en fais une boulette et l’envoies s’écraser contre une fenêtre… Fenêtre 1, lettre 0. Tu aurais aimé que la fenêtre se brise, que ce bout de papier, ce torchon infâme disparaisse de ta vue, de ton esprit. Que tu puisses faire genre tout va bien, circulez et foutez-moi la paix.

Ton pas était lourd, pesant, oppressant. Tu naviguais, à l’aveuglette, seul… Ce mot t’oppresse, te remplit l’esprit… Seul… Oui, tu es seul ! Désespérément seul… Ta furie repart de plus belle, à toute berzingue… Tu ne sais pas pourquoi tu es là… T’as pas joué depuis longtemps… T’sais même pas si y’a un piano, et puis pourquoi tu jouerais…

Y’a une voix… C’te voix tu la connais pas, mais elle te dit que ça peut t’aider… Va crever la gueule ouverte foutue voix… Tu te prends la tête entre les mains. Tes pas s’accélèrent, ton cœur bat la chamade. Tes mains sont dans tes cheveux, arrachant ces derniers… Tu exultes d’une colère. Une rage solitaire… Un désespoir bruyant… La pièce se met à tourner… Ton esprit a vrillé… Qu’elle est bonne cette colère. Celle qui vous emplit les entrailles, qui prend le contrôle… Une colère destructrice, mais qui protège ton âme morcelée. Car ouai mon gars, t’es mal… Mal dans ta peau. Mal dans ta chair. Mal jusque dans ton être… T’es foutu, une loque, un débris. Voilà ce que t’es ! Voilà ce que tu vaux, même pas un galion. T’es ridicule mon gars à bouillonner comme ça !

LA FERME ! Tais-toi… Juste, tais-toi, tu apprécies ce silence, ce silence dans lequel tu t’es emmuré. Et dont tu ne veux absolument pas t’échapper. Tu bouillonnes… Exulte… Mais en silence. Tes pas sont vifs, il tape le sol, en pagaille, tu ne fais pas attention où tu vas… Heureusement que tu es seul… Seul… Ouais, t’es affreusement seule maintenant. Et tu connais la meilleure, va falloir faire avec… Car c’est terminé, fini, rideau ! À cette pensée, tu repars au quart de tour. Ton cœur frétille de haine de rage, de colère… Puis tu aperçois ce foutu papier, inerte, comme mort, sur le sol. Et là tout s’arrête tu restes immobile…

Pétrifié, incapable de bouger, une statue que l’on brise à grand coup de massue. Et on la brise de bon cœur en plus ! Tu ne dis rien, tu n’as rien dit depuis que tu es entré par hasard dans cette pièce, une salle de musique apparemment. T’avais repéré un piano dans un coin… T’avais juste envie de l’exploser… De tout explosez, mais tu t’étais retenue… Tu redescendais progressivement… T’étais où ? Pourquoi ici ? T’en avais aucune idée. Pourquoi ici ? Surement parce que t’es seul. La solitude, ça allait devenir son nouveau cocon, sa nouvelle peau. Il avait besoin d’exulter, sa tignasse blonde aurait pu virer au rouge ardent tant tu bouillonnais. Tu veux détruire quelque chose, la lettre qui se trouve en boule quelque part dans la salle ne suffit pas. Tu veux détruire… Détruire quelqu’un, détruire quelque chose comme toi on t’as détruit. Comme ce bout de papier imbibé de tes larmes invisibles, ces monstres ne les méritaient pas, tes larmes. Ce bout de papier avait brisé, fissuré, fait voler en éclat ton monde. Tu avais précipitamment quitté la grande salle, presque en courant. T’avais besoin d’exulter, de crier ta rage silencieusement. Sauf que cette fois le silence fut brisé et tu poussas un cri, de rage, mais tinté d’une note de désespoir.

Ton idéal, ton petit monde rêvé était perdu à jamais, on lui avait coupé la tête sur l’échafaud… Maintenant, une époque incertaine arrivait, l’hiver vient… Et tu ne savais pas comment ça allait finir cette histoire… T’en avais rien à foutre après tout… Tu voulais plus les voir… Ce hibou à la con, leur tronche… Tu voulais plus rien, te délaisser dépérir ici te semble tout à coup l’idée du siècle. Il est tôt et personne dans la salle. Seulement toi, ta rage, et cette lettre. Une lettre ! Une putain de lettre ! Ils avaient vraiment rien trouvé de mieux… Des lâches, des pleutres, des imbéciles ! Ou alors c’était peut-être toi le lâche, l’imbécile. Tu te rattaches depuis si longtemps à des chimères éphémères. Et ouais, quand tu tombes ça fait toujours mal. Et là, t’étais tombé de haut et sans parachute. T’étais étale au sol, comme un jambon… T’avais pas envie de bouger, c’était agréable de sentir les os de ton âme se briser un à un. Sentir une lame invisible, lacérer, arracher, déchiqueter ton âme. Morceau par morceau. Bout de viande spirituelle par bout de viande. On te dépouillait peu à peu.
Ton corps était déformé par la rage qui t’habitait. Une veine pulse sur ta tempe, tes poings serrés donnaient un air blafard à tes mains. La circulation sanguine devait être coupée tellement tu les serrais. Mais t’avais pas mal, on aurait pu tu amputé que tu aurais à peine crié. Y’avait un court-circuit, un plomb qu’avait sauté quelque part. T’étais entrain de disjoncter c’était certain. Rien à cirer. Tu aimais cette colère, cette rage qui emplissait ton esprit, qui le détournait du trou béant dans ta poitrine. Ce trou qu’avaient laissé ces mots, cette trahison. Tout te semblait désormais fade, insipide, la vie n’avait pas de saveur.

La vie est une ordure… Et tes parents aussi. C’était pas le hibou que tu aurais voulu immoler c’était ces deux-là. Ils s’étaient bien foutus de ta gueule en décembre quand t’avais reçu une lettre comme quoi tu pouvais pas rentrer chez toi. Il s’était bien payé ta tronche. Tu étais bien passé pour le dindon de la farce. Mais la colère reste en toi, tu inspires colère, tu expires rage, tu penses haine, tu vis le désespoir qui emplit ton âme. Tu as besoin d’expier tous ces sentiments, cette colère sourde qui bat le tempo dans ton esprit… Tu te souviens d’un piano…

Un piano… Tu ne sais pas à quand remonte la dernière fois que t’en as joué.. Rien a foutre, tu t’approches du piano, y reste quelques partitions que t’envoie promener par terre d’un geste de la main… C’est des conneries… Elle tombe par terre pendant que toi tu t’installes sur le petit tabouret, relevant le couvercle qui protégeait les touches.

Les protégeaient de quoi ? De toi, imbécile, de toi et de ta colère silencieuse, sourde. Tant mieux, sa colère bouillonnait et il dut se faire violence pour ne pas taper du poing sur les touches. Il voulait les abîmer, les détruire comme lui l’était. Une pauvre petite loque dont l’esprit était recroquevillé là quelque part entre deux interstices sombres et obscurs. Tu dois te faire violence pour ne pas refermer violemment le couvercle. De toute façon, tu ne connais que ça depuis tout à l’heure : la mer de colère, le fleuve de la haine, l’écume de la violence. Tu inspires grandement, ça va rien changer, mais c’est pour te donner une certaine contenance au cas où quelqu’un rentre. Y’a pas de chance, tout le monde mange. Tout le monde rit, chante, se raconte des blagues et toi tu es là. Avec toi même, en tête à tête avec ce piano. Avec ces touches noires et blanches, tu n’es plus que noir, le blanc t’a quitté.

Tu observe ce piano, glisse tes doigts tendus dessus, tes gestes sont brefs, emplit d’une certaine colère que tu peines à contenir. Tu appuies sur une touche blanche, puis une noire. Le son est le reflet de ton idée de ce monde en ce moment : disgracieux, moche, horrible. Alors tu essaies quelques autres accords, des bribes de souvenirs, tu n’as pas pratiqué depuis longtemps. La musique qui émane du piano est forte, ton doigté est colérique et cela se ressent même jusque dans la musique que tu joues… Tu t’arrêtes, ça sert à rien… Ça fait rien et ça t’énerve… Tu hésites entre te lever et poursuivre… Tu choisis finalement la deuxième option. Tu vas le faire morfler ce piano ! Il va devenir le réceptacle de ta colère. Lui au moins ne se plaindra pas, il ne dira rien et te laissera le martyrisé de ta folie furieuse sans un mot. Tu inspires un grand coup et fermes les yeux, tes doigts se posent sur les notes et rapidement tu trouves une mélodie. Elle est rapide, emplit d’une certaine furie, tant dans l’expressivité que tu tentes d’insuffler dedans que par tes gestes, tu martyrise littéralement les touches du piano, les notes s’enchainent, se repoussent. Elles se haïssent, ces notes. Mais tant pis. La mélodie est brutale, un combat, voilà ce que symbolise cette musique. Un combat à mort, plein de rage, de colère, de haine. Tu transmets toutes tes émotions au piano… La mélodie est vive, abrupte, parfois dissonante, mais tu t’en tamponnes. Tu as cet irrésistible besoin de jouer. Jouer pour oublier qu’on t’a abandonnée. Que t’es qu’une loque, une boule de cristal brisé… De toute façon t’es idiot tu l’avais vu venir nan ? Ça se voyait comme le nez au milieu de la figure, c’était qu’une question de temps t’façon. Même Julian était d’accord là-dessus. Ça allait de Charybde en Scylla et toi idiot que tu es tu te laisser bercer par une illusion illusoire, le bonheur. La famille, c’était une belle connerie ça aussi, ça volait en éclat à la moindre secousse. D’un côté, tu te sentais responsable, c’était depuis ta naissance que ta mère était distante. Elle te voulait pas aussitôt et te l’avait longuement fait payer… Ton paternel aussi te l’avait fait payer à sa façon, mais tu te refusais d’y penser maintenant ça serait jeté de l’huile sur une Feudeymon. Tu te contentais d’extérioriser cette rage, cette colère, ta peine, ton désespoir. Voilà ce que tu essayais de transmettre à travers ta musique, elle était énergique, forte, assourdissante. Tes yeux étaient clos, tu profitais, tu ne voulais pas voir tes doigts martyriser ces blanches et ces noires qui n’avaient rien demandé. C’était mieux que d’égorger un hibou après tout. Alors tu te contentais de jouer…

La mélodie changea, elle devenait encore plus brutale, les notes étaient violentes, affûtés tranchantes comme le fil d’une épée. Elles s’assemblaient, s’entrechoquaient puis se disloquaient. Les notes étaient éphémères, mais la mélodie, elle, demeurait. Tes doigts filaient à toute allure sur le piano… D’un côté vers l’autre, même ton pied martyrisait la pédale en dessous pour donner plus d’ampleur, d’amplitude aux notes. Tu jouais une mélodie plus vive, brutale, les épées s’entrechoquaient, les boucliers se brisaient, les chevaliers était désarçonné. Une mélodie pleine de rage de colère, de haine, de désespoir. Oh oui, de désespoir… Car ta colère était savamment distillée de désespoir… Les larmes montèrent à tes yeux, sans que tu t’en rendes compte. Tu te mis à pleurer, pleurer sans un mot ni un bruit qui était couvert de toute façon par la mélodie tonitruante que tu jouais. Tu pleurais à chaude larme, ta main tremblait ajoutant une certaine teinte à ta mélodie. Une teinte de mélancolie. On t’avait arraché une partie du cœur que jamais rien ne pourrait remplacer. Tu mettais ce déchirement en musique, ton visage baignait de larmes, et celles-ci tombait lentement sur les touches, indifférentes à leurs couleurs qu’elle soit blanche ou noire. Pourquoi ? Pourquoi ? POURQUOI !

Tu ne comprenais pas, tu étais comme ailleurs, ton cerveau était sur pause, tu ne réfléchissais pas laissant libre cour à tes émotions, à cette haine qui te bouffait les entrailles, cette colère silencieuse. Tu laisses libre cours à cette folie furieuse, et tu pousses à nouveau un cri. Puissant, déchirant, celui d’une âme en peine. Ce cri se mêle à la mélodie vive qui émane du piano. Les touches deviennent humides, tes doigts te font mal à force de taper sur les touches si bien que tu abats ton poing droit sur un ensemble de touches avant de poursuivre ta mélodie. Pourquoi tu ne t’arrêtes pas, t’en sais rien ! Tu n’as pas envie d’arrêter de toute façon. Tu n’en as pas envie pas vrai ? Tu veux rester là à jouer, à jouer une mélodie furieuse et déchirante. Jouer pour guérir tes blessures, en voilà un bel d’idée stupide. T’avais toujours que des idées stupides de toute façon. Ça en ferrait qu’une de plus. Tu sentais toujours cette lame, ce long coutelas qui te labourait la chair, la découpant en de minces filaments, ce poignard fiché en plein cœur. Ce poignard que tu ne pourrais surement jamais retirer…

Alors pour apaiser la douleur, essayer de ne pas y penser tu jouais. Parce que sinon tu aurais surement tout détruit autour de toi. À coup de poing, de pieds, de tête même s’il l’aurait fallu. Tu préférais canaliser tes ressentis dans la musique, tes larmes baignaient encore ton visage, dans un flot qui ne se tarissait pas. Mais tu ne parlais pas. Pas un mot, tu transmettais tous tes mots douloureux, ta lourde peine à travers la musique. Ignorant tant bien que mal la douleur lancinante qui te ronge les entrailles. Tu continuais de jouer, toujours cette même mélodie, improvisant. La mélodie se fit plus furieuse, brutale alors qu’une nouvelle vague de colère emplissait ton âme. Les notes entraient en collision, s’éloignaient et se heurtaient de nouveau. La furie emplissait ton cœur et la pression exercée sur les touches grandissait, tu les frappais, les violentaient dans l’espoir qu’elle produise une complainte agressive teintée de rage. Tu n’étais de nouveau plus que ça. Une boule de rage tapant frénétiquement sur le piano. La musique qu’il produisait était agressive, mais belle. Il cherchait à ce qu’elle soit juste agressive, afin de traduire son humeur actuelle, mais il ne parvenait pas à retirer cette beauté à la musique qu’il produisait. C’était complexe comme ressenti. Le rythme de la musique s’accélère, il devient plus frénétique, emplissant l’air d’une musique vive, pesante, agressive puis celle-ci devint tout à coup plus faible, plus normale, elle était désormais mélancolique. Ces variations étaient le reflet de ton esprit. Divisé, en colère, mélancolique. Un véritable cocktail d’émotion qui t’emplissait l’âme, jusqu’à en déborder sur ce pauvre piano. Alors que quelques instants auparavant tu frappais les touches, désormais tu les caressais, les chérissais du bout des doigts. C’était semblable à une supplique silencieuse.

Celle d’une âme en peine, celle de quelqu’un qui venait d’apprendre que ses parents se séparaient, un esprit d’enfant qu’on avait brisé, et piétiné jusqu’à l’agonie. Il criait son désespoir. Il criait en musique.


Reducio
@Arya Nightshade encore désolé pour la longueur du post, Henry m'as emporté dans sa colère. Au plaisir de continuer cette danse furieuse avec toi

Henry joue cette air au piano, de façon plus furieuse : Portoloin

2e année RP/ Code coleur : #3d85c6

07 mai 2020, 23:15
 Privé   RPG++  Rains of Castamere  A.N 
A certain darkness is needed to see the stars



Il était rare qu'Arya se lève si tôt un jour où elle n'avait pas cours. Mais, après un énième cauchemar, après avoir été aveuglée une énième fois par cet éclair blanc qui la hantait depuis ce soir-là, elle avait décidé de prendre les choses en main. Elle ne savait pas très bien d'où lui était venu cette idée, idée qu'elle avait longtemps repoussée, ne voulant même pas en entendre parler. Elle en était même terrorisée. Mais elle ignorait de quoi elle avait le plus peur : du souvenir de ce soir-là, ou bien la peur du souvenir ? Comment pouvait-elle se montrer aussi faible, aussi sentimentale ? Comment pouvait-elle être aussi peureuse ? N'était-elle pas une Gryffondor ? Elle doutait de la décision du choixpeau, quelque fois. Mais elle se savait aussi choixpeauflou, alors elle préférait ne pas penser à sa Répartition de l'année passée. Elle n'était pas comme son père. Elle n'accordait pas autant d'importance aux maisons. Elle se l'était promis. Et elle ne briserait cette promesse pour rien au monde. Elle montrerait, à ses camarades, à ses sœurs, au fantôme de son père, au monde entier, qu'elle n'était pas comme son géniteur. Et elle ne le serait jamais.

C'était ce qu'elle se répétait alors qu'elle descendait les escaliers. La salle de bal était juste en-dessous de la tour des Gryffondors, un seul étage les séparait. Chaque nuit, dans son dortoir, Arya songeait à cette soirée qui s'était déroulé juste sous ses pieds. En se réveillant ce matin-là, elle était décidée à arrêter de fuir. À arrêter de faire comme s'il ne s'était rien passé, comme si ça ne lui avait rien fait. Comme si elle était insensible. Comme si sa carapace n'avait pas été brisée, broyée ce soir-là. À moins qu'elle ne le fût déjà avant ? Et que ce ne fut que le coup fatal ? En tout cas, tout était allé de mal en pis depuis. Elle n'arrivait plus à parler. Ou en tout cas, pas tout le temps. La seule chose positive qu'elle avait pu tirer de tous ses malheurs, c'était qu'elle s'était rapprochée de Madison.

Plus elle s'approchait de la salle de bal, moins elle se sentait sûre d'elle. Affronter ses démons en face, c'était une chose, mais elle sentait déjà ses jambes trembler. Elle s'arrêta un instant au milieu de l'escalier. Respira un bon coup. Et fonça. Lentement, mais sûrement, elle réduisit la distance qui la séparait de cette salle maudite. En arrivant devant, les portes étaient closes, elle resta devant sans les ouvrir. Elle n'y parvenait pas. Son corps s'était figé, entièrement. Elle revivait son cauchemar, et surtout, l'éclair blanc. L'éclair blanc qui lui remémorait tout, absolument tout. Cet événement était pourtant déjà vieux de six mois. Mais elle ne parvenait tout simplement pas à le rayer de sa mémoire. Elle ne sut combien de temps elle resta immobile ainsi. Longtemps. Les émotions diverses ressenties ce soir-là affluaient en elle, la peur, l'adrénaline, ce stupide courage qui lui avait valu cet éclair blanc.

Elle réussit à porter sa main à son visage, juste sous son œil. Elle caressa l'emplacement où le sortilège de découpe l'avait frôlé. Sa peau était redevenue lisse, comme si rien ne s'était passé. Alors que son esprit, lui n'avait pas oublié.

Avait-elle vraiment bien fait ce soir-là ? Car après tout, qui lui dit que, si elle était restée dans son coin, dans l'ombre, comme d'habitude, il ne lui serait pas arrivé pire ? Elle ne se souvenait pas très bien de l'après, une fois qu'elle s'était écroulée sur le sol. Elle savait que Roman l'avait emmené en sécurité, que du feu s'était déclaré. Mais c'est surtout son réveil à l'infirmerie, atroce, abominable, qui l'avait marqué.

Une mélodie lointaine la tira de ses souvenirs. Enfin, la Gryffondor retrouva sa mobilité habituelle. Elle tourna la tête vers la source du son. Elle savait que la salle de répétition était tout près, au même étage. Elle ne devrait donc pas s'étonner d'entendre de la musique venait de là. Mais un mercredi, si tôt ? Après une seconde d'hésitation, elle s'approcha à pas de loup, discrètement. Plus elle avançait, mieux la musique lui parvenait. Quelqu'un jouait du piano. La mélodie avait quelque chose de furieux. Un instant, elle s'adoucit, légèrement. Avant de repartir en fureur. Arya était frappée par les émotions que la musique faisait résonner au fond d'elle-même. Elle était comme attirée, telle un aimant. Enfin, elle arriva au seuil de la salle de répétition.

Un garçon était assis au piano, seul. Ses doigts semblaient être l'essence même de la colère, la représentation en personne de la fureur. La justesse de l'émotion qu'elle percevait à travers les notes la surprirent et l'attirèrent de nouveau. C'était un première année, si elle se souvenait bien. Elle remarqua que des partitions parsemaient le sol, çà et là.

Guidée par son instinct, elle s'approcha, encore. Finalement, elle vint se placer en face de lui, et s'accouda au piano. Elle leva sur lui un regard à la fois épuisé et mélancolique. Deux âmes perdues semblaient s'être trouvées, ce matin-là.

Vous dites que c'est si beau la vie. Je veux savoir comment je m'y prendrai pour vivre.
~ Antigone, Anouilh
3èmeannée 2045/2046

09 mai 2020, 20:29
 Privé   RPG++  Rains of Castamere  A.N 
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J'ai trouvé plus de joie dans la tristesse Que vous pourriez en trouver dans la joie.
Tes doigts frappaient les touches du piano, tu n’en avais rien à faire de l’abimer. Tu avais juste besoin d’expulser. Oui, d’expulser cette colère en toi, et si ce piano devait en faire les frais, ça t’importait peu. Tu étais seul dans ton esprit, seul avec tes doigts. Ces fins doigts qui frappaient les touches du piano les martelaient de ton toucher puissant. Ça te faisait un bien fou, tu n’étais que rage, colère.

Mais cette rage était dénuée de raison, un coffre vide dans lequel tu t’étais engouffré. Car tu étais un lâche. Oui un lâche. Mais ça, tu ne voulais pas l’admettre, c’était trop dur, tu l’avais toujours sue dans le fond, que tu n’étais pas courageux. Quand tu avais un problème, tu le fuyais, tu l’oubliais, espérant qu’il se règle. Mais voilà, c’était le revers de la médaille ; la souffrance. Cette souffrance qui emplissait son cœur et que tu tentais d’exprimer à travers la musique. La musique n’était pas ton exutoire, d’ordinaire tu aurais laissé libre cours à ta colère, comme dans la salle commune où tu avais brulé cette lettre il y a de cela quelques mois. Mais voilà, tes pas t’avaient inconsciemment guidée ici. Peut-être que ta peine était trop forte pour être soulagée en brulant encore une lettre. Le mal était plus profond. Plus enraciné dans ta chair, dans ton sang, dans la plus infime partie de ton corps.

La mélodie devint plus mélancolique, tu repensais à tous ses souvenirs heureux, ses souvenirs qui n’auraient plus lieu. Oui, cela appartenait au passé, il fallait leur dire au revoir à jamais. Tu n’en avais pas envie, alors tu crias à qui voulait bien l’entendre une douce complainte musicale. Probablement que personne ne comprendrait, personne ne pouvait te comprendre en ce moment. Voulais-tu seulement que cela se produise ? Que quelqu’un t’aide à surmonter ta douleur ? Pas le moins du monde, tu t’étais enfermé dans une bulle solitaire, un carcan pour éviter toutes les piqures acerbes de la douleur. Tu avais déjà trop souffert. Tu avais atteint un point de rupture. Cette année, tout ton monde avait volé en éclat. D’abord Poudlard, la découverte de la magie, et puis ça. Tu n’en supporterais pas davantage. Était-ce l’éloignement qui les avait poussées dans cette décision, dans ce douloureux poignard fiché en plein dans ton âme meurtrie ?

Peu importe, la décision était prise, le mal était fait, l’ombre était là. Et toi, toi tu continuais à jouer, tes doigts devenaient douloureux à force de frapper le clavier comme tu le faisais, ton corps était raide, le dos droit, et tes mains. Tes mains enchainaient les notes, certaines devaient sans doute être fausses. Mais quelle importance, personne ne t’écoutait. Personne, absolument personne ne partageait tadouleur et tant mieux. C’était la tienne, tu voulais ressentir cette douleur, l’amer gout de l’échec qui emplissait ton être comme un sucre se gorge de café. C’était la tienne, et tu ne voulais pas qu’on te la vole.

Alors tu jouais, cet air triste, un impromptu fantaisie emplit d’une mélancolie furieuse. Une harmonie dissonante, mais une harmonie agréable à écouter à l’oreille. Tu aimerais qu’une oreille silencieuse écoute ta complainte musicale. La musique que produisait tes doigts qui caressaient, agressait ce clavier. Le rythme allait crescendo, puis se radoucissait, jusqu’à devenir une caresse de l’âme, un fin murmure entre les arbres. Mais ce n’était pas assez percutant, trop mélancolique. Ce n’était pas ce que tu ressentais. Il fallait du punch, de la vivacité, une colère musicale. Alors tu repartais, te fichant éperdument du monde qui t’entourait. C’était un rendez-vous manqué entre toi et ce piano. Ton seul ami, le seul qui te comprenne vraiment, tu n’aurais pas pensé dire cela. Tu n’avais pratiqué qu’en de rares occasions depuis la rentrée, pour ne pas perdre la main, souvent des musiques joyeuses, emplies de joie de vivre. Mais cette joie n’était plus, elle était enterrée, elle s’était métamorphosée. Et tu l’avais laissé partir, elle était partie sans un regard en arrière, t’abandonnant à ta colère, à ta rage. Tes barrages avaient cédé et elles inondaient désormais chaque parcelle de ton cours de leur folie furieuse.

Tu sentais que le piano lui te comprenait, il ne disait rien. Ne te jugeais pas, ne te considérai pas comme un lâche, il jouait la musique que tu te contentais de lui dicter rapidement de tes doigts. Ressentait-il ta douleur ? Non, c’était une chose, un objet. Tu entretenais une conversation silencieuse avec lui, les mots n’avaient pas lui d’être. Seule la musique comptait. La musique était devenue aujourd’hui un exutoire. Une puissante drogue contre la douleur. Et ça faisait du bien à ton âme, en soulageant tes peines. Bien que cela n’était pas des plus efficaces. Tu martelais avec ton pied une des pédales, afin de donner plus d’amplitude à ta complainte. La complainte d’une âme brisée. D’une âme qu’on avait fracturée jusqu’au plus profond de sa chair. Pourrais-tu t’en sortir indemne ? Surement pas, mais tu aurais tout le temps d’y penser à un autre moment. Mais quand ce moment arriverait-il ? Les moments n’étaient que des pages éphémères, des pages de quelques lignes. Ils étaient précieux, car rien ne disait qu’ils se reproduiraient. La preuve était sous ses yeux. Les sorties en famille, les jeux de société le soir. Les lettres. Tout ça n’avait plus cours. Et ça faisait mal. Terriblement mal.

À cette pensée, tes doigts reprirent de la vivacité et tu laissais exulter toute ta haine. Pourquoi toi ? Pourquoi eux ? Pourquoi ça fait mal ? POURQUOI ? Tes doigts possédaient leur propre volonté, tu ne pensais pas, tes doigts jouaient la musique qu’ils désiraient, vaguement guidée par des instructions floues de ton cerveau, causant cette alternance pour le moins étrange. Ne dit-on pas que la musique est le reflet de l’âme ? La tienne est divisée, la Joie livre bataille contre la Colère, l’Abandon tirait à feu nourri sur la Compassion. Et au milieu de ce sanglant champ de bataille. Toi, toi qui jouais, qui essayait de retranscrire tes émotions. Mais ces batailles étaient-elle réelle, ou juste le fruit d’une imagination en proie au désespoir. Tu pensais y être préparé, physiquement peut-être, tu n’avais pas tremblé en recevant ce foutu hibou que tu avais toujours envie d’étriper. Mais mentalement, ton âme était un vase qui s’était brisé en mille morceaux. Et bien patient devra être celui qui les recollera pour redonner leur unité de sens à ses fragments.

Ton regard fut attiré par du mouvement à côté de toi ? Qui était-ce, une fille apparemment. Peut-être était-elle venue récupérer ses partitions. Ces mêmes partitions qu’Henry avait envoyé balader et qui gisaient non loin. Ou alors était-elle venue lui dire que sa musique était assourdissante, et nulle. Elle ne disait rien ? Parle ! Qu’attends-tu pour parler petit être ? Abreuve-nous de tes paroles vides, creuse de sens. Car elle le serait surement pour toi. Dans d’autres circonstances tu aurais surement parlez avec elle, tu lui aurais dit des paroles fades, insipides. Mais là tu ne voulais pas parler. Elle ne parlait pas non plus, et tant mieux. Tu ne fixais plus tes doigts, mais la jeune fille. Elle a l’air d’un garçon, un garçon un peu fragile. Son regard était épuisé, mais elle restait là, accoudée au piano écoutant ta litanie. Et toi tu la fixais, et vous écoutiez sans un mot. Après tous, pourquoi mettre des mots sur ce que l’on ressent ? C’était inutile. Vous écoutiez la musique des mots. Vous écoutiez le piano saigner.

2e année RP/ Code coleur : #3d85c6

14 mai 2020, 21:10
 Privé   RPG++  Rains of Castamere  A.N 
So many feelings go unsaid



Arya avait rarement eu affaire à une telle colère, une telle rage. Bien sûr, elle l'avait déjà perçue en elle-même, à de nombreuses reprises. Elle s'emportait facilement, il lui suffisait d'un rien pour éveiller la tempête qui sommeillait en elle. Dès lors, elle pouvait faire n'importe quoi. C'était d'ailleurs sous un coup de colère qu'elle avait coupé ses cheveux courts. Et elle ne le regrettait pas, au contraire. Elle sentait, au fond d'elle-même, que c'était la bonne chose la faire, la chose qu'elle attendait depuis longtemps.

Mais sa colère lui faisait aussi désespérément peur. Comme lorsqu'elle avait frappé Alexei, Tess, la cousine de Lili, et même lorsqu'elle avait failli s'en prendre à Lili elle-même. Cette dernière maintenait que son Epouvantard ne s'était pas trompé, avec des arguments logiques qui l'avait fait sortir de ses gonds. Certes, Arya pouvait devenir violente lorsque l'on touchait aux cordes sensibles. Mais de là à s'en prendre à Lili, alors qu'elle était certainement l'une des seules personnes à qui elle accordait sa confiance à Poudlard, et prendre ainsi le risque de se la mettre à dos... La Gryffondor frissonna rien qu'à cette idée. Mais autrement, elle était quelqu'un de plutôt calme. Ou tout du moins, en apparence. La plupart du temps, elle parvenait à garder son calme et à maintenir la tempête à l'intérieur. Mais il arrivait que celle-ci soit trop forte, plus forte qu'elle, et qu'elle la laisse sortir et prendre procession d'elle un moment. Jusque-là, elle était toujours parvenue à redevenir elle-même avant de vraiment causer de gros dégâts. Mais elle vivait dans la peur de ne pas réussir à s'arrêter, un jour. C'était pour cela que dès qu'elle qu'elle avait du temps libre, elle filait au parc pour se calmer dans un arbre ou se défouler au Quidditch ou à l'escrime. Ces entraînements quotidiens lui permettaient de ne pas sortir de ses gonds dès qu'on lui tapait un peu sur les nerfs. Elle se demanda si le garçon au piano était comme elle.

Ni l'un ni l'autre ne parlait. Ils se regardaient, et Arya tenta de lire dans ses yeux. C'était son seul moyen de communiquer. Elle n'y rencontra que de la colère. Elle ne frémit pas pour autant et soutint son regard sans faillir. Elle ne voulait pas qu'il pense qu'elle se laisserait impressionner par sa rage. Elle avait vu pire, et avait fait pire. Elle s'appliquait donc à garder un visage indéchiffrable.

Elle ne savait pas vraiment ce qu'elle attendait. Ni ce qu'elle faisait là. Elle pourrait très bien partir sans rien dire. Elle était venue pour affronter sa peur, elle n'avait rien à faire là. Mais rien que l'idée de repasser devant la salle de bal lui donna un frisson glacial. Elle n'avait pas non plus spécialement envie de retourner en salle commune, qui s'animerait dès les premiers élèves levés. Elle était donc coincée là, avec ce garçon en colère.

Au bout d'un long moment, elle se décida enfin à réagir. Ils n'allaient pas s'affronter du regard éternellement, tout de même. Elle repoussa sa cape de sorcière et déclipsa son carnet son stylo moldu accroché à sa ceinture.

Elle n'avait pas besoin d'essayer, elle savait qu'elle n'arriverait pas à parler. C'était un sentiment qu'elle sentait au fond d'elle-même, qui lui était familier à présent. Son étrange mutisme ne passait pas, mais elle apprenait à vivre avec. Alors, dans les situations comme celle-là où ses lèvres refusaient de s'ouvrir, elle affrontait les regards interrogatifs et communiquait à travers son carnet. Elle espérait simplement que le garçon au piano ne prendrait pas cela comme un signe de faiblesse. Bien sûr, son incapacité à parler dans certaines situations, avec des inconnus notamment, représentait un handicap, mais elle ne voulait pas que cela témoigne de sa lâcheté pour autant.

Elle posa donc son stylo sur le papier de son carnet et écrivit ce qu'elle ne pouvait dire tout haut.

Marteler ce pauvre piano ne t'aidera pas. Tu seras toujours en colère après.

Elle avait simplement voulu lui décrire avec honnêteté son ressenti. Il ne le prendrait certainement pas en compte, elle en avait conscience. Ce qu'il ressentait lui devait être bien plus fort et ce qu'elle lui dirait serait bien superflu. Cependant, elle lui montra tout de même son carnet. Elle le tourna vers lui et le fit glisser dans sa direction, sur le piano, tout en soutenant de nouveau son regard.

Vous dites que c'est si beau la vie. Je veux savoir comment je m'y prendrai pour vivre.
~ Antigone, Anouilh
3èmeannée 2045/2046

16 mai 2020, 19:23
 Privé   RPG++  Rains of Castamere  A.N 
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Joie ou tristesse, les larmes sont des sentiments que le coeur ne parvient pas à traduire en mots.
Le silence. Le silence est le bien le plus précieux des hommes, ce silence qui blesse, celui qui soulage, qui guérit de profondes blessures. Mais le silence n’est pas. Il n’en a jamais été question. Pourquoi devrais-tu te taire après tout qu’on te laisse t’exprimer ce que tu ressens ? Qu’on t’écoute, franchement tu t’en fichais. Tu avais juste ce besoin, presque vital, qui t’obligeait à extérioriser ta colère, elle te rongerait jusqu’à l’os sinon, une véritable sangsue qui se gorge de ton désespoir.

Tu baisses le regard vers tes doigts. Fin et long, ton père disait que tu avais des mains de pianiste, mais tu n’as jamais vraiment joué. Tu glissais quelques notes de-ci de-là, mais c’est la première fois. Quelle première fois ! Tes doigts n’étaient pas caresses, il était violence. Ton âme n’était plus entière, elle était perdue. Tu jouais de tout ton saoul, t’enivrant de cette cacophonie dissonante. De ces notes qui croisent le fer, qui désirent ardemment s’entretuer, émerge un sentiment de… Ce sentiment est difficilement descriptible, un drôle de mélange de satisfaction et de plénitude. Tu te noies dans cette colère, tu te noies. Mais tu t’en fous. Tu aimes cette sensation d’étouffement dans ta gorge, la bile acide que tu sens remonter de tes entrailles avant de repartir. Tu étouffes, mais à la fois tu respires. C’est assez paradoxal non ?

Tu vois les notes danser devant tes yeux qui sont embués de larmes. Le piano pleure, mais tu ne vas pas tarder à le rejoindre. Tu vois les notes dansées entre vous deux. Tu la fixes, cherchant à comprendre ses intentions. Mais pour l’instant, cette fille. Eh bien, cette fille est une énigme. Son visage, son attitude est indéchiffrable, un cocktail d’émotions, de sensations. Mais ce n’est pas ton problème, tu as eu assez d’énigmes pour le moment, ne vient pas en rajouter une supplémentaire. Tu es déjà écorné, ne cherches pas à te déchirer. Même si c’est trop tard et que la page est d’ores et déjà noyée d’encre. Imbibé de ce sang noir. Une page qu’on avait égorgée. Et qu’on regardait se vider de son sang, répandre ce liquide poisseux sur le sol.

Mais ça, elle ne pouvait pas le savoir. Tu n’avais pas le cœur à t’ouvrir, encore moins te confier. Possédais-tu seulement encore un cœur ? Tu en doutais énormément. Tes doigts alternaient caresse et furie, donnant un air étrange à cette musique. Tu faisais passer tout ton ressenti, tu parlais en musique. Mais parlait-elle le langage de la musique, tu en savais rien ? Et franchement tu t’en foutais. Tu parlais à qui veut bien t’écouter. Alors si cette fille ne comprenait pas. Tant pis pour elle, mais toi tu continuerais à jouer.

Tu joues. Tu joues de toute d’âme, la furie avait disparu, la musique était plus douce. Aussi douce qu’une larme qui lentement, glisse sur la peau immaculée d’une joue, qui tombe, et tombe encore. Sans que personne ne se préoccupe de son sort. La musique avait des tonalités de lamentations, d’appel à l’aide d’une personne qui ballotte entre haine et désespoir. Une bouée lancée dans le vide, tu ne voulais pas être aidé, mais tu avais quand même lancé cette bouée, dans l’espoir désespéré que quelqu’un te comprenne. Mais ce quelqu’un existait il ? Peu importe !

Tu la regardais. Tu la fixais intensément. Que voulait-elle ? Prendre ta place ? Surement pas, tu n’en avais pas finit, tu avais ce besoin d’exulter, de te défouler sur ce pauvre piano. Il se contentait d’être et pour toi, c’était déjà trop. Alors tu essayais de le détruire comme toi tu es détruit. Petit page déchiré. Arrachées à la reliure. Petite page, que le vent emporte vers des horizons lointains. Mais toi tu n’en voulais pas de ces horizons obscurs aux promesses floues. Tu n’en voulais qu’un seul. Celui que tu percevais depuis ta petite maison de Dublin. Cette maison où tu avais l’impression d’étouffer. Maintenant tu ferais tout pour y rester enfermer avec tes parents, pour profiter. Mais tu n’en aurais plus l’occasion. Les chemins avaient bifurqué et toi tu ne savais pas lequel prendre. D’ordinaire quand deux chemins se proposaient, tu traquais le tien, empruntant par moment des portions des deux autres chemins. Mais tu devais être honnête avec toi même, tu n’en avais absolument pas la force. Ou alors était-ce question de volonté ? Peut-être.

Tu la regardais, sans détourner le regard. Pourquoi la regardais-tu encore ? Pour l’impressionner ? Ce n’était pas ton genre. Pour lui faire peur ? Visiblement, elle avait l’air d’un garçon manqué avec ces cheveux coupés court, alors tu doutais de lui faire peur. Alors pourquoi continuais-tu de la fixer ? C’était une question à rajouter sur la pile des questions qui n’auront jamais de réponse. Ce n’était pas un duel de regard ni malaisant. Ils se fixaient juste, lui essayait de comprendre qui était cette jeune fille. Qu’essayait-elle de faire ? Tu ne le savais pas, et franchement, ça t’importait peu. Tes doigts étaient devenus indépendants et jouaient leur propre mélodie, ayant décidé d’arrêter d’écouter le flot intarissable qui s’écoulait de ton âme. La musique était plus douce, elle était caresse, tu ne jouais une musique du regret, de la douleur, pas de la haine, ni de colère. Juste du regret. Un infini regret. Mais elle ne devait pas le comprendre.Toi même tu ne comprenais plus tes agissements. Ils n’étaient qu’incohérences, ils étaient brouillons. Mais tu as cessé de réfléchir depuis que tu as lu cette lettre. À quoi bon réfléchir quand on peut se laisser aller ? Se laisser consumer par ses émotions. Se laisser porter sur les vagues de l’abandon. L’abandon de soi, de son essence. De ce qui fait ce que nous sommes. Dans le fond, ce n’était pas plaisant, mais tu n’avais pas d’autre issue. Tu devais te débrancher avant qu’un court-circuit se produise au plus profond de toi.

Puis soudain, alors que tu la sondais toujours, elle écarta sa cape et en sortit un carnet elle se mit à écrire dessus. Visiblement elle était indifférente à ce duel silencieux de regard, elle s’en était lassée, elle devait trouver cela amusant au départ. En fait, elle devait se moquer de lui intérieurement depuis le début. Tu fulminais intérieurement. Pourquoi écrivait-elle dans ce fichu carnet, qu’est ce qu’elle écrit ? Pourquoi maintenant ? Pourquoi autant de questions ? Pourquoi tu te posais ces questions inutiles et ne la laissait écrire. Au moins tu pouvais te concentrer sur tes doigts qui étaient devenus indépendants et qui jouaient une musique que tu ne voulais pas. Tu détournas alors le regard, gommant la présence de la jeune fille. Qu’elle fasse ce qu’il lui plait, tant qu’elle ne le dérange pas. Il se remit à jouer, à frapper ce piano. À l’agresser, à déverser sa rage dessus. Mais alors qu’il ne s’était pas encore arrêté de jouer et que ses doigts étaient engourdis à force de jouer, crispés sur les touches du piano. Les jointures un peu blanchirent par la colère qui coulait à nouveau entre ses doigts, un mouvement sur le dessus du piano attira son attention.

La jeune fille avait visiblement terminé d’écrire. Et elle voulait que tu lises. Que tu lises ou que tu vois ce qu’elle avait fait. Tu empiètes sur mon espace avec ton carnet débile. Tu n’es pas capable de parler ? Pathétique ! Tu voulais lui cracher ton venin, faire fuir cette présence indésirable, ce parasite que jusqu’alors tu tolérais. Mais toi non plus les mots te manquaient, tu n’arrivais pas à parler. Dans le fond, toi aussi tu étais pathétique, lamentable. Pourquoi te défoulais-tu sur ce piano ? Parce que sinon je l’aurais fait sur ce hibou qui a apporté cette lettre. Et que je m’en serais voulu de l’avoir étripé. Au moins le piano n’est pas vivant. Je peux le détruire, le réduire en miettes, mais pas le tuer. Une fois que le hibou serait mort, tu ne pourrais plus rien faire. Si tu réduisais en miettes le piano, tu pouvais le remplacer, ou le réparer. Mais pas le hibou. Tu ignorais ce carnet ouvert sur une page ou quelque chose était écrit.

Son regard retrouve le tien, ils sont de nouveau ensemble à se fixer, s’affronter, discuter ensemble. Les mots sont bien fades à tes yeux, ces regards sont plus forts. On peut comprendre un homme en lisant son regard, parait-il. Peut-être que c’était vrai. Lui ne comprenait pas, aveuglé par ses sentiments, mais peut être qu’elle comprenait. Elle te comprenait peut-être. Mais ça ne te fit aucune émotion. Tu étais incapable de ressentir quoique ce soit. Elle ne pouvait pas te comprendre, ou tu ne voulais pas l’admettre. Vivre dans le déni, ça tu savais faire. Ça faisait des années que tu vivais dans le déni, alors un jour de plus, c’était de l’ordre d’une goutte d’eau dans un océan. Tu la fixais. Tu la fixais sans trop savoir pourquoi tu attachais de l’importance à ce regard. Même si tu ne voulais pas l’admettre, ce regard, ce duel, apaisait ton esprit. Le détournant de ce piano. Tes doigts jouaient toujours, de plus en plus endoloris par la frénésie de la musique qui s’était à nouveau apaisée quand tu avais retrouvé son regard.

Le carnet te revint alors à l’esprit. Elle l’avait laissé entre eux deux, elle avait griffonné quelque chose. Une phrase tout au plus de ce que tu pouvais apercevoir. Mais quelle phrase ? Ta curiosité était piquée à vif. Tu relevas le regard pour lire. Qu’avait elle bien pu écrire sur cet assemblage de feuille. Ton regard parcourut la seule phrase marquée dessus. Elle était culotée. Elle envahissait son espace personnel et voulait lui donner des leçons. Tu hésitas un instant. Tu avais levé le bras pour balayer le carnet d’un revers du bras et l’envoyer voler parmi le tas de partitions dont tu t’étais débarrassé auparavant. Mais tu suspendis ton geste ayant une autre idée. Tu pris le stylo des mains de la jeune fille, n’en ayant pas d’autres à porter de mains. Ça n’allait pas lui plaire, mais tu t’en fichais. Tu l’avais pris de manière un peu brusque. Et tu te mis à écrire aussi. Tu ne voulais pas parler. Les mots étaient fades, insipides. Tu te mis à griffonner une phrase en dessous de la sienne.
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Tu reposas alors le stylo sur le carnet, fixant toujours la jeune fille. Son visage dénué d’émotion, une simple coquille que l’on avait évidée.

2e année RP/ Code coleur : #3d85c6

20 mai 2020, 00:45
 Privé   RPG++  Rains of Castamere  A.N 
Embrace reality, even if it burns you



Une fois de plus, Arya n'était pas là où elle était censée être. C'était courant, en ce moment. Peut-être qu'elle n'était jamais là où il fallait, en fait. Peut-être qu'elle n'avait sa place nul part. Dans les dortoirs, elle observait les autres filles comme si elle faisait face à des extra-terrestres, dans la Grande Salle, malgré le monde, elle était plus seule que jamais, en cours elle dormait où regardait le plafond. Sa place n'était jamais où elle devait être. Elle se retrouvait toujours dans des endroits improbables ; comme là, dans la salle de répétition, où sa présence n'avait pas lieu d'être, où sa présence n'était qu'incongrue. Elle n'était pas musicienne, loin de là. Même si elle trouvait les musiques incroyables, même si elle enviait les musiciens quand elle en voyait, eux qui semblaient si légers, si transportés par leur art, elle ne s'était jamais approchée de celui-ci. On lui avait répété toute sa vie qu'elle n'était qu'une brute sauvage. Jamais, au grand jamais, elle n'aurait ainsi eu l'affront de toucher un instrument, un objet d'une valeur inestimable. Pas dans le sens de coûteux, non. Dans le sens où quelqu'un comme elle n'en avait pas le droit. Les gens comme elle, qui grimpaient aux arbres, jouaient sans cesse du Quidditch, frappaient les gens et avaient toujours les mains couvertes d'échardes ne pourraient jamais être légitime devant un instrument. Les instruments étaient si majestueux, si forts et fragiles à la fois, si délicats, si justes. À vrai dire, elle ne devrait même pas s'accouder sur ce piano ; c'était presque un crime. Ses mains qui avaient fait tant de mal, elles n'étaient pas légitimes à avoir ne serait-ce qu'un seul contact avec l'instrument.

Lâche, elle préférait affronter le regard du garçon plutôt que d'aller affronter la salle de bal. C'était plus facile, n'est-ce pas, de se ridiculiser devant ce qui semblait être un première année, plutôt que d'aller se retrouver volontairement en face de ses pires cauchemars. C'était plus simple, n'est-ce pas, de tourner le dos aux blessures sans revenir dessus. C'était plus lâche, n'est-ce pas, de fermer le livre sous tourner la page, de le glisser loin de soi en espérant très fort qu'il disparaisse. Ça fait moins mal, n'est-ce pas, de nier le mal que cette simple salle lui faisait, de l'ignorer plutôt que de le réparer. Cela demandait trop. Trop de temps, trop d'énergie, trop d'elle-même. Trop de courage. Courage qu'elle n'avait pas. Elle avait essayé de s'en persuader, oui. En vain. Ce n'est pas parce que l'on est à Gryffondor que l'on est forcément invincible face à la peur qui nous tord le ventre et grignote toutes nos tripes. Elle s'était dit, puisqu'elle avait échoué à atterrir à Serdaigle, comme ses sœurs, comme son père l'aurait voulu, alors autant ne pas le regretter, autant faire pleins de choses stupides qui prouveront à son entourage que le choixpeau ne s'était pas trompé, qu'elle était bien une idiote tête brûlée comme tout le monde voulait s'en persuader. Car c'était plus simple d'être ce que les gens nous demandaient d'être. C'était plus simple d'être le monstre que certains voyaient. Se débattre, se décoller de cette étiquette demandait trop.

Ce garçon-là semblait comme elle ; trop aveuglé par ses propres soucis, il en oubliait que les Autres pouvaient en avoir, eux aussi. Même s'ils paraissaient loin, très loin. Trop loin. Même si s'y ouvrir semblait impossible, car se replier sur soi-même était plus agréable.

Le garçon continuait de jouer. Arya espéra que la mélodie l'emporte loin de la salle de bal, tout comme elle l'en avait éloigné. Mais ça ne marchait pas. Elle la sentait encore, toute proche. Trop proche.

La fillette surpris son regard lorsqu'elle lui glissa son carnet. Elle ne lui en voulait pas de mal prendre son étrange mutisme. Elle non plus ne l'acceptait pas. Elle aussi pensait que c'était une énorme blague et qu'elle allait retrouver sa voix, là, tout de suite. Qu'elle allait réussir à entrouvrir ses lèvres et à parler, comme tout le monde. Mais il semblerait que cette règle ne s'appliquerait pas à elle.

Lorsqu'il se décida enfin à lire ce qu'elle avait écrit sur son carnet, il lui prit son stylo pour lui répondre dessus. Arya se demanda à quel instant ils s'étaient autant rapproché pour qu'il puisse lui prendre son stylo. Habituellement, elle préférait garder une certaine distance de sécurité entre elle et les Autres. Non pas pour se protéger elle. Elle protéger les Autres d'elle-même, plutôt. Elle était toujours autant effrayée par le manque de contrôle qu'elle pouvait avoir sur ses sentiments et sur son corps. Bien que, si elle s'emportait, rien ne l'empêchait de se rapprocher pour frapper les Autres. Mais elle préférait penser qu'il y avait peut-être une chance pour qu'elle se rende compte de son acte avant de le mettre à exécution.

Elle se pencha pour lire la réponse du garçon sur son carnet. Un instant, un court instant, elle replongea son regard dans le sien. Elle voulait comprendre, oui. Elle voulait savoir ce que ça faisait, de s'échapper à travers des mélodies. Mais elle ne connaissait que la méthode de l'arbre, de l'escrime et du Quidditch. C'était ces sensations fortes qui la défoulaient, qui la faisaient, elle, se sentir vivante. Taper sur les touches d'un piano semblait bien dérisoire à côté. Pourtant, la fillette aurait juré pouvoir toucher la compréhension des mots du garçon. De loin, certes, mais elle la frôlait.

Elle reprit son stylo, joua avec un petit moment, juste le temps de se faire à l'idée que quelqu'un d'autre y avait touché, que quelqu'un d'autre avait posé son emprunte dessus. Puis elle approcha son carnet, tourna la page et écrivit, en haut d'une feuille vierge :

Ressentir du vide ne veut pas dire que tu ne ressens rien.

Elle marqua un temps d'arrêt, puis ajouta un peu plus bas, juste au cas où :

Tu peux me parler, tu sais. Je suis peut-être muette par moments, mais pas sourde.

Elle reposa le stylo à plat sur le piano, avant de pousser son carnet dans la direction du garçon avec ses doigts – presque timidement.

Vous dites que c'est si beau la vie. Je veux savoir comment je m'y prendrai pour vivre.
~ Antigone, Anouilh
3èmeannée 2045/2046

22 mai 2020, 05:37
 Privé   RPG++  Rains of Castamere  A.N 
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C'est affreux quand quelque chose vous préoccupe, de ne pas avoir une âme à laquelle vous décharger. Tu sais ce que je veux dire. Je raconte à mon piano les choses que je te disais.
Le bruit. Celui de la colère, son tonnerre assourdissant que tu ressens au plus profond de toi. Cette douleur, celle de l’abandon. Celle du laissé pour compte, celui du bord de route. C’était tout ce que tu ressentais. Enfin, le terme plus exact serait, tout ce que tu t’autorises à ressentir. Cette violence, la violence d’une vie bâtie sur un château de cartes. Et une brise avait fait s’écrouler ce château aux fondations fragiles. Et toi, petit être lâche tu te vengeais sur le piano. Tu n’essayais pas de t’apaiser. Tu déversais toute la colère de ton âme sur ce piano. Tu la déversais, car tu te sentais salie, tu devais te débarrasser de ce poids. Mais, tu ne voulais pas. Tu étais enfermé dans ta propre cage. Cette colère t’apaisait et… rien… Voilà ce que tu ressentais… Rien… Un trou béant à l’endroit où aurait dû se trouver ta réflexion. Tu n’étais plus qu’une bête qui frappait des doigts un piano innocent. Mais personne n’est innocent. Tout le monde est coupable de quelque chose. Toi le premier. Est-ce pour te punir de ne pas l’avoir vu venir que tu t’es enfermé dans une cage, emplie de haine jusqu’au coup ?

Tu ne sais pas. Tu ne sais jamais rien de toute façon, tu subis de jour en jour, de seconde en seconde cette vie. Tu n’aurais pas dû naître maintenant. Est-ce que c’était une manière de te le faire payer ? Sans aucun doute. Une cruelle vengeance. Mais voilà tu n’y pouvais rien. Alors tu ne dis rien et tu encaisses. Tu as toujours fait ça quand tu n’es pas bien, tu encaisses et tu te tais. Mais voilà à quoi tu es réduit maintenant. Une pauvre loque, une coquille vide qui se défoule sur un piano rapiécé. Enfin, tu en avais l’aspect.

L’autre fille. Cette inconnue aux cheveux courts qui avait empiété sur tes plates-bandes et qui semblait ne pas vouloir s’en aller pour que tu laisses libre cours à ses pulsions sanglantes. Que tu puisses te plonger totalement dans cet océan qui ne cessait de t’appeler. Lointain murmure de sirènes. C’était profondément stupide ce que tu faisais, mais peu importe tu avais besoin de te défouler sur ce piano, alors tu le faisais. Tu étais en plein déni, et la présence de la jeune fille ne faisait que te rappeler sa lâcheté, tu t’étais réfugié ici pour te vider l’esprit. Tu ne pleurais pas, poussant des cris silencieux. Le rythme de la musique était lent, beaucoup plus triste et mélancolique que tes envolées furieuses de tout à l’heure. Tu n’avais à aucun moment cessez déjouer, tes doigts te faisaient mal, à force de taper sur le piano, mais tu n’en fis rien. Tu jouais. Tu jouais, car c’était la seule chose dont tu étais capable en ce moment. Par moment, tu jettes un bref regard à l’Autre, celle qui t’observait sans un mot depuis tout à l’heure. Est-ce qu’elle était muette ? Peut-être. Mais tu t’en fichais éperdument, au moins ces mots ne venaient pas entraver tes maux. Elle était toujours aussi indéchiffrable, pourquoi était elle là, pourquoi restait-elle. Pourquoi ne parlait-elle pas ? Mais ces questions pouvaient être remises à plus tard.

C’est lors d’un de ses regards à la dérobée que tu la vis entrain de lire ta réponse. Elle n’avait pas réagi quand tu lui avais pris le stylo cela n’avait pas l’air de la déranger, elle avait suffisamment de force pour te le reprendre. Elle avait une carrure de sportive. Mais ça ne te disait toujours pas comment s’appelait ce garçon, cette fille. Tu n’arrivais pas à être certain. Tu l’observas lire la réponse. Pendant ce temps, tu avais presque arrêté de jouer. Ta musique était plus lente, presque silencieuse. Tu ne te calmais pas. Tu n’avais juste plus de mots à mettre en musique. Alors itu allait devoir te taire. Ta complainte musicale touchait à sa fin et tu expirais les dernières notes sur le piano. Une sorte de râle musicale. Les derniers murmures d’une musique à l’agonie. Tu la vis écrire quelque chose, s’arrêter puis écrire autre chose. Et alors que tes doigts jouaient leurs dernières notes et que le silence se fit, tu avanças la tête pour pouvoir lire. Tu te demandais pourquoi elle cherchait à comprendre. Mais il n’y avait rien à comprendre, alors pourquoi. C’était juste un ivrogne du désespoir qui jouait une musique tout aussi désespérante. Elle avait reposé le stylo sur le carnet, mais tu ne le pris pas tout de suite, ta réponse allait attendre.

Tu finis par quitter le tabouret sur lequel tu étais auparavant assis depuis un très long moment. Tu étiras tes doigts endoloris par une rude mise à l’épreuve, tu ne t’étais jusqu’alors arrêté à aucun moment pour faire une pause. Tu finis par t’avancer vers le piano, et tu t’accoudas dessus, exactement en face de la jeune fille, le carnet posé au milieu, entre eux deux. C’était assez insolite comme discussion tu devais l’admettre.

Cependant, tu ressentais toujours ce vide, ton visage complètement inexpressif. Elle n’allait pas devoir dire quelque chose de travers, tu étais particulièrement irritable. Bien que tu ne fasses pas le poids contre elle, tu aurais bien des façons de lui montrer que sa présence était à la limite de l’indésirable. Tes lèvres toujours scellées, le seul bruit qui régnait ici était celui de vos respirations. Tu approches alors le regard du carnet, afin de voir ce que la jeune fille a marquer. Tu hésites quelques instants avant de prendre le stylo. Elle se trompait, tu ne ressentais pas du vide, ni rien d’ailleurs. Tu ne ressentais juste pas. Sa dernière phrase te fit sourire intérieurement, bien que ce sourire fut invisible extérieurement. Tu n’étais pas un idiot, tu savais qu’elle n’était pas sourde, cependant elle semblait atteinte de mutisme situationnel. Elle ne voulait pas lui parler, alors il en ferait de même. Il n’avait pas envie de discuter Hippogriffe ou Botruc de toute façon.

Il commença alors à écrire sur le carnet, d’une fine écriture manuscrite. Il fit une pause pour réfléchir à ce qu’il écrivait, se mettant un peu d’encre sur le doigt avant de poursuivre sa réponse, le dos légèrement penché en avant. Tu finissais ta réponse et ne pus t’empêcher de penser qu’elle était bien curieuse, elle n’avait pas l’intention de rester simple auditrice. Pourquoi les choses devaient-elles s’avérer si… compliquées ?
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Une fois satisfait de ta réponse, tu relevas ton regard vide vers celui de la jeune fille et reposa le stylo sur le carnet situé entre vous deux, un peu comme une frontière. Tu la fixais, attendant sa moindre réaction.

2e année RP/ Code coleur : #3d85c6

01 juin 2020, 14:56
 Privé   RPG++  Rains of Castamere  A.N 
Not all truths need to be voiced



Elle avait beau essayer de penser à autre chose, la salle de bal revenait constamment à elle. Elle essayait de se concentrer sur le garçon, sur le piano, sur les notes de musiques, sur la salle de répétition, et repoussait les souvenirs vieux de plusieurs mois vers l'arrière. Elle aurait tout le temps d'y penser plus tard. Mais pas ici, pas alors que la salle de bal était si proche. Pas ici, alors que les souvenirs se faisaient plus précis et plus douloureux. Tant pis si cela montrait une quelconque faiblesse. Elle n'en avait plus rien à faire, elle voulait seulement quitter cet étage maudit. Mais elle était prise au piège dans une cage imaginaire. Tout son courage avait disparu, et la fuite lui semblait maintenant être la meilleure solution. Elle voulait aller au parc, grimper à un arbre et y rester toute la matinée, bercée par la brise matinale du printemps.

Elle ne put empêcher son regard de se diriger vers la porte ouverte de la salle de répétition, vers le couloir qui menait à la salle de bal. Elle la fixa d'un air inquiet, légèrement trop longtemps pour que cela paraisse naturel. Mais si le bal était le nid de toutes ses préoccupations, il l'attirait également comme un aimant. Elle ignorait pourquoi, d'un côté, elle voulait fuir à toutes jambes, et d'un autre, elle voulait se jeter dans la toile d'araignée. Elle ignorait laquelle de ces deux possibilités était la meilleure.

Lorsqu'elle parvint enfin à ramener son regard vers le garçon, elle vit qu'il s'était levé, et se tenait à présent en face d'elle, dans la même position. La musique s'était arrêtée, ne restait plus que le silence. Et les cris des souvenirs du bal qui lui revenaient en mémoire, malgré ses efforts pour les ignorer. Ils résonnaient dans sa tête, certes étouffés, mais bien présents. Pourquoi était-elle ainsi obsédée par ce bal ? Pourquoi les souvenirs ne voulaient pas la lâcher ? Pourquoi ne parvenait-elle pas à tourner la page ? Était-ce une sorte de punition pour s'être jetée ainsi dans l'action sans réfléchir ? La Gryffondor repoussa bien vite cette pensée. Elle n'aimait pas cette pensée, qui l'horripilait. Elle avait fait ce que son instinct la poussait à faire, voilà tout. Elle avait laissé ses gestes la guider, sa colère éclater. Ce n'était peut-être pas la bonne chose à faire, mais de toute manière, si elle devait être punie, elle l'avait déjà bien été, avec toutes les blessures qu'elle avait récoltées. Elle avait déjà bien assez souffert, à tout bien réfléchir. Elle était la seule fautive à tous ses souvenirs qui lui revenaient en mémoire.

À peine eut-elle pensé cela qu'elle se sentit déjà mieux. Oui, voilà la manière dont elle devrait se forcer à penser. Elle se promit d'y réfléchir plus tard et se concentra sur le garçon et son carnet. Il avait de nouveau écrit quelque chose, de ce qu'elle pouvait apercevoir. Son carnet était comme un messager, qui leur épargnait de devoir se parler à haute voix comme tout être normal, comme une navette qui naviguait entre eux. Un chemin obligatoire pour communiquer.

Il disait ne pas ressentir. Arya ne le croyait pas. Peut-être qu'un océan d'émotions pouvait faire croire au rien, mais elle était persuadée qu'il était impossible de ne rien ressentir. Elle, avait toujours des tonnes et des tonnes de sensations chaque seconde. Mais elle sentait que ce n'était pas vraiment ce dont il avait besoin d'entendre en ce moment... ou de lire, plutôt. Elle s'abstint donc d'inscrire le fond de sa pensée lorsqu'elle reprit son stylo.

Et ça te plaît de ne rien ressentir comme ça ? Ça m'a tout l'air d'être particulièrement ennuyant.

Puis, pour toute réponse à sa dernière phrase, elle écrivit :

Tu veux peut-être que je te laisse seul, dans ce cas ?

Elle cherchait une bonne excuse pour quitter cet étage et partir. S'il lui répondait à l'affirmative, ce serait l'occasion de prendre son courage à deux mains, au moins.

Elle reposa ensuite le stylo, mais ne put s'empêcher de jeter un nouveau regard à la porte avant de le reposer sur le garçon.

Vous dites que c'est si beau la vie. Je veux savoir comment je m'y prendrai pour vivre.
~ Antigone, Anouilh
3èmeannée 2045/2046

01 nov. 2020, 17:25
 Privé   RPG++  Rains of Castamere  A.N 
ImageLe bonheur repose sur le malheur, le malheur couve sous le bonheur. Qui connaît leur apogée respective ?
Tu fixais toujours ce petit carnet de papier, tu en étais réduit à cela. Incapable d’aligner des mots, des lettres autres partent que sur du papier, ta langue ne voulait produire aucun son. Et bien tu resterais muet alors. Tu fixais toujours ce stylo. Ne faisant même plus attention à l’encre sur tes doigts tu avais tellement l’habitude de t’en mettre partout avec la plume que cela ne te dérangeait même plus. Tu allais simplement devoir passer un peu plus de temps à te nettoyer. Sauf si tu sautais l’étape nettoyage. Mais il était bien trop tôt pour te décider.

Tu fixais toujours ces pages que vous noircissiez d’encre à tour de rôle. Un simple cahier comme support pour communiquer. Tu n’étais pas apaisé pour autant, le silence seulement brisé par le bruit de ta respiration qui devenait lourde. Tu étais dans tes pensées. Et elles n’ont jamais été aussi désordonnées qu’aujourd’hui. Tu avais envie de tout et de son contraire. Que la fille parte, mais aussi qu’elle reste. De jouer du piano et de ne pas en jouer. Cela te provoquait à la longue une douleur au crâne, et tu passas brièvement tes doigts dessus comme pour comprimer un mal uniquement imaginaire. Était-ce de ta faute ce qui t’arrivait ? Qu’avais-tu fait de mal, de travers ? Tu ne comprenais pas. Avais tu seulement cherché à comprendre ? Non, c’est bien plus facile de laisser aller ces émotions plutôt que de comprendre. Tu n’en avais pas envie de toute façon. Alors à quoi bon ? Autant être lâche et laisser s’exprimer ce que tu ressens.

Au bout de plusieurs longues minutes, tu relèves la tête vers la jeune fille-garçon, tu ne sais toujours pas. Et voilà quelque chose qui t’énerve encore plus. Ne pas savoir, tu détestes cela. L’ignorance est un fléau, tu aimes tout savoir. Pourquoi cela et pas ceci ? Pourquoi ? Pourquoi et toujours pourquoi… Pourquoi ça fait mal ? Pourquoi… Trop de pourquoi dans ton esprit, tes pensées sont à l’étroit et tu sens que si tu ne fais rien tu vas imploser… Peut-être que tu devrais. Mais pourrais-tu seulement faire machine arrière ? Là était toute la question. Encore une question… Et toujours pas de réponse… Tu devrais cesser de réfléchir, débrancher tes neurones. Ne penser à rien, tu ne ressens déjà rien, alors cela ne devrait pas être bien compliqué.

Encore absorbé par tes pensées tu la voies détourner le regard. Que regarde-t-elle ? Le couloirs ou autre chose ? Quelqu’un d’autre attendrait à la porte. Tu l’aurais sans aucun doute entendu, maintenant que le silence est fait. Et puis à cette heure-ci, beaucoup de gens dorment encore. Non, elle pense, elle au moins arrive à avoir une pensée cohérente. Ce n’est pas ton cas. Mais à quoi pense-t-elle ? Encore une question… Et toujours pas de réponse. Cesseras-tu donc un jour de poser des questions auxquelles tu n’auras surement jamais de réponse. Tu n’es pas une fourmi qui aurait pu se faufiler dans son esprit et décortiquer sa pensée. Elle semblait inquiète, était-elle poursuivis et avait-elle trouvé refuge ici ? Le poursuivant ne semblait pas physique. En effet, elle se serait abritée dans ce cas, elle n’aurait pas pris le temps de discuter avec une pauvre âme brisée comme toi.

Elle semblait inquiète, mais ses inquiétudes lui appartenaient, tu ne pouvais rien y faire, et tu ne voulais rien y faire. Quel égoïste tu fais ! Mais n’as-tu pas le droit une fois dans ta vie d’être le plus abject des égoïstes ? Tu t’en voudrais certainement. Mais cela ne serait qu’un poids de plus après tous. À quel sujet était-elle inquiète ? Qu’est ce qu’il y’avait d’autre à cet étage ? Tu ne savais pas trop, tu savais simplement qu’il y avait une salle de répétition. Et une salle de bal… Ton esprit faisait le lien… Tu avais entendu des rumeurs à ce sujet. Des mots bas échangés dans les couloirs. Tu n’y étais pas allé, tu ne te sentais pas bien ce jour-là. Mais tu te rappelles bien de l’agitation qui en avait suivi. Était-ce pour cela ? Avait elle était blessée ? Tu ne le savais pas… Mais ce n’était pas impossible.

Tu émis un long soupir, fixant tes doigts maculés d’encre, une encre noire, semblable à du sang, tu détournas le regard pour voir les partitions éparpillées sur le sol. Ta colère était légèrement retombée, tu ne pensais plus trop au mal qui t’avait trainé ici. Mais il suffirait d’un rien pour que tu repartes au quart de tour. Alors tu détournas bien vite le regard de ces partitions, sans quoi le risque de faire agoniser un piano déjà sanguinolent serait trop important. Tu t’es même étonnée un bref instant de ne pas avoir trop abimer le piano, ni avoir cassé une touche. Tant mieux, cela risquerait de s’ajouter à la désormais longue liste des choses pour lesquelles tu t’en veux.

Tu replonges tes yeux dans ce carnet, tu as l’impression qu’il t’obnubile. Dans d’autres circonstances, tu aurais trouvé cela bien ridicule de communiquer uniquement avec un carnet. Mais aujourd’hui le fait de t’épargner de vocaliser tes pensées t’aide grandement. Tu ne sais même pas si tu ne vas pas faire comme elle et devenir muet par choix. Après tous, cela à des avantages. Tu n’en sais en toute franchise rien du tout. Tu vois qu’elle aussi a décidé de fixer son regard sur ce carnet. Il agit un peu comme un messager. Si on t’avait dit une semaine auparavant que tu discuterais avec une fille, ou un garçon, il faudrait vraiment que tu saches ce qu’il en est, cette indécision te préoccupe, via un carnet. Qu’aurais-tu fait ? Tu aurais surement ri en prenant cela à la légère comme tu le faisais si bien avant. Les jours d’après ressembleront-ils aux jours d’avant ? Tu n’en sais strictement rien. Mais tu n’as aucune certitude. Pour le moment tu es à terre. Alors le futur te semble une bien lointaine préoccupation.

Tu remarques son regard sur le carnet, elle lit la réponse que tu as écrite auparavant. Elle semble réfléchir quelques instants et finit par reprendre le stylo entre ses mains et griffonner une réponse. Tu te penches légèrement en avant pour en lire la teneur. Tu sens comme une pointe de sarcasme, mais ne relèves pas, elle te permet de ne pas totalement sombrer dans ta folie furieuse alors autant ne pas la froisser. Elle soulève cependant une question assez essentielle. Est-ce plaisant de ne pas ressentir ? La réponse n’est pas si évidente pour toi. D’un côté, cela te permet de te protéger, de ne pas abimer une page déjà écornée, mais de l’autre tu ne ressens que du vide. Et ce n’est pas franchement des plus agréables toi qui d’ordinaire aimes ressentir les choses, puis les penser. Tu ne penses pas non plus, tu agis jusqu’alors comme une sorte d’automate que l’on aurait réglé auparavant. Et tu n’aimes pas ça du tout. Tu te grattes la tête quelques instants comme pour te donner l’impression de réfléchir. Et il est vrai que tu réfléchis pour la première fois depuis que tu as reçu cette lettre.

Tu tends la main pour te saisir du stylo, mais avant que tu n’aies pu le récupérer là où elle aurait du le poser elle se met à écrire de nouveau quelque chose tu te penches un peu plus avant pour continuer à lire au fur et à mesure qu’elle écrit, elle semble cherche une échappatoire pour te laisser seul. Tu manques de perdre l’équilibre étant obligé de te pencher pour lire en bas de page. Tu attends qu’elle ait reposé le stylo avant de t’en saisir de nouveau et d’écrire :
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Puis en relevant la tête, tu vis qu’à nouveau son regard se faisait fuyant, tu ne savais pas trop comment elle allait réagir. Tu reposes le stylo et l’observe un air mélancolique présent sur ton visage aux traits tirés.

Sincérement désolé pour ce très grand retard @Arya Nightshade

2e année RP/ Code coleur : #3d85c6

04 janv. 2021, 22:29
 Privé   RPG++  Rains of Castamere  A.N 
Strange how we decorate pain



Un instant de flottement suivit ses derniers mots dessinés sur le papier. Comme si le temps s'était arrêté. Peut-être était-ce le cas. La mélodie jouée par le garçon continuait de résonner dans son esprit, litanie lente et continue.

Elle aurait voulu lui faire comprendre ce qu'elle pensait, au plus profond d'elle-même. Elle aurait voulu lui dire que ne rien ressentir n'était pas la meilleure solution. Que s'enfermer dans une cage dont nous seul détiendrait la clé n'était pas une bonne idée, que la cage deviendrait de plus en plus étroite sans qu'on ne puisse rien y faire, et sans qu'on s'en rende compte, on suffoquerait. Elle comprenait tout juste que s'il était facile d'ignorer les sentiments, ils revenaient au grand galop et cette vague-ci était dangereuse, incontrôlable. Mieux valait ne pas les nier, plutôt les accepter, même si le chemin pour y arriver était semé d'embûches et particulièrement ardu à suivre. La piste s'effilochait, disparaissait dans l'ombre, et l'on avait beau l'éclairer d'une flamme, elle semblait toujours se dérober à nous, inaccessible. Arya était loin d'être capable de continuer à marcher droit, elle se laissait trop souvent emporter par la vague. Elle la redoutait et la désirait à la fois. Elle voulait vérifier qu'elle était encore capable de ressentir, et vérifier si elle pouvait ne pas se laisser dominer. Mais chaque fois, c'était comme si on la jetait dans une machine à laver en cours de route ; elle n'avait aucun pouvoir sur ce qui la traversait.

Elle fixe le garçon de ses grands yeux, cherchant à déceler si, d'une manière ou d'une autre, lui aussi a peur de cette vague, immense, gigantesque, titanesque et démesurée. Dévastatrice. Comment ne pas être effrayé par cette entité supérieure à tout, par ce monstre qui n'avait qu'une pichenette à faire pour nous réduire en poussières ? Mais on avait beau tourner le dos, cela n'empêchait pas la vague de déferler sur nous, en nous, comme si nous n'étions que fourmis.

Le garçon a écrit, arrachant Arya de ses pensées trop compliquées pour être sensées. Elle pencha la tête sur le côté, lu en diagonale. Lui aussi avait besoin d'y réfléchir, semblait-il. Il était perplexe face à la vague. Il voulait vérifier si elle allait vraiment s'abattre sur lui ou dévierait.

Elle s'empara du stylo à son tour, mais stoppa son geste, la mine à quelques centimètres de la feuille. Non, elle n'avait rien à ajouter, en fin de compte. Elle marqua un temps d'hésitation, puis ferma lentement son carnet, qu'elle serra contre sa poitrine. Se tournant vers le garçon, elle le fixa longtemps, le visage impassible.

Elle devait partir. Elle était entrée, sans vraiment savoir pourquoi, et maintenant, sans vraiment savoir pourquoi, elle sentait qu'elle devait sortir. Elle espérait l'avoir aidé, ne serait-ce qu'un peu. Au moins aura-t-elle accordé un peu de répit au pauvre piano. Elle sentait qu'elle n'avait plus rien à faire là. Elle ne pouvait rien faire de plus.

Leurs routes s'étaient croisées, entremêlées, comme un courant d'air. Et comme un courant d'air, elle devait être éphémère. Elle lui tourna le dos, commença à rejoindre la sortie. Ses pas résonnaient dans le silence. Peut-être le recroiserait-elle, dans une autre situation. Peut-être leurs pas les ramèneront l'un en face de l'autre. Elle ne connaissait pas son prénom, et il ne connaissait pas le sien. Comme une promesse pour la première fois, un murmure dans le vent.

Juste avant de complètement disparaître, elle se tourna une dernière fois vers lui, chercha une dernière fois son regard. Elle voulait lui dire « à bientôt », ou quelque chose comme ça. Mais, comme sa langue restait indéniablement liée, elle se contenta de baisser la tête, puis de rejoindre le couloir.

Là, elle resta immobile un long moment devant la porte fermée de la salle de bal. Elle repensa au garçon, à sa haine sur le piano, à la vague qu'elle voulait à la fois éviter et ressentir de toute son âme. Elle esquissa une grimace, un mi-sourire. Puis pivota sur ses talons pour retourner à sa salle commune. Plus légère.

Elle était venue là, guidée par un cauchemar. Mais elle ne fuyait pas. Elle s'envolait.


Fin du RP pour ma part, merci beaucoup !

Vous dites que c'est si beau la vie. Je veux savoir comment je m'y prendrai pour vivre.
~ Antigone, Anouilh
3èmeannée 2045/2046