Comme tous les deuxièmes années, tu n'as pas cours le mercredi matin, ce qui veut dire que tu peux te permettre de ne pas trop faire attention aux heures, tant que tu te présentes dans la grande salle à temps pour les divers repas de la journée. C'est pour cette raison que tu es restée à lire dans la salle commune pour la matinée et que, maintenant, tu te trouves dans la bibliothèques. c'est en général ce que tu fais après le repas de midi, afin d'avancer le plus possible tes devoirs. tu es toute installée, tes livres et tes nombreux parchemins posés sur la table, tu n'as plus qu'à t'y mettre. Seulement, tu ne pouvais t'empêcher d'être déconcentrée par des rires, juste en face de toi. Ils se font discrets puisque le silence doit régner mais tu as l'impression que les responsables ne cachent pas leur hilarité. Au début, tu ne relevais même pas la tête, te disant que ça ne devait être qu'un fou rire d'une petite bande mais, lorsque tu regardes dans la direction de ce prétendu fou rire, ton visage, habituellement rayonnant, se change en un visage illustrant la frayeur. Juste en face de toi, tu reconnais cette tête blonde qui te fait la misère depuis quelques années déjà. Evidemment, elle est avec ses amies mais elle regarde bien dans ta direction. Elle savait que tu allais finir par croiser son regard et ce, malgré le fait que tu ne sois pas si curieuse, et elle en a profité pour te mettre un coup de pression en montrant qu'elle était dans les parages, ce qui a fonctionné. Elle te connait et elle sait comment tu peux réagir.

Désemparée, tu arrêtes illico de travailler, tu es bien trop distraite désormais. Ce lieu te rappelles bien trop la dernière fois que Tess t'a menacée, depuis que tu sais qu'elle est en face de toi, tu ne peux pas rester là, ce sera complètement contre-productif, en plus de te faire du mal.

Finalement, tu décides de ranger tes affaires dans ton sac et de remettre les livres dans les bons rayons. Tant pis pour aujourd'hui, tu pourras toujours travailler demain et continuer les devoirs qui ne nécessitent pas de recherches un peu plus tard. Tu passes donc rapidement la porte de la bibliothèque, ton sac sur une épaule.

A partir de ce moment-là, tu penses rejoindre la salle commune mais ta cousine peut également y aller, ce qui n'est clairement pas la bonne idée, même si c'est ce qui vient le plus facilement en tête. Tu montes donc les étages pour rejoindre la salle de répétitions, une autre salle où tu as l'habitude de passer du temps. Machinalement, tu te retournes pour t'assurer que tu n'es pas suivie mais, comme si le destin avait décidé que les choses iraient de pire en pire aujourd'hui, tu vois Tess et sa petite bande te suivre et ne pas te quitter des yeux. Elle n'est pas si loin que ça et elle ne se cache pas, classique Tess.

Tu laisses tomber la salle de répétitions, elle t'a peut-être déjà vue y aller. Cette pensée est sûrement paranoïaque mais il est difficile de ne pas l'être à ce moment précis. Maintenant, tout ce que tu veux, c'est trouver une salle où tu pourrais entrer sans que la troisième année ne te voie y aller. Tu grimpes à toute vitesse les escaliers pour rejoindre finalement le troisième étage, si tu as bien compté. Tu confirmes tes pensées en reconnaissant l'étage où tu es arrivée et tu ouvres la porte de la première salle qui est devant toi. Pas le temps de regarder derrière toi, tu ouvres la porte, tu entres dans la salle et tu refermes aussitôt.

Tu prends le temps de respirer un bon coup, mains sur les genoux. Tu as même déposé assez bruyamment ton sac au sol, comme pour t'enlever ce poids de sur ton dos. Pendant que tu reprends ton souffle, tu fais de ton mieux pour te calmer : c'est fini, elle n'est plus là. Tu as dû répéter plusieurs fois cette simple phrase dans ta tête mais, c'est bon, tout va bien.

Tu te redresses et tu passes une main dans tes cheveux pour les remettre en place. Tu détailles du regard la salle des trophées, comme pour t'assurer que c'est bien dans cette salle que tu es entrée. Tout semble être entré dans l'ordre mais tu te dis que tu vas rester encore un moment ici, au cas où. Tu allais jeter un oeil aux trophées autour de toi, lorsque tu remarques qu'en réalité, tu n'es pas seule, dans cette salle. Sans trop réfléchir, tu t'exclames :

- Oh excuse-moi, je pensais être seule !

Tu reconnais peu à peu la personne en question, bien soulagée que ce soit elle et pas quelqu'un d'autre : tu ne t'es pas vue mais tu as sûrement dû être ridicule !

- Arya ?

Voilà déjà trois jours qu'Arya avait eu cette fameuse et longue conversation avec Madison. Conversation qui avait eu le pouvoir – ou bien le miracle – de rapprocher les deux sœurs qui s'étaient si longtemps haï. Arya se sentait mieux, plus légère, maintenant qu'elle avait partagé quasiment tous ses secrets avec elle. Maintenant qu'elle sentait qu'elle pouvait lui faire confiance. Malgré ses cinq sœurs, elle n'avait jamais vraiment eu la sensation d'en avoir autant à ses côtés.

Madison avait montré à sa benjamine le trophée de leur père qui trônait fièrement sous la poussière. Arya n'avait cessé d'y penser, n'avait cessé de s'imaginer son père voler dans le stade de Poudlard, à son âge. Ainsi, lorsqu'elle trouva enfin du temps libre en-dehors de ses entraînements d'escrime et de Quidditch, elle se rendit à la salle où étaient exposé tous les trophées. Simplement pour s'assurer qu'il était toujours là, qu'elle n'avait pas rêvé.

Voilà déjà un moment qu'elle le fixait. Elle sentait la présence du fantôme de son père près d'elle. Mais il n'était pas envahissant, cette fois. Il était léger, doux. Il ne disait rien, cette fois, pas un murmure à l'horizon. Mais il n'en avait pas besoin. Relire encore et encore le prénom et le nom de son père suffisait à calmer la fillette. Comme si cette même personne n'était pas également celle qui la tourmentait habituellement jour et nuit.

C'est alors qu'un son brusque, incongru dans le silence dans lequel elle baignait jusqu'à maintenant la fit sursauter. La Gryffondor se redressa et se tourna vers la porte. Elle n'eut aucun mal à reconnaître Lili Cooper, sa fidèle compagne de potions et autres cours où elle la réveillait lorsqu'il le fallait. Son entrée précipitée semblait indiquer qu'elle n'était pas venue pour admirer les trophées – plutôt pour se cacher. Celle-ci mit quelques secondes à se rendre compte de sa présence, et lorsqu'elle prononça son prénom, Arya eut presque envie de répondre « Bravo, tu connais mon nom, je te félicite ! » d'un ton ironique. Mais comme d'habitude, sa voix était partie se cacher aux oubliettes.

Elle fit signe à la Serpentard de s'avancer dans la salle et de la rejoindre pour s'éloigner de la porte. Puis elle la détailla des pieds à la tête, avant de la fixer intensément, l'air de demander « qu'est-ce qui se passe ? ». Lili devait se douter qu'elles n'allaient pas se taper la discute alors qu'elle venait d’atterrir telle une furie dans la salle des trophées, ce qui n'était pas son genre. Lili, la célèbre élève la plus gentille de tout Poudlard, qui ne ferait pas de mal à une mouche, venir se cacher dans une salle quasiment déserte et poussiéreuse ? Il y avait de quoi se poser quelques questions.

Honteuse, c'est le sentiment que tu as, d'un coup. Arya était ici, tranquillement et toi, tu arrives comme un éléphant arriverait dans un magasin de porcelaine. D'un côté, tu es tout de même soulagée de savoir que c'était la Gryffondor que tu dérangeais, plutôt qu'un inconnu parce que tu n'aurais pas vraiment su comment t'expliquer. Tu sais que tu les lui dois, ces explications, il faut dire qu'il est rare de te voir dans cet état. On doit déceler la peur dans ton regard, mêlé peu à peu au soulagement d'avoir semé ta cousine. Cela change beaucoup de ton sourire habituel, remplacé par de longs soupirs pour reprendre ton souffle.

Tu laisses tes affaires de côté et tu t'approches doucement d'Arya. Tu sais qu'elle ne te poserait pas de questions, pas à haute voix en tout cas, il est donc normal qu'elle ne te dise rien. Elle ne fait que te regarder, elle te fixe même. Tu cherches tes mots pour ne pas paraitre ridicule mais rien ne vient, rien. Tu es encore bouleversée par tout ce que ta cousine peut faire pour te mener la vie dure. Clairement, sa réussite du mois dernier ne lui a pas suffi.

Vous n'allez pas vous regarder en chien de faïence, c'est à toi d'engager la conversation et de lui expliquer. Enfin, engager ? Celle-ci a déjà été entamée, tu le sens dans le regard de la Gryffondor : elle te demande ce qui se passe, tu en as grandement l'impression en tout cas. Depuis qu'Arya est devenue muette, tu as su apprendre à la comprendre, du moins grâce à ses réactions et son regard, principalement.

- C'est.. Une très longue histoire, bredouilles-tu.

On a vu mieux comme réponse mais c'est pourtant la vérité. Comment expliquer en deux mots ce qu'il t'arrive depuis que tu es toute petite à cause d'elle ? Tu ne peux pas, tu ne sais même pas tout, tu ne comprends toujours pas pourquoi votre relation a changé du jour au lendemain. Pourtant, Arya pourrait comprendre, finalement, puisqu'elle a vu ta cousine chercher à te pourrir la vie, elle était même aux premières loges.

Regardant une première coupe à proximité de la Gryffondor, tu finis par ajouter :

- Enfin, si tu veux la version courte, disons que je suis là à cause de Tess, dis-tu, d'une voix très posée et sérieuse.

Pour le moment, tu n'en dis pas plus, tu ne sais pas si Arya a envie que tu lui expliques tout ce qui vient de se passer ou même la version longue. Tu n'es pas du genre à raconter tes problèmes, c'est indéniable. Même avec Alexei, tu lui as simplement dit qu'elle te mène la vie dure depuis des années. Tu as toujours du mal à t'ouvrir aux autres et à leur expliquer ce qui ne va pas, tu ne veux pas leur miner le moral avec des histoires qui ne les concernent même pas. Tu regardes à nouveau Arya, te demandant si tu devrais continuer ou non.

Arya fixait Lili, en attente d'une explication. Si elle ne voulait pas en parler, elle ne s'en mêlerait pas et la laisserait tranquille. Elle n'était pas du genre à s'occuper des affaires des autres, ni à insister pour absolument savoir pourquoi Lili semblait si désemparée.

La Serpentard posa son sac, mais n'en dit pas plus. Il ne fut pas difficile pour la Gryffondor de reconnaître ce sentiment qu'elle ne connaissait que trop bien. Lili ne parvenait pas encore à trouver les mots, alors elle la laissa prendre son temps, et son regard se fit plus doux. Elle ignorait que Lili, la parfaite Lili, connaissait elle aussi ce ressentiment, quelques fois. Mais cela pouvait arriver à tout le monde, n'est-ce pas ? Arya avait simplement l'impression que son amie avait le pouvoir de toujours savoir comment réagir à n'importe quelle situation. La voir ainsi était encore tout nouveau pour elle.

Et puis enfin, une phrase. Elle avait l'air épuisée. D'un geste complètement instinctif, elle posa sa main sur l'épaule de son amie, sans réfléchir. Lorsqu'elle se rendit compte de son mouvement, son regard se fixa sur sa propre main avant de se plonger de nouveau dans celui de Lili. C'était sa manière de lui signifier qu'elle était là, elle qui ne parvenait pas à le dire à haute voix. Les mots n'étaient pas la seule manière de se faire comprendre. Il en existait toute une palette, mais les gens les connaissaient à peine, laissant la Gryffondor perdue en ce monde.

Elle se demanda si Lili allait la laisser ainsi avec seulement cette explication. À vrai dire, la Serpentard en savait beaucoup sur elle, mais ce rapport ne fonctionnait pas à l'inverse. Si Arya ne se confiait pas spécialement facilement, Lili en savait pourtant beaucoup sur a vie. Elle avait été là pour elle dans les moments où elle en avait besoin, c'était certainement cela. Pourtant, à l'inverse, Arya n'avait pas l'impression de savoir beaucoup de choses sur Lili. Par exemple, elle ne l'avait jamais vu dans cet état.

Puis Lili mentionna Tess. Immédiatement, la main posée sur l'épaule de son amie se crispa au possible, et la Gryffondor cessa de respirer par la même occasion. Son regard doux se changea en regard dur alors qu'elle se remémorait la scène qu'elle avait osé imposer à sa cousine un mois auparavant. Ce jour où elle avait de nouveau perdu le contrôle, où elle avait été incapable de se retenir et avait frappé la poupée Barbie. Elle regrettait d'avoir perdu le contrôle, mais pas de lui avoir offert son poing. Elle le méritait, et méritait même cent autres coups. Certes, elle avait écopé d'une punition par la suite, mais s'il fallait recommencer, elle le referait sans hésiter. Mais la prochaine fois, elle éviterait de le faire dans la Grande Salle, sous les regards de tout Poudlard. Comment Lili et Tess pouvaient être de la même famille ?

La fillette retira sa main de l'épaule de son amie pour déclipser son carnet attaché à sa ceinture, se remettant à respirer par la même occasion. Comme à son habitude, elle communiquerait ainsi, par écrit, faute de pouvoir parler. Elle apprenait certes la langue des signes avec ses sœurs, mais elle était prête à parier que Lili ne savait pas signer.

Comment va son nez à cette peste ?

Avec un petit sourire satisfait, elle montra son carnet à la Serpentard, dans l'espoir de lui remonter un peu le moral en lui remémorant le magnifique poing que sa cousine s'était pris.

La main d'Arya sur ton épaule te fait du bien. Mine de rien, tu te doutes que ce geste signifie beaucoup pour Arya, puisqu'elle ne peut pas toujours s'exprimer comme tu le ferais. Tu ne l'interprètes peut-être pas de façon exacte mais tu y vois un geste réconfortant. Elle sait combien Smith t'a fait du mal et savoir que tu n'es pas la seule à ne pas trouver ça normal aide à ne pas se refermer sur soi-même, un sentiment qu'il t'arrive de connaitre assez souvent lorsque des soucis t'arrivent.

Vous n'avez pas vraiment parlé de ce jour-là depuis mais tu es rassurée de savoir qu'elle est de ton côté et qu'elle n'a pas l'air de t'en vouloir d'avoir caché ton statut, c'est ce que tu comprends en voyant qu'elle n'a pas coupé les ponts avec toi, en tout cas.

Lorsque tu vois sa réponse, tu rigoles légèrement. C'est vrai, son nez. Rien que de voir ces mots t'aide à revoir parfaitement la scène. Il faut dire que tu avais bien écarquillé les yeux, tellement tu étais étonnée. Au moins, Tess s'était tue, même si le mal était déjà fait.

- Miss Holloway le lui a réparé avant de partir à ta recherche. Elle lui a aussi lancé un Silencio, ajoutes-tu en ne cachant que très peu ta joie.

Sur le coup, savoir qu'elle se tairait pendant un moment t'a soulagé, mais pas suffisamment pour que tu restes tranquillement à ta table. Même si tu ne souhaites le malheur de personne, tu dois avouer que voir que ta cousine a dû s'arrêter malgré elle n'était pas si mal. Enfin, tu étais surtout paniquée par tout ce qu'elle venait de dire mais, au moins, elle n'a pas pu en rajouter vu le savon que lui a passé votre professeure de Défense contre les forces du mal.

- Au fait, je ne devrais peut-être pas dire ça mais merci d'avoir essayé de me protéger. Ça fait plus d'un mois mais j'en parle peu, ne sachant pas vraiment quoi en penser.

Tu lui souris sincèrement et tu te dis que tu ferais mieux de lui expliquer un peu plus en détails ce qui vient de se passer.

- Mais bon, ça ne lui a pas empêché de me suivre comme si j'étais une proie, aujourd'hui. Faudrait que j'en parle à Dylan ou il va me tuer. J'étais en train de travailler et elle était en face de moi, avec ses meilleures amis, j'crois. Je suis partie mais elle m'a suivie assez bruyamment.

Tout comme toi, ton frère pensait qu'elle se calmerait après ce qu'elle a fait mais non, elle s'amuse encore à te mettre des coups de pression. Tu ne sais pas si elle cherchait réellement à t'approcher mais tu n'avais clairement pas envie de lui adresser la parole. Une contre trois, tu avais clairement d'autres choses à faire. Et si tu caches ce qui vient de se passer à ton frère, tu vas le regretter puisqu'il tient à mettre les points sur les i avec Tess si besoin. Seulement, contrairement à ta première année, ça ne semble pas si bien marcher puisqu'elle a trouvé un coup de pression. Maintenant qu'elle a utilisé sa carte maitresse, tu espérais qu'elle s'arrêterait mais elle continue à s'en donner à coeur joie.

Tu regardes une nouvelle coupe et tu poursuis :

- Mais tu sais ce qui est le pire dans tout ça ?

Hésitante, tu ne regardes pas ton amie dans les yeux, te demandant si tu fais bien de lui en parler.

- C'est que j'aurais pu chercher à me défendre. Au lieu de ça, je n'ai presque pas bougé et j'ai attendu que quelqu'un d'autre agisse à ma place. C'est pour ça que tu as été punie, par ma faute. Et j'en suis désolée, vraiment, dis-tu en la regardant après avoir prononcé ton dernier mot.

Tu ne voulais pas jouer au jeu de la spirale infernale en avouant que Tess ment sur son statut depuis le début mais, parfois, tu te dis que ça aurait peut-être été la meilleure chose à faire. Ça ne te ressemble pas mais peut-être que ça la dissuaderait de s'approcher de tes amis et toi. Face à elle, tu te sens impuissante et ça te rend malade.

Arya fut déçue d'apprendre que la Barbie avait eu le nez réparé juste après sa fuite de la Grande Salle. Elle mérité de garder un nez de travers pendant au moins une semaine. Mais un léger sourire vint faire frémir ses lèvres quand elle appris que miss Holloway lui avait fermé son grand clapet. Elle se promit que lorsque viendrait le temps d'apprendre Silencio, elle y mettrait toute sa passion, toute son âme. L'idée de pouvoir obliger quelqu'un au silence était étrangement excitante. Sans en abuser bien sûr. Comme disaient les grands, « un grand pouvoir demande de grandes responsabilités ». Mais bon, abuser un peu du sortilège de silence ne ferait de mal à personne... Le coin de ses lèvres se dressa à cette pensée. Gare à celui ou celle qui croiserait son chemin quand elle saurait maîtriser ce sortilège. D'ailleurs, Tess méritait de recevoir un Silencio à vie. C'était possible, ça ?

Elle s'efforça de ranger toutes les punitions qu'elle avait en tête pour la Barbie dans un coin de sa tête pour écouter Lili. Et ce n'était pas une mince affaire, elle en avait beaucoup. Quand la Serpentard la remercia d'être intervenue, Arya répondit par un rapide sourire, qui dura environ une demi-seconde. Elle, n'était pas vraiment sûre que c'était vraiment la bonne chose à faire. Et puis, Lili venait de le dire elle-même, elle avait « essayé » de la protéger. Elle n'avait pas réussi.

Cependant, elle décida de ne pas pleurer sur son sort et se concentra sur ce que lui disait son amie. Elle disait ne pas savoir quoi en penser, ce que la Gryffondor comprenait très bien. Il n'était pas difficile de constater que depuis cette fameuse scène dans la grande salle, Lili n'était plus vraiment comme avant. Peut-être moins épanouie. C'était un sentiment qu'Arya ne parvenait pas vraiment à décrire, mais d'un seul coup d’œil, elle pouvait jurer que les paroles de Tess et ses conséquences l'avaient énormément touché. Arya ignorait ce qu'elle pouvait bien faire pour ramener la Lili d'avant, mais d'un autre côté, elle avait conscience qu'elle ne reviendrait jamais. La Serpentard devait apprendre à faire face et à passer au-dessus de cette épreuve, et pour cela, elle seule pouvait affronter ses démons.

Puis Lili lui raconta que Tess venait une nouvelle fois de faire des siennes aujourd'hui, comme elle s'en doutait. Elle l'avait donc suivie ? Mais cette fille était malade dans sa tête ou bien il lui manquait simplement quelques neurones ? C'était le vide intersidéral dans son crâne, à cette Barbie à la coquille vide !

Arya imagina la cène sans grande difficulté. Il lui arrivait souvent, quand elle était seule dans son coin dans une pièce remplie, de penser entendre des choses qui se disaient sur elle, pas forcément toujours en bien. Évidemment, dans une école remplie d'adolescents, tout le monde devait parler de tout le monde, mais la sensation d'être observé ainsi n'était pas agréable. Elle comprenant pourquoi Lili avait fuit, elle aurait certainement fait de même.

Lili dit qu'elle allait en parler à son frère, mais Arya doutait qu'il puisse faire quelque chose. Après tout, en apparence, Tess n'avait « rien fait de mal ». Et c'était ce qui mettait le plus la Gryffondor hors d'elle. Il suffirait simplement que Tess fasse une grosse erreur pour que le karma puisse s'abattre sur elle en toute tranquillité.

Elle continua d'écouter Lili en silence. Parfois, les gens avaient juste besoin qu'on les écoute. Et elle sentait que c'était ce que souhaitait la Serpentard. Une simple oreille attentive.

Par contre, quand Lili lui confia qu'elle se sentait coupable de n'avoir rien fait ce jour-là, un mois auparavant, sa résolution de rester une oreille attentive vola en éclat. On pouvait bien l'appeler Arya la girouette, tant pis, elle ne pouvait pas laisser Lili dans cette stupide culpabilité. Elle fronça les sourcils, s'empara de son carnet de son stylo pour écrire :

Dis pas n'importe quoi ! Si j'ai été punie, c'est parce que moi, j'ai décidé d'intervenir, pas parce que toi, tu n'as rien fait. N'importe qui aurait réagi ainsi à ta place, tu n'as pas t'en vouloir.

Elle montra son carnet à Lili, puis, après une seconde de réflexion, écrit de nouveau.

Tess est une peste, et il paraît qu'on a pas le droit de la punir pour ça, même si elle mérite encore de bonnes raclées. Ça n'a rien à voir avec toi, t'as pas le droit de la laisser te toucher. Certes, aujourd'hui, t'avais pas 36 choix qui s'offraient à toi, mais c'est pas une raison pour t'enfermer dans ta bulle de culpabilité. Crois-moi, je sais que c'est pas une bonne chose. La laisse pas t'emmener sur des chemins sombres comme ça.

Son paragraphe sonnait vraiment grave, mais elle s'en fichait. Elle voulait que Lili comprenne. Elle voulait la libérer de ces pensées venimeuses, même si elle-même ne parvenait pas à s'en délivrer.

Tu as bien vu à la tête d'Arya qu'elle n'était pas super heureuse de savoir que ta cousine n'a pas gardé très longtemps les traces de son passage. Seulement, même si Tess est une peste reconnue pour cela, il est normal que Miss Holloway ait fait quelque chose pour son nez. Même toi, tu aurais sûrement voulu faire quelque chose pour elle, peu importe vos différends, sauf peut-être à ce moment précis, vu qu'elle venait tout juste de chercher à te faire du mal. Enfin, il faut dire que, toi, tu n'apprécies pas sa compagnie car elle laisse à désirer mais tu n'as rien contre elle, ce qui semble être tout le contraire de Tess.

Voir qu'Arya nie en bloc toutes tes réflexions te fait autant de bien que cela t'étonne : face à ces réflexions, tu te disais à chaque fois que oui, tu aurais dû faire quelque chose mais tu te le dis sans doute car ce n'est pas ce qui s'est passé. Tu es du genre à éviter les conflits et voir que ta réaction face à ces situations est plus ou moins ridicule t'énerve au plus haut point. Néanmoins, au fond de toi, tu sais que la Gryffondor a raison, en particulier pour sa punition. Seulement, tu ne peux pas t'empêcher de te mettre la faute dessus, simplement car tu sais pertinemment que cette situation ne serait pas arrivée si tu n'avais pas caché ton statut. Arya semble avoir survécu à cette punition et ne t'en veut pas, c'est ce qui t'aide à accepter ses paroles.

La deuxième partie de son message te fait vraiment réfléchir : c'est vrai, elle n'a pas le droit, mais comment l'en empêcher ? Elle t'a laissée tranquille lors de ta première année mais, maintenant, cela semble compliqué de l'imaginer ne plus t'approcher.

- Tu as raison, mais ça m'agace vraiment. J'ai du mal à lui faire face, alors, comment faire en sorte que tout ça s'arrête ? En général, tant qu'elle n'implique pas mes amis, ça m'est égal mais ce n'est pas la première fois malheureusement, donc qui me dit qu'elle ne le fera pas à nouveau ?

Tu regardes Arya et tu ne sais pas du tout si elle a des réponses à te fournir. Pour une fois, tu n'es pas celle qui conseille mais bien l'autre personne. Tu as suffisamment confiance en Arya pour lui confier tes doutes et tes peurs, c'est pourquoi tu le fais. Peut-être qu'elle n'aura rien de spécial à dire mais savoir qu'elle t'écoute te rassure. Tu soupires, avant de prononcer, sans vraiment t'en rendre compte :

- Ce serait tellement plus simple si tout était comme avant...

Tu regardes Arya, redoutant sa réaction par apport à ce que tu viens de dire. Un mois après cette révélation, tu dois dire que tu es bien mieux sans ce secret, ce n'est pas ce que tu cherches à dire, tu sais bien que tu es bien mieux ainsi, même si ce sera compliqué pendant quelques temps encore. Voyant que la Gryffondor est dans l'incompréhension, tu ajoutes :

- Quand nous étions petites, Tess et moi, on s'entendait bien, très bien même. On passait beaucoup de temps ensemble mais ses parents avaient tendance à la comparer à moi, trop tendance. Sur le coup, quand elle a commencé à être plus froide avec moi, je n'ai pas compris - il faut dire que j'avais sept ans aussi - mais, avec le temps et grâce à Dylan, j'ai pu comprendre d'où vient le problème : Tess m'en veut car je suis celle que ses parents voulaient avoir. Elle faisait beaucoup d'efforts mais ses parents continuaient sans cesse à me comparer à elle, ce qui a dû la démoraliser. Maintenant, elle doit vouloir chercher à faire de ma vie un enfer, comme j'ai pu le faire lors de son enfance, malgré moi, finis-tu par dire. Ça ne veut pas dire que je cautionne ce qu'elle fait mais je comprends un peu son mal-être, même si sa façon de faire pour le réduire n'est clairement pas la bonne. J'aimerais pouvoir m'expliquer avec elle mais ça semble impossible, donc la seule solution que j'ai est de l'ignorer et de ne pas me laisser atteindre.

En général, ce que disent les autres à ton sujet t'importe peu mais il faut dire que Tess a de quoi te faire du mal. C'est sûrement pour cette raison que tu ne veux même pas essayer de lui parler.

Plus elle écoutait Lili, plus Arya prenait conscience que Tess lui avait vraiment rendu la vie dure en lui faisant comprendre qu'elle ne la laisserait jamais tranquille. Elle aurait vraiment aimé faire quelque chose pour elle, aller enfermer Tess dans un placard à balais et jeter la clé dans le lac. Lili était beaucoup trop gentille avec elle pour que sa cousine ait le droit de l'embêter. Tout en continuant d'écouter la Serpentard, une idée germa dans son esprit. Peut-être qu'elle pourrait trouver Tess et lui parler, simplement histoire de lui faire peur pour qu'elle arrête de l'embêter. Mais elle n'était pas certaine de réussir à contrôler son envie de la frapper si elle parlait avec elle. Ni si elle l'apercevait dans un couloir, en fait.

Ce que Lili semblait le plus craindre, c'était que Tess recommence. Quand elle murmura qu'elle souhaitait que tout soit comme avant, Arya l'observa d'un œil neuf. Elle s'était faite cette réflexion tant de fois qu'elle était quasiment devenue une seconde nature, une pensée qui lui venait instinctivement chaque seconde de la journée. Elle se demandait souvent pourquoi tout était devenu si compliqué avec le temps. Pourquoi le monde lui semblait si sombre alors qu'il lui apparaissait auparavant si clair.

Puis, quand son amie lui raconta leur enfance, à elle et Tess, elle comprit enfin pourquoi sa cousine la persécutait tant. Apparemment, ses parents n'avaient pas été les plus sympathiques, mais elle comprenait, étonnement, pourquoi elle s'était mise à détester Lili. Après tout, elle était... parfaite, à son sens, et être sa cousine constamment comparée à elle ne devait pas être facile. Mais, à sa place, Arya se serait simplement éloigné d'elle. Ça aurait bien plus simple que de se fatiguer à la suivre dans les couloirs de Poudlard.

Quand Lili eut fini de parler, la Gryffondor reprit son carnet et son stylo et écrivit :

Peut-être qu'en grandissant elle finira par mûrir et se rendra compte que ce qu'elle fait est débile. En attendant, tu peux simplement lui montrer que t'es plus mature qu'elle en l'ignorant royalement.

Elle souligna le dernier mot et montra le carnet à sa camarade. Elle aurait aimé lui dire plus, lui dire de toujours garder la tête haute malgré tous ce que Tess était capable de faire, de ne pas se laisser impressionner... Mais on ne pouvait pas tout dire sur du papier. Alors elle espéra simplement qu'elle pourrait lire tout ce qu'elle ne pouvait pas dire dans son regard. Mais elle savait que les yeux ne faisaient pas tout non plus. Elle s'obligea à ne pas s'apitoyer sur son sort à cause de son mutisme. Lili n'avait franchement pas besoin de cela maintenant.

Tu sais très bien que la Gryffondor a raison mais, malgré tout, tu te dis que c'est bien plus facile à dire qu'à faire : en temps normal, tu te fiches de ce que peuvent bien penser les autres mais, là, lorsqu'il s'agit d'une personne qui a plusieurs cartes en main pour toucher là où ça peut faire mal, ce n'est pas si évident. Après tout, essayer d'aller au-delà des paroles d'une personne qui t'appelle sans cesse Miss Parfaite, ça part mal.

- Royalement.. J'ai presque envie de dire si seulement. J'ai même pas envie de la remettre à sa place tellement elle n'a pas l'air de vouloir changer, et dire que c'est elle la plus âgée... Elle arrive toujours à trouver quelque chose de neuf qui pourrait me faire du mal et je ne sais pas comment y réagir. Enfin, je devrais ne pas y prêter attention, c'est vrai.

Tu sais, malgré ce que tu as l'air de dire, que tu t'es bien améliorée depuis que Tess s'en prend à toi. La troisième année n'est pas à son coup d'essai et tu avais réussi à être indifférente face à ses manigances mais, à Poudlard, ce n'est plus pareil, puisqu'elle ne s'attaque plus forcément à toi, mais aussi à tes amis. Toi, tu peux laisser faire et simplement t'éloigner d'elle mais pour tes amis, c'est une autre histoire : en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, tu pourrais très bien la remettre à sa place, comme tu l'as fait lorsqu'elle a tenté d'embobiner Alexei. Rien que de penser à ce jour te fait serrer de manière assez forte tes poings, comme si tu te rendais compte que cette fois ne lui avait pas suffi. T'éloigner d'elle et la remettre en place, tu sais faire, mais l'ignorer est encore peu simple pour toi.

- Avant, quand je n'étais pas à Poudlard, elle essayait de monter mon frère contre moi et vice-versa. A force, on a compris son petit jeu et ça ne nous atteint plus mais avec mes amis, c'est différent puisque vous ne savez pas forcément de quoi elle peut être capable, elle est bien manipulatrice, malgré son âge.

Tu t'en veux presque de parler de ta cousine de la sorte mais, après tout, c'est bien la vérité. Tu poursuis :

- Je ne voulais pas qu'on me rattache à elle, ce qui lui permettait de s'approcher de vous, comme elle a pu le faire avec Kyana.

Les larmes viennent mais tu les retiens sans trop de soucis, tu sais t'y prendre. Tu en voudras toujours à Tess, c'est une évidence, et ce, bien que tu sois loin d'être rancunière en temps normal.

- Merci pour le conseil en tout cas, et pour tout. Savoir que tu me soutiens m'aidera à coup sûr ! finis-tu par dire avec un léger sourire.

Tu te rends compte que tu as beaucoup parlé pour une personne qui parle très peu d'elle. Il faut dire que savoir qu'Arya est de ton côté aide beaucoup à te laisser aller. Elle a l'air de ne poser aucun jugement sur toi et tu comprends bien qu'elle essai de trouver des solutions pour que la situation évolue, d'où ton remerciement que tu considères de rigueur.

Arya n'avait pas besoin d'être voyante pour deviner que Lili avait plus besoin d'être écoutée que réconfortée. Elle se réjouissait de la voir s'ouvrir ainsi à elle, même si c'était pour lui confier de telles choses. En plus, elle ne voyait pas très bien ce qu'elle aurait pu ajouter que la Serpentard ne sache pas déjà. Et elle savait à quel point il était agaçant d'entendre toujours les gens répéter les mêmes conseils ; ce n'était pas comme si certains ne comprenaient pas son incapacité à parler, par moments.

Alors elle l'écouta. Elle espérait que cela ferait du bien à Lili. Elle ne voulait pas qu'elle se sente seule contre sa cousine. C'était peut-être le cas avant, avant qu'elle n'entre à Poudlard, quand elle était seule avec son frère, mais plus maintenant. À présent elle avait des amis autour d'elle, et Arya ne comptait certainement pas laisser Tess lui faire un nouveau mauvais coup de ce type. À Poudlard, elle ne serait pas seule.

Par contre, lorsque Lili commença à avancer qu'elle avait peur pour ses amis, elle reprit son stylo. Non mais dis donc, elle n'allait tout de même pas la laisser se morfondre pour cela ! Tess était peut-être persuasive et manipulatrice, mais si certains la laissaient tomber juste après l'avoir écouté, alors ils n'étaient pas de vrais amis. Arya était persuadée que si ça arrivait – et encore, si elle parvenait à écouter Tess sans lui mettre son poing dans la figure – elle irait ensuite voir Lili pour entendre sa version des faits. Elle savait quel genre de personne était la Barbie, et elle ne s'abaisserait jamais à se faire mener en bourrique par une Barbie – elle avait ses principes, tout de même.

T'inquiète pas, je crois que tout le monde sait que Tess est une peste de renom, faudrait être un peu barré pour l'écouter.

Quand Lili mentionna Kya, Arya fronça légèrement des sourcils. Quel rapport y avait-il entre Kyana et Tess ? Mais elle ne posa pas la question. Ce n'était pas ses affaires. N'empêche, elle se demanda si au moins, Kyana savait à quel point Tess n'était pas très fréquentable... Bon, c'était une vision complètement subjective, mais tout de même...

Puis Lili la remercia, et Arya esquissa un sourire qui se voulait rassurant. Ce devrait plutôt être elle qui devrait la remercier, pour lui faire assez confiance et lui ouvrir ses sentiments. Elle avait la sensation de mieux connaître la Serpentard, comme si auparavant, elle n'avait fait que frôler la surface de sa personnalité.

De rien, combattre les Barbies mal intentionnées, c'est plus qu'une passion, c'est un devoir !

Elle espérait que ce trait d'humour la détendrait un peu. À condition qu'elle sache ce qu'était une Barbie... Le savait-elle ? Après tout, elle avait grandi dans une famille de sorciers exclusivement... Mais peu importait, elle comprendrait quand même le fond de la blague. Normalement.