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19 févr. 2019, 23:57
Περι-Sons
Les Sons comptent. Tellement. Ils déterminent des alentours, une atmosphère, les présences. Enveloppe immatérielle pourtant si puissante de vibrations qui provoquent les frissons jusqu’au cœur d’un être. Les ondes indistinctes frappent de façon récurrente l’ouïe des enfants qui perçoivent tout, n’ont pas encore appris à occulter certains canaux pour n’en saisir que quelques-uns. Le grondement sauvage des foules en devient épouvantable. La clameur ronge tout l’espace, le sature d’un impitoyable joug qui refuse toute étrangeté. Le silence n’en plus le droit de vivre. Le noyau de résistance se dissimule dans l’écrin d’innocence qui croit encore en la Douceur après la tempête. La touffeur interne s’apaise enfin. Non, jamais nul ne se tait, mais la mouvance est perpétuelle. Ils doivent disparaître, ceux qui emplissent de vacuité. Quelques derniers raclements de bois résonnèrent contre la pierre alors qu’une adolescente décollait lentement ses mains qui avaient été plaquées sur ses oreilles depuis quelques minutes déjà. Elle quitta alors le renfoncement dans lequel elle s’était insérée et rejoignit le banc en quelque pas avant de s’y asseoir à cheval. En cette soirée, la Serpentard avait mal calculé et s’était retrouvée trop tôt dans la Grande Salle. De coutume elle arrivait après la grande vague pour bénéficier d’une tranquillité et de sa présence à soi. Incapable de supporter l’horreur chaotique agressant ses Sens, elle s’était collée impuissante contre un mur, attendant que l’orage passe.

Son regard tenta de capter les nuances du faux Ciel. Il présentait bien entendu de sombres teintes, quelques éclats lui offraient les lueurs de la Nuit. Cette vision avait un aspect attrayant, comme si cette Voûte conçue d’artifices pouvait montrer de quelque volonté. L’authentique était cependant beaucoup plus complexe, permettait la découverte en sa lecture, contrairement à cet Ersatz de Magie. En dépit de toute la beauté que le mage souhaiterait intégrer en ce qu’il produit, les reproductions demeurent particulièrement ternes. Il était rare d’avoir l’occasion et le temps de s’abandonner à une contemplation sans souci d’une oppression externe. Loin des fausses prévenances, loin des traits jetés en tous sens avec maladresse et frénésie. L’air du château n’était jamais pur, mais retirée des pesantes présences, la petite Swan se donnait presque l’illusion qu’il en était moins vicié, du moins bien plus respirable.

Son décalage effectué pour glisser à quelques pouces de distance sur le côté provoqua l’émission de froissements qui auraient été à peine audibles s’ils n’avaient pas été la seule manifestation de Son dans un périmètre de quelques mètres. Son buste était tourné vers la table, immobile, elle caressa les veinures du bois aperçues en surface durant quelques secondes, un chuchotement plus tactile qu’offert à l’écoute. Ses paupières se baissèrent alors qu’elle fermait temporairement la fenêtre des couleurs et des lumières. Ainsi se ressentait-elle de façon beaucoup plus puissante qu’en d’autres temps. Phœbe prit conscience de son Souffle, qui revêtait soudainement une importance insoupçonné, il était son élan qui voguait sur les courants de son corps. La myriade des pulsations perçues était essentielle, discrète elle voyait soudainement sa trace exacerbée par l’attention portée par l’adolescente. Vibrante de Silences et de Cris, cette contradiction s’épanouissait en elle sans heurts.

S’en retourne le calme égaré, amenant la Vert et Argent à être de nouveau prête à affronter ce qui l’entoure parfois si étroitement qu’elle en est étouffée. Exhale un soupir quand réintègre le spectacle de la réalité. Le vrai est particulièrement rêche, surtout pour la jeune sorcière qui n’était pas préparée à sa dureté. Cependant il vit de ceux qui le vivent. Il faut parvenir à être prête à le vivre. D’une main Phœbe repoussa un objet posé devant elle pour rapprocher l’un des verres à pied posés sur le vaste support brun. D’un geste d’appréhension son bras entoura à une certaine distance la forme et se figea à mi-hauteur du contenant. Une respiration précéda seulement la détente d’un doigt qui rencontra la matière lisse et résonna immédiatement la clarté aiguë, qui se propagea encore de longues secondes. Un coin de ses lèvres se leva alors imperceptiblement.

Sonne l’Écho qui ne s’endigue.

Éternelle nouvelle Lune
Sombre Ciel

20 févr. 2019, 16:26
Περι-Sons
Comme la singulière goutte d'eau rejoignant le vaste lac, et comme le Corbeau reposant aux côtés des Corneilles, Neithan avait réellement acquis une forme d'invisibilité. Ce qui, en toute sincérité, n'était pas pour lui déplaire, bien au contraire. Il s'accoutumait aux bains de foule, et par chance, les autres élèves s'étaient accoutumés à lui comme on s'accoutume aux chants quotidien des oiseaux; si bien qu'on ne les distingue plus, à moins d'un effort spirituel.

Cette situation avait pour étrange effet de dessiner un sourire sur le visage du jeune Serpentard. Car assis à la table de sa maison, il se sentait bien. Dans un conte, l'instant qu'il vivait aurait pu être passé sous silence aux moyens d'une ellipse. Mais il convenait tout de même de conter ce genre d'instants, tant ils pouvaient relever d'une précieuse sobriété. Les jours sombres font regretter ces instants, et ces instants se tiennent comme infaillibles alliés lors des jours sombres.

Ainsi était il en paix, sous le prisme d'un équilibre. Il avait appris à sortir de ses lieux de conforts et d'aisance pour se confronter au monde extérieur comme le ferait un héros de conte traversant le seuil de sa porte en direction de l'Aventure. Mais il parvenait, dans le même temps, à demeurer fidèle à lui-même. De ce fait, il n'y avait rien de surprenant à ce que le Vert et Argent demeure assis lorsque la foule quitta la pièce. Neithan attendait le calme, si précieux et apaisant. Un calme qui ne manquait jamais de le tirer vers de reposantes réflexions.

*Qu'adviendra-t-il, maintenant que tout va bien ?*. Ainsi débutèrent ses pensées tandis qu'il dirigeait son regard vers l'admirable artifice que constituait le Ciel de la Grande Salle. *C'est étrange*, pensa-t-il de nouveau, *une histoire qui n'est constituée que de joie et de bonheur n'offre jamais de grand intérêt, ni ne se tient comme une bonne histoire. Nécessaires aux grandes histoires sont les jours sombres*, s'était-il dit dans la sagesse apportée par le calme. Ainsi médita-t-il sincèrement, soucieux de sa promesse, conscient avec certitude que des jours sombres viendraient tôt ou tard le porter vers l'avancée de son histoire. Il s'agissait d'une méditation qui pouvait encore durer de longs instants, mais à laquelle Neithan apporta une conclusion des plus simples : *Demain serait un autre jour et présenterait de nouveaux chemins à prendre*. Et cela, le Lotus l'espérait bien, car dans son humble silence, soucieux de l'éveil du héros, il était fermement prêt.

Enfin se laissait-il errer dans ses pensées, toujours convaincu qu'elles n'étaient que source de bien. *Et tous ceux qui errent ne sont pas perdus*, continuait-il de se dire au quotidien. Et ses pensées revinrent doucement à la réalité, en passant tout d'abord par ce Ciel artificiel que Neithan continuait d'observer. Un Ciel dont il tira un bel enseignement tant il considérait que, loin de la beauté du réel, ce Ciel n'était pas une pâle imitation, mais un bel hommage emplit de modestie.

Et c'est tandis que ses pensées avaient pour intention de quitter Neithan avec douceur, que ce dernier fut brusquement attiré vers la réalité. Il fut attiré par une vibration, du moins c'est ainsi qu'il l'avait ressenti. Un modeste écho auquel le calme avait accordé de l'importance en l'amplifiant harmonieusement. C'est donc naturellement que Neithan suivit du regard la source du modeste écho.
Le regard de Glace croisa alors deux Lunes dont la douceur rayonnait avec humilité. Il avait bien évidemment d'ores-et-déjà croisé la Verte et Argent, mais jamais son regard lunaire. Ces deux lunes jumelles évoquèrent alors dans l'esprit du jeune Serpentard une vieille énigme. Il s'agissait d'une énigme que lui contait sa mère, dont elle disait qu'elle provenait d'un ancien conte.

*Un œil dans un visage sombre, vit un œil dans un visage bleuté. "Cet œil-là ressemble à cet œil-ci, dit le premier œil, mais en un lieu bas, non pas en un lieu haut."* Une énigme que Neithan ne pouvait oublier tant elle lui avait donné du fil à retordre dans le temps, et de ce fait, il connaissait la réponse par cœur : *La Lune s'adressant à son reflet dans l'océan*. La pensée de se souvenir dessina sur le visage du Vert et Argent un sourire emplit de sincérité et de nostalgie. Et pour cela, il se sentait redevable envers la fille au regard Lunaire. Il décida alors, sans la moindre difficulté, de briser à son tour le calme d'un écho emplit de reconnaissance :

— Bonsoir.

"Je suis le Lotus..."
(3ème année RolePlay)

25 févr. 2019, 00:52
Περι-Sons
La suspension se goûte des Sens, si fugace qu’elle doit être vécue intensément, cependant se faire assaillir avec trop de brusquerie de toutes les perceptions les rendrait illisibles. Alors, avec douceur, elles sont accueillies progressivement, se distinguent avant de fusionner et de former la fresque complète. Elle n’a pas peur de se laisser envahir par ce qu’elle a provoqué, inhale l’air empreint d’un courant singulier. Dans un équilibre écarté de l’avidité et de l’indifférence, l’adolescente est emportée, comprenant la rareté de ces secondes qu’elle ne peut prolonger à l’infini. C’est mieux ainsi, si le minuscule écrin de la Brillance devenait un fleuve scintillant, elles perdraient grandement de leur unique saveur car noieraient de présence. Or, ce qui est suffocant est difficilement appréciable à Phœbe. Ne l’est pas. Même quand se tait un Son, demeurent toujours en soi ses multiples échos qui prolongent de façon ténue et latente les ultimes rémanences, qui gardent de la disparition. Au moment où se dissipent les dernières traces de la suspension s’écarte lentement la main de la Vert et Argent pour se reposer auprès de son corps. Ses yeux de Lune perdus dans un lointain univers recouvrent la conscience de l’environnement de Château, providentiellement pour un très court instant car se trouvent rapidement happées par des Gouttes-en-Glace. Elles l’arrachent à l’ambiance terne pour la ramener en des tréfonds inexplorés et inédits. En des Iris par le biais de la concentration et de l’attention peuvent être perçus des variations d’Éclat, parfois lisibles. Un infime virement était comme la trace d’une histoire… un Fragment.

*… Soir* Perdue dans ce bleu figeant, la petite Swan n’avait su prêter attention et ne lui survint que cette petite syllabe, lue sur les lèvres de ce visage que l’étudiante découvrit quand elle réalisa l’émission d’une Voix. Elle cligna une fois les paupières, puis deux. Le changement de perspective de ce regard d’attraction vers la considération du visage d’un jeune garçon offrit en effet dans un premier temps des traits particulièrement flous, le temps de l’accommodation. Enfin la composition organique d’équilibre se dessina. Était-ce la pâleur de sa peau qui mettait en valeur l’intensité de son Regard, ou bien était-ce cette teinte magique qui donnait l’impression de blancheur alentour ? Il fallut à Phœbe un certain effort pour ne pas aussitôt se perdre de nouveau dans ces Perles follement attirantes. Il avait parlé… elle n’avait cependant capté qu’une simple syllabe, une fin arrachée sans son commencement. Impossible quoiqu’il en soit de retourner en arrière ni que ce soit répété, elle devait composer avec pour son retour. Ce ne sera pas parfait écho, mais il s’agira certainement de sa résonance.  *Soir…*

Le temps du Soir était bien arrivé. Oui, cette considération n’était pas étrangère, sans doute. Doublement les Ciels en étaient des attestations. Les Étoiles les peuplaient, brillaient pour rapporter la myriade des Contes du passé. Elles étaient magnifiques. Incontestablement. Il y a peu encore l’adolescente se serait nourrie de ce qu’elles avaient à raconter. Une vision avait suffi à renverser son envie habituelle, à faire naître un désir nouveau. Le contact étrange de ces Perles bleues et profondes. Où semblait se mirer le scintillement de mille Étoiles. Elle souhaitait les explorer elles, ce Soir. En avait-elle seulement le droit, la permission ? La jeune sorcière respectait Ouranos. Elle respectait cet hôte à la chevelure corbeau contrastant avec la Clarté de son émanation. Il protégeait l’accès à ce Conte, il n’était pas question d’enfoncer la porte. Pour l’ouvrir précautionneusement et sans empiéter sur des emplacements interdits, elle aurait besoin de la clef. S’introduisant avec insistance à la surface de cette nappe glaçante, Phœbe murmura sa requête.

« Narre-moi cette Histoire… »

Une rime… cela avait été rendu possible car la Vert et Argent était arrivée en seconde position. Les Sons ont-ils besoin de se rencontrer de la sorte ? Elle l’ignore. Ils s’allient ainsi joliment et se crée aussi une continuité, une souplesse. Savoir s’il y est sensible n’importe pas en premier lieu.

J’attends l’Histoire.

Éternelle nouvelle Lune
Sombre Ciel

26 févr. 2019, 14:39
Περι-Sons
Suspendu. Ainsi que le permettait la souplesse de la durée, émancipée du caractère stricte du temps. Comme une goutte bien trop pure pour s’écraser chaotiquement et demeurant accrochée noblement, ne souhaitant pas disparaitre. Est-ce nous, créatures effrayées par l’incertain, qui avons donné ce caractère infaillible au temps ? Car en cet instant, il semblait avoir perdu toute l’étendue de sa force fatale. Car en cet instant, le temps s’était suspendu.

Entre Lune et Glace, le temps s’était suspendu.

Ainsi Neithan fut conforté dans son idée. Idée selon laquelle les instants les plus silencieux et les plus simples méritent d’être contés. C’était donc là, un instant suspendu qui se devait d’être narré. Ainsi que le mérite le cycle des Arbres, chant silencieux et apaisant d’une suite de nuances. Ainsi que le mérite le repos du soleil, murmure discret d’un au revoir porteur de bonne fortune et d’espoir. *Ainsi que le mérite le déploiement du Lotus à la surface du marécage, humble poème d’une glorieuse résilience.*

Ainsi que le méritait donc en cet instant, la Lune illuminant la Glace. Un instant suspendu et silencieux qui contrastait mystérieusement et magnifiquement avec une clameur. Car en effet, il y avait en cet instant une clameur source d’échos réguliers. Tout s’était arrêté, mais pas les battements du cœur Vert et Argent. Battements du cœur distincts, clairs comme des cristaux de Glace, *ou comme la Lune dans le ciel dégagé*.

Lune et Glace, un poème suspendu source de rimes harmonieuses et silencieuses. Neithan comprit enfin le rôle de cet instant. Puisqu’il souhaitait arracher cet instant pour pouvoir le contempler encore et encore dans une pensine ; puisqu’il s’agissait d’un instant aussi apaisant que la douceur du foyer ; Neithan comprit qu’il s’agissait là d’un début de conte. *Une histoire sur le point d’être contée*, conclut-il paisiblement. Mais qui concernerait cette histoire ? La Lune et la Glace ? D’autres forces ? À tout cela Neithan n’avait pas de réponses. Et il ne souhaitait pas en avoir, car l’instant suspendu l’était toujours.

Ainsi il ne devait pas se concentrer sur quoique ce soit d’autre, car les débuts de contes sont bien trop passionnants. Le Vert et Argent en avait conscience. Lorsque l’histoire s’achève, marquant à jamais nos cœurs, nous nous plaisons à revenir en arrière pour goûter de nouveau au plaisir et à l’excitation de l’Aventure sur le pont d’être contée. Neithan devait se plonger corps et âme dans cet instant suspendu, dans ce début de conte, car ainsi seulement parviendrait-il à construire les premiers mots de ce récit, pour ensuite s’en souvenir. Ces premiers mots suffisent à nous replonger dans toute l’histoire, et leur écho nous procure le plus chaleureux et sincère réconfort. *Hymne d’une nostalgie, bannière d’un souvenir, forteresse d’un foyer*, pensa Neithan, car tels étaient le pouvoir des débuts de conte.

Rien n’échappait donc aux sens du Vert et Argent. Car peut-être, un jour, reviendrait-il vers ces instants, lorsque l’ombre aura envahi la Glace. Peut-être garderait-il comme force l’instant où la Lune l’illuminait d’une blancheur douce et perlée.

« Narre-moi cette Histoire… », avait donc dit la Lune, et la Glace savait donc quoi raconter.

« Un Lotus dans un marécage fit la promesse un jour de se déployer. Mais vents et tourments firent en sorte que la tâche ne soit point aisée. Le Lotus n’oubliait pas et continuait de se remémorer sa promesse. Tandis que l’ombre venait et disparaissait sans cesse. Las de ces instants de faiblesse et de tourments, le Lotus au cœur de Glace s’en remit à ses joyeux souvenirs d’antan. Aux tourments succédèrent donc le repos et la paix, à l’ombre succédèrent donc les lumières étoilées. C’est alors en un jour de paix, tandis qu’il ne pouvait rien espérer, qu’une Lune vient illuminer le Lotus au cœur de Glace. Claire et harmonieuse, la Lune vint porteuse d’allégresse. Engendrant un instant hors du temps et des faiblesses. Le Lotus décida alors que cet instant, simple, privilégié et apaisant, marquerait le départ d’une nouvelle histoire. Une histoire qui à son terme se solderait, par un Lotus de Glace aux pétales déployées. Ainsi garderait-il en mémoire la Lune claire d’une douceur perlée, premiers mots d’un conte qui mérite d’être conté. »

"Je suis le Lotus..."
(3ème année RolePlay)

01 mars 2019, 01:18
Περι-Sons
L’aède chante le récit, il chante ses Figures. Une douce mélodie enveloppe les mots, leur offre un Cocon de délicatesse par lequel ils se déploient de façon si fascinante qu’ils acquièrent une importance singulière, particulière. Une rythmique qui devait certainement être magique mais dont les traces ont été perdues. Les mots peuvent demeurer gravés, épigraphiés, mais la musique s’envole et se dissipe si aisément, dès que s’estompe le Souffle. La reconstituer est un projet trop ambitieux pour le voir porter ses fruits en un temps de vie. Cependant, absorber et savourer l’Air présent est parfaitement envisageable. Elle peut écouter l’Air qui traverse son homonyme qu’elle respire. Il est modulé d’une voix qui connaît les Sons qu’elle fait traverser à la langue et aux lèvres. Comment savoir qu’ils sont connus ? L’oreille certainement le décèle. Elle se sent accompagnée, dirigée avec douceur, embarquée par un Nocher qui provoque de très belles ondes miroitantes dans ses gestes de souplesse, caressants. Phœbe aimerait à jamais être plongée dans la narration du Conte. Savoir narrer est un don rare. Doucement elle avait glissé dans un univers qu’elle côtoyait et réalisait qu’elle n’y était plus l’unique résidente. Une nouvelle Histoire avait émergé. Elle ne semblait pas se contenter d’accueillir un seul protagoniste. À moins que deux Entités ne soient devenues qu’une composition, d’équilibre.

Le Lotus, cette représentation n’est pas totalement étrangère à la Vert et Argent. L’Immaculé que rien n’est capable d’entacher. Son bouclier est sa surface-même. Les Gouttes sont incapables de s’y écraser, elles demeurent parfaitement sphériques, soutenues par les aspérités de la feuille, maintiennent de la sorte la pureté. Voir une Perle d’eau rouler est l’un des spectacles les plus magnifiques, l’observateur en est enchaîné de la grâce dans la régularité et des images multiples qui transpercent ce prisme étonnant. Une granule limpide qui danse fugitivement avant de se fondre parmi ses semblables. La Lune ainsi avait le droit d’être une composante du récit du Lotus… Alors en un moment où la Goutte a commencé à tomber mais ne choit pas encore, à travers cette Sphère translucide entre les hauteurs ils se rencontrent de leurs Reflets.

« À l’inverse de son frère Hélios, la Lune respecte la Glace. Elle est capable d’y contempler la réflexion et la réfraction de son éclat. Quand son cœur bat ses pulsations lui confèrent une Lueur changeante. Si elle entendait le cœur de Glace, elle pourrait certainement voir que les pétales frémissent à son rythme. Ils ont longtemps attendu, mais cela ne leur a en rien ôté leur vitalité, les veinures d’un suc de vie les animent. La Lune est patiente. Elle sait que rarement son regard se laisse hanter par une brillance. Elle veille sur un Conte car elle sait qu’un jour le héros luira. La Lune s’est toujours crue seule en sa voûte sombre, avec une possibilité de transfiguration à chaque cycle. Sa sensibilité au magnétisme de certaines figures est très fine puisque elle en est illuminée à son tour. »

L’ombre parfois assombrit. Parfois protège cependant. Le Lotus ne se déploiera ni dans l’ombre, ni dans la lumière, mais plus probablement dans un entre-deux, quand les perspectives seront étroitement entremêlées au point de les rendre indéfinissables. Sans se rendre compte que telle fascination pourrait la perdre, Phœbe se jette dans les flots du moment qui est en train de se construire et de s’élever. En ces Fragments du temps, il est bon de s’immerger pleinement, devenir acteur d’un instant entouré et préservé entre des mains bienveillantes. Tentant de ses forces d’esprit de pénétrer dans la glace, elle était indétachable de son sujet d’attention.

« Est-il possible d’effleurer l’un de ces pétales sans le déchirer ? »

Les liquides rythmaient ses syllabes, sans même qu’elle ne l’ait recherché, ces sonorités paraissaient les accompagner à propos. Un fin filet d’eau s’écoulant doucement, posé avec pudeur en un murmure. Elle craignait manquer de délicatesse et habilité si un jour souhaitait approcher de quelques pas cette fleur nimbée d’une Aura qui la tenait encore à distance. 

Éternelle nouvelle Lune
Sombre Ciel