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25 sept. 2018, 01:06
 RPG++  Noir de Lumière  SOLO 
Cet Instant de Vie suit directement celui-ci


Lancinante et transperçante Confusion. Pourquoi son esprit lui échappait-il de la sorte ? Elle avait perdu toute lucidité interne, aucune Ancre n’avait daigné se présenter sur sa route. Tous les éléments dans son champ de vision étaient flous, sous l’effet de la vitesse à laquelle elle se lançait éperdue vers ce Refuge dont elle avait besoin. Elle ne l’avait pas revu depuis quelques semaines, elle l’imaginait inchangé. Essoufflée, elle déboula au Sommet recherché et fit quelques pas, pliée en deux, le temps de recouvrer une respiration qui lui permette de contrôler ses mouvements, qu’ils ne soient pas pleinement sollicités par l’effort de la prise d’air. La main gauche posée sur son cœur palpitant qui s’était emballé plus que de raison, Phœbe leva son regard vers le Ciel et s’offrit à cette vision. Tromperie inattendue. Clarté aveuglante et lumière terrible. Ce n’était pas son Ciel, ce n’était pas sa voûte familière, cette couverture nocturne qui l’accompagnait à chaque fois qu’elle se présentait. Il avait été muet la dernière fois, certainement un mauvais présage. La petite Swan était perturbée de ne pas trouver sa Jumelle de la Nuit, la Lune. Elle était occultée par Hélios, le brillant qui imposait sa chape de luminosité et de clarté sur son petit être qui tendait à se recroqueviller pour se protéger.

L’adolescente jeta un regard dur à ce Ciel d’Azur qui la narguait de sa parfaite couleur unie. La saison estivale avait chassé les moindres nuages et potentielles touches blanches.
*Qui es-tu ?* Elle ne le connaissait pas, n’avait jamais cherché à le découvrir. Ouranos, elle l’avait toujours effacé au profit de Nyx, des astres. Le jour c’était à lui qu’était offerte la place, entièrement. Elle ne voyait rien, ses Perles d’Argent faites pour couvrir un autre Astre étaient aveugles, mais se démenaient pour tenter d’obtenir des parcelles d’appréhension. Sa rétine brûlait de supporter cette teinte Azur et l’éclat intense du Soleil. Le jour était sa prison, il était son Ennemi, il l’étouffait durant de longues heures agonisantes jusqu’à ce qu’il se meure et qu’elle puisse de nouveau respirer la pureté des Ombres. Phœbe s’offrait en pâture à ce Ciel impitoyable qui la tenait sous son emprise et se refusait à lui dévoiler quoique ce soit. Les histoires, c’est ce sur quoi elle s’arrêtait quand elle levait son Regard de coutume. En ce moment elle ne pouvait puisqu’elles étaient absentes. Elle n’avait encore profité réellement de ce bleu sombre. La prochaine fois, oui la prochaine fois la petite Swan lui offrirait son attention. Actuellement c’était la Clarté qui la retenait. Ce fond de clarté ne donnait-il pas à voir par sa plénitude, sa constance, sa perfection ? Pourquoi, pourquoi se taisait-il ? La jeune sorcière avait la certitude de sa présence, elle la sentait, c’était un Être qui la dominait, mais ce dernier lui était hermétique. Il avait soigneusement scellé toutes ses portes.

Ses petits poings se serrèrent tandis qu’elle jetait ses reproches silencieux avec ses yeux gris. Consumée par un Éclat chaud qui l’absorbait de matière et d’esprit. Son Œil exposé directement à la vive brillance la brûlait, la pellicule fluide gagnait aussi en brillance jusqu’à ce qu’ait lieu l’affleurement. Une saillie se créa sur sa peau pâle, une traînée de feu lui disaient ses sensations tactiles, elle était tracée par le roulement des gouttes. Mais Phœbe ne s’en souciait plus. Il avait le droit de se protéger de ce Mastodonte. L’eau surgissait et une netteté inédite lui apparaissait. Des couleurs. Les Couleurs. Il n’était alors pas monochrome ? Il cachait cette richesse, le chemin pour la trouver était si personnel, si hasardeux. Que dissimule-t-il ? La petite Swan s’ouvrait à la réponse, et attendait son retour, son expression. Elle aimait l’écouter, il suffisait qu’il daigne offrir ses mots. Était-elle digne du partage ? Ce lourd silence, cette ignorance lui pesait et le doute s’insinuait en elle, lui imposait son joug serrant, sa pression douloureuse. Réponds-moi, réponds-moi… Diable réponds ! L’adolescente était à sa merci, complètement impuissante, à lui seul il tenait de donner ou non. Sa requête était légitime mais il conservait ce mutisme, ce dédain. Traîtrise ! Il lui cachait tout, la condamnait à une déchirante Cécité. Elle pensait pouvoir faire lui faire confiance. Que ce pendant sur lequel régnait Hélios avait la bonté qu’elle connaissait à Phébé. De toute évidence cette complicité était occultée, Phœbe était elle-même occultée. Un invisible Satellite. Elle n’avait pas ses droits dans cet Univers, pas même celui d’exister. La Lune pouvait se risquer à confronter le Soleil.

La Serpentard pouvait y mettre un ton impérieux, elle avait compris que cela n’aurait aucun impact, elle reconnaissait avoir besoin de demander. Deux éléments, une composition. L’Azur et le prisme éclatant contenant d’innombrable nuances révélées par l’eau. Cet Être qui couvrait tout et qui devait avoir un Regard ce qu’il couvre, il devait receler d’innombrable réponses.

Phœbe ne prit pas la peine de formuler à haute voix son souhait, il était parfaitement compréhensible. Jetée sans le chercher en cet Instant du jour en ces lieux, l’élève argentée avait besoin de comprendre ce que cet échange forcé de Regards signifierait. Il lui avait fait si mal, elle comptait sur ce dernier pour faire réparation. Avec un baume que lui seul détenait et était en mesure de proposer. Sa dernière Pensée satura tout son esprit durant quelques fractions de secondes. Ce n’était pas qu’une pensée, c’était une adresse, un message, des mots lancés directement dans le cœur de son dôme, s’il s’était montré perceptif. Elle attendait cette ouverture de sa part. À la tangente entre la requête et le commandement.

*Écoute-moi.*

*****



Le souffle qui circulait de façon irrégulière était chaud et brassait un air d’une lourdeur écrasante et désagréable. Saccadé, il provoquait agitation et ondulations indomptables, en aucune attache régulière et rassurante il pouvait recouvrir le rythme de la sérénité. Toujours sur ses gardes il sinuait continuellement du corps frêle et tendu de l’adolescente à cet espace ouvert mais couvert d’une imposante chape à la clarté écrasante. Une attente insupportable était subie, qui pourrait bien ne jamais aboutir à l’accomplissement de ce qu’elle espérait. Une réponse, un retour, une présence rassurante. Celle d’une voûte qui comprend et qui protège. Et non une qui domine et impose un joug étouffant à tout être sous son empire, échapper à ce seul bord qui n’en était pas un car s’inscrivait dans une idée d’infini tenait de l’impossible. Chaque expiration était l’expression d’une rage, elle en profitait pour rejeter se tension qui s’élevait en elle, pour cracher devant elle tout ce qui lui était prétexte de bouillir. L’échauffement qu’elle subissait du au temps peu clément et à son état de fébrilité était tel que la sensation d’une brise passagère sur sa nuque eu l’effet d’une lame glacée apportant une fraîcheur peu commune et imprévisible. Elle entendait son cœur s’assouplir, devenir très lent, au point qu’elle sentait s’exprimer jusqu’au bout de ses doigts ces coups réguliers et graves. Une basse rythmique qui aurait très bien accompagné un chant, mais c’était le silence qui régnait, ce n’était pas quoiqu’il en soit  la saison pour les instruments, distordus par des conditions peu clémentes de conservation. En se laissant calmer par ce son grave et apaisant, sa main tâtonna au hasard ses alentours.

Celle-ci atteignit doucement la pierre froide sur laquelle elle reposa, à plat, profitant de la sensation glacée et passagère qui remonta sur une partie de son bras tendu et immobile. L’adolescente sentait comme un lien diffus qui se nouait et se créait entre sa main étendue dont toute la paume sentait cette texture à la fois lisse et grenue, elle n’en tirait ni stabilité ni déséquilibre, une attache étrangement tissée. Un support auquel elle ne faisait pas confiance, mais sur lequel elle se tenait tout de la même, ayant besoin de sentir un contact tactile, avoir une sensation que l’endroit ne parvenait pas à lui offrir en cet instant précis. C’était d’une nature peu connue, sans être nouvelle. Une familiarité dormante d’une expérience déjà vécue mais jamais réellement goûtée. Les paupières de la Serpentard se refermèrent doucement alors qu’elle caressait la pierre pour commencer à la connaître non pas son aspect mais par son relief, sa structure, tout ce qui lui était si propre et qui devait être touché pour être perçu. Une autre forme de refuge venait d’être trouvée et découverte. Temporairement seulement elle oubliait sa déception d’un alentour traître et muet qui niait toutes ses espérances et attentes. La petite Swan changea alors de main, frémissant en appréhendant une nouvelle fois cette fraîcheur inattendue dans cet espace de touffeur ou l’air lourd et écrasant présentait une chape devant l’espace vide qu’elle évitait par son activité dissipatrice. Elle prit alors un fort appui, écrasant presque ses doigts contre la surface, ce serait l’Ancre qui la garderait de choir.

La Serpentard à nouveau leva la tête, elle ne vit rien de palpable, une étendue dont elle ne comprenait ni l’intérêt ni l’existence. La mer d’un fond unie peut tumultueuse s’agiter et perdre les hommes, les entraîner par sa violence, les envoûter par sa douceur. Quel était le pouvoir d’un pan uni et sans contraste ? Une perfection détestable en tout point qui habillait ce Ciel de Jour. Phœbus, es-tu mon ami ou mon ennemi ? Un être dont elle ne comprend les facettes, dont elle ne comprend pas les nuances. Il est trop plein en ses manifestations. La jeune fille ne trouve son ombre. Trop lumineux, trop imposant, l’unique dominant qui règne sans partage. Elle relâcha alors la pressions de ses mains et les aplanit avant de les mettre devant elle, puis s’allongea pour contempler l’Azur sans avoir à tirer sur son cou. Une forme d’amertume la saisissait implacablement. Comme une Épave de sensations. Phœbe ne parvenait pas à communiquer quoique ce soit, ni absorber la moindre onde du Ciel. Un hermétisme à double sens s’était instauré, d’un côté une force placide et indifférente, de l’autre côté une énergie brouillonne qui ignorait comment combattre ce mutisme.

Un Ombre, attendue, vint alors obscurcir l’espace sur lequel se tenait la petite Swan, provoquée par une imposante masse cotonneuse et d’un blanc pur. Le tableau gagnait une nouvelle couleur, devenait soudainement moins terne. Une fresque dichrome s’étalait à présent sous le regard de l’adolescente. La clarté si parfaite du nuage était par contraste responsable d’une tâche nette et sombre sur la terre sous l’effet de la source lumineuse et puissante qui la surmontait. Il était… défini. Dans sa forme, ses contours. Sa Silhouette donnait à voir une figuration évocatrice. Et si ? Et si aux Étoiles au tracé de sens se substituaient les Nuages au rôle similaire. Alors le jour aurait aussi son récit et sa possibilité de narration. À la différence que la Nuit offre un livre aux origines lointaines, dont les Anciens même purent être témoins. Héméra est changeante, perpétuellement prend un nouveau visage. Parce qu’il est à découvert elle aurait besoin de se couvrir d’artifices et d’innombrables masques quand Nyx est protégée par sa noirceur.

Toujours une nouvelle histoire est contée. C’est cela ? Ce langage totalement étranger à la Verte et Argent se dévoilait sous cette forme et devenait enfin compréhensible, au lieu d’être blindé d’orifices scellés. Ouranos parlait-il ainsi ?
La peur était moins présente. La petite Swan était certainement moins craintive. Elle avait évité avec soin ce qui lui semblait parfaitement hermétique, refusant ses incursions. À présent une brèche avait été sortie après avoir été longuement dissimulée. Ce n’était pas une réconciliation. L’acceptation de poser un pas en avant au lieu de tourner résolument le dos à la source d’effroi. Quelque chose de redoutable demeure dans le peu connu. Il est très probable que la prochaine fois que l’enfant reviendra en ce lieu d’observation, ce sera le temps de la Nuit, celui dont elle est le plus coutumière, qui la rassure. Bientôt, elle sera prête pour une confrontation après la trahison dernière que la Serpentard avait subie. Chronos peut se dérouler sans presser, elle attendra le kairos pour se présenter à nouveau.

Éternelle nouvelle Lune
Sombre Ciel