Kyana venait de sortir de son cours de Défense contre les Forces du Mal. Et la première chose qui lui vint à l'esprit, lequel était embrumé depuis la fin de la matinée à cause de la chaleur, fut de se rendre dans le parc. Elle n'avait rien prévu, la journée était presque terminée et les vacances arrivaient, et elle se sentait de plus en plus fatiguée. Elle décida donc de quitter le château qui, bien qu'il fut agréable de s'y reposer, à l'abri de la trop forte chaleur, commençait à être quelque peu... lassant. Après avoir fait un détour par son dortoir afin d'y déposer ses affaires de cours et d'y prendre son livre, lequel était intitulé Nous Sommes l'Etincelle, elle descendit dans le parc, cherchant un endroit à l'ombre d'où elle pourrait tranquillement continuer sa lecture. Après quelques minutes d'observations attentives, elle finit par trouver un grand arbre, un saule pleureur près duquel peu d'élèves était assis. Elle s'approcha, puis s'assit un instant plus tard, le dos appuyé contre le tronc. Elle espérait ne pas être dérangée, chose qui, bien que peu probable, risquerait de l'irriter au plus haut point.




Décidément, ce livre était l'un des plus magnifiques qu'elle ait jamais lu. Il était si poétique, si agréable à lire ! Cette réflexion la fit plonger dans un souvenir. Un souvenir qui remontait à plus de trois ans, avant que tout ce bazar ne mette fin à son amitié si complice avec Maë. Elles étaient assise sur le lit de Kyana, chacune tenant un petit cahier dans ses mains. Les pages du premier était quadrillées de lignes et de colonnes sur lesquelles la petite fille faisait courir son stylo, l'ai concentré, tandis que celles du second étaient vierges. Maë dessinait, son crayon de papier glissant sur la feuille, s'arrêtant parfois pour réfléchir ou gommer tel ou tel détail qui ne lui convenait pas. Elles étaient absorbées dans l'invention de leur livre. Maë faisait la couverture et les illustrations, Kyana les textes.
Deux ans plus tard, elles avaient abandonné cette idée qui, si elle leur avait paru extraordinaire au premier abord, s'était révélée peu concluante. Kyana avait continué à écrire, sa soeur à dessiner, mais elles n'avaient plus mis en commun leurs passions.
Elle sourit. Comme elle aurait aimé que Maë soit là, en ce moment ! Mais c'était impossible. Elle ne possédait pas de pouvoirs magiques, n'avait pas reçu sa lettre d'admission et s'était même mise à haïr le monde des sorciers. Il allait donc falloir que la petite fille se débrouille sans sa jumelle pour le restant de l'année, et elle comptait bien lui prouver qu'elle en était capable. Mais en attendant, il fallait qu'elle termine ce livre pour pouvoir le rendre à son propriétaire d'ici quelques jours. Elle se replongea donc dans sa lecture, toujours aussi impressionnée par la qualité de l'écriture de son auteur.

Trinity sortit de son cours de Métamorphose, furieuse. Encore un P. Un P ! Une note pareille alors qu'elle avait tout donné dans ce devoir la rendait folle de rage. Elle qui avait dû renoncer à écrire à sa famille et était restée un week end entier dans la salle commune des Serpentard pour le finir, ce maudit devoir ! Un week end où le soleil brillait, où elle aurait pu sortir, voir ses amis et s'amuser, eh bien non. Elle avait récolté un P. Et dire qu'elle allait devoir annoncer ça à ses parents...

- Ils vont encore me dire que je suis la honte de la famille !

Dans sa colère, elle oublia la moitié de ses affaires, mais courut tout de même vers le parc, espérant se retrouver seule pour expulser toute sa rage.

Sa colère aurait pu sembler exagérée, si seulement ce n'était pas la quatrième fois qu'elle avait un P en Métamorphose. Toute sa famille avait été excellente à Poudlard, surtout son frère, à Serdaigle. Lui, recevait des O à chaque devoir, ou presque.

Trinity déboucha sur la pelouse, le soleil l'éblouissant. Elle continua pourtant de courir, plissant les yeux pour tenter d'y voir quelque chose.

Elle entendit un garçon lui dire de s'arrêter, puis sentit un choc violent et se retrouva sur le dos, le souffle coupé, ses affaires éparpillées autour d'elle et son P voltigeant pour finalement se poser sur sa tête.

Trinity se releva rageusement et invectiva celle qu'elle avait percutée.

- M'enfin, tu peux pas faire attention ?! Ma parole, ce que les Serdaigle sont tête en l'air ! Reste pas plantée là, aide moi !!!

Trinity se releva rageusement, ses yeux lançant des éclairs...

Eh, jvous jure que jsuis pas comme ça dans la vraie vie !

Noah était adossée à un des murs du château, les mains dans les poches. Le soleil dardait ses rayons sur lui, et ses yeux semblaient transparents. Le temps chaud ne le dérangeait aucunement, bien au contraire. Il aimait sentir les rayons de soleil sur sa peau, lui qui avait toujours vécu dans la pluie et le mauvais temps.

Les yeux observateurs, son regard scrutait les moindres recoin du parc. Tout était calme en cette fin de journée. Puis, Noah vit une tête qu’il reconnaissait traverser la pelouse à pas furieux, le regard colérique. Il regarda Trinity se mouver droit vers une autre jeune fille, qu’il ne connaissait pas, comme si elle ne la voyait pas. Noah courut vers elle, essayant de lui éviter un choc qui sera sûrement très violent.

« Trinity ! Arrête toi ! »

Noah grimaça lorsqu’il vit Trinity tomber par terre, le souffle coupé. Il ne fit pas plus attention à l’autre fille, et se dirigea en courant vers son amie. Qui elle, se relevait déjà furieusement, râlant contre celle qu’elle avait percuté.

« Trinity, calmes-toi ! Donnes-moi ta main ! »

Malgré ses yeux qui lançaient des éclairs, Noah prit sa main et la fit relever. Il se baissa ensuite pour ramasser ses notes éparpillées. En faisant cela, Noah vit l’un de ses contrôles. Un P, récent. « Aie.. c’est donc pour ça.. »

Il ne fit pas plus de commentaires et lui donna ses notes, tout en lançant un regard désolé - mais pas trop - vers l’autre fille. Puis il regarda Trinity, inquiet.

« Est-ce que ça va ? »

Enfermée dans la bulle dans laquelle elle se réfugiait lorsqu'elle lisait, Kyana n'entendit pas le garçon crier. Ce ne fut que lorsqu'elle sentit le choc qu'elle émergea de sa torpeur, juste à temps pour entendre la fille qui venait de la percuter l'invectiver.

Trinity n'était pas stupide. Ni aveugle. Elle avait remarqué les regards convergeant sur sa feuille. Un regard de compréhension pour Noah, de moquerie pour l'autre. Elle reprit d'un coup sec son devoir raté et le fourra dans son sac. Cette fille se moquait d'elle ? Très bien, elle allait en payer les conséquences.

Trinity s'apprêtait à parler, quand elle remarqua de la ... pitié ?! Sur le visage de la Serdaigle...

Aussitôt, elle vit rouge. Personne, personne n'avait le droit d'avoir pitié d'elle. Elle était une Serpentard, fière et hautaine. Elle n'avait peut-être pas le niveau intellectuel de la fille en face d'elle, mais ce n'était pas avec des bouquins et des mentions aux examens qu'on réussissait à se faire respecter.

Trinity pensa "Elle croit m'impressionner, elle, avec son regard méprisant ? Elle qui a osé avoir pitié de moi ? Elle croit qu'elle a le droit de me parler sur ce ton ? Mais pour qui se prend-elle ?!"

Elle rejeta ses longs cheveux noirs en arrière, jeta son sac sur le sol et s'avanca rapidement vers elle. L'autre fille eut l'air surprise, mais ne recula pas. Trinity lui glissa à l'oreille, d'une voix venimeuse :

- Fais attention à toujours regarder derrière toi, une Maximoff ne laisse pas impunément une simple Serdaigle la traiter ainsi. Ce ne sont pas tes bouquins et tes bonnes notes qui te sortiront de cette situation là. Et, une dernière chose : ne t'avise plus jamais de me regarder ainsi. Je suis un serpent, agile et fier et pas un pauvre reptile apeuré et sans défense. La pitié, c'est pour les faibles. Mais, peut-être en es-tu une, après tout ?

À ces mots, l'autre fille se crispa. Cela n'avait pas l'air de lui plaire, "et tant mieux", pensa Trinity, satisfaite. N'est pas né celui qui osera résister à un Maximoff.

-Maintenant, pousse toi. Il y en a qui passent.

Elle pensa un instant qu'elle pourrait sortir sa baguette et lui lancer un sort, mais rejeta aussitôt cette pensée, prenant comme argument qu'elle n'oserait pas.

Lorsque Trinity reprit sèchement ses feuilles, sans un regard pour lui, Noah soupira, et se passa la main dans les cheveux. Il n’hésita pas à parler, lui qui avait appris à être toujours honnête.

« On dit merci Trinity, ça ne coûte rien.. »

Puis Noah ne sût ce qui se passait, que lorsqu’il vit la Serdaigle regarder son amie les yeux pleins de moquerie et de pitié. Il ferma les yeux quelques secondes, se disant que ce pétrin est loin d’être terminé. Noah redouta le pire lorsque le visage de Trinity ne devint plus que fureur. Elle s’avança vers l’inconnue, après avoir jeté son sac par terre. Noah se retenait d’aller la retenir. Il préférait rester en dehors du conflit. Et lança un autre regard désolé à l’inconnue.

Noah entendit nettement ce que disait son amie. Et ses sourcils se froncèrent. Son ton venimeux faisait froid dans le dos. Il n’appréciait pas ni sa façon de faire, ni sa façon de parler. Il ne la pensait pas aussi hautaine. Pourtant, il mit cela sur le coup de la colère, et jugea préférable d’aller apaiser la situation, qui pouvait dégénérer à tout moment. Il se dirigea lentement vers elles, et posa sa main sur l’épaule de Trinity, essayant de paraître le plus amical possible.

« Elle ne t’as rien fait, tu sais. Ce n’est pas bon de lui en vouloir pour rien. »

Son sourire était hésitant, et l’on voyait à son air qu’il craignait d’avoir été trop loin. Peut-être, aurait-il mieux fait de rester en dehors de tout cela.

Le garçon rendit à son amie ses notes, et après un instant de silence lui reprocha son manque de politesse. La peste, après avoir rejeté ses cheveux d'ébène avec un geste digne de sa condition de fille imbue d'elle-même, s'approcha de Kyana en la toisant. Elle se baissa, et lui chuchota à l'oreille d'une voix menaçante :

Le petit sourire qui avait failli apparaître sur son visage disparut aussi vite qu'il était apparu. Elle se crispa encore plus lorsqu'elle entendit la remarque blessée de Noah, et davantage aux paroles de la fille.

La haine qu'elle avait pu ressentir n'était plus. A la place se trouvait seulement un vide immense, qu'elle avait tenté de combler en vidant son sac. Décidément, elle ne savait toujours pas bien réagir face aux situations. Elle sentit des regards peser sur elle, après la réplique de la fille de Serdaigle. Une remarque qui ne lui avait pas du tout plu. Comme les autres, d'ailleurs.

Mais, Trinity ne s'occupait pas de ça. Elle songeait plutôt à ce qui l'avait conduite à réagir ainsi. Peut-être la fureur de ses parents, ou sa solitude de presque toujours.

Tri avait des amis, Noah par exemple. Seulement, elle n'avait jamais su entretenir les amitiés. Elle commettait tout le temps des bourdes phénoménales, qui conduisaient ses amis à ne plus vouloir lui parler.
"Et, on dirait bien que je viens d'en commettre une, de bourde..." pensa la jeune fille, tiraillée entre la fureur et la tristesse.

"Mais qui peut comprendre cela ? Qui peut comprendre ce qui se passe en moi, et pourquoi je réagis ainsi ? Personne, pour le moment... J'en ai assez de passer pour la peste imbue d'elle même que je laisse paraître de temps en temps. J'en ai marre de devoir me disputer avec tous pour garder mes distances. Personne ne comprend que ce n'est que par sécurité que je ne veux pas réagir correctement et parler poliment."

Trinity l'avait pensé, tout ça. Bien évidemment, elle était trop fière pour le dire à haute voix, et ne voulait pas paraître faible...

Elle tourna le dos à la fille, se mettant en face de Noah. Ses yeux brillaient de larmes.

- Désolée, ce n'est pas une bonne journée, mais ce n'est pas une raison pour te traiter ainsi. Merci.

Puis sans un regard en arrière, elle s'enfuit vers le château, des larmes coulant sur ses joues.

Les yeux dans le vide, Trinity semblait plongée dans ses pensées. Toute trace de colère avait quitté son visage et ses yeux se remplissaient de larmes, au fur et à mesure que ses trait s’emplirent d’une apparente tristesse. Le regard larmoyant, la jeune fille se retourna, faisant face à Noah, qui avait toujours la main sur son épaule. Le visage peiné, cette dernière prononça des paroles qui firent déborder le jeune garçon de compassion. Et avant même qu’elle n’ait pu faire un seul pas, elle qui voulait sûrement s’en aller vers le château, fuyant, Noah raffermi sa prise. Il ne relâcha sa poigne que quand il répondit, le sourire réconfortant.

« Ça arrive les mauvais jours et les mauvaises passes, Trinity. Je ne t’en veux pas, tu sais. Je comprends tout à fait ta situation. Or.. »

Noah tourna la tête vers la Serdaigle, qui était restée en retrait jusque-là. Il lui fit un léger coup de tête, sans se départir de son sourire. Puis il plissa les yeux et secoua la tête, désignant la Serdaigle du regard, tout en essayant de transmettre sa façon de penser à son amie.

« ..Tu t’es mal comporté avec elle. Au lieu de t’excuser pour ta froideur compréhensible, il vaut peut-être mieux de t’excuser pour tes paroles blessantes, qu’elle ne va sûrement pas comprendre. »

Kyana fut très étonnée de voir que les yeux de la jeune Serpentard se remplissaient de larmes, et son désarroi fut plus grand encore lorsque celle-ci prononça des mots que jamais elle n'aurait imaginés sortir de sa bouche. La compassion s'empara de la petite Lewis, faisant écho à celle qui transparaissait dans les yeux du garçon. Tournée vers lui, elle s'excusa, puis sembla vouloir tourner les talons pour fuir vers le château. Mais avant qu'elle ait pu esquisser ne serait-ce qu'un seul pas en direction de l'école, son ami l'attrapa par le bras en l'empêchant de fuir. Il lui dit, en souriant gentiment, qu'elle avait le droit de ne pas aller très bien, et que cela arrivait à tout le monde de passer des mauvais moments, mais après avoir jeté un petit regard à Kyana, il déclara qu'elle devrait s'excuser pour avoir prononcé des paroles que la Serdaigle n'avait sûrement pas comprises. Ce fut à ce moment là qu'elle se décida à réagir. L'ironie reparut dans son regard, et elle leur dit avec un air légèrement vexé :