Octobre 2043


Courir, courir ... Toujours courir pour échapper au pire. En l’occurrence, éviter que les autres aient à la subir. Pour une fois, Olympe savait ou aller, pour être seule mais pas trop isolée. Elle sentait un cyclone d'émotion bouillir en elle, prêt à éclater. Depuis son entrée à Poudlard, ce genre de phénomènes était devenu très rare chez elle. Mais l'arrestation de son père l'avait rendu plus instable, et plus souvent victime de ses sentiments. Cette journée-là, avait été particulièrement rude. Tout l'énervait, et s'ajoutait à la rancœur qui l'habitait. Elle survolait les marches par de grandes enjambés. Arrivée à destination, elle se laissa tomber dans la paille qui couvrait le sol de la volière. Des brindilles s’emmêlèrent dans sa tignasse, mais elle n'en avait rien à faire. La vague était sur le point de la submerger. Les digues que formaient ses paupières cédèrent sous la déferlante de larmes.

Elle se recroquevilla sur elle-même. Ses sanglots silencieux lui arrachaient parfois quelques tressautements. Mais elle n'arrivait pas à faire le vide en elle. Expulser ces pensées négatives. Au contraire, elle se sentait plus mal qu'autre chose. Son cœur était écrasé sous le poids d'un chagrin qu'elle n'arrivait pas à exprimer autrement que par des pleurs. À court de larmes, ses yeux s'asséchèrent. Elle se releva, tremblante. Le monde tournait autour d'elle. La nausée lui nouait l'estomac, et elle crut plusieurs fois qu'elle allait gerber son repas de midi. Avec le temps, sa vision devint plus nette, mais elle ne prit pas pour autant de nouveau le contrôle de son corps.

Une deuxième Olympe avait remplacé la première, faible et pleurnicheuse. Une Olympe plus vive et plus vicieuse aussi. Son visage s'éclaira d'un sourire machiavélique. Ses traits distordus étaient assez effrayant. Elle s'agrippa au bureau de toute ses forces pour ne pas tomber, et s'approcha d'une fenêtre sans vitre. Sans plus de difficulté, elle grimpa sur le rebord, et toisa l'horizon. Son regard perçant voulait lui faire passer un message. Un message qui aurait était très explicite pour quiconque l'aurait aperçu, mais seule le vide a eu ce privilège. C'était un regard qui voulait dire "défie-moi si tu oses, de toute façon, je te crache dessus !". L'Aiglonne fut secouée par de nouvelles convulsions qui manquèrent plusieurs fois de la précipiter dans le vide. Mais ce n'était pas as des gémissements qui s'échappaient de sa bouche, bien au contraire, il s'agissait de grand éclats de rire. Un rire nerveux, et démoniaque. Sonore aussi, il se répercutait la grande pièce, et dérangeait même les volatils les plus endormis.

Son visage était fendu par un rictus méprisant, qui la défigurait complètement. Elle avait véritablement l'air d'une possédée, ou d'une folle à lié. Si quelqu'un tentait de l'approcher, il devrait bien s'y reprendre à deux ou trois fois, avant d'oser.

Ce jour là, Jon avait profité d'une pause entre deux cours pour monter à la Volière. Il ne recevait plus la Gazette du Sorcier depuis quelques jours déjà, et il comptait bien, du haut de ses douze ans, pousser sa petite gueulante. Hé ! Il fallait bien se montrer adulte de temps en temps !
Sa lettre était déjà toute prête, il n'aurait qu'à fixer la lettre, envoyer le hibou et roulez jeunesse !
Il sauta les dernières marches trois par trois tout en sifflotant. Il était d'excellente humeur aujourd'hui. Ses cours commençaient enfin à bien se passer et sa solitude habituelle s'était légèrement effacée. Une bonne journée.
Il franchit la porte de la Volière.

- ... migh as well Jump. Go ahead and juuuuump ! chantait-il.

Il s'arrêta net. Sa lettre s'écrasa par terre.
Une fille se trouvait devant lui, lui tournant le dos. Elle avait de courts cheveux d'un blond difficile à définir, et ses couleurs indiquait qu'elle était de Serdaigle. Mais le détail qui retenait toute l'attention de Jon, c'est que la fille se tenait sur le rebord d'une des fenêtres de la Volière, à quelques centimètres seulement d'une chute mortelle.

- Oy ! interpella Jon.

Ce n'était peut-être pas la chose à faire, mais actuellement il n'avait pas vraiment idée de quelle était LA chose à faire. La fille se retourna... Et ce que Jon vit lui fit des frissons dans le dos : la fille arborait un rictus terrifiant, un sourire maléfique qui fit instinctivement reculer Jon. Ce sourire n'avait rien de naturel...
A ce moment précis, il entendit les hiboux commencer à s'agiter autour de lui, des feuilles éparses laissées par des élèves peu soigneux commencèrent à s'envoler. Une atmosphère glauque et maléfique emplit la Volière. Tout, absolument tout criait à Jon de s'enfuir, mais une élève était en danger... Même si le sourire terrifiant qu'elle lui adressait à ce moment précis ne semblait pas indiquer qu'elle ait besoin d'une quelconque aide.
Les hiboux se firent plus nerveux, commencèrent à piailler avec force...

- OY ! répéta-t-il, en cachant le tremblement dans sa voix. Descend de là ! Si on nous voit on va se faire coller, et si tu tombe j'ai pas envie qu'on m'accuse !

Un trait d'esprit n'était peut-être pas la chose la plus adaptée à ce moment. Mais c'était la seule chose qu'il pouvait faire à ce moment pour ne pas s'effondrer sous le stress.
Surtout, garder à l'esprit que ce démo... cette fille est sur le point de tomber

Les hiboux s'étaient mis à piailler autour d'elle. Ils battaient des ailes, et envoyaient de la paille un peu partout. Une pluie de paille pour être précise. Elle avait dû se dévisser la tête pour voir derrière elle tout en gardant le buste orienté vers l'extérieur. Ses sourcils s'enfoncèrent d'un cran pendant que son sourire s'allongeait. Elle savait qu'il y avait quelqu'un près de la porte, mais sa vision était floue, son regard vide. De nouveaux gloussements surgirent des profondeurs de sa gorge. Ils étaient tellement dissonants qu'ils en donnaient mal aux oreilles.
- AHAHAHA !!!

La nouvelle Olympe trouvait l'expérience très intéressante, et décida de sauter. Sauter sur place, sur le rebord de fenêtre. Ses deux mains étaient jusque là fermement agrippées au cadre glissèrent, petit à petit, millimètre par millimètre. La sueur qui perlait sur sa paume et sur son front accéléraient le processus. Son corps était tellement tendu et crispé que ses muscles lui faisaient mal. Ses zygomatiques étaient prêts à rompre. Le seul avantage qu'on pouvait trouver à ses sauts convulsifs, et totalement inconsidéré dans le moment présent, était le sang qu'il libérait dans les membres. Au moins, elle n'était pas assez engourdie pour perdre toute sa maladresse et son agilité.

Toujours en sautant, elle lâcha complètement le mur et mit deux doigts dans sa bouche. Comme le lui avait appris son père. Elle souffla de toutes ses forces, et un sifflement aiguë et surpuissant jaillit de ses entrailles. Lorsqu'elle pensa à son père, de grosses gouttes glissèrent sur ses joues. De grosses larmes bien rondes, et bien ventrues. Le sifflement s'en alla au loin. Comme une enfant, l'Aiglonne battit des mains, riants aux éclats.
- AHAHAHAHA

À présent le rire était roque et enroué. Et bondissait, encore, et encore, inlassablement. Prise d'une soudaine inspiration, elle fit un 180° pour se trouver face au garçon. Ses yeux aveuglent ne lui permettaient toujours pas de voir ou il était, mais elle fixa un point quelques part en dessous d'elle en y mettant tout la rage dont elle était capable. La lumière du soleil se reflétait sur son visage humide.