Le monstre invisible PV
Quarante-quatre plats disposés sur la table des Poufsouffle. Au moins. S'il y avait bien une qualité que l'on devait reconnaître à Poudlard, c'était que ses élèves ne risquaient pas de mourir de faim.« Tu sais quoi, Maïka ? Ça commence à bien faire. »
Cette voix assurée fit sursauter Maïka qui, dans la lune, n'avait même pas remarqué que quelqu'un s'était dirigé vers elle. La Poufsouffle tourna la tête et vit qu'Aurora Jackson, une Gryffondor qu'elle avait rencontrée lors de son premier jour, était en train de s'installer à sa droite, se servant tranquillement parmi les victuailles proposées aux Poufsouffle.
« Salut. Tu es au courant que t'es à la table de Poufsouffle ? »
Imperturbable, Aurora se servit un verre de jus de citrouille.
« Ouais, je m'ennuyais chez Gryffondor. Enfin, en fait, c'est surtout que j'avais un truc à te dire. »
Maïka n'était qu'à moitié surprise par cette réponse ; Aurora avait toujours des trucs à dire à tout le monde. Elles ne se connaissaient que depuis deux semaines mais Maïka avait l'impression d'avoir déjà cerné Aurora ; elle était assurée, curieuse, franche, bavarde, et surtout très attachante dès lors qu'elle avait décidé de vous apprécier. Allez savoir pourquoi, Aurora semblait avoir décidé qu'elle apprécierait Maïka, ce qui la rendait très sympathique aux yeux de la Poufsouffle.
« Ah. Alors, qu'est-ce qui commence à bien faire ? »
Pendant qu'elle avait posé sa question, Maïka s'était levée pour se servir un peu de ragoût anglais. Elle s'était ensuite assise, puis relevée sans raison, comme si elle avait voulu observer quelque chose ou quelqu'un à l'autre bout de la table, puis s'était rassise.
« Le calmar, expliqua Aurora en coupant son poulet sous le regard étonné de deux Poufsouffle qui se demandaient ce que cette fille à la cravate rouge faisait là. Ça te saoule pas, toi, tout ce qui se dit sur cette bête ? »
Maïka essaya de fouiller dans les tréfonds de sa mémoire, mais rien n'y faisait. Tout ce qu'elle avait entendu sur le calmar de Poudlard, c'est qu'il vivait dans le lac, et elle ne voyait pas en quoi cette information était agaçante.
« Heu... Qu'est-ce qui se dit sur le calmar ? »
– Bah, qu'il est géant, impressionnant, incroyable ! Maïka, il est temps qu'on voie ça de nos propres yeux. T'es pas d'accord ? »
Maïka en lâcha presque ses couverts. Elle n'avait pas la moindre envie de provoquer une bête marine géante et potentiellement dangereuse. Pourquoi les idées d'Aurora devaient-elles toujours être extrêmes ? Pourquoi ne proposait-elle jamais d'aller faire une sieste ?
« Voir le calmar ? Mais pour quoi faire ? »
Aurora eut l'air scandalisée par la réponse de sa camarade.
« Quel manque de curiosité ! On comprend pourquoi t'es pas à Serdaigle. »
Maïka haussa les épaules. Sa maison lui convenait très bien et elle ne pensait de toute façon pas que la curiosité soit une qualité. Pas quand elle vous poussait à vouloir titiller une créature géante, en tout cas. D'ailleurs, Aurora semblait en désaccord avec elle-même, puisqu'elle ajouta :
« Ce qui n'est plus mal, quand t'y penses... À Serdaigle, t'aurais du te coltiner Marvin. L'horreur. »
Marvin Orchard, c'était un garçon qu'elles avaient rencontré sur la barque qui les avait conduits à Poudlard, le soir de leur arrivée. Il avait eu le culot de s'en prendre à Serpentard, ce qui n'avait pas du tout plu à Aurora qui vénérait presque cette maison - ce qui expliquait d'ailleurs le fait qu'elle se plaignait régulièrement d'être à Gryffondor. Maïka, elle, n'avait rien contre Marvin, même s'il semblait doté d'une sacrée fierté.
« En fait, je crois que t'es bien à Poufsouffle, continua Aurora. Tu sais, quand j'y pense, je me dis que tes troubles n'ont rien à voir avec ta personnalité. En fait, si on regarde que ton caractère, tu t'enflammes jamais, t'es même un peu trop gentille. J'comprends pourquoi le Choixpeau t'a placée à Poufsouffle. C'est ton histoire d'hyperactivité qui te rend insupportable. Bah, au moins, ça nous fait un point commun. »
Elle soupira et ajouta, d'un air théâtral :
« C'est juste que moi, j'ai pas besoin de troubles bizarres pour être hyper énervante.
– C'est vrai, ça. »
Aurora avait avalé son repas à la vitesse de la lumière. Elle était motivée par son projet fou et, pire, elle semblait décidée à mêler Maïka à cette affaire. Se levant promptement, elle s'exclama :
« Bon, allez, on y va ! »
– Oh non ! Aurora, non ! »
Souriante, l'élève de Gryffondor tira sa camarade par la manche en l'imitant :
« Ah si ! Maïka, si ! »
Finalement, elle se résigna, finit rapidement son ragoût et se laissa entraîner hors de la Grande Salle. Tant pis, elle accompagnerait Aurora jusqu'au lac et la laisserait tenter ses expériences. En cas d'apparition de la créature, elle courrait. C'était un bon plan.
Arrivée à destination, Maïka se mit à tourner autour de l'étendue d'eau, faisant semblant de réfléchir à un moyen d'attirer le calmar à la surface. En réalité, elle ne faisait que se dégourdir les jambes, parce que bouger lui faisait du bien. Aurora, de son côté, avait commencé à jeter quelques pierres dans l'eau, essayant de guetter une réaction parmi les fonds marins.
Moins présente.