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20 nov. 2017, 19:40
 RPG+  La promesse du bonheur  PV 
31

LENDEMAIN DE GUERRE


La Bataille de Beauxbâtons vit les derniers Mangemorts être vaincus par une alliance improbable de sorciers britanniques et bulgares. De nombreuses spéculations coururent au sujet de leur affrontement, mais aucune d’elles ne touchaient à la vérité. La vérité, aussi glorieuse ou sombre fut-elle, devait demeurer le secret de ses illustres protagonistes ; tout du moins pour un moment.


*

Mon bras gauche manifestait sa désapprobation. J’avais beau avoir employé tous les soins à ma portée, l’avoir recouvert d’onguent cicatricielle puis l’avoir bandé soigneusement, les brûlures que m’avaient infligé le dragon ne manquaient pas de se faire ressentir à chacun de mes mouvements. J’essuyai la sueur qui perlait sur mon front d’un revers de manche et poursuivis mon ouvrage. Le manque de sommeil avait beau rendre mes gestes lents, ma volonté consolidait leur précision. A coeur vaillant, rien d’impossible. Les elfes de maison, qui couraient dans tous les sens pour me soulager de certaines tâches, n’avaient pas été facile à convaincre. Il n’était pas dans leur nature de comprendre qu’une pensionnaire de Poudlard, qui plus est une invité d’honneur, puisse demander à confectionner le petit-déjeuner elle-même. Je louai toutefois leur aide précieuse et ne manquai pas une occasion de les remercier, consciente de l’état de fatigue dans lequel je me trouvais.

Quand je parvins devant la gargouille ensorcelée, je comptai une bonne heure et demi écoulée depuis le moment où je m’étais vêtue d’une robe cintrée de velours bleu et nouée les cheveux d’un ruban assorti avant de filer aux cuisines. Tout le château était encore profondément endormi. Même les vieilles armures disposées le long des couloirs ronflaient à en faire virevolter leur casque en fer. Ma baguette fermement pointée vers les trois plateaux que je faisais léviter devant moi, je m’engouffrai dans le passage laissé libre par la gargouille. Une fois parvenue dans le bureau de Kristen, je constatai avec soulagement qu’elle n’était pas encore au travail. Ma surprise n’en aurait que plus de saveur.

Je profitai donc de la quiétude du bureau vide pour déposer les plateaux sur une commode avant de pointer ma baguette vers le centre de la pièce pour y faire apparaitre une petite table ronde sur laquelle je disposai une nappe blanche empruntée à mes amis des cuisines. Je dressai ensuite la table, à la française, faisant apparaître divers couverts en argent et de petites assiettes en porcelaine que je plaçai précautionneusement sur la table. Je reculai ensuite pour observer le rendu final. Insatisfaite, je fis apparaître au bord de la table un vase et un bouquet de fleurs aux teintes rouge orangé.

« Voilà qui est mieux. »

Deux chaises plus tard, j’entrepris de placer à la main le fruit de mon travail acharné sur les petites assiettes en porcelaine : croissants, pains au chocolat, pains aux raisins, petites brioches, le tout dégageait une agréable odeur qui me rappela, non sans m’arracher un sourire, les petits-déjeuners de mon enfance. Je conclus les préparatifs en plaçant une tasse devant chaque chaise avant de caler le café et le thé dans deux théières distinctes. Fatiguée, je pris place face à la porte d’entrée du bureau en poussant un soupire de contentement. Mon bras gauche me faisait un mal de chien, mais j’étais résolu à garder le sourire pour ma chère et tendre. Les combats de la veille étaient encore parfaitement imprimés dans mon esprit, et je savais qu’il en était tout autant dans le sien.

La guerre était terminée. Je comptai bien profiter des temps de paix qui s’ouvraient maintenant devant nous.

Je dus m’assoupir sur ma chaise ; combien de temps, je ne le sais pas, mais le fait est que le bruit de la porte me fit sursauter. Je bondis sur mes talons en m’armant de mon plus beau sourire tandis que la silhouette de Kristen se stoppait dans l’embrasure de la porte.

« Surprise ! lâchai-je, la voix encore un peu déformée par le peu de repos que j’avais réussi à m’accorder. »
24 nov. 2017, 15:15
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La nuit avait été courte et difficile. Après avoir fait le tour du domaine, Kristen s’était lavée, pouvant faire un constat plus complet de la grosse plaie qui barrait son épaule. Elle s’était couchée et avait encore ruminé sur ce qu’elle venait de vivre, comment elle avait échappé de justesse à la mort, comment tout aurait pu s’arrêter, si simplement. Elle s’était sentie fatiguée, fatiguée de cette vie, fatiguée du monde entier.

Elle avait toujours méprisé la vie des Moldus et leur trop-plein de quotidien. Elle avait voulu d’une vie bien remplie, pleine de rebondissements, d’action. Elle ne cherchait pas la gloire. Tout ce qu’elle voulait, c’était bouger. Ne jamais rester immobile. Faire. Et maintenant, elle se demandait si c’était le bon choix : ne pouvait-elle pas simplement s’isoler dans un endroit où les problèmes n’existeraient pas ? Partir loin, partir avec elle, et vivre sans y penser.

En se réveillant, elle pensait à la même chose. C’était fait, Legallet ne poserait – normalement – plus de problèmes. Et maintenant, pourquoi ne pas tirer sa révérence, disant « mission accomplie » et adieu ? Qu’allait-il se passer, ensuite, qui viendrait encore l’épuiser et mettre le monde sens dessus dessous ? C’était sans fin. Une boucle éternelle. Comme dans ces histoires où le héros vit sans cesse la même journée, ou pas tout à fait : c’est presque la même journée, mais elle se dégrade petit à petit, c’est de pire en pire, à un détail près. Ça rend fou et on veut juste que ça s’arrête, qu’on nous fiche la paix.

Elle fixait le plafond. Pourquoi se lever ? Qu’allait-elle faire, aujourd’hui ? Ramasser les morceaux du drame d’hier soir : une gueule de bois collective. En vingt-quatre heures, tout était parti en vrille. La veille, elle s’était réveillée dans ce même lit, dans cette même chambre, en s’imaginant que ce serait une journée comme une autre. Une journée de sorcière, certes, mais une journée de cette vie qu’elle aimait à peu près. Et là, tout était différent.

Mais elle se leva quand même, parce qu’il le fallait bien.

*
**


Voilà pourquoi tout n’était pas bon à jeter.

Une surprise !, une très belle surprise. Kristen s’arrêta sur la dernière marche des escaliers qui menaient de ses appartements à son bureau et balaya la pièce du regard. Aude était là avec sa surprise : elle avait apporté un petit-déjeuner et avait mis la table, bref, elle avait fait les choses bien.

Kristen descendit la dernière marche, ne dit rien, et s’avança vers Aude, regardant la table mise. Arrivée près d’elle, elle la serra dans ses bras et enfouit sa tête dans son cou. Elle la serrait fort, sans doute trop. Son épaule lui faisait mal et Aude était aussi blessée, peut-être que cette étreinte était plus désagréable qu'autre chose. Mais elle ne pouvait pas la lâcher, il fallait qu’elle s’assure qu’elle était là, bien là, contre elle. Et qu’elle ne partirait pas, jamais.

Finalement, elle s’en détacha. La fatigue, l’émotion et peut-être l’amour lui avaient humidifié les yeux.

« Désolée. »

Elles n’avaient pas vraiment eu l’occasion de parler de tout ce qui s’était passé la veille. Tout s’était enchaîné beaucoup trop vite. Pourtant, c’était un soulagement immense de pouvoir se retrouver en se disant que tout allait presque bien pour l’une comme pour l’autre.

« Ça me fait vraiment très plaisir, dit-elle en tournant la tête vers le petit déjeuner. »

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27 nov. 2017, 12:16
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32

UNE VOLONTÉ


Á ma connaissance, rien n’était plus agréable et plus réconfortant que le simple fait de sentir Kristen entre mes bras. Mon bras gauche avait beau me faire un mal de chien, j’en oubliais presque cette douleur enquiquinante, pressée par la chaleur corporelle de ma compagne. Je me laissais aller doucement à sa présence, fermant les yeux, les narines envahies par la délicatesse de son parfum. Je raffermis l’emprise de mes bras autour de son corps pour lui signifier qu’elle était mienne et que j’étais sienne dans une avalanche de soulagement. Puis je la laissai me filer entre les doigts, un doux sourire imprimé sur mes lèvres. Je la dévorai des yeux, un peu comme si je la regardais pour la première fois, tandis qu’elle s’empressait de fuir mon regard. Les larmes qu’elle avait parfaitement réussi à contenir ne m’avaient pas échapper. Elle le savait.

« Un maigre réconfort après tant d’efforts, commentai-je en me rapprochant d’elle, bien décidée à ne pas la laisser me filer sous le nez comme l’anguille qu’elle était trop souvent. »

Arrivée dans son dos, j’appuyai délicatement mon menton sur son épaule et passai mon bras droit autour de sa taille.

« Il n’y a plus que nous, lui dis-je à voix basse avant de déposer un baiser sur son épaule couverte. Plus d’ennemis, plus de gens à protéger, plus de dangers, il n’y a plus que toi et moi. »

Je savais qu’elle pouvait sentir mon sourire irradier sa joue. Je tournai légèrement ma tête vers son visage et le contemplai sous cet angle si particulier. L’envie de l’obliger à se tourner pour que je puisse l’embrasser était terriblement forte, mais les choses n’avaient jamais fonctionné de la sorte entre nous. Je relâchai mon étreinte en caressant son ventre au passage et me déportai légèrement sur sa gauche pour lui présenter le fruit de mon travail.

« Je ne savais pas ce qui te ferait plaisir. Je sais juste que les anglais ont des goûts plutôt variés en matière de petit-déjeuner… alors je me suis décidée à te confectionner un petit-déjeuner digne de ceux que la française que je suis aime déguster de bon matin. J’espère que tu l’apprécieras autant que moi. Les elfes de maison m’ont aidé à réunir les ingrédients et surveiller la cuisson des viennoiseries, mais je les ai faites de mes propres mains. Sans magie. »

Je me laissai aller à un petit rire amusé en imaginant ce que Kristen allait bien pouvoir penser d’un repas préparé sans le moindre tour de baguette magique.

« Je te rassure, je suis plutôt douée même sans baguette magique. Tu ne risques pas l’intoxication. »

Je tournai la tête dans sa direction et lui pris la main.

« Je veux rester avec toi pour le reste de mes jours, lui avouai-je d’un ton très sérieux. Je ne me vois nulle part ailleurs. Même si cent dragons venaient à nous tomber dessus, c’est auprès de toi que je resterais. »
02 déc. 2017, 21:48
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Kristen n’était pas forcément du genre à rougir facilement, mais elle sentit le feu lui monter aux joues. Aude était particulièrement câline ; Kristen en eut même un frisson. Il n’y a plus que toi et moi… Pourquoi Kristen avait-elle droit à ce privilège, déjà ? Elle ne savait pas, ou avait oublié, ce qu’Aude lui trouvait, pourquoi elle restait avec elle. Elle se sentait largement en-dessous de ce qu’il fallait pour conquérir un tel cœur.

Il lui semblait tellement improbable de préparer un petit déjeuner sans baguette qu’elle haussa un sourcil. Elle ne croyait pas avoir déjà vu chose pareille se réaliser : quand elle était petite, c’était le plus souvent son père qui faisait la cuisine, prodigieusement bien d’ailleurs, mais il faisait toujours voler les carottes et les casseroles d’un bout à l’autre de la pièce. En temps normal, elle aurait trouvé idiot de se priver de baguette pour ce genre de tâches – on est sorcier ou on ne l’est pas ! – mais en l’occurrence, cela lui fit plaisir. Ce n’est pas seulement parce que tout ce qui venait d’Aude lui faisait plaisir par principe, mais aussi parce qu’il était agréable, un instant, de penser qu’on pouvait se tenir loin de son arme et faire les choses simplement.

Sa déclaration la fit rougir un peu plus. C’était si spontané… comment Aude pouvait-elle dire tout cela sans difficulté ? On avait beau le ressentir, le dire était autre chose. Elle baissa les yeux sur la main de sa compagne.

« Je ne veux pas te blesser, dit-elle. »

Elle eut peur de ne pas en dire assez et que ses mots soient dévastateurs par leur incomplétude. Alors, elle lui expliqua la seule chose qui lui restait encore à expliquer, à savoir que Nathan, qui avait été son fiancé et avec qui elle aurait pu passer le reste de sa vie si elle ne s’était pas détachée de cette léthargie hypocrite, n’était pas le père d’Owen. Qu’il y avait eu un autre homme, en même temps que lui, et que sur le moment elle n’avait eu aucun scrupule. Elle lui parla de sa peur de s’engager.

« Et pourtant… Aujourd’hui, je peux le dire… Je ne veux pas que tu me quittes. Installe-toi avec moi. Je veux dire, vraiment. Je pourrais faire construire… »

Elle s’interrompit tant elle se trouvait ridicule. Dans son esprit, c’était intéressant, mais oralisé, cela prenait des airs de romans à l’eau de rose du genre « partons en Italie, juste toi et moi ! ». Cela ne l’empêchait pas d’y penser sérieusement : il y aurait bien une place, quelque part à Poudlard, pour qu’elle puisse installer un endroit à elles, où il n’y aurait plus que toi et moi.

Elle s’éloigna d’elle plus vite que la délicatesse ne le permettait et rejoignit la table du petit-déjeuner.

« Des croissants, des brioches… je suis gâtée. »

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04 déc. 2017, 16:57
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33.


J’étais debout, privée de mes mouvements par un horrible sentiment d’oppression. Celui qu’on ressentait forcément dès que l’être aimé vous révélait un pan insoupçonné de son passé. Par un mécanisme traitre, j’appliquai, comme bon nombre d’êtres humains à la sensibilité exacerbée, un jugement dénué de fondements, froid et sévère, à ces évènements peu reluisants. Le « pourquoi ? » précédait au « comment une personne telle que toi a pu faire une chose pareille ? » Puis des ténèbres de cette inquisition silencieuse jaillissait, parfois, une lueur de raison… se fut mon cas. Je remuai mes doigts, les faisait se toucher pour me persuader que je ne rêvais pas et que j’étais en pleine possession de mon corps. Alors seulement après avoir réalisé que j’étais restée immobile pendant trop longtemps, je pris la place qui me revenait autour de la table. Mon sourire était forcé, j’en avais conscience, alors je m’efforçai de lui donner une courbure plus naturelle en détendant mes traits. La Kristen que je connaissais n’aurait jamais fait une telle chose, voilà pourquoi je n’avais pas à la juger. Cette histoire appartenait à une autre femme ; certes la même que j’aimais, mais une version différente de cette femme, une version plus écornée.

« Je ne connais pas Nathan, mais je suis certaine qu’il ne m’arrive pas à la cheville, dis-je en saisissant un croissant. Car si tu m’infligeais le même traitement, j’ai bien peur que tu ne puisses plus en témoigner ensuite. »

Je déchirai le croissant en savourant, les yeux fermés, la douce odeur de beurre fondu qui s’en dégageait. C’était typiquement le genre de parfum qui éveillait en moi des souvenirs lointains de ma scolarité, de ces années insouciantes où rien n’avait plus d’importance que le fait d’entamer une journée de cours l’estomac plein.

En rouvrant les yeux, je posai un regard volontairement énigmatique et pénétrant sur Kristen. Que devait-elle penser à cet instant ? Imaginait-elle un seul instant que la menace teintée d’humour noir que je venais de proférer était fondée ? Avait-elle le sentiment d’être assise devant une autre femme ? Ne pouvant soutenir plus longtemps la farce, je laissai l’amusement me déborder en riant à ma façon : un rire discret et frais, comme aimait à le qualifier Constance.

« Je plaisante, commentai-je. Tu aurais du voir ta tête. »

Rire était le meilleur moyen de détendre une atmosphère un peu trop lourde. Nous avions connu notre lot de peines et de douleurs au cours de la Bataille de Beauxbâtons, je n’avais pas organisé ce petit-déjeuner pour laisser un détail du passé me voler ma compagne. Il y avait tant de sujets que je voulais aborder, tant de choses que je brûlais de lui dire maintenant que le calme nous entourait. Quelles que soient ses peurs, j’étais déterminée à prouver à Kristen que j’étais autre chose qu’une brève lueur de passage dans son existence. Je n’étais ni Nathan ni le mystérieux père d’Owen. Je n’appartenais pas à ce passé sombre et tortueux. Je voulais être le présent et le futur. Ecrire une histoire plus lumineuse pour elle et pour moi.

Je pris une bouchée de croissant — dont le goût délicieux me procura un sentiment de fierté immédiat — en continuant de regarder cette Kristen que j’aimais tant ; d’un regard infiniment plus tendre, cette fois.

« Peu importe le passé. Il s’est écrit loin de moi, dis-je en essuyant mes doigts. Je veux que nous abordions le futur, notre futur, ici et maintenant. Si nous avons pu abattre un dragon, l’aménagement d’appartements privés ne devrait pas constituer un obstacle, tu ne crois pas ? Encore que… maintenant que j’y pense, que comptes-tu faire de l’oeuf qu’ils ont trouvé dans ses entrailles ? »
06 déc. 2017, 22:47
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Elle s’assit en même temps qu’Aude. La réaction de celle-ci à la révélation que lui avait faite Kristen fut aussi étonnante que plaisante. Kristen, d’abord surprise, s’autorisa un petit sourire amusé. Elle aimait ce côté d’Aude, sûre d’elle, sûre de ce qu’elle avait, forte et déterminée. Néanmoins, Aude dut se croire obligée de rétablir l’ordre et Kristen ne sut quoi dire. Elle était rassurée. Elle se sentait si peu fiable en relations humaines, et pourtant si désireuse de prouver à Aude qu’avec elle, tout était différent… Elle tendit d’abord sa main droite vers un croissant, puis, voyant que les cicatrices qu’elle portait depuis de trop nombreux mois ne s’étaient pas miraculeusement effacées, elle attrapa la viennoiserie de sa main gauche.

Elle manqua de la lâcher quand Aude, l’air de rien, évoqua sérieusement leur futur, leur vie commune. Elle resta stupéfaite un instant, le croissant pendu au bout de deux doigts qui tombaient d’une main molle. Elle le reposa et fit tourner sa tasse entre ses mains, sur la table.

La question de l’œuf de dragon était tout à fait sérieuse. Qu’en ferait-elle ? Par orgueil, Kristen aurait évidemment voulu le garder. Elle en aurait volontiers discuté avec Rubeus Hagrid, le très vieux garde-chasse, dont la passion pour les grosses bêtes était fort connue. Kristen avait davantage passé du temps avec le professeur de soins aux créatures magiques de son temps qu’avec le demi-géant, car alors leurs caractères étaient assez peu compatibles, mais lorsqu’elle était revenue en tant que professeur de cette même matière, Kristen avait naturellement eu l’occasion d’aborder avec Hagrid quelques sujets passionnants. Les dragons en faisaient partie.

Néanmoins, Rubeus Hagrid n’était pas connu pour prendre les bonnes décisions concernant ces grosses bêtes qu’il adorait. Il n'aurait pas aidé Kristen à être raisonnable. En fait, Kristen envisageait deux solutions sensées : remettre l’œuf - ou le dragon - aux autorités compétentes sur le territoire : elle était toujours en contact avec Nathan et sa dragonologiste (elle avait, depuis, bien compris la nature de leur relation) et ils pourraient certainement arranger quelque chose de ce côté. L’autre possibilité était de le remettre à l’école chinoise, Zhuangyán. Kristen dévissa son regard de sa tasse et regarda sa compagne :

« Je connais quelques dragonologistes. Je suppose que je devrais les contacter. »

Elle but une gorgée de thé.

« J’ai aussi pensé à Zhuangyán. »

Elle reposa sa tasse.

« Seulement, j’aurais voulu voir l’éclosion… »

Elle réfléchissait en même temps qu’elle parlait et commençait à regarder dans le vide, s’adressant finalement autant à elle-même qu’à Aude.

« Le passage éclair d’Erza Nyakane a eu beaucoup de succès… les élèves ont été très réceptifs… la découverte d’autres cultures magiques… »

Le ton de sa voix baissait au fur et à mesure. Elle haussa les épaules, reprit sa tasse et conclut plus fort :

« Ce serait intéressant de les faire se déplacer. Pour le dragon entre autres. »

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07 déc. 2017, 19:01
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34

La voie chinoise



Aude écouta attentivement les explications de Kristen en mangeant son croissant petit bout par petit bout. Elle écouta jusqu’à la fin sans émettre le moindre son, allant jusqu’à ralentir le mouvement naturel de ses mâchoires pour ne pas provoquer de bruit intempestif. Elle ne voulait surtout pas interférer dans le raisonnement de Kristen, car il lui semblait que celui-ci se déployait progressivement devant ses yeux. Kristen avait certainement réfléchi à la question au cours de la nuit, mais Aude avait le sentiment que le fait d’exposer son point de vue le rendait nettement plus vivant pour sa compagne.

La conclusion fut accueilli par un sourire réjoui. Aude avait son propre point de vue sur les dragonologistes et il n’était guère reluisant. Elle les trouvait trop… et bien trop portés sur les analyses et les tests de toute sorte. Au fond, trop inhumains. La créature qui allait sortir de cet oeuf aurait, selon elle, besoin d’être choyée, dorlotée et plus que tout éduquée de la bonne manière pour éviter de reproduire les erreurs qui avaient conduit sa mère à s’attacher à un mage noir de la pire espèce. Zhuangyán lui paressait une bien meilleure option. Les enseignants et les élèves de cette école étaient réputés pour leur bienveillance à l’égard des créatures magiques, qui plus est à l’égard des dragons qu’ils vénéraient comme des divinités.

Aude acquiesça et fit couler un peu de café dans sa tasse, un sourire complice imprimé sur ses lèvres.

« Nous savons toutes les deux que cette idée aura du mal à être délogée maintenant qu’elle a trouvé un nid douillet dans un coin de ta tête, dit-elle avec une pointe d’amusement dans le ton de sa voix. »

Elle avala une gorgée de café en gardant ses doux yeux bleus posés sur Kristen.

« Zhuangyán me semble la meilleure option, poursuivit-elle en reposant la tasse sur la table. Xixia Biao est un expert mondialement reconnu en matière de dragons. Je suis certaine qu’en lui expliquant l’origine de l’oeuf, il ne manquera pas d’éprouver de l’intérêt pour lui. Si tu te proposes, en prime, de lui en confier la garde… je gage qu’il se présentera à l’entrée du château plus vite qu’on ne l’imagine. »

La passion dévorante du doyen chinois pour les dragons était connue des onze autres directeurs et directrices d’écoles de magie reconnues par la Confédération Internationale des Sorciers. Nul n’ignorait qu’il en possédait quatre. Kristen voulait très clairement toucher la corde sensible du vénérable directeur chinois pour l’attirer à Poudlard. Aude se demanda avec amusement si sa compagne ne tirerait pas plus de plaisir que ses élèves à accueillir ce monstre sacré sous les tuiles de Poudlard. La passion qu’elle vouait aux autres cultures magiques était sans demi-mesure aussi grande que celle de son homologue chinois pour les dragons.

« Xixia Biao n’a jamais quitté Zhuangyán à ce qu’il se dit. Je crois vraiment que tu devrais lui écrire… s’il vient à Poudlard, ce sera un moment inoubliable pour tout le monde ! De plus, je suis certaine qu’il trouvera un moyen pour te permettre d’assister à l’éclosion. »

Aude piocha un pain au chocolat sur le plateau de viennoiseries qu’elle déchira en deux au-dessus de son assiette.

« En parlant d’éclosion, tu sais… elle hésita en baissant les yeux sur ses doigts. J’ai vraiment eu peur de te perdre pour la première fois de ma vie, face au dragon… ça… ça m’a terrifié… c’est pour ça que je suis entrée dans une colère noire… je crois… je te jure, je crois qu’à ce moment-là j’aurais pu rayer Beauxbâtons de la carte par désespoir. »
08 déc. 2017, 22:42
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C’était si plaisant, d’être compris. Aude comprenait Kristen, et cela faisait un bien incroyable à cette dernière. Elle avait la sensation qu’elle n’avait plus besoin de s’expliquer, que tout était clair, que tout allait de soi. Même pour les petites choses, comme cette idée de faire venir une délégation de l’école chinoise – petite chose ? vous avez compris – il n’y avait pas besoin d’épiloguer. L’idée était là, elle était bonne, Aude le savait, et voilà, c’était décidé. Nul besoin de se perdre dans de longues explications qui prenaient du temps et de l’énergie.

Kristen sourit et se dit qu’elle rédigerait très vite cette fameuse lettre d’invitation au directeur de l’école chinoise. Elle se sentait toute excitée à l’idée d’accueillir entre les murs de son école son homologue de Zhuangyán : elle pourrait aborder avec lui des sujets passionnants tout en faisant profiter ses élèves de la présence de jeunes sorciers d’autres contrées. Il faudrait aussi discuter d’un prix, car un tel œuf aurait forcément un prix… L’esprit de Kristen allait beaucoup trop vite pour le matin et elle avait déjà une idée derrière la tête. Elle y pensa en trempant un bout de je-ne-sais-quoi dans son thé, plus par réflexe que par goût.

Elle dût se rattraper pour ne pas laisser tomber le gâteau dans sa tasse. Les dernières paroles d’Aude l’avaient surprise. Elle reposa le bout de gâteau mouillé sur le bord de sa petite assiette (en fait, c’était de la brioche, et ainsi humidifiée, elle ressemblait plutôt à une éponge en décomposition). Elle releva les yeux vers Aude.

Toute la soirée d’hier lui revint en mémoire. Ce petit-déjeuner et la présence de la femme aimée avaient un instant éclipsé cette terrible soirée de son esprit. Elle fut prise d’une culpabilité immense. Comment pouvait-elle être là, mangeant des croissants et de la brioche tranquillement, pendant que des familles étaient anéanties, pendant que des sorciers, et même certains de ses collègues, voyaient leur vie basculer ? Elle se repassa le film en accéléré : tous ces cadavres calcinés, l’imminence de sa propre mort, la peur de perdre tout ce qu’elle avait de plus cher…

Elle baissa à nouveau les yeux sur son lamentable bout de brioche mouillé.

« Tu as été blessée…, murmura Kristen. »

Elle le disait à Aude et pour elle-même, comme si elle devait se faire un devoir de ne pas oublier un seul événement de cette soirée.

« Tous ces gens qui sont morts… Et le corps d’Arseni… »

C’était dans la même perspective. De quel droit se permettait-elle de penser au futur et à ses chinois alors que tout ceci avait eu lieu quelques heures auparavant ?

Elle posa les mains sur la table selon la politesse française et baissa la tête.

« Et maintenant, quoi ? »

Elle voulut ajouter quelque chose mais ne trouvait plus rien à dire.

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09 déc. 2017, 23:18
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Le devoir des vivants



Le silence qui suivit ses paroles pétrifia Aude. L’espace de cet instant, elle eut peur de ne pas avoir choisi le bon moment pour aborder ce sujet pénible. Bien qu’en vérité, elle songeait qu’il valait mieux aborder tout ça le plus tôt possible avant que la fenêtre ne se referme, une fois le petit-déjeuner bien avancé. Elle guetta donc avec appréhension la réaction de Kristen, dévorant des yeux ses moindres faits et gestes — qui s’avérèrent d’ailleurs bien peu nombreux en dehors de l’épisode de la brioche imbibée de thé. Elle chercha désespérément le contact de ses yeux, sans obtenir gain de cause, et comprit à ce simple fait que Kristen souffrait.

Aude déglutit en regrettant amèrement ses paroles car rien ne lui tordait plus le coeur que de voir Kristen la tête basse, perdue dans ses pensées douloureuses. Ces mêmes pensées qu’Aude souhaitait combattre de tout son coeur, par amour pour sa compagne.

En la voyant poser ses mains sur la table, elle sauta sur l’occasion d’établir un contact tactile pour lui rappeler qu’elle avait, certes, été sérieusement blessée — la douleur qu’elle avait réussi à oublier depuis que Kristen était entrée dans la pièce se manifesta de nouveau comme pour se rappeler à son bon souvenir — et que nombre de vies avaient été fauchées par la faute d’une seule, mais qu’elle était encore là, auprès d’elle, pour la soutenir et l’aimer.

Aude caressa les mains de Kristen avec toute la tendresse dont elle était capable avant de les empoigner délicatement.

« Nous sommes en vie, Kristen, annonça-t-elle en prenant un ton faible mais rassurant. Nous avons le devoir de vivre notre vie jusqu’au bout, d’autant plus maintenant que d’autres se sont sacrifiés pour nous permettre de la savourer. Nous leur devons au moins ça. Leur immense sacrifice ne servirait à rien si nous enfoncions nos vies dans un marasme sans fin. »

Elle prit une courte inspiration et poursuivit sur le même ton :

« Je n’oublierais jamais leur sacrifice, non jamais, et je sais que tu feras de même. Permettons-nous un peu de bonheur après une trop longue série d’épreuves. Faisons-le pour eux et pour nous. Je… »

Aude se demanda une nouvelle fois si le moment était bien choisi, mais elle envoya valdinguer toutes ces interrogations pour s’accrocher à ce que lui dictait son coeur.

« Je t’aime, et je veux te voir heureuse. »

Le feu aux joues, Aude se replongea dans le dépouillement minutieux de son pain au chocolat qu’elle mastiqua en silence, bouchée par bouchée, hésitant sur ce qu’elle devait ajouter après ça. Elle avait bien une petite idée derrière la tête, quelque chose qu’elle brûlait tout autant de dire à Kristen, mais elle laissa le silence s’appesantir quelques instants. Le temps, au moins, de donner corps à la déclaration d’amour spontanée qu’elle venait de prononcer.

Quand elle jugea le moment propice, Aude reposa sa tasse de café après une énième gorgée. Elle s’immobilisa ensuite pour regarder sa compagne.

« … Je compte me trouver un nouveau travail, annonça-t-elle en ramenant très vite son regard sur ses mains croisées devant sa tasse de café encore fumante. Je ne sais pas encore dans quelle branche. Je sais juste que je ne veux pas interférer dans ton travail. Qu’est-ce qu’on dirait si tu venais à m’embaucher… »

Elle se força à sourire pour montrer sa confiance, même si celle-ci était fragilisée par l’immense inconnue qui s’ouvrait devant elle.

« Mais je sais une chose. Ma vie est ici désormais. »
10 déc. 2017, 12:21
 RPG+  La promesse du bonheur  PV 
« Je t’aime », ces mots avaient été prononcés en anglais, puisque Aude s'adressait toujours à Kristen en anglais. C’était terriblement concret. Kristen resta bloquée un instant sur ces mots, elle frissonna. Cette déclaration était un coup de vent sur tout le reste ; un argument en soi. Kristen releva la tête vers sa compagne et ouvrit de grands yeux. Elle voulait chercher quelque chose dans son regard, y creuser même pour mieux comprendre, mais Aude semblait gênée, rosie et se concentrait sur son pain au chocolat. Kristen ne savait pas quoi faire. Devait-elle répondre ? En aurait-elle seulement le courage, les mots sortiraient-ils comme ça ?

On redescendit sur terre en parlant travail. Kristen n’y avait pas pensé jusqu’alors, mais il était vrai qu’Aude, maintenant qu’elle n’était plus directrice de Beauxbâtons, devait avoir envie de s’occuper à quelque chose. Il semblait à Kristen qu’Aude n’était pas destinée à attendre, il fallait qu’elle soit active et qu’elle puisse accomplir chaque jour quelque chose ; même si aimer Kristen et l’avoir changée à ce point était déjà un accomplissement qui lui aurait valu sans problème sa place au paradis.

Kristen écoutait, s’essuya très calmement la bouche et les mains avec une serviette et se leva. Elle n’eut qu’à faire deux pas pour contourner la table et se retrouver juste à côté d’Aude. Kristen la regarda un instant. Tout était lent, mesuré. Parfaitement calme. Elle se baissa, prit le visage de celle qui lui avait dit qu’elle l’aimait dans ses mains et l’embrassa. Elle se baissa un peu plus. Elle était désormais plus basse qu'Aude, presque à genoux devant elle qui était assise. Les mains sur ses genoux, elle dit :

« Tu sais que je me fiche de ce qu’on dirait. On ne m’intéresse pas. »

De manière très générale, c’était beaucoup trop vrai. Kristen faisait ce qui lui plaisait et tant pis si ça ne plaisait pas. C’était encore plus vrai dans sa relation avec Aude. Ce n’était pas une question d’assumer ou pas, c’était juste comme ça. Elle se fichait des autres. La seule personne qui pourrait poser problème, c’était Owen… Owen qu’elle avait convoqué dans son bureau cet après-midi, suite à son comportement de la veille dans la salle commune de Serpentard.

« Je suis sûre que tu trouveras rapidement quelque chose de très intéressant. Tu es une sorcière brillante. »

Elle se releva et ajouta avec un air désinvolte :

« C’est décidé, je créerai un endroit pour toi et moi. Je ferai monter du sol une tour entière s’il le faut. »

Gênée, elle expira un petit rire nerveux et dit plus bas :

« Franchement, qu’est-ce que tu as fait de moi… »

Ce n’était évidemment pas un reproche, mais plutôt un constat. Si on lui avait dit, deux ans auparavant, qu’elle serait capable d’aimer et d’être aimée en retour et deviendrait finalement si… dépendante de quelqu’un, elle ne l’aurait jamais cru. C’était même contre ses principes.

Elle regagnait sa place et était toujours debout quand elle sortit de sous son gilet la baguette de Sureau. Elle se tourna vers Aude et tendit sa paume vers elle pour lui montrer la baguette.

« Je crois qu’il est assez dangereux de posséder pareil objet… Un certain nombre de personnes savent déjà que je l’ai… Penses-tu qu’une illusion pour modifier son apparence auprès des autres pourrait constituer une première protection ? »

Nécromancienne - Mère du dragon - Détentrice de la Baguette de Sureau et du Retourneur de Temps
~ if i wasn’t a narcissist i wouldn’t like me either ~

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