Lumah était inquiète.

Déjà, d'habitude, elle n'aimait pas trop les cours de potions. Toutes ces bulles, ces ingrédients étranges - comme une "queue de rat" : ça ne tentait personne -, et ces on-dit lui faisaient peur. Tenez, la dernière fois, elle avait entendu qu'un élève avait fait explosé son chaudron parce qu'il avait raté sa potion. Résultat : la petiote n'avait pas dormi de la nuit.
Ses parents lui avaient bien dit qu'elle aurait eu physique-chimie si elle avait été à l'école mordue, et elle avait pensé à un équivalent, mais en fait, non : les potions, c'était pire.

Et c'est ainsi que depuis le début de l'année, la petite albinos ratait tout ce qu'elle entreprenait en potions : de la préparation des ingrédients, au touillage. Ses notes en suivaient, et elle avait obtenu des piètres, un troll, enfin bref : un traumatisme.
Pourtant, la professeure n'était pas méchante, mais aux yeux de Lumah, tout dans cette salle était contre elle, et tout était digne d'un film d'horreur.

Quel choc quand la professeure avait annoncé que le prochain sujet serait la pimentine ! Lumah avait fait des recherches à propos de ce nom qui ne sonnait déjà pas bien dans ces oreilles à la bibliothèque, et voilà ce qu'elle y avait trouvé : "Potion qui soigne le rhume, mais qui ayant pour effet secondaire de faire fumer les oreilles pendant plusieurs heures."
Désastre, miséricorde, cataclysme, catastrophe, précipice et ruine ! Lumah en avait fait des cauchemars, ou elle se voyait en train de fumer des oreilles et de faire comme dans les dessins animés : rebondir grâce à sa fumée, comme les enfants qui sautaient grâce à l'eau éjectée par la baleine.

La blondinette entra donc dans la salle, avec ces mauvaises images en tête. On lui annonça que c'était un travail où plusieurs élèves seraient sur une même table ; la petiote s'installa donc à une place, sortant son matériel, en se disant qu'elle partagerait sa maladresse avec d'autres élèves qui seront bien obligés de la supporter - contre leur gré-.

Lumah regardait, perplexe, sa camarade de table. Faites qu'elle soit douée bon sang de bonsoir, je suis dans la mouise sinon... Faites qu'elle soit douée. Mais la longue hésitation de sa coéquipière en disait long, ou en tout cas n'avait rien de rassurant ; on pouvait penser le contraire ! La blondinette resta un peu étonnée du temps qu'elle dû attendre afin de savoir enfin le nom de sa voisine. Hestia. Cette même Hestia se pencha sur le livre qui ne ressemblait plus réellement à un livre, si ce n'était qu'à un tas de feuilles légèrement brulées sur les bords, tachées et sales ; en tout cas, il n'avait certainement pas l'apparence qu'il avait au début de son existence, celle de beau livre exposé, prêt à vivre une jolie vie et à aiguiller son utilisateur. Il ne servait à rien pour Lumah, concrètement, puisqu'en fait, quoi qu'il fut dit dessus, la pouffy ne le réussissait malheureusement pas. S'il avait eu la moindre conscience et une vois, il aurait soupiré, puis aurait fini en larmes ; mais à penser cela, Lumah se donnait mal au coeur. Pourquoi était-elle si peu douée, pourquoi ? 

Un regard à la rouge. Hestia semblait profondément douter. Lumah espérait de tout coeur que ce n'était pas sur son talent non-né, parce qu'il n'y avait pas à se creuser la tête, elle n'en avait pas. Pas le moindre.

Lumah devait avoir une tête véritablement inquiète.

« Je me débrouille... »

Et elle n'en devint que plus. Comment, ça débrouiller ? Et zut. Lumah déglutit et sourit simplement, histoire de faire croire que ce n'était pas grave et que tout irait pour le mieux. Même si au fond elle savait perpétuellement que chacune des séances de pratique de potions qu'elle avait effectuées et effectueraient finiraient obligatoirement en catastrophe. Comme ça avait été le cas depuis le début d'année.

« Ç-ça devrait aller, alors ! » dit-elle d'une voix qu'elle voulait assurée. Mais elle ne l'était absolument pas. Si son ressenti avait été réel, trois litres de sueur lui auraient soudainement coulé du front.

Lumah regarda le manuel, puis la professeur, pour ensuite jeter un regard en coin à sa coéquipière. Il fallait commencer, visiblement, et Lumah en avait un noeud au ventre. Elle ne pouvait même pas ne serait-ce que positiver, puisqu'elle savait pertinemment que quoi qu'elle fasse et quoi qu'elle pense, le résultat serait le même ; indéchiffrable, désastreux, et non conforme à la demande du professeur et à la description du manuel.

Elle prit une grande inspiration et se retroussa les manches. Ready, set, go.

« Tu te sens capable de remplir le chaudron d'eau à moitié ? » Demanda Hestia.

Lumah la regarda, implorant d'ores et déjà son aide. Non, non. Même ça, elle le ratait. Mais elle prit un air un peu plus sûr et répondit simplement.

« Euh, oui, oui ! »

Sa camarade montrait le lavabo près du bureau de la professeure, et Lumah suivit instinctivement son main du regard. Misère, si la professeure la voyait rater cette étape, elle aurait une opinion désastreuse d'elle ! Si ce n'était pas déjà le cas, d'ailleurs.

« Moi, je vais... » Commença la rouge.

Lumah regarda à nouveau la brune. Elle va ?

« Tu vas ? » Elle en mettait du temps, à finir sa phrase.

« ... M'ouais, je vais.. Rester ici pour s'assurer que personne ne vole nos affaires ! »

Lumah acquiesça, approuvant l'idée de sa camarade, naïvement. Elle saisit le chaudron et se tourna une dernière fois vers sa voisine pour lui annoncer :

« Bonne idée ! Je vais remplir le chaudron entiè-à moitié, euh... Ouais, ben j'y vais, quoi. », se corrigea Lumah, de justesse, avant de déguerpir vers le lavabo.

Une fois plantée devant, elle se tortilla une mèche de cheveux, perplexe. Et zut. Elle avait déjà oublié. Ah non ! C'était un tiers, c'est ça ? Oui.
Elle tourna la poignée et l'eau coula dans le chaudron, puis le débit s'arrêta, dès que l'eau eut atteint les un tiers de la potion, Lumah ayant tourné la poignée dans le sens inverse.
Elle saisit ensuite à nouveau le chaudron et le ramena pour le poser sur la table où était assise Hestia.

« C'est fait ! Du coup maintenant il faut rajouter de-euh... De l'huile essentielle d'eucalyptus, je crois. Tu veux t'en occuper ? » proposa Lumah, espérant de tout coeur que la brune accepterai ; c'est qu'elle ne voulait pas que la potion soit entièrement ratée, surtout.