Cela faisait plus d'une semaine que Cassie n'avait pas eu de courrier venant de sa famille. Daphnée Murphy, sa mère, lui envoyait une lettre au moins tous les trois jours et, quand elle n'avait pas le temps, Jay ou Eloeen, parfois son père, lui écrivaient un petit mot pour lui dire à quel point elle leur manquait. C'était aussi le seul moyen qu'elle avait pour avoir des nouvelles de Magnus et Liselotte. De plus, même si elle avait fait quelques connaissances dans le château, elle ne sentait toujours pas à sa place. Ce n'était définitivement pas normal... 
Assise à la table des Gryffondor pour le petit-déjeuner, Cassie soupira. Elle jouait avec la nourriture dans son assiette, sans y toucher. Cette absence lui faisait un trou dans le cœur. Ses propres parents l'avaient-ils oublier ? Elle secoua la tête, des larmes aux yeux. Non, il ne fallait pas qu'elle pense à cela ! Ce n'était pas vrai. Ça ne pouvait pas être vrai ! Soudain, un cri perçant déchira le bruit déjà ambiant de la Grande Salle. La jeune fille leva la tête ; des centaines de hiboux arrivaient, des colis et des lettres plus ou moins gros dans le bec ou accrochés à une patte. Elle ne put s'en empêcher, Cassie scruta le ciel à la recherche d'Athéna, la chouette effraie qu'elle utilisait pour envoyer des mots à ses parents. Comme sa famille n'avait pas de messager personnel, il renvoyait en général cette même chouette. En y repensant, cela faisait un moment que la jeune lionne n'avait pas vu la chouette à la volière... Et soudain, elle l'aperçut. Elle était là, une lettre dans le bec ! Cassie sentit un poids s'ôter de sa poitrine à l'apparition de cet oiseau qui avait tant changé sa vie - du moins à Poudlard. Athéna se posa près de la jeune fille. Cette dernière la caressa, tout en récupérant la l'enveloppe que tenait son amie. Car oui, l'oiseau et la la Gryffondor étaient devenues des amies.
Cassie regarda ce qu'elle venait de recevoir et soudain, un regard horrifié traversa son visage. Oh non... Cette enveloppe était beaucoup trop rouge à son goût. Rouge carmin même. Elle savait exactement ce que c'était. Elle avait même une petite idée du pourquoi, même si elle ignorait comment ses parents l'avaient appris. Elle voulut s'enfuir avec le colis piégé mais elle n'en eut pas le temps. Au moment même où elle frôla le sceau, la lettre s'ouvrit dans un grand geste.


La lettre s'arrêtait là. Elle se dévora toute seule, sous le regard de - presque - toute la Grande Salle. Rouge de honte, Cassie se recroquevilla autant qu'elle pouvait sur le banc.

Ennuyant, ennuyant, ennuyant ! répétait-il mentalement dans une litanie rageuse.

Airen frotta vigoureusement ses cheveux, agacé. Merlin qu'il s'ennuyait ! Il ne se passait jamais rien dans ce château ! Ses camarades échangeaient toujours sur les mêmes sujets dénués d'importance, que ce soit le Quidditch, leurs notes, les cours… Mais n'avaient-ils aucune vie en dehors de cette école ?!

Et Persona était toujours désespérément vide ! Son Journal, son Projet, la raison pour laquelle il avait été si enclin à s'immiscer dans la routine de Poudlard… Il avait l'impression de négliger une part de lui-même.

Frustré, il releva la tête vers le courrier et les nombreux élèves qui recevaient des lettres et des colis de leurs familles, et claqua sa langue contre son palais avec désapprobation en entendant les hululements incessants de ces bestioles pleines de plumes.

Il avait une chouette, et elle ne lui servait à rien mise à part à faire du bruit inutilement. Depuis qu'il était à Poudlard, il n'était pas venu la voir à la volière. Quelle utilité ? Il n'avait personne à qui écrire. Sa mère et son père ne méritaient pas qu'il perde son temps dans la rédaction d'une lettre vide de sentiments.

Il se décida à se lever, pour quitter la Grande Salle. Il avait fini de déjeuner, et n'avait aucun intérêt à rester un instant de plus dans cet endroit ô combien convivial.

-CASSIE AIDAN MONA HORIA MURPHY !

Le sursaut qui prit Airen agita ses épaules, et il se tourna brusquement vers la table des Gryffondor, tant dis que le silence s'imposait de lui-même sous la voix puissante de la Beuglante.

La Serpentard avait toujours détesté le concept des Beuglantes, bien qu'elles soient parfois utiles pour en savoir plus sur les autres. Il restait tout de même le fait que tout le monde profitait des hurlements ravageurs des parents mécontents. Airen préféra ignorer la contraction de sa gorge lorsque la pensée que jamais il ne recevrait une lettre rouge effleura son esprit. À la place, un sourire moqueur étira ses lèvres et il se dirigea vers la forme recroquevillée d'une Gryffondor de première année qui devait plus que tout espérer disparaître.

Non seulement elle venait de se faire engueuler en public, mais en plus, et sans méchanceté, ses parents n'avaient aucune crédibilité dès que son père ouvrait la bouche.

Sous l'œil plus que mauvais des Rouge et Or, il s'installa à côté d'elle, à cheval sur le banc, et son sourire se modifia pour devenir engageant.

Il savait simuler les émotions relativement facilement, et connaissait la répercussion de chacun d'entres eux sur les autres.

-Un sacrée Beuglante hein ? Engagea-t-il d'un ton léger, comme s'il parlait de la pluie et du beau temps. Peu importe ce que tu as fait, la prochaine fois je t'aiderai à dissimuler les preuves.

Un air faussement maléfique prit brièvement place sur son visage avant qu'il ne lui fasse un clin d'œil, plongeant son regard sombre dans celui bleuté de la jeune fille.

-Je suis Airen, en première année chez les serpents, se présenta-t-il avant d'ajouter, un brin ironique : Toi, tu es "Cassie Aidan Mona Horia Murphy", si j'ai bien entendu la délicieuse voix de ta mère.

Il glissa une main dans ses cheveux pour les rabattre en arrière tant dis que son autre main allait desserrer machinalement sa cravate. De façon nonchalante, il s'accouda à la table. Les autres Gryffondor avaient fini par l'ignorer, bien que quelques uns continuaient de lui lancer de drôles de regards. Que fichait un Serpentard à leur table ? semblait exprimer leurs yeux.

Malheureusement pour eux, ce n'était certainement pas Airen qui allait satisfaire leur curiosité, car c'était LUI qui posait les questions.

"Ohmondieuohmondieuohmondieuohmondieuohmondieuohmondieuohmondieuohmondieu."

Le cerveau de Cassie ne semblait plus fonctionner correctement. Elle voulait disparaître à tout jamais. Eloeen, sa grande sœur, l'avait prévenu que, parfois, lors des repas, une Beuglante perturbait la vie tranquille des étudiants de Poudlard mais jamais OH GRAND JAMAIS Cassie n'aurait cru que ça lui arriverait à elle. Elle avait toujours été très proche de ses parents et avait toujours essayé de les rendre fiers. Bon, dans ce cas là, c'était compréhensible qu'une petite punition s'imposait mais de 1) comment était-il au courant ? et de 2) était-ce vraiment nécessaire d'envoyer une Beuglante à la personne la plus timide et la plus introvertie de tout le château ?
Après quelques secondes durant lesquelles Cassie n'osa pas bouger, elle sentit les regards des autres lions se tourner vers elle. Elle captura même un regard désapprobateur. Honteuse et rouge, la jeune fille ne fit pas un seul mouvement, jusqu'à ce que quelqu'un s'asseye juste à côté d'elle. La griffonne releva la tête, étonnée. 

"Une sacrée Beuglante hein ? engagea le nouveau venu."

Il avait lancé ça d'un air léger. Après un coup d’œil, Cassie aperçut qu'il portait les couleurs de la Maison ennemie. S'attirer un peu plus d'ennuis en sympathisant avec un Serpentard, à la table même des lions n'était pas une bonne idée, d'autant plus que c'était à cause de l'un d'eux qu'elle avait autant de problèmes. Sans lui laisser le temps de lui dire de la laisser tranquille, il ajouta ; 

"Peu importe ce que tu as fait, la prochaine fois je t'aiderai à dissimuler les preuves."

Cassie ouvrit de grands yeux et, après quelques secondes, elle laissa s'échapper un éclat de rire. L'éclair de malice qui était passé sur le visage de son interlocuteur, suivi du clin d’œil du serpent, la libéra de sa honte. Après les récents événements, sa venue était appréciée, d'autant plus qu'il n'était pas là pour l'embêter. En tout cas, pas de ce que Cassie lisait sur son visage. Et puis, après tout, elle avait toujours rêvé d'appartenir à la maison des verts et argents. 

"Je suis Airen, en première année chez les serpents, continua-t-il. Puis, avec un brin d'ironie dans la voix : Toi, tu es "Cassie Hayden Mona Horia Murphy", si j'ai bien entendu la délicieuse voix de ta mère."

Tandis que la jeune fille l'étudiait inconsciemment, il glissa une main dans ses cheveux pour les rabattre en arrière tant dis que son autre main allait desserrer machinalement sa cravate. Une attitude typique de beau garçon. Cassie remit une mèche de cheveux derrière son oreille. Lui s'accouda à la table d'une manière qui se voulait nonchalante. La jeune fille avait vu que les autres Gryffondor avaient, bien heureusement, jeté leur dévolu sur le courrier qu'ils n'avaient pas ouverts à cause de la Beuglante. Enfin, pour la plupart. Quelques uns ne pouvaient détacher leurs regards de l'intrus. Mal à l'aise, Cassie sourit tout de même au nouveau venu.

"Bien vu, Sherlock, tenta-t-elle de plaisanter. Mais la plupart du temps, les gens m'appellent Cassie. Juste Cassie."

Et elle présenta sa main au Serpentard. Ce n'était pas parce qu'une fille de cette Maison lui avait fait des misères qu'elle allait avoir peur de tous les autres. Et puis, ce n'était pas du côté de Gryffondor qu'elle allait trouver des alliés. En plus, Cassie en avait marre de cette petite guerre des Maisons. Tout ce qu'elle voulait, c'était profiter au maximum de cette expérience. Elle sourit un peu plus.

La réticence évidente de la jeune Rouge et Or en voyant les couleurs de sa maison firent mentalement sourire Airen, et il nota dans un coin de sa tête ce fait, se promettant de connaître la raison pour laquelle les Gryffondor et les Serpentard se détestaient mutuellement.

Son rire lors de sa proposition quelque peu douteuse satisfit le jeune Serpentard, et il prit le temps d'étudier la personne qui remplirait une nouvelle page de Persona. Blonde, visage fin, yeux bleus, timide, gentille. C'était un bon début. Il ne restait plus qu'à faire durer la conversation, et il en saurait rapidement bien plus sur elle. Il avait peut être un problème, en fait. Vouloir tout savoir sur les autres, ce n'était pas vraiment normal. Enfin, quelle importance ? Il se sentait parfaitement en adéquation avec ce comportement.

-Bien vu, Sherlock, lança-t-elle d'une voix mal assurée. Mais la plupart du temps, les gens m'appellent Cassie. Juste Cassie.

Les gens, avait-elle dit. Ainsi elle le mettait dans une vaste catégorie. Il avait donc réussit à lui ôter de la tête catégorisation "Méchant Serpentard". Elle semblait plutôt facile à aborder, donc. Le "Sherlock" le fit sourire un peu plus. Les élèves de sa maison faisait rarement, voir jamais d'allusions au monde moldu. Elle devait donc détenir des connaissances de ce monde qui évoluait en parallèle au leur.

Un de ses parents devait être moldu, ou du moins né-moldu. Airen aimait vraiment discuter avec les autres. Il pouvait apprendre tant de choses en simplement quelques phrases !

Son regard glissa vers la main tendue de la jeune fille, et il prit le temps de détailler son maintient manifestement décontracté. Bien, elle souhaitait donc continuer la conversation. Il attrapa sa main et y exerça une légère pression, un sourire au coin des lèvres.

-Sherlock, je n'irai pas jusque là, sauf tu veux bien être mon John, dit-il en coulant un regard à demi-intéressé vers la Gryffondor.

Intéressé était le mot. Il voulait dévorer chacune des réactions de son interlocutrice, les étudiant méticuleusement. Son ancien professeur avait inscrit dans son bulletin moldu "Comportement irrespectueux, il semble tester les limites à chaque occasion". Il ne comptait certainement pas le démentir, bien que l'irrespect lui semblait être une vaste blague, étant donné que ses actions étaient perçues différemment en fonction des témoins.

-Bien, Cassie, il appuya sur le prénom de la Gryffondor d'une façon qui semblait moqueuse, bien que son intention première était de lui dire qu'il acceptait de l'appeler familièrement. Alors dis-moi, qu'as-tu donc fait pour mériter les hurlements affectueux de ta mère ? L'interrogea-t-il, d'une curiosité à peine dissimulée.

Il lâcha sa main et laissa la sienne aller attraper un croissant sous l'œil hébété de quelques Gryffondor. Il s'en sentit pleinement satisfait, la provocation étant une chose qu'il appréciait particulièrement faire. C'était par de simples gestes dénués de gêne qu'il agaçait le plus facilement les autres. Là où quelqu'un aurait hésité, ou se serait demandé si c'était correcte, il faisait simplement ce qu'il souhaitait et renvoyait ainsi un je-m'en-foutisme évident.

Et dire que je n'ai même pas faim… Je suis peut-être un peu trop immature, songea-t-il, les sourcils légèrement froncés. Remarque, je peux peut-être empirer encore un peu l'opinion des autres à mon égard…

Il émietta la viennoiserie, faisant inévitablement chuter sur la table de nombreuses miettes et morceaux dorés craquelés, préférant en manger seulement l'intérieur, n'aimant pas se retrouver avec des miettes au coin des lèvres. Peut-être était-il quelque peu maniaque sur les bords lorsqu'il s'agissait de son apparence. Il chassa ce constat, désintéressé de lui-même. Il reporta plutôt son attention sur Cassie.

Airen mit quelques secondes pour serrer la main que lui tendait la Gryffondor. Elle eut peur qu'elle n'ait fait ou dit quelque chose de mal. Mais celui finit par répondre à l'invitation, et Cassie fut rassurée. 

"Sherlock, je n'irai pas jusque là, sauf tu veux bien être mon John, répliqua-t-il."

La jeune fille sourit, tout en levant les yeux au ciel. Un poil trop dragueur à son goût. Mais il avait compris la référence. Elle avait un peu hésité à la faire ; la plupart des Serpentard étaient des Sang-Pur et leur connaissance du monde moldu était bien souvent étriquée. Néanmoins, celui-ci semblait intéressé - et intéressant. 

"Bien, Cassie, reprit-il en appuyant sur son prénom."

Cette dernière fronça les sourcils. Se moquait-il d'elle ?

"Alors dis-moi, qu'as-tu donc fait pour mériter les hurlements affectueux de ta mère ?"

Il ne semblait même pas vouloir cacher sa curiosité. Cassie appréciait. Au moins, il était honnête avec elle. Du moins, en sous-texte. Elle soupira. La Beuglante. Exact. Il faudrait bien qu'ils en parlent, à un moment ou à un autre. Tandis que la griffonne pesait le pour et le contre - lui dirait-elle la vérité ? - le Serpentard se servit allègrement un croissant, ce qui eut le don d'agacer bon nombre de Gryffondor présents. Mais, sûrement retenus par le monde alentour, aucun n'eut un geste agressif envers l'invité. Car c'était désormais comme cela que Cassie le considérait. 

"Disons que... j'ai peut-être amoché quelqu'un, confia-t-elle en regardant le jeune homme émietter sa viennoiserie. Tu comptes manger ça ?"

Et sans attendre de réponse véritable, la jeune Murphy amassa les miettes en un petit tas d'une main et le récupéra en les emmenant au bord de la table pour qu'elle tombe dans l'autre. Elle tendit sa main à plat à Athéna, qui était restée tout le long de la discussion. La chouette mangea un peu et, lorsqu'elle fut sûre qu'elle n'en voulait plus, Cassie mit le reste dans sa bouche, en jetant sa tête en arrière afin d'en mettre le moins possible par terre. Lorsqu'elle se redressa, quelques miettes s'étaient éternisées sur son nez.

La jeune Gryffondor échappa un soupir contrit, semblant se perdre dans ses pensées. Peut-être se remémorait-elle sa bêtise ? Et si c'en était une, Airen était bien curieux de savoir ce qu'elle avait bien pu faire, car elle n'avait pas le profil d'un fouteur de trouble, bien qu'il puisse se tromper. Il préférait croire que ce qu'elle avait fait était exceptionnel et qu'il ne s'était pas tromper.

-Disons que... j'ai peut-être amoché quelqu'un, finit-elle par dire, tant dis que son regard restait posé sur les mains du Serpentard en mouvements. Tu comptes manger ça ? Demanda-t-elle d'ailleurs en avisant les miettes éparpillées sur la table.

Airen eut à peine le temps d'entrouvrir les lèvres qu'elle récupérait déjà les vestiges de son croissant pour les faire tomber au creux de sa main d'un geste qui lui parut habitué.

Il aperçut pour la première fois la chouette de la jeune fille, et fronça quelque peu des sourcils en constatant la facilité avec laquelle il parvenait à éclipser la présence des animaux. Il faut dire qu'il ne les portait vraiment pas dans son cœur.
La bête pleine de plumes picora les miettes, et Airen écarquilla des yeux en voyant la main contenant le restant de la croute dorée se diriger vers la bouche de Cassie. Allait-elle… ?! Oui. Elle venait de manger le reste !

Le jeune homme fronça du nez dans une mimique dégoûtée, songeant au nombre potentiel de bactérie que la jeune fille venait de mettre dans sa bouche, mais son regard s'adoucis lorsqu'elle abaissa sa main, dévoilant quelques miettes qui s'étaient collées à son nez fin.

D'un geste nonchalant, il les essuya du dos de la main, étirant un rictus entre la moquerie et l'affection. Peut-être était-ce étrange, mais c'étaient les premières vraies émotions que Cassie venait de lui susciter. C'était sans doute le contraste entre son caractère et le sien. Elle semblait se soucier bien peu des conséquences de ses gestes.

-Eh bien… Qui aurait crut que derrière cette timidité de Poufsouffle se cachait un véritable Gryffi ? Se moqua-t-il avec un faux dédain, son regard à l'affut de la moindre réaction face à cette pique bien enfantine à son goût. Remarque, je comprends mieux les couleurs de ta maison… Est-ce que ce quelqu'un à saigné ? Enchaina-t-il, en étirant un sourire malveillant. Si c'est le cas, je noterai bien d'éviter de te provoquer. C'est probablement narcissique, mais je préfère garder mon visage actuel.

Il lança un regard par-dessus son épaule en entendant le reniflement moqueur d'un autre Gryffondor. Son regard se fit froid et dénué d'émotions, un lent sourire mauvais étirant ses lèvres.

Il avait longtemps travailler cette expression en particulier. Le Gryffondor se détourna brusquement de lui. Parfait, il pouvait toujours faire peur. Autant dire que regarder quelques films d'horreur moldus le rendait créatif. Les menaces étaient surfaites ! Mieux valait laisser couler dans son regard les milles souffrances qu'il promettait à ses ennemis.

Il reporta son regard sur son interlocutrice, en réempruntant un air avenant.

-Je crois que tu aurais peut être dû être dans une autre maison, souffla-t-il en laissant ses yeux se diriger vers le plafond enchanté de la Grande Salle. J'ai l'impression que tu es trop… délicate… pour ces brutes de décoffrage.

Et il le pensait !

Il ne connaissait pas vraiment les Gryffondor, pas qu'il ne le voulait pas, mais il avait besoin de temps pour prendre correctement ses marques dans le château et apprendre les habitudes des quatre maisons. Par exemple, il trouvait plus facilement des Poufsouffle dans les jardins, ou encore des Gryffondor. Tant dis que la bibliothèque était un endroit "neutre" ou on retrouvait différentes maisons, bien qu'une majorité de Serdaigle.

Tout ça pour dire qu'il était rare de croiser des Gryffondor timide et renfermé, et encore moins solitaires. Car Cassie était seule à cette table, pour le petit déjeuner.

Cassie remarqua bien le regard de dégoût que le Serpentard eut lorsqu'elle avala les miettes. Tant pis. Elle n'était plus à un jugement prêt. Mais ce regard s'adoucit bien vite lorsque sa tête revint à sa position normale. Airen avait-il vu quelqu'un qu'il appréciait ? La jeune fille n'eut pas le temps de poser de questions ; il épousseta délicatement son nez. Elle aperçut quelques miettes tomber de son nez. C'était donc cela ! C'était le regard attendrissant que l'on a devant un enfant... Elle se sentit rougir un peu, mais bien moins que d'habitude. Le garçon ne la mettait pas mal à l'aise. Au contraire, son air joueur faisait ressortir chez la griffonne son côté malicieux et son amour des blagues. 

"Eh bien… Qui aurait crut que derrière cette timidité de Poufsouffle se cachait un véritable Gryffi ?"

Il s'était moqué, mais si gentiment que la jeune fille ne lui en tint pas rigueur. Elle avait l'habitude des piques affectives avec ses frère et sœur. Elle sourit plutôt que de s'énerver.

"Remarque, je comprends mieux les couleurs de ta maison… Est-ce que ce quelqu'un a saigné ?"

Il changea de sujet si vite que Cassie ne le vit pas venir. Un peu surprise, elle vis s'étirer sur le visage d'Airen un sourire qui se voulait malveillant. Était-il vraiment sadique, ou jouait-il au mauvais Serpentard ? 

"Si c'est le cas, je noterai bien d'éviter de te provoquer, enchaîna-t-il. C'est probablement narcissique, mais je préfère garder mon visage actuel."

Elle ne put s'empêcher de rire. Voilà que ressortait le tempérament vert et argent. Bien qu'il s'agisse de préjugés, du peu qu'elle avait pu voir, les serpents étaient bel et bien arrogants. Dans son dos, cependant, un reniflement se fit entendre. Elle ne se retourna même pas. Elle allait dire à son nouvel ami - pouvait-elle déjà l'appeler comme ça ? - de laisser tomber, que c'était sûrement un débile, mais le visage d'Airen fit aussitôt taire n'importe quelle remarque. Un visage terrifiant, qui revint à la normal dès qu'il reposa les yeux sur Cassie.

"Je crois que tu aurais peut être dû être dans une autre maison. J'ai l'impression que tu es trop… délicate… pour ces brutes de décoffrage."

La jeune fille soupira.

"Ne me lance pas là-dessus, par pitié."

Cela faisait presque un mois qu'elle était entrée à Gryffondor, et elle n'arrivait toujours pas à dépasser sa déception. Elle n'avait, en plus, fait que peu de rencontre dans sa propre Maison, si ce n'était Clément quelques semaines auparavant. Après un autre soupir - elle soupirait beaucoup ces temps-ci... - elle prit un pain au chocolat et un verre de jus d'orange. Bien qu'à moitié sorcière, le jus de citrouille, ça n'avait jamais été son truc. Avant de croquer dans la pâtisserie dorée, elle fit attention de l'émietter et de les donner à Athéna, qui se jeta aussitôt dessus. La jeune fille caressa la chouette. 

"Et pour te répondre... je ne sais pas, reprit-elle. Je ne suis pas restée assez longtemps pour découvrir les dégâts que j'ai causé."

Après une bouchée du délicieux pain, elle but une gorgée de jus. La chouette s'envola à l'instant où la main de Cassie quittait ses plumes. Elle releva la tête et jeta un regard amusé et taquin au Serpentard.

"Mais, tu devrais faire attention. La fille que j'ai amoché... elle appartenait à ta Maison."

Ah, comme ça lui avait manqué ! Les piques lancés, le regard malicieux... Tout cela lui rappelait Liselotte, et par extension, Magnus. Quel dommage que ses deux amis ne soient pas là, avec elle. Ils auraient vécu des aventures tous les trois ! Elle secoua légèrement la tête et revint à Airen.

Le soupir qui échappa à Cassie à sa remarque attisa sa curiosité. Ainsi elle regrettait d'être chez les Gryffondor ? Dans quelle maison aurait-elle souhaité aller, à l'origine ?

-Ne me lance pas là-dessus, par pitié, finit-elle par répondre, l'air… déçue ?

Elle sembla se plonger dans ses pensées, et attrapa un pain au chocolat ainsi que du jus d'orange. Cela conforta Airen dans l'idée qu'elle était Née-Moldu ou Sang-Mêlé. Restait à savoir lequel des deux, et il ne savait pas si poser la question risquait de lui paraître un peu… indiscret ?

Elle émietta à son tour la viennoiserie pour en donner la croute à sa chouette, la caressant pendant que la bestiole dévorait les miettes dorées.

-Et pour te répondre... je ne sais pas, reprit-elle. Je ne suis pas restée assez longtemps pour découvrir les dégâts que j'ai causé.

La chouette s'envola lorsque sa main quitta son plumage, et Airen la quitta instantannément des yeux, reportant son regard sur la jeune fille qui esquissa un air malicieux qui ne manqua pas de se répercuter sur les lèvres d'Airen, agréablement surpris par cette expression de pur Serpentard.

-Mais, tu devrais faire attention. La fille que j'ai amoché... elle appartenait à ta Maison.

Un sourire franc étira ses lèvres, ses yeux se plissant doucement et démontrant la rare sincérité de cette expression sur son visage. Il se pencha vers elle, avec un air de conspirateur, son coude allant s'appuyer sur la table pour le soutenir dans cette nouvelle position.

-Oh… Je t'accompagnerai la prochaine fois, je serai curieux de voir un Serpentard se faire amocher par un Gryffondor. Elle a dû se sentir indignée d'être esquintée à la moldu ! Se moqua-t-il. Mais comme je l'ai dis, je compte bien faire attention, histoire de conserver ma dignité.

Pas qu'il s'en souciait, être aimé ou détesté était la dernière chose qui l'importait ici, alors qu'on le considère vulgaire ou lâche le désintéressait. Mais il se surprenait à apprécier Cassie, bien qu'il soit venu la voir pour une raison précise.

Il se redressa, empruntant un maintient d'aristocrate, le dos droit et le menton fièrement relevé.

-Je suis sûr que tu aurais eu ta place chez les serpents, si tu n'étais pas… violente.

Il haussa d'un sourcil, l'interrogeant silencieusement sur le terme qu'il avait employé. L'était-elle vraiment ? Ou était-elle sanguine ? Peut-être que ça valait le coup de l'énerver, histoire de déterminer ce trait de caractère. Il le nota dans un coin de sa tête. Il la provoquerait un autre jour. De toute façon, il ne comptait pas éterniser la conversation, il reviendrait la voir plus tard.

-Enfin… Je vais te laisser. Nous nous reverrons sûrement une autre fois, annonça-t-il en se levant, époussetant inutilement son uniforme et resserrant sa cravate. Au revoir, Cassie Aidan Mona Horia Murphy, la salua-t-il, d'un rictus provocateur avant de tourner les talons et quitter la Grande Salle d'une démarche souple et silencieuse.

Le sourire qui s'afficha sur la tête du serpent était différent que les autres. Plus... sincère ? Cassie n'aurait su le dire, mais elle appréciait cette expression. Le garçon se pencha vers elle, comme s'il allait lui chuchoter un secret. La jeune Gryffondor fit de même, jouant la conspiratrice. Elle aimait ce jeu de rôle, qui la sortait de sa timidité habituelle. Elle ne savait pas pourquoi, mais elle appréciait la compagnie d'Airen. Elle se sentait bien avec lui, à l'aise.

"Oh… Je t'accompagnerai la prochaine fois, je serai curieux de voir un Serpentard se faire amocher par un Gryffondor. Elle a dû se sentir indignée d'être esquintée à la moldu !"

Son ton moqueur laissa Cassie perplexe. La prenait-il pour une Né-Moldue ? Si non, que voulait-il dire ? Les sorciers aussi se battaient. Elle ne réagit pourtant pas et le laissa enchaîner.

"Mais comme je l'ai dis, je compte bien faire attention, histoire de conserver ma dignité."

Elle ria. Elle ne voulait pas que cela paraisse méprisant mais elle trouvait drôle qu'Airen soit le stéréotype du Serpentard arrogant et égocentrique. Elle aimait bien cette simplicité de caractère. Était-ce vraiment simple d'être narcissique ? Cassie le pensait. Le jeune garçon se releva, et elle le suivit. Alors qu'il avait un maintient quasi princier, elle était plutôt du genre arquée. Encore quelque chose qui venait de son envie constante de passer inaperçue...

"Je suis sûr que tu aurais eu ta place chez les serpents, si tu n'étais pas… violente."

Une lueur de tristesse passa dans les yeux de la jeune fille, tant à cause de la mention de la Maison que de son association à la violence. Elle n'était pas violente. C'était d'ailleurs la première fois qu'elle tapait quelqu'un. Elle avait turbulente, à une époque, ça oui. Joueuse, malicieuse, taquine, d'accord. Elle prenait certaines choses très à cœur. Mais violente, ça, non. Elle ne répondit pas, néanmoins. Que pouvait-elle dire ? Comment pouvait-elle expliquer son action ? Elle ne pouvait pas, tout simplement. La Serpentard l'avait cherché alors qu'elle souffrait. Même si elle ne le laissait pas paraître, Cassie était dans un état de chagrin constant. Elle avait mal réagi. Mais c'était une fois ! Avant qu'elle put enchaîner sur un autre sujet - elle ne voulait pas tendre une nouvelle relation dès le début, elle n'avait déjà pas beaucoup d'amis ici, pas la peine d'en rajouter - Airen se levait du banc.

"Enfin… Je vais te laisser. Nous nous reverrons sûrement une autre fois."

Il épousseta son uniforme déjà impeccable et resserra sa cravate. 

"Au revoir, Cassie Hayden Mona Horia Murphy, lui lança-t-il, provocateur, avant de s'éloigner d'un pas de chat.
- Mon nom à moi, c'est Cassie ! Cria-t-elle. Auparavant, elle n'aurait jamais osé, pas en public, mais elle se sent pousser des ailes. Au diable les Gryffondor de sa table ; Juste Cassie !"

Et elle sourit, sans savoir que de son côté, le jeune serpent, désinvolte, fait de même.