La boucle ne se taisait pas dans mon crâne. *Montmort*. Il devait sûrement y avoir une raison à ce blocage.
Peut-être un oubli, alors que cette boucle bosselait le moule de cet oubli. Avec le moule, j’allais peut-être retrouver la forme qui pouvait rentrer dans l’oubli. *Montmort*. Entendre enfin la musique de ce souvenir qui ne revenait pas.
Mes lombaires pulsaient de douleur. J’étais restée bien trop longtemps assise sur ces chaises aussi confortables qu’un parterre de béton. D’un geste lent, j’appuyais ma main sur la dernière table juste avant Miss Montmort ; d’un basculement presque imperceptible, je transférais mon poids sur mon bras pour que mon dos arrête de gueuler.
*Montmort*.
Puis les quelques mots de la professeure englobèrent mon esprit.
La tonalité de sa voix réveillait encore plus fort ce foutu souvenir qui ne voulait pas s’offrir à moi. Je connaissais cette singularité de douceur dans son ton, mais j’étais sûre que ce souvenir était plus vieux qu’un an.
Un an…
C’était impossible, mais c’était pourtant ce que je ressentais. *Montmort*. Et ça me faisait chier.

Je dirigeais mes yeux dans les siens — pour retourner son regard — alors que ma bouche s’ouvrait déjà en prononçant les mots que j’avais précisément choisis dans mon esprit : « Cette baguette… ». De ma main libre, je dégainais mon arme lentement, en accord avec le flux douloureux qui grattait dans mon corps ; tellement lent, lourd.

— N’a pas servi depuis plus d’un an, continuais-je sans quitter les yeux bleus qui ne me donnaient aucune information, pour l’instant ; aussi glissants que ce foutu souvenir moqueur.

*Montmort*. Une seconde tomba, mais je la rattrapais déjà en agitant ma langue avec un calme que je contrôlais : « Et j’ai lu à la bibliothèque qu’il existait un retourneur de temps ». L’articulation de mes mots se lovait dans ma bouche. *Montmort*. Je savais ce que je faisais, mais je n’avais aucune idée d’où est-ce ça allait me balancer.
Et cette boucle, encore.
Encore.
*Mont… mort*.

La jeune fille ne dit rien dans un premier temps. Elle ne semblait pas se sentir bien. Fronçant légèrement les sourcils, Elina regarda la Gryffondor plus attentivement, cherchant à identifier le problème. Charlie semblait s'appuyer de tout son poids sur son bras comme pour soulager ses jambes. Elina avait déjà vu ce genre de postures à certaines occasion. Avec sa collègue Naomi lorsqu'elle s'appuyait sur sa canne notamment. La jeune fille avait-elle été blessée ? La professeure n'avait pas souvenir d'avoir entendu parler d'un accident qui aurait pu avoir lieu à Poudlard et dans ses souvenirs, Charlie ne présentait pas de handicap. Du moins il lui semblait que cela n'était pas le cas lors des épreuves avec les élèves chinois.
Lorsque la jeune fille prit à nouveau la parole, la conversation pris une tournure plutôt inattendue. Lui présentant sa baguette, elle ajouta qu'elle ne s'en était pas servie depuis plus d'un an avant de mentionner un retourneur de temps. La jeune professeure avait du mal a voir où son élève voulait en venir.

« Continuez je vous prie. Comment se fait-il que vous ne vous soyez pas servit de votre baguette depuis aussi longtemps ? Et quel rapport cela a-t-il avec les retourneurs de temps ? »

Cela avait-il un rapport avec un accident qui expliquerait les difficultés qu'elle semblait avoir à rester debout ? Mais si c'était le cas, pourquoi avait-elle choisit de s'adresser à elle ? La jeune professeur avait trop peu d'information pour l'instant.

Sans arrêt, la boucle tournait sur elle-même, frénétique. Je la sentais se déplacer au travers de mon corps, traversant les couloirs de mon intérieur. *Montmort*. Pour aller se planquer dans cette petite trappe qui tournoyait de douleur dans mon bassin. Un coin reculé, insupportable.
Ensemble, boucle et douleur se mélangeaient en une toute petite tornade qui creusait dans ma chair jusqu'à se frapper l’Œil contre mon os, de bassin. *Montmort*. Et la tornade miniature ne se calmait pas, je sentais son Œil s’écraser frénétiquement contre mes os, avec un bruit de chaussure mouillée qui se répétait en boucle ; jusqu’à ce que le pus déborde de la cornée, jusqu’à ce que la douleur soit faite d’éclats. *Montmort*. Et la boucle infernale se déroulait.

Je me sentais encore plus écrasée par mon propre poids. Mes dents se serraient jusqu'à se mouler entre elles pendant que j'écoutais la tonalité d’oubli de ma professeure. Un oubli oublié.
Ses mots accompagnaient le coucher du soleil, ils étaient paisibles. Pourtant, le regard bleu était toujours aussi opaque ; même si j’y voyais une petite intrigue dans l’accent de ses sourcils. *Montmort*.
La politesse classique glissait vers la curiosité de l’esprit, au moins un peu.

— Je suis encore une sorcière de premier cycle, articulais-je tout en posant ma baguette sur le bureau, à côté de ma main écrasée par moi.

Mon regard ne quittait pas le bleu.
J'essayais d'y capturer la moindre petite information. « J'ai été absente toute l'année dernière, j’ai donc redoublé avec beau… ». Et si j’utilisais un joli mot ? Ça allait sûrement lui plaire. « …avec une pléthore de temps à rattraper, Professeure Montmort ». J’essayais de me tenir droite, sans tanguer. Et l’impression de connaître depuis longtemps le visage me faisant face ne s’étouffait pas.

Son bleu était jeune, d'une couleur très différente des autres professeurs. Est-ce qu’elle était réellement jeune ou ce n’était qu’une illusion ? Je ne pouvais pas vraiment trancher.
Son coloris était bien plus proche du mien que des Autres professeurs, même s’il restait foutrement opaque. *Montmort*. Ma concentration diluait le tourbillon miniature de mon bassin. J'avais envie de me rapprocher encore plus du bleu, mais la simple idée de laisser la gravité prendre le relais dans mon dos me retirait toute envie de m'avancer.

Alors j'attendais l'amoncellement du temps, stoïque.

L'attitude de l'élève laissait Elina un peu perplexe. Elle semblait en proie à un tourbillon de pensées diverses. Charlie donnait l'impression de vraiment se sentir mal. La main sur laquelle elle s'appuyait commençait à blêmir à cause du poids qu'elle devait soutenir. Alors que la Gryffondor évoquait son absence de toute une année, des infos à ce propos revenaient à la mémoire d'Elina. Elle avait bien eu vent par ses collègues d'une élève qui avait été hospitalisée. Elina venait alors tout juste de débuter en tant que professeure et, avec tout ce qu'il s'était passé en novembre de cette année-là, cela lui était quelque peu sorti de l'esprit. C'était pour ainsi dire les premiers cours qu'Elina dispensait à Charlie, mais grâce au tournoi qui avait eu lieu avec les élèves chinois,la jeune professeure se souvenait de son nom. C'était le premier cas, à sa connaissance, de redoublement à Poudlard. Quelles que soient les raisons qui avaient causées son hospitalisation, cela avait dû être d'autant plus sérieux si cela l'avait empêché de suivre des cours par correspondances pour éviter de prendre du retard.

« Vous devriez vous asseoir miss. Vous n'avez pas l'air de vous sentir bien. Vous êtes sure que ça va aller ? »

Elle n'avait pas répondu à sa question à propos du retourneur de temps. La jeune fille avait-elle l'idée folle de se servir de ce genre d'outil pour rattraper le temps perdu ?  Quand bien même elles auraient un retourneur de temps à disposition, cette méthode comportait trop de risque pour le peu d'avantages que l'on pouvait en tirer.

« La direction vous a-t-elle donné des instructions particulières pour votre programme de cette année ? »

Puisqu'elle avait été intégrée aux cours des élèves de troisième année, le plus simple aurait été pour Charlie de continuer sa scolarité avec cette promotion. Cependant, il semblait que son ambition était de rattraper son retard. Ce n'était certainement pas la solution de facilité, mais c'était un objectif d'autant plus louable. Cependant la jeune femme était un peu inquiète. La jeune sorcière ne semblait pas particulièrement en forme pour s'atteler à une tâche de cette ampleur. Se surmener était rarement une bonne idée quand on sortait tout juste de l'hôpital.

Toutes mes excuses pour l'attente.

— Vous devriez vous asseoir miss.

Et le tourbillon qui avait perdu de son opacité s’intensifia brusquement. Me rappelant sa présence — aux tréfonds de mon bassin — en me hurlant qu’il était bien LÀ. « Vous n'avez pas l'air de vous sentir bien ». *C’est vrai*. Même si je ne voulais pas qu’elle le remarque, elle avait tellement raison — pour plein de raisons.
Mon regard s’envola soudainement vers un petit craquement que j’avais entendu, tout là-bas. Une petite flamme, qui avait sûrement consommé un peu fort sa brindille. *’s’en fous*. Ma concentration retourna sur ma professeure.
Je devais me focaliser que sur elle, et pas sur tout ce qu’il y avait autour.

— Vous êtes sûre que ça va aller ?

*M’asseoir*. Il fallait arrêter ça !

— Ça va, lui soufflais-je simplement alors qu’elle reprenait déjà la parole. « La direction vous a-t-elle donné des instructions particulières pour votre programme de cette année ? ». D’un mouvement que j’essayais de faire aussi lentement que naturellement — sans grimacer — je m’assis sur le tabouret le plus proche, à ma droite. J’aurais préféré me rapprocher de son regard, mais la Douleur était trop présente pour l’instant. *Foutue ! Au pire moment !*. Je ne savais pas pourquoi elle était si forte, d’un coup. *Arrête d’y penser*. Et d’un seul coup mental, un tourbillon aqueux dilua la présence de la Douleur.

J’expirais sans trop en faire, tout en posant mes coudes sur la table. Mon regard n’avait pas quitté celui de Madame *Montmort*. Et la boucle avait disparue, pour l’instant. Oubliée. *Disparait*.

— Oui, Madame la Directrice m’a dit que je devais rattraper mon retard de… une seconde de réflexion, je n’avais pas vraiment envie de le dire, mais je préférais être honnête, de Septembre.

Mais ça n’était pas ce que je voulais ; ce n’était pas assez.

— Alors j’ai lu plusieurs choses sur les objets magiques de temps.

Des choses dont je ne comprenais absolument rien. *Insupportable*. « Mais j’pré… je rattrape vite ma langue, je préfère vous… » *Vous quoi ?*. Sa façon de regarder. Juste ça. « Juste demander conseil à quelqu’un comme vous ».

Mes mains étaient posées l’une sur l’autre, et mon regard allait d’un œil bleu à l’autre. *Montmort*.

Elina observait la jeune fille avec une certaine inquiétude qu'elle s'efforçait de ne pas laisser paraître. La jeune Rengan s'assit péniblement, affirmant de manière peu convaincante que ça allait. La professeure en était à se demander s'il n'y avait rien de plus que l'infirmier de l'école pouvait faire pour atténuer la douleur physique que la Gryffondor semblait ressentir. La magie avait de nombreuses applications. Si elle ne pouvait rien faire pour Charlie, c'est que son cas devait être complexe.

« C'est certainement plus sage miss. La magie qui touche au temps est dangereuse et délicate. Elle apporte plus de problème qu'elle n'en résout. »

Sans compter que les artefacts magiques permettant d'influer sur le temps avaient, à sa connaissance, tous été détruits. Sans compter que les matériaux nécessaires à leur confection, déjà rares lors de la création de ces artefacts, étaient désormais introuvables. Elle n'était pas une spécialiste de la question, mais elle doutait que l'on puisse y faire quoi que ce soit. Tout du moins c'était au-delà de ses compétences.

« Vous allez devoir travailler plus dur que vos camarades si vous voulez rattraper votre retard sans en prendre davantage avec les cours que vous suivez actuellement. Si je peut vous aider, je le ferais avec plaisir. »

Charlie n'avait pas été choisie comme binôme par l'un des élèves chinois pour rien lors de leur venue à Poudlard. La Gryffondor était une sorcière prometteuse dès le départ. Peut importe le temps que cela prendrait, elle serait capable de rattraper son retard si c'était ce qu'elle voulait. Elina ne savait pas exactement de quoi la jeune fille aurait besoin de sa part, mais si elle pouvait l'aider, elle le ferait.

Son regard m’en disait, des petites choses. Minuscules, que j’arrivais à accrocher et à aligner bout à bout. Il y avait des trous partout dans mon alignement, mais une forme s’en dégageait quand même : dans son bleu, des questions étaient en train de se baigner. Je n’en connaissais ni la force, ni le contenu. C’était des questions, c’était tout ce dont j’étais sûre. Bonnes ou mauvaises questions ? *J’sais pas*. J’allais bientôt savoir.
Je me concentrais tellement que j’avais l’impression de m’approcher de Miss *Madame* Montmort sans bouger.

— C'est certainement plus sage miss.

*Vous…*. Elle avait déjà pensé à m’aider ? Elle… « La magie qui touche au temps est dangereuse et délicate ». La descente était aussi violente que la montée. *Merde*. J’expirais longuement.
*Montmort* parlait de la magie du temps, mais ce n’était pas ce qui m’intéressait ; pour l’instant. Mes dents se serraient. « Elle apporte plus de problème qu'elle n'en résout ». La grimace de mon esprit ne devait pas apparaître. Surtout pas. Je n’aimais pas ses mots-là ; j’avais l’impression qu’elle me mentait. *’y a rien*. Et ses yeux bleus étaient toujours aussi opaques, sans être repoussants. Fermés, mais attirants.
J’attendais.

— Vous allez devoir travailler plus dur que vos camarades si vous voulez rattraper votre retard sans en prendre davantage avec les cours que vous suivez actuellement.

*J’sais*. J’y avais déjà réfléchi. Ça faisait plusieurs mois que je ne faisais que réfléchir, et que je n’en pouvais plus d’autant réfléchir sans jamais pouvoir agir. *J’suis là*. Maintenant que Poudlard était à nouveau mon chez-moi, je n’allais pas perdre une seule seconde. Je devais faire vite.
Ma bouche commença à s’ouvrir lorsque je remarquai ses lèvres qui s’agitaient encore une fois. « Si je peux vous aider, je le ferais avec plaisir ». *Avec plaisir…*. C’était ce que disaient tous les Adultes. *’veut m’aider…*. Le plaisir était partout pour eux, mais pour une fois, ça ne me dérangeait pas de l’entendre. *Enfin*. Parce que je n’avais qu’une seule envie qui me ravageait le crâne : savoir tout ce qu’elle savait. *Montmort*. Et elle venait juste d'accepter de me donner un peu de son temps.
J’avais réussi.

Comme un réflexe, je baissais un peu ma tête en signe de reconnaissance. « Et je viendrais avec encore plus de plaisir ». J’articulais lentement, aussi clairement qu’une formule compliquée ; sans quitter son regard bleu, plus beau que jamais en cet instant.
*Doucement*. Même si je m’emballais trop vite. *Juste un peu*. Je rattrapais ma langue, encore une foutue fois.

— J’veux dire… *Articule !*, quand vous aurez un peu de temps pour moi.

Un léger sourire étira mon visage. Dans cette lumière dorée d’un soleil couchant.

Charlie l'écouta en silence sans qu'Elina puisse dire exactement a quoi elle pouvait bien penser. La jeune fille était plutôt difficile à lire, mais cela n'avait pas grande importance. Tout ce qui importait, c'était la demande de la jeune fille et son envie d'avancer. La Gryffondor fini par acquiescer doucement a ses paroles, affirmant qu'elle viendrait. Une réponse plutôt plaisante aux oreilles de la jeune professeure, mais en cet instant il ne s'agissait que de cela ; des paroles. Si la motivation de Charlie était réelle, elle le verrait très vite même si elle avait tendance à penser que la jeune fille pesait ses paroles. La Gryffondor ne se sentait visiblement pas très bien et Elina doutait qu'elle ait envie de passer du temps en palabres si elle n'avait pas l'intention de s'y tenir.
Pour la première fois depuis le début de leur échange, un sourire vint étirer le coin de ses lèvres. Ce sourire-là était l'expression la moins douloureuse qu'elle ait affiché durant leur discussion. Elina lui rendit son sourire.

« Fournissez-moi une copie de votre emploi du temps lors de votre prochain cours d'Histoire de la Magie ou par hibou. Je pourrais ainsi vous proposer un horaire pour un premier rendez-vous. Nous verrons à ce moment-là ce dont vous avez besoin. »

Elle aurait besoin de savoir où se trouvaient les lacunes de Charlie pour l'aider à les combler. Cependant, il lui semblait que la rouge et or n'était pas en état d'entrer dans le vif du sujet sur le champ.

« Est-ce qu'il y a autre chose dont vous vouliez me parler ? »

Elina n'était pas particulièrement pressée, mais elle avait l'impression que si elle traînait elle ne ferait qu'allonger le calvaire de la jeune fille.

Les commissures de mes lèvres étaient tirées, vers ce joli soleil bleu qui me faisait face. *Montmort*. Aussi frénétique que cette sensation tremblante qui était en train de m’envelopper les muscles, je sautais de son œil gauche à son œil droit.
Gauche. Et son regard sourit en petites stries. Droit. Des mouvements minces, presque imperceptibles. Gauche. Sans forme, incompréhensible, mais bien construit. Droit. Pas gra… Ses mots arrivaient.
Silence. C’était important ; bien plus que cette réussite.

J’écoutais parfaitement jusqu’à l’arrivée d’une suite-de-mots. *Vous proposer un horaire*. Je ne perdais pas une miette du reste, mais mon crâne restait fixé sur cette suite. Quatre petits maillons enlacés *Vous proposer un horaire*. Qui me rappelait tellement de souvenirs. Les grands Autres, les sous-sols de mon quartier, l’école d’Harmonique, mais surtout Papa et son sourire rebondi face à ces quatre maillons. *Vous proposer…*. Alors que d’autres mots arrivaient déjà.

Je laissais mes paupières cligner deux fois pour me reconcentrer sur Madame Montmort.
Elle avait raison, je n’avais rien à dire de plus. *Pour l’instant*. Juste pour le moment. Une petite aiguille s’enfonça dans ma conscience. Cette foutue torture d’Oubli. Je ne devais pas y penser, elle n’était rien, j’avais le temps. J’avais réussi. *Rien d’plus*.
D’un mouvement un trop brusque, je me relevais de ma chaise ; sans faire la moindre grimace quand mon dos hurla.
Une seconde. Je laissais ma respiration reprendre son chemin vers mes poumons, une enclume pesait dans mon buste, mais je m’en foutais. J’avais réussi. Même si, dans le soleil de bleu, je n’avais encore rien réussi du tout. *Enfin*.
J’attrapais mon manuel d’Histoire de la Magie pour le caler contre ma poitrine.
Sans quitter le regard de ma Professeure, je me rendais compte que j’avais enfin un Regard-plein-de-Magie qui m’écoutait.

— Pas du tout Madame Montmort, c’est… j’avais tellement de questions, tellement de théorie, tellement de concepts à demander ; mais ce n’était pas le moment, juste… Je n’avais pas réfléchi à ce que je voulais dire. Je ne savais pas. Et le regard ensoleillé attendait, là, que ma phrase se termine. Que nos regards en finissent, pour l’instant. *Juste*. Merci.

*D’accord ?*. Il était sorti tout seul, comme un traitre. Foutu remerciement, comme face à Maman.
Et cette même bouillie recommençait : comme si mon corps se tendait vers le haut, cherchant un appui encore plus haut que mon crâne. *Pas grave*. Je ne devais pas y faire attention.
Ce n’était pas comme si je n’avais pas eu envie de le dire.

La jeune Gryffondor sembla satisfaite de la réponse que lui donna Elina quand bien même ses expressions étaient étonnamment difficiles à lire. Mais la jeune professeure commençait à s'habituer aux personnes indéchiffrables. Brusquement Charlie se leva, gardant un visage imperturbable et récupérant promptement son manuel d'Histoire de la Magie. La jeune fille avait l'esprit assez vif pour lire entre les lignes et c'était une information plutôt engageante. Si Elina savait se montrer patiente, il était toujours plus plaisant d'avoir affaire a des élèves perspicaces. Elles seraient amenées à se revoir afin que la Gryffondor puisse rattraper son retard et ce ne serait pas chose aisée de se plier aux exigences de tout le programme. La jeune femme devrait probablement consulter certains de ses collègues sur la meilleure manière d'aborder certains sujets et certaines pratiques. Avoir été une bonne élève ne faisait pas nécessairement d'elle une bonne professeure dans l'ensemble des matières. Assimiler un savoir et être capable de le transmettre étaient deux choses bien différentes et bien souvent indépendantes.

Visiblement prête a reprendre sa route, Charlie Rengan la remercia. Semblant malgré tout la proie de multiples interrogations qu'elle choisi de laisser de côté au moins pour l'instant. Les questionnement viendraient bien assez vite.

« Il n'y a pas de quoi miss. »

Après tout, en tant que professeurs, c'était leur devoir d'aider au mieux leurs élèves à progresser. Il lui serait bien entendu impossible de faire de même pour l'ensemble de ses élèves, mais le cas de Charlie était particulier. D'autant que la jeune fille l'intriguait un peu. Peut-être aurait-elle l'occasion de voir elle aussi ce que la jeune Qiong Xixia avait senti chez la Gryffondor ?

« Je vous laisse retourner à vos occupations. Nous nous reverrons très vite. »

Elina avait encore une foule de choses a préparer. En y repensant bien, un retourneur de temps l'aurait probablement bien aidé elle aussi quand bien même elle savait que ce serait une prise de risque disproportionnée.
Fin de cette danse pour moi. Merci miss!