J’avais rendez-vous aux *portes de Poudlard.* Ces mots me semblaient être légendaires, comme s'ils sonnaient avec la solennité du tsar ⁽¹⁾ ou la majesté d'un magyar. *Pam, pam, padadam, padadam, pam* - j'avançai, l'allure assurée, les yeux fixés sur les confins du domaine. Je me sentais aventurier et découvreur, et regrettais de ne pouvoir m'attarder dans les petits chemins avec des jumelles. Beaucoup d'autres convergeaient vers le même horizon que moi. Soleil droit dans le ciel au-dessus de nous avant l'heure du rendez-vous, la petite atmosphère de western me frappa, prêt à dégainer ma baguette comme on sortirait un revolver de cow-boy aux premières consignes du professeur ; ou à sortir mes gants dignes du sheriff de Nottingham.

Tandis que d'autres arrivaient comme des fleurs, doucement, naïvement sur ce bout de champ, les notes des westerns retentissaient en moi comme des pétards pétillants. Je fixais intensément la frontière de la propriété chauffée par le soleil, dans ce paysage sans ombre malgré le froid de novembre. Mon manteau matelassé couleur cuir collé à ma peau, je devais être un cow-boy d'un type spécial, peut-être bien un des rares membres de l'espèce des cow-boy écossais à manteaux épais. Passant entre deux rangées de buissons pour arriver à ma destination, il me semblait traverser les portes du saloon.

Certains discutaient au ras des pâquerettes de la réalité. Je me répétais de mon côté avec toute la force de mon imagination : "une feuille, une boussole et une carte" ⁽²⁾, pour entendre le craquement du parchemin comme le craquement d'un pas, me figurer l'aiguille de la boussole bouger comme oscillerait le pendule d'un chercheur d'or, imaginer une carte au trésor. Nous n'aurions pas carte blanche sur le terrain mais je frissonnais à l'idée de découvrir de nouveaux espaces. Un cours en mouvement, finalement, heureusement.

Comme si la carte qui allait nous être donnée me faisait tressauter de joie dans ma tête par avance, comme une chocogrenouille bondissant de la sienne, une carte qui dorerait, "légendaire", sous ce soleil de novembre qui peinait à éclairer le paysage. Avec la Fine, la Ronde et la Plate [la feuille, la boussole et la carte, version imaginaire western de Jacob], je partirais à la conquête de la Botanique, le souffle de l'aventure sur la peau taillé comme la tramontane. M'approchant de quatre pas vifs, l'anse du portoloin désormais à fleur de peau, je fis un sourire à ma voisine avant d'ouvrir grand mes yeux pour le voyage. Elle avait l'air sérieux de ceux qui pensent déjà à la note finale de la bande-originale du western, au haut -O- de la mélodie, vraiment très droite, le visage haut.

Alors que les derniers élèves s'approchaient du portoloin, mes yeux vers les siens, je levai un sourcil interrogateur : "Prête pour l'aventure ?". Aventure sonnait presque solennel dans ma bouche... dire "aventure", c'était déjà presque le sentir, ouvrant une nouvelle pAge d'un nouvel Album dont nous ne savions encore rien. "A la conquête de l'inconnu..." murmurai-je, le sifflement du portoloin imprimé dans mes oreilles comme le sifflement d'un train vers le lointain. Si un rideau de fumée était tombé à ce moment du sifflement, l'impression train de western aurait été parfaite.

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⁽¹⁾ Je considère que ce terme fait partie de l'univers culturel de Jacob comme j'ai fait porter plusieurs autres RPs sur Michel Strogoff. — Le tsar est l'empereur de Russie.
⁽²⁾ Je me suis permis de donner une couleur aux paroles de Miss Kwon

Depuis son été intense en révisions, l'état général - physique et émotionnel - de la petite irlandaise étudiant en deuxième année dans la maison de Gryffondor pouvait se résumer en un seul mot; fatigue. Et malgré tout ce quelle avait espéré, être à poudlard n'avait en rien amélioré les choses puisque sa mère lui demandait des comptes et des devoirs supplémentaires. Rajoutez à cela les entraînements de Quidditch... Et vous aurez une adolescente de tout juste treize ans se dirigeant doucement mais sûrement vers un point de rupture. Quand à savoir qui céderait en premier c'était une grande question.

Mais cela ne l'empêchait pas de faire état de présence et de participation active en cours. Même quand le cours en question débutait de la plus étrange des manière, en demandant de rejoindre la porte du grand portail. Et se poursuivait sous des hospices particulières. Il était question de course en solitaire et d'orientation mêlée à de la reconnaissance de plantes diverses. Ennis sentit la fatigue s'abattre un peu plus sur ses épaules. Rien que l'idée de rapidité lui donnait déjà envie de se faire porter pâle. Mais cela impliquait des explications a posteriori avec ses parents... Non ce n'était pas judicieux. Mieux valait prendre ce portoloin puis terminer rapidement ce cours. Si possible.

Debout entre une Serpentard et un Gryffondor, elle s'approchait de leur moyen de transport en essayant de faire fit de la nausée qui lui prenait déjà la gorge. Et dû faire un effort pour ne pas envoyer une remarque acerbe à Jacob - le fameux Gryffondor - car miss Kown pourrait bien de nouveau chercher à lui parler de son relationnel avec les autres élèves. En plus de tout le reste elle devait faire attention à ça, ne pas donner l'impression ni de détester les nés-moldus, ni ceux qui ne sont pas bons dans une quelconque matière. Alors quand le camarade en question cumulait les deux... généralement Ennis manquaot cruellement de patience.

Plutôt que de répondre verbalement, elle préféra arrêter son regard quelques instants sur son visage en prenant un air le plus détaché possible puis hausser les épaules avant de secouer la tête lentement de gauche à droite pour montrer que son enthousiasme n'était clairement pas contagieux. Pas du tout. Puis elle attrapa le portoloin et ferma les yeux. La châtain ne les rouvrit qu'après avoir reçu l'information de leur professeur qu'ils atteindraient bientôt leur destination. Dans l'unique but de ne pas tomber tête la première et donc de se ridiculiser.

La course d'orientation allait débuter. La poursuiveuse se savait pâle et aux cernes légèrement violacés. Mais elle tenait malgré tout son matériel en main. Elle étudiait la carte avec intérêt pour trouver le chemin le plus propice. Laissant même les autres partir comme des furies une fois le départ lancé.

Tête inclinée et cheveux ébouriffés par l'aspiration du déplacement, je regardais l'avancée de la classe à travers le nuage flou du Portoloin comme un film à travers un grand écran de fumée. Je n'avais pas encore compris le trucage de cet objet très classe, digne des plus grands James Bond. Pour en sortir pourtant, pas de roulade à la Bond, seulement un atterrissage éberlué fermement ancré sur mes pieds, avec la chair de poule dans la peau pour preuve du prodigieux déplacement.

Abruti par la secousse, je mis quelques secondes à reprendre pied, alors que mon estomac gargouillait, probablement aussi perturbé que moi face aux secrets de ce drôle d'objet. Une fois que la clairière me parut enfin verte et nette, je pris ma carte dans mon sac à dos emprunté à un camarade du dortoir pour l'occasion -la besace n'aurait pas été pratique pour le portoloin- et m'élançai vers le grand vert : *forêt, à nous deux !*.

Une dizaine de foulées me suffirent à apprécier la douceur du tapis de mousse qui s'étendait à cet endroit. J'avais avancé silencieusement. L'approche feutrée était aussi un principe de base de James Bond et je n'en étais pas peu fier. *Dommage que mon uniforme ne soit pas celui des Verts pour me fondre dans le décor de la terre inconnue.* Mais un flash interrompit ma course-poursuite de plantes : *et elle* ?

J'haussai un sourcil, stoppai mon pas aussi sec, rebroussant chemin, l'esprit occupé par elle. Celle dont le nom résonnait dans la bouche des profs avec un air d'évidence. Parce que de sa bouche à elle naissait tout le temps les réponses. Aux réponses, moi, je préférais les mystères. Cette fille systématiquement devant dont les réponses volaient plus vite encore que les oiseaux que je pliais dans le papier. Qui se taisait dans les rangs au moins autant que je pépiais, piquant une réplique par ci, déposant une plaisanterie par là. Elle, l'Enigme avec un E majuscule.

Mais un je-ne-sais-quoi clochait. Trottant droit vers le portoloin, je me représentais le haussement las d'épaules, le regard vide. Son visage ! Si pâle. Avec ses yeux creusés profondément. Ce n'était pas réjouissant, même pour le spécialiste du teint pâle que j'étais de trouver une personne comme lui, quand ce teint n'était pas des plus habituels. *Est-ce qu'Ennis plutôt que ne voulait pas dire, ne pouvait pas dire quelque chose ? Pourquoi cet air flapi comme si elle allait flancher, le corps quasi hors contrôle, elle qui se tenait toujours très droite ? Et puis, que faisait-elle fixée là alors que tout le monde avait déjà filé par ci par là ?*

J'étais déjà las de me poser tant de questions sans réponse plutôt que de me fier à mon intuition. Comme elle ne semblait ni partir ni parler, je pris encore un instant pour hésiter. Ce n'était pas comme si j'avais déjà lu une carte dans ma vie et pouvais apprendre quelque chose à l'élève modèle en personne en train de fixer l'objet dans ses mains. Mais en même temps, ce n'était pas non plus comme si la première de classe allait débuter la conversation. Intuitivement, je suivis l'entre-deux : pas de question exigeant d'investissement de sa part, tout en lui parlant : "Les rayons de soleil picotent sur le visage. C’est agréable, je trouve. Tout va bien ?"

Je n'avais jamais été aussi laconique et la langue me démangeait. Je sortis ma gourde de jus d'oeillet et en bus une gorgée en attendant sa réponse. Je rattraperais bien mon retard sur la course une fois qu'elle aurait dit qu'elle allait bien. Je courais vite, avec mon entraînement depuis la première année. J'avais soif d'exploration et ressentais l'appel de la forêt.

Plongée dans l'étude de la carte et le placement de sa boussole pour choisir l'itinéraire qui serait le plus adéquat et lui permettrait d'économiser le plus d'énergie possible, Ennis n'avait pas remarqué la présence d'un camarade de Gryffondor à quelques pas. Totalement inconsciente d'être observée, voir épiée, son index gauche - les autres étant repliés pour fermer son poing - parcourait la carte au rythme de ses yeux. Ces derniers faisaient quelques allers et retours entre la dite carte, son environnement et la boussole. Et elle essayait d'imprimer dans sa mémoire.

Alors qu'elle relevait la tête pour observer la forêt et mémoriser une partie de son trajet, son regard fut attiré par la silhouette de Jacob. Leurs prunelles se croisèrent et aussitôt le garçon à la tignasse brune lui parla du soleil qui réchauffait la peau et lui demanda si tout va bien. Est ce que tout va bien? Oui et non. Elle était fatiguée, n'arrivait pas à bien dormir, ni à récupérer. Malgré son attirance pour les études on lui en demandait trop. On? Elle-même bien entendu, les professeurs - pas vraiment plus que de raisonnable à des enfants de douze ans -, sa mère aussi. Beaucoup. Vraiment. Des devoirs supplémentaires si elle estimait que son travail scolaire n'est pas suffisamment bien réalisé, à rendre dans un délai relativement court. Donc des nuits raccourcies. Et le Quidditch. Pourtant Esmée ne semblait pas imposer un rythme plus soutenu que ses collègues capitaines.

- "C'est vrai que c'est agréable." Souffla la jeune irlandaise après avoir tourné son.visage dans un rayon lumineux et fermé les yeux un court instant. La chaleur des ondes l'aida à détendre les traits de son visage crispé par la fatigue. Apres quelques secondes ainsi elle reporte son attention sur son camarade.

- "J'ai déjà été en meilleure forme, mais ça va aller. Merci de t'en inquiéter." Jacob lui paraissait prêt à bondir comme impatient. Pourquoi n'était il pas partir à la recherche des plantes rapidement comme les autres? Était-ce juste sa sollicitude? Ou bien avait il autre chose derrière la tête? Il but une gorgée dans sa gourde et Ennis ne sut trop quoi faire. Devait elle poursuivre la discussion ou bien lui proposer de partir à la recherche des plantes nommées par leur professeur?

- "Tu voulais autre chose? Sinon, moi je pars par là," Elle montra avec sa main droite - qui tenait la boussole fermement - une direction bien différente de celle empruntée par la plupart des autres élèves de deuxième année, "ça sera plus court." Elle attend.dit de voir ce que le garçon allait dire. Luibposerait il plus de question ou la suivrait-il dans le parcours qu'elle venait de déterminer comme étant le plus judicieux?

Finalement Ennis releva la tête et dit qu’elle allait bien. Quelle belle nouvelle ! Je levai le pouce et laissai mon regard glisser quelques instants de nouveau sur le paysage : le tapis vert qui nous entourait était comme le tapis d’un de ces jeux de cartes, doux comme le tissu. Un de ces tapis verts de jeu où faire une petite bataille explosive de dortoir, où les cartes vibraient et explosaient. A ce détail près que le silence semblait envahir la clairière pleine de mousse désormais. A ce détail près enfin que j’étais à peu près autant un as du déchiffrage des cartes de bataille explosive qu’un véracrasse de la lecture des cartes d'orientation.

Les cinq surfaces de couleur : le carré vert herbe, les montagnes brunes, les marécages gris, le désert orangé et la forêt interdite vert sombre me semblaient des cases d’un coloriage magique dont je ne disposais pas du code. Aussi, plissant un peu les yeux sous l’effet des reflets du soleil et de ma nouvelle idée en cherchant à comprendre cette carte, je m’enquis auprès de la seule camarade restante : « On peut suivre le même chemin ? ». Et dès les premiers pas, le nez penché sur la carte, j’essayais de la tourner à la recherche de repères, comme on tournerait un volant pour se diriger, plissant le nez dans mon incompréhension. Après quelques nouvelles foulées, je finis par poser la question : « On est à quel niveau de la carte ? ». Lire une carte nécessitait en réalité de fixer son attention sur un point. Un exploit pour le deuxième année en mouvement que j’étais dont l’esprit avait tout d’une boussole dont l’aiguille tournerait en permanence.

Pourtant, nous avançions. Rapidement aussi à l’aise dans mes foulées dans la mousse douce que sur un de ces tapis roulants défilants de la salle d’escalade de Cambridge, j’essayais de me remémorer l’importance de réussir. Comme si le tapis vert sur lequel nous avancions nous permettait d’accéder à un de ces tapis rouges Gryffondor marquant le succès en France.

Je me mis à nouveau à regarder la direction dans laquelle nous avancions, cherchant quelle plante nous aurions à observer par espace, faisant résonner le petit refrain élastique nom-de-la-plante—catégorie—détail physique dans ma tête silencieusement pour mieux l’y imprimer. J’aimais beaucoup courir ainsi dans les bois avec la sensation que beaucoup de sorciers n’y étaient pas, comme dans cette comptine.

La course me procurait une sensation prodigieuse de liberté, laissant libre cours à mon imagination : tel grand arbre noueux me semblait le lourd arbre généalogique des Tramontane. Quelques secondes après, mon index et mes yeux pointaient ainsi une trouvaille : « Oh regarde ! Tu ne trouves pas que la forme de cette plante ressemble à un sourire ? ». Difficile alors de faire converger mon attention sur un seul point, à croire qu’elle partait en autant de branches que les arbres autour. J’étais le paradoxe d’un garçon dont le corps courait au plus court et l’esprit se perdait en longues associations.


Vu que tu maîtrises le chemin, je ne m’avance pas trop sur les paysages traversés et les premières plantes rencontrées .

Ennis haussa les épaules à la demande de Jacob. Il pouvait la suivre ca ne la dérangeait pas. Enfin en l'occurrence, c'était elle qui suivait le brun. Elle avait une bonne condition physique mais la longueur de ses foulées étaient restreintes par la taille de ses jambes mais aussi l'énergie qui lui était disponible; peu. Juste quelques pase arrière du garçon, la fillette le voyait observer carte et paysage en alternance à la recherche de repères ou d'un des végétaux qu'ils devaient trouver. Il était perdu au sens strict du terme. Et c'est assez naturellement qu'il finit par lui demander de l'aide.

- "On est ici." Indiqua la châtain en pointant un croisement de chemins se trouvant dans le quadrilatère de couleur grise. "Le chemin tortueux c'est celui sur lequel on est. Celui qui part vers l'est est là." Elle montra le chemin sur la carte puis sur leur droite. "Celui vers le nord ouest est à notre gauche." Elle pivota légèrement pour indiquer la seconde direction. "Miss Kown nous attend ici." Termina la gryffonne en plaçant son index gauche sur leur point de départ.

L'irlandaise tourna son visage vers l'anglais pour voir s'il avait compris avant de l'inciter à prendre le chemin vers l'est. Ils reprirent leur course commune. Chacun observant le paysage, guettant l'apparition soudaine d'une plante au beau milieu du marécage. Malgré ses entraînements regulier en balai, Ennis avait le souffle court, elle sentait l'air lui brûler la trachée et les bronches. Mais elle tenait bon. Lorsqu'ils s'arrêterait pour prendre des notes sur leur première trouvaille, elle reprendrait un peu de force. Heureusement qu'elle avait pris des petits quelque chose a manger au petit déjeuner. Sinon elle allait perdre pied. Affolant comme la fatigue accumulée lui semblait insurmontable en cette journée.

- "Un sourire?" La plus petite des deux rouges et ors s'arrêta net, prenant de grandes inspirations et expirant lentement pour calmer le rythme de son muscle cardiaque. La main qui tenait la boussole la lâcha, la faisant claquer contre son torse encore enfantin, puis, elle orienta son visage vers la plante désignée par le garçon et pencha la tête. "Tu trouves?" Elle pencha la tête dans l'autre sens, observa un certain temps puis remit sa tête droite. Elle ne savait pas quoi lui répondre mais allait ouvrir la bouche pour le faire quand son regard fut attiré juste à droite de la plante au sourire.

- "En voilà une de celles qu'on recherche." Elle fouilla dans ses poches pour mettre la carte à l'abri ete ressortir de quoi écrire les détails dont ils auraient besoin.

- "C'est un lutrin portatif que j'aurais dû demander à Yule... pas un nouveau livre de runes." Gromela-t-elle.


Mes excuses pour le retard... Syndrome de la page blanche

Rapide comme le vent à pas d'enfant. A filer ainsi dans la forêt, je me sentais tout puissant, tout libre, tout autrement que sur un banc de bois. J'adorais cela. Aussi souriais-je autant devant la drôle de plante que dans l'effort. En soufflant dans ma course, je me sentais vivant. Pétillant d'énergie et d'envie de continuer, encore.

Mes yeux s'arrondirent de curiosité quand Ennis pointa la première plante à indiquer. Puis en l'entendant souffler jusqu'à l'épuisement. Le temps que je sorte un calepin pour essayer de croquer la plante en quelques traits, il me semblait que son essoufflement se prolongeait face au silence des plantes.

Tout en récupérant également en souriant, je notais ce que je pus : "'tite plante grise assise sur une pierre". *Bic..., bic..., bicuptos ! J'y étais !* Si j'étais un personnage de bande-dessinée, une petite ampoule se serait allumée au-dessus de ma tête... "Beurk, beurk. Il y a un médicament au goût amer fait à partir de cette plante, j'en suis sûr." Je grimaçai.

Puis reportai mon regard vers Ennis : "Merci pour la direction ! Bouger, enfin, après la dernière semaine de cours, ça fait du bien !" Pas que je me sois particulièrement illustré en cours, au contraire. Mais peut-être que les cours parleraient à Ennis. Je connaissais peu d'elle si ce n'était ses facilités en cours et son rôle de poursuiveuse au quidditch. P'têtre bien qu'elle avait d'autres centres d'intérêt.

Je regardais la carte, un sourcil froncé sous l'effet d'une concentration forcée. "Et si on suivait le ruisseau ? On tomberait rapidement sur la mife blanche, non ? Tu aimes l'eau ?". Cette image de première de classe collée à sa peau plus qu'un vêtement mouillé en tête, je n'éclaboussais pas Ennis au passage. *Hop ! Les mifes blanches. Là, regarde !*. Mon doigt pointa la colonie odorante des sous-bois. Miam, on pouvait tester ?

J'approchais de près mon nez des champignons attirants. De près, les petites taches les rendaient beaucoup moins appétissants. J'essayais de regarder attentivement le petit champignon en suivant le schéma : en haut le chapeau. Tiens, répartition dans une maison blanche, original. En-dessous les lamelles, très fines, crantelées. Elles seront dures à dessiner. Curieux, sa tige s'appelait pied. J'inclinais un peu la tête pour essayer de comprendre où était la ressemblance avec une jambe humaine, sans succès puis mis quelques instants encore à dessiner le champignon à la douce odeur.

Ma camarade était toujours là. Je m'arrêtais un instant pour sortir ma gourde et boire quelques gorgées en souriant, vérifiant qu'elle avait aussi de son côté terminé pour repartir d'un pas leste et léger. Heureusement que je n'avais pas emporté de chocogrenouilles, les cahotements de la course associés à la température qui augmentait pas après pas leur auraient été fatals. Dure vie que celle des chocogrenouilles en forêt !

Un médicament? De quoi parlait-il? Ennis n'en avait aucune idée. Cela devait être quelque chose de lié au monde moldu. Elle lui aurait bien posé la question mais il avait déjà amorcé un autre sujet de conversation. L'irlandaise écrivit donc le mot en phonétique un peu à la va-vite.

- "Je ne sais pas. Entre les cours, les rondes et le Quidditch... Mon réservoir d'énergie est proche d'être vide. Cette course..." Et lui qui débordait d'énergie. Où la puisait-il? Parce qu'elle aimerait bien pouvoir en prendre un peu si sa source était exterizur à son corps. Pas grand chose... juste un peu. Mais elle faisait bonne figure et tenait bon. La première plante croquée, il suivirent le ruisseau et tombèrent effectivement sur les petits champignons assez rapidement. Comme le garçon, la préfète le dessina. Le dessin n'était pas son fort, elle n'arrivait jamais à respecter les proportions. Et certaines formes lui semblaient complètement hors de portée. Son champignon avait donc un espèce de chapeau haut de forme tordu et un pied gringalet. La chatain ne put s'empêcher de montrer son œuvre avec un sourire:

- "J'espère que le talent de dessinateur n'est pas pris en compte... sinon mes lots vont chuter je pense." Elle ajouta les légendes puis inspira un grand coup avant de vérifier la carte. Son index gauche se place pile sur leur position et suivit un petit chemin jusqu'à la prochaine plante.

- "Prenons la prochaine à droite. Après une dizaine de mètres on devrait trouver des tulipes et des géraniums." Elle réfléhit une seconde, le temps de voir que le garçon était déjà partit, et ajouta un peu plus fort: "Il y aura sûrement des pissenlits sur le trajet. Faut ouvrir l'œil." Ces recommandations faites elle reprit la route en marchant de manière à pouvoir ranger son matériel et avoir les mains libres. Puis elle accelera pour le rejoindre.

- "C'est quoi un médilament?" Demanda-t-elle au jeune garçon une fois arrivée à sa hauteur. "Tu parlais d'un goût amer, c'est une sorte de potion?" En dehors de ce contexte et peut être moins fatiguée, elle n'aurait peut être pas posée la question. Ou pas à Jacob. En des temps plus normaux elle aurait cherché à la bibliothèque ou fait appel à Audric. Mais là, elle n'avait pas vraiment envie de s'ajouter ce travail, ni d'attendre. Et, alors que le garçon commençait sa réponse elle s'arrêta net. Elle venait de repérer une fleur jaune au bout d'une longue tige avec des feuilles dentelées. Elle sortit de quoi la dessiner - ou tenter de la dessiner - du mieux possible tout en écoutant les explications qui lui étaient fournies.

Un sourire traversa mon visage en regardant le dessin d’Ennis. Je hochai la tête en riant gentiment : "Ton champignon est cent pourcents unique, vingt points d'originalité !". Je ne voyais pas l’intérêt de retracer trente fois à l'identique le motif d’un champignon inconnu au bataillon jusqu’à cette course d’orientation. Autant le faire à sa façon. Elle avait bien raison. La patience me manquait un brin pour avoir un talent pour le dessin, aussi.

*Pissenlit, tulipes, géranium*. Ces noms ne m’évoquaient qu’un vide géant. Grand comme le ciel du cours d’astronomie. J'ouvris des yeux ronds comme des soucoupes en les entendant. Ça sonnait moldu, mais jamais entendu.

Pire encore, à peine arrêté devant le pissenlit, le parchemin sur lequel je posais mes yeux expliquait les pistils, les pollens et les pédoncules, pfpfpfpf, tout cela me passait à six pieds au-dessus… je ne pouvais vraiment pas me les représenter. Même en prenant quelques instants après la tulipe entre mes doigts, je ne comprenais pas comment on pouvait écrire tant de mots pour un si petit endroit.

Je n’avais pas l’intérêt des plantes imprimé dans la peau, il fallait croire. Même en observant avec attention, je n’étais pas pris de passion pour les sépales et les pétales dont je déchiffrais avec peine les noms complexes. Et qui me laissaient parfois perplexe : comment la « rose » pouvait-elle être rouge quand on la regardait ?

Progressivement, j'avais rempli mon parchemin avec de vraies indications entre mes rapides dessins : *Pissenlit : fleur ressemblant à un soleil*
*Tulipe : fleur à tige longue comme une baguette*
*Géranium : fleur couleur souafle*
*Rose : attention, elle ne l'est pas*.

Et puis, pétale sur la chasse aux fleurs, sans longue-vue de pirate et sans lunettes d’observation de quidditch, même des fleurs jaunes n’étaient pas si faciles à repérer dans le carré d’herbe, alors qu'il y avait de moins en moins d’arbres. Alors je plissais un peu les yeux, me penchais un peu, pliais les genoux pour me retrouver un peu plus bas pour percer les secrets des plantes.

On aurait dit une enquête géante où chaque plante était un indice masqué avec soin. Alors, même sans trouver ma vocation à travers les différentes constatations, je sillonnais avec le sourire la fin du petit bois et observais les longues herbes vertes qui cachaient les fleurs, curieux de leur odeur, suivant les indications de direction qu’Ennis avait données tout à l’heure.

Ce faisant, je discutais gaiement : "Médicament ? C'est le sirop ou le bonbon pas très bon pour avoir moins mal. Les repas pas très colorés donnés aux malades de l'infirmerie !" C'était le métier du père de Nadia dans Michel Strogoff, donner des médicaments, mais je le taisais, me doutant que ça ne serait pas d'une aide flagrante pour ma camarade.

Hop, hop, hop, nous avions passé les étapes des fleurs, pour repartir prestement pour la suite : la mandragore, une plante à grimace vu les indications, à côté de laquelle je m’arrêtais pour de bon pour barrer toutes les plantes passées. "Fait, fait, fait, fait !" souriais-je en les barrant. "Le quidditch : c'est pa-ssio-nnant ! Par contre, pour les cours, je comprends. Et puis, tu dois travailler tellement. Tu n'arrives pas comme une fleur en cours, toi." souriais-je. Au jeu des 7 différences entre nous, celle-là sauterait aux yeux même du moins observateur des apprentis élèves botanistes.

Ah ca pour être original, son champignon était original. Les vingts points bonus laches dans le gré du vent firent sourire la châtain. Cela illumina son regard quelques secondes.

La caricature de géranium rejoignit le pissenlit stylisé, le tulipe grotesque et la rose approximative sur sa feuille de parchemin dédiée au fleur d'origine moldue. Vraiment, elle était tout sauf douée d'un talent quelconque en dessin. Le fait de ne pas avoir de réelle table de travail n'arrangent rien du tout. Heureusement qu'elle légendaire son travail car il serait illisible sinon. Elle grimace, entourage un baillement et hocha la tête quand à l'explication sur les médicaments. C'était donc un équivalent des potions curatives. Ni plus ni moins. La nouvelle poursuiveuse des Gruffes Ardentes se demandait bien ce que les moldus pouvaient mettre là dedans puisqu'ils n'avaient pas les plantes magiques aux propriétés si intéressantes. Peut être uniquement des plantes moldues qu'elle ne connaissait pas forcément.

Ils avaient avancé dans leur course aux plantes, dessiné du mieux possible les fleurs, tiges et feuilles, annoté le tout... et le bout du chemin n'était plus très loin.

- "Enfin!" Souffla l'irlandaise une fraction de seconde avant que Jacob ne coche sur une liste tous les végétaux et champignons qu'ils avaient croisés sur l'itinéraire décidé par la gryffone.

- "Je préfère la course en balai. Mais comme il n'y en a pas à Poudlard je me suis présentée aux sélections. J'aime bien l'ambiance dans l'équipe mais Esmée Peterson - la Capitaine - n'est pas tendre." Elle trouvait en réalité la course bien plus passionnante que le Quidditch. Mais elle y retrouvait des éléments qu'elle aimait beaucoup, la vitesse, la dextérité, l'évitement d'obstacles... Et elle perfectionnait sa visée. Et puis cela faisait un exutoire physique à toute sa charge de travail mental liée aux cours, devoirs et travaux supplémentaires.

- "J'aime bien m'avancer un peu dans les matières que j'aime bien. C'est stimulant. Mais ma mère m'a demandé du travail en plus. Je dois tout faire en double." Elle n'avait pas pour habitude de se plaindre. D'ailleurs son ton de voix était bien plus fatigué que plaintif. Elle haussa les épaules, se massa la nuque de sa main libre et rangea ses affaires qui dans son sac qui dans une poche avant de reprendre doucement le cours de leur route.

- "Je crois qu'on a tout trouvé. Le point de rendez-vous est là-bas." La fillette tendit le bras en direction où il trouverait à coup sûr Miss Kown, leur professeur de botanique. Il y était presque. Bientôt la journée serait terminée et elle pourrait aller se doucher. Et se reposer un peu avant le dîner. Ce soir, elle ferait ses devoirs avec Clément, il faudrait que ses yeux soient en mesure de tenir d'ici là.