Je déambule dans les couloirs de l'école mon sac sur une épaule en bandoulière tandis que j'essaye de me glisser au milieu de la mêlée d'élèves. Le couloir du premier étage est toujours plein à craquer à cette heure-ci de la journée, avec un peu plus d'avance je me serais sans doute éviter ce bain de foule. Cela fait un mois que je le sais et pourtant je persiste, arrivant toujours pile à l'heure. Promis la prochaine fois je viens en avance. Enfin c'est ce que je dis à chaque fois. Un coude vient heurter sur ma joue tandis qu'un pied vient s'écraser contre le mien. Je lâche une plainte avant de grogner, agacée par les géants qui n'ont pas un regard pour les plus jeunes. Moi aussi un jour je serais grande d'abord et je n'en fais pas une montagne. Ah. Montagne. Géant. Un petit rire s'échappe de ma bouche, amusée de ma propre blague. Je me stoppe net à la vue d'un septième année qui me contemple un sourcil levé en plein questionnement concernant ma santé mentale. Baissant la tête, je sens le rouge me monter aux joues, et mes cheveux attachés ne me sont d'aucun secours.

Pivoine, je parviens à rejoindre la leçon de Défense contre les Forces du Mal, non sans quelques derniers efforts, je vais avoir des bleus. Où vont-ils chercher toute cette énergie, en sortant d'une matière comme l'étude des moldus en plus, la question se pose. Disons que ce couloir est en quelque sorte une préparation à cette matière riche en émotions qu'est celui de Miss Holloway. Essoufflée, mais satisfaite, je m'avachis à ma place heureuse de retrouver le calme d'une salle de classe ne serait-ce que l'espace d'une heure. Installant mes affaires de manière habituelle, je constate que personne n'est encore assis à côté de moi. Rien de bien grave, les Défenses contre les Forces du Mal sont assez prenantes, je n'ai pas encore eut trop le temps de discuter, et puis les élèves changent régulièrement de place. Le temps que les affinités se fassent comme on dit. Mon manuel sorti, dans lequel s'échappent quelques notes en bazar, je réalise la présence d'une robe à l'écusson vert et argent à mon pupitre.

Tournant la tête dans sa direction, je m'étonne d'y voir un visage familier, Talya Hale, une de mes camarades de dortoir. J'avais pu lui parler un petit peu lors de la première semaine, mais sans réellement trouver du temps pour la connaitre d'avantage depuis. Je crois que l'occasion est toute trouvée pour discuter un peu plus avec elle, et moi qui pensais ne pas parler.

- Comme on se retrouve, lui dis-je tout sourire avec un clin d'oeil, amusée de la situation

- Mon lit est très confortable, je ne pourrais pas m'en passer ! C'est vrai que je ne dors pas beaucoup mais ça me suffit. Et si je veux être honnête avec toi, je dois te dire que mon apparence parfaite me sert à cacher le manque de confiance en moi. Tu vas peut-être me dire que c'est un cliché mais j'essaie simplement de masquer ma faiblesse. Comme ça si les gens me regardent, ils n'auront aucun argument pour me juger.

Woah. Si je m’attendais à ça. C’est pourtant bien vrai que ces lits sont confortables et si moelleux ... j’aimerais y être là toute suite. En disant ça, je pensais qu’elle allait me répondre à côté ou encore qu’elle se contente de rire. Mais elle s’était confiée à moi. Pour avouer une faiblesse en plus. Je me sens alors bien plus proche d’elle de par son aveux. Je tourne la tête vers Talya, la joue posée sur l’oreiller qu’est mon manuel et la regarde avec admiration.

Elle n’a donc pas confiance en elle. Comment est-ce possible ? Cela me fait plaisir, qu’elle ose se confier à moi de cette manière. Bien que je ne sache pas pourquoi elle parle de cliché, n’étant pas trop habituée à ce genre de discussion à coeur ouvert sur l’apparence, elle est sincère. Je le sens. Si elle ne dort pas beaucoup, son visage se garde bien de la trahir, son teint est lumineux et pas la moindre cerne ne vient dévoiler ses courtes nuits. Je me demande ce qu’elle fait au lieu de dormir. Et puis c’est si bien de dormir.

Si son secret devrait me réjouir par la présence d’un défaut à sa perfection, il n’en est rien. Je la trouve alors d’autant plus admirable, elle est si mature. Elle admet ne pas avoir d’assurance et craindre le regard des autres sans pour autant chercher à les rabaisser comme beaucoup le feraient. Non, elle se protège voilà tout. J’admet ne pas trop comprendre ce qu’elle ressent, non pas que je me trouve irréprochable loin de là. Cependant je ne pense pas accorder de crédit aux étrangers, grand-mère m’a sûrement trop mise sur un piédestal. Je connais mes défauts, et y en a, mais pourtant cela n’entrave en rien mon assurance et ma fierté.

Sortant de ma rêverie j’ai le sentiment de devoir lui renvoyer l’ascenseur, comme disent les moldus, lui montrer que moi aussi j’ai confiance en elle. Et surtout que sa faiblesse ne change rien de l’image que je le suis fait d’elle. Si ce n’est qu’elle en devient plus humaine.

- Je dois t’avouer que cela me rassure, je sais maintenant que tu es bien un être humain. Si l’heure est aux confessions alors, je dois dire que je manque parfois d’affection. Enfin ce que je veux dire c’est que dans ma famille il y a très peu de preuves d’amour ou de réconfort. La preuve je ne sais même pas prendre quelqu’un dans mes bras. Je n’aime pas trop les contacts mais parfois lorsque je me sens triste je me sens un peu seule.


Honteuse, je ne pensais pas avouer tout haut ces paroles. Dire cela à Talya est au final me l’avouer a moi même par la même occasion.

- Charlotte, tu es toujours avec moi ? En tout cas, je suis heureuse qu'on ait pu se parler en-dehors du dortoir. C'est vrai, après tout on ne se connaît pas tant que ça. Ça te dirait qu'un midi on mange ensemble ? Ou qu'on aille se promener dans le parc ? Ou autre chose !

Avec sursaut, je réalise que j'étais doucement entrain de sombrer dans le sommeil. Le cours n'a même pas débuté, ça commence mal. Je me tapote les joues de mes mains afin de me redonner un peu d'énergie pour ce cours bien plus énergique que celui d'histoire de la magie. Si je me suis faite aux dédales des couloirs, aux professeurs, aux nouveaux élèves et même un peu aux devoirs, j'ai encore du mal avec le rythme. Talya me regarde avec tendresse en souriant fidèle à elle-même. Je suis contente d'avoir pu parler avec elle moi aussi, elle se rapproche plus d'une amie que d'une simple camarade de dortoir et pour mon plus grand plaisir.

- Pardon j'ai toujours du mal le matin et puis qui peut résister au confort de ce doux manuel ?

De mes mains je caresse l'air entourant mon livre et oreiller désigné en rigolant, satisfaite de ma blague.

- Mais oui je serais ravie de passer du temps avec toi, c'est vrai qu'au début on est tous dans l'excitation de partir à l'aventure au milieu de l'inconnu alors que des histoires se cachent autant sous nos yeux. Et puis maintenant que j'ai mon plan du château j'irais où tu voudras et sans me perdre., j'ajoute avec un léger rire

Ce après quoi la professeure Holloway fait son entrée dans la salle de classe des affaires sous le bras, on peut dire que je me suis réveillée juste à temps.