Les mots s'étaient échappés de mes lèvres sans que je ne le veuille, et à présent, il était bien trop tard pour les rattraper. Sitôt que je les eus prononcés, j'aurais voulut remonter le temps pour m'en avoir empêché. Qu'est-ce qu'il m'était arrivé ? Pourquoi avais-je dit ça ? Alaska allait forcément se douter de quelque chose, car ce n'était pas logique quelqu'un qui disait que les étoiles trouvaient que vous aviez de beaux yeux. Et la fille la plus belle de la terre semblait le penser, car elle resta silencieuse. Un gros blanc s'installa, et je fut pris de regrets. Pourquoi, mais pourquoi avais-je fait ça ? J'avais tout gâché, j'en étais certain. Alaska devait être gênée, devait se douter que quelque chose ne tournait pas rond chez moi, et allait surement se moquer de moi puis partir. Et ce serait fichue, ma vie serait fichue. A peine je l'avais rencontrée que je la perdais.

Mon coeur se serra en l'entendant s'écrouler sur les remparts. Que lui arrivait-il ? Un malaise ? Ma respiration se bloqua tandis que mon coeur battit plus vite, plus fort. Je reculais instantanément, n'osant dire quoi que ce soit. Je n'avais aucun idée de ce qui arrivait à mon coeur et à mes joues devenues soudain brulantes, mais je savais que ça n'était pas que de l'amitié... Et tout ça à cause des yeux d'une fille dont je ne connaissais même pas la couleur de cheveux. Soudain, je ne vis plus la silhouette d'Alaska adossée aux remparts, et n'entendit plus son souffle rauque à côté de moi. Paniqué, je jetais des coups d'oeil partout, mais le noir m'empêchait de bien voir. J'entendis soudain des légers bruits de pas en direction de la porte, et entrevis une ombre qui tentait de s'enfuir. La plus belle fille de la terre voulait me fausser compagnie. Mon coeur se serra, et, pris d'un élan de je-ne-sais-quoi, je m'approchais d'elle et l'empêchais de partir, dans un mouvement ferme. Son poignet, entre mes doigts tremblants, était tiède. Je rougis de plus belle, et arrivais à bafouiller quelque chose du genre :

"Pourquoi... t-tu veux pa... partir ?"

Alaska me supplia d'une voix de biche battue de la laisser partir. Elle semblait tout aussi paniquée que moi, mais je n'arrivais pas à lâcher son poignet. Mes doigts semblaient tellement crispés que je ne pouvais plus les bouger. Mon coeur battait tellement vite que je crus qu'il allait cassée ma cage thoracique. Soudain, je fus pris d'un élan d'une chose indescriptible qui me poussa à tendre ma main lire vers le visage de la belle jeune fille, et de remettre l'une de mes mèches derrière son oreille. Ce contact hérissa de chaire de poules mon épiderme. J'étais devenu complètement fou, et ça me plaisait. Ses yeux émeraudes m'hypnotisaient, je n'arrivais pas à m'en défaire. Posant une main sur le mur de pierre froide juste à côté de la tête d'Alaska, j'approchais mon visage du sien.

Quand soudain... Elle me cria "Dégage" d'une voix emplie de rage et de terreur, avant de m'envoyer un coup de genoux dans les côtes. Je poussais un cri de douleur en m'éloignant d'un bond. Puis elle partit, me laissant seul avec ma douleur et ma fierté blessée. J'avais tout gâché, tout, tout. Ma vie était fichue puisque la fille de ma vie était partie, et raconterais surement à tout le monde ce qui s'était passé. La douleur m'enserrait le coeur, sans que je ne puisse pleurer. Je me roulais en boule contre le mur où s'était tenue quelques instants plus tôt Alaska, et décidais de ne plus en bouger.