Les deux garçons avaient été amenés en urgence à l'infirmerie. En effet, ils n'avaient pas échappés aux dégâts du Saule Cogneur, se mesurer à lui n'était décidément pas une bonne idée.. Bien qu'ils n'en avaient jamais eu l'intention à l'origine. Ils y ont été contraints, et ont beaucoup moins fait les malins. Surtout Isaac, qui heureusement eut l'idée d'utiliser le sortilège des fusées rouges en guise de signal pour appeler de l'aide. Celle-ci fut arrivée rapidement, mais cela n'avait pas empêché l'arbre de leur laisser un beau souvenir de lui. Ainsi, ils étaient là, chacun sur un lit. La côté gauche d'Isaac lui faisait mal, une douleur à chaque bouffée d'air qu'il inspirait ou expirait. Par pur réflexe, il soupira, comme à chaque fois qu'il était exaspéré par quelque chose, il s'agissait comme d'un tic. Et il eut de ce fait une plus vive douleur. Satané arbre, la prochaine fois, il le calcinerait. Parole d'Avery. Il ferma un instant les yeux, attendant que la douleur parte, puis les rouvrit doucement. 

Que faisait donc Mme Lloyd ? Ne pouvait-elle pas s'activer un peu ? Il la chercha du regard, mais en tournant la tête, vit le garçon aux cheveux mi-longs sur le lit d'à côté. C'est vrai, il était là lui aussi.. Il ne se sentait pas coupable, après tout il n'y était pour rien. Ce n'est pas parce qu'il l'avait défié que c'était arrivé, dans tous les cas ça se serait produit. L'arbre pouvait se mouvoir plus que prévu, et c'est parce qu'il ne le savait pas qu'ils avaient fini ainsi. Parce qu'il ne s'était pas assez renseigné sur la nature de ce végétal, de cette fichue plante. Il s'en voulait. Il avait réagi trop précipitamment, en temps normal il aurait bien pris le temps de récolter toutes les informations nécessaires avant d'aller tester le sort Immobulus, mais là, il ne l'avait pas fait. Et le résultat était ça. Deux première années à l'infirmerie. Pourquoi n'avait-il donc pas fait ce qu'il faisait habituellement, se renseigner. Le savoir était toujours l'arme suprême, ce qui permettait d'avoir le contrôle de toutes les situations et de tous les conflits. Il tourna sa tête du côté opposé à celui où se trouvait son compagnon, honteux. En fait, si. C'était de sa faute.

« .. Désolé. »

Tout est de ma faute. Voilà la pensée que je ressassais depuis déjà une dizaine de minutes, assis tant bien que mal dans ce lit tout blanc. Je détestais l'infirmerie, et faisais tout pour ne pas rentrer dans cette pièce de torture. Mais malheureusement, aujourd'hui, y pénétrer avait été inévitable. Tout ça à cause de ce Serpentard, du Saule Cogneur et du fait que je ne sois vraiment pas doué. A présent, j'étais cloué au lit à cause d'une côte qui me faisait vivre un enfer. Chaque fois que je faisais un infime mouvement, elle m'élançait et me poussait à crier de douleur. Même lorsque je respirais trop fort ou quand je pleurais, elle me faisait très mal. En bref, je ne pouvais presque plus bouger car même lorsque je remuais le bout de mon orteil, je trouvais le moyen d'avoir mal. Et tout ça à cause d'un arbre frappeur qui m'avait fait jouer au manège dans les airs avant de me briser une côte.

Depuis mon arrivée dans la pièce de la torture, je n'avais même pas posé le regard sur l'autre garçon, trop préoccupé par ma douleur et mes remords. Je l'avais presque oublié. Et puis de toutes façons, je m'en fichais. J'avais juste envie de disparaitre sous terre à cause de la honte et de la vive douleur. Toute l'école allait être au courant de ma mésaventure sur le Saule Cogneur, et mes amis allaient s'inquiéter pour moi. Je voyais déjà à des kilomètres la tête choquée de Taylor et d'Athéna, qui ne cesseraient de me faire des reproches quant à ma "bêtise" qui était survenue sans que je ne la fasse réellement. Même si je savais que je n'avais pas fait exprès de me faire attrapé par le saule, je ne cessais de me lamenter en me répétant en boucle : C'est de ma faute. C'est vrai que si je m'étais reculé, rien de tout cela serait arrivé.

Je poussais un gros soupir qui m'arracha un cri de douleur, tandis que le garçon à côté de moi me murmura un "Désolé". Je sursautais doucement avant de tourner avec lenteur la tête vers lui. Je lui adressais un sourire douloureux :

"C'est pas ta faute. C'est la mienne. C'est moi qu'es été attrapé par l'Saule en premier."

En entendant ces mots, il hésita à tourner sa tête vers lui. Finalement, il le fit, toujours aussi honteux, puis aperçut son sourire. Pas un sourire chaleureux, joyeux ou autre, mais un sourire qui respirait un état d'âme probablement assez similaire au sien. Maintenant qu'il y pensait, il ne l'avait encore jamais vu sourire sincèrement, et lui non plus ne lui avait pas encore adressé un tel rictus. Il ne le lui rendit néanmoins pas ce dernier, non seulement il n'était pas souriant de base, mais en plus, il avait bien trop honte. Alors ses yeux se baissèrent vers le sol qui séparait leurs lits.

« Et c'est moi qui ne m'étais pas assez renseigné sur lui. En plus tu serais pas resté aussi proche de cette plante à deux galions si je t'avais pas proposé ce défi ridicule. »

Parler faisait mal, surtout pour dire autant de choses. Tant de mots tout aussi inutiles les uns que les autres, ce n'était pas en ayant des remords que la situation changerait. Il se faisait simplement plus mal, mal à cette maudite côte. Ses mains le piquaient également, mains remplies d'échardes avec le bout de certains doigts déchiquetés. Il avait eut si peu de lâcher et de tomber, si peur du Saule, des conséquences qu'une chute aurait pu avoir, qu'il avait serré le plus possible la branche qu'il s'était pris, jusqu'à même tenter d'y enfoncer ses doigts. C'était ridicule. Perdre autant ses moyens à cause de la peur, ça ne se reproduirait plus. Il n'avait pas senti la douleur sur le coup, mais maintenant que son corps et son esprit pouvaient se reposer, elle n'arrêtait pas de crier pour se faire traiter. Puis la porte s'ouvrit, où il vit Mme Lloyd arriver assez rapidement, tenant dans un main comme une espèce de torchon blanc dans lequel semblait coincé quelque chose. Elle arriva à leur hauteur, posa cette chose sur le meuble entre les lits, sous le regard interrogateur du Serpentard, puis elle se redressa en regardant tour à tour les deux garçons. Ils devaient vraiment avoir l'air de deux idiots, et Isaac eut la tête la plus blasée qu'il pouvait avoir en portant son regard vers elle. 

Je ne savais pas si c'était vraiment de ma faute, et pourtant j'en avais l'impression. Après tout, c'était moi qui avais été emporté par la branche, le Serpentard n'avait fait que me suivre... Je me mordillais la lèvre, et ce geste me fit presque mal à la côte. Je jetais un regard au garçon allongé sur le lit d'à côté, sans bouger la tête. Au début de notre conversation, il m'avait paru méchant, moqueur, vantard, et tous les autres défauts des élèves de la maison des serpents. A présent, allongé dans son lit de l'infirmerie, blanc comme un linge, en train de s'excuser, il me semblait si gentils et inoffensif, que j'avais envie de tout lui pardonner. Pourtant, cela devait être un piège, et lorsque nous sortirons de la salle, il recommencerait à être méchant.

Pour rompre le silence gêné qui s'était installé, je demandais :

"Au fait, tu t'appelles comment ?"

Je me rendis compte alors que nous nous étions pas présentés, trop occupés à se lancer des méchancetés ou à hurler au secours lorsque nous étions ballotés, accrochés à une branche du saule cogneur. Je préférais savoir d'abords son nom avant de dire le mien, au cas où. Il y avait parfois des gens tordus qui s'amusaient à ne pas se présenter...

Soudain, l'infirmière ouvrit la porte délicatement et entra dans l'infirmerie. Je remarquais qu'elle tenait un chiffon blanc qui contenait lui même quelque chose. Ce quelque chose en question renvoyait les quelques rayons de soleil qui arrivaient à se frayer un chemin jusqu'à lui. Je fronçais les yeux pour mieux voir, et parvins à distinguer un flacon remplis d'un liquide jaunâtre d'allure repoussante. Je frissonnais, ce qui m'arracha un cri de douleur à cause de ma côte. Le garçon de l'autre lit semblait lui aussi se demander ce que contenait le flacon. Du poison ? Un élixir pour nous faire moins mal ? L'infirmière mit fin à mes questionnements en déclarant :

"C'est du Poussoss. Cela fera repousser les os qui ont été cassés ou fracturés, mais ça fera un peu mal..."

Je jetais un regard paniqué à l'autre garçon, tandis que Mlle. Lloyd nous servait le liquide jaune dans deux verres différents.