Evidemment que je n'ai jamais pensé à passer commande. Porter ce type de vêtements à Poudlard serait désobéir à ma mère, et de toute ma vie je n'ai jamais fait quoi que ce soit qui pourrait la contrarier. J'ai grandi en essayant de respecter chacune des attentes de mes parents, en tâchant de ne jamais les décevoir : mission à laquelle j'ai souvent échoué malgré moi, écrasé par la complexité que représentent les normes sociales et tout ce qui s'y apparente. Mais je suis majeur désormais et il serait peut-être temps que je proteste contre ces règles que je n'ai jamais comprises.

Néanmoins, la commande en distanciel reste peu envisageable : ma morphologie n'étant pas adaptée à la plupart des vêtements féminins, j'ai déjà constaté lors de mes essayages qu'il me fallait essayer beaucoup de vêtements avant d'en trouver à ma taille.

Plongé dans mes pensées, je tisse hâtivement un pétale de lilas sans aucune grâce. Les derniers points tranchent grossièrement avec le reste de mon ouvrage, mais ce n'est pas ce qui m'importe actuellement. Je suis tout focalisé sur le plan que j'échafaude, tâchant par la même occasion de me convaincre que je ne fais rien de mal, qu'il est parfaitement juste que je fasse quelque chose qui me rend heureux.

« C'est bientôt les vacances... » pensé-je à voix haute. Et en vacances, il n'est pas rare que mon père m'emmène à Pré-au-Lard avant de transplaner pour faire quelques emplettes ailleurs. Il m'avait notamment promis qu'une fois la majorité atteinte, j'aurai sur place quartier libre plus longtemps avant qu'il ne vienne me chercher. Ce serait l'occasion idéale d'acquérir de nouveaux vêtements, et même si ma mère ne m'autoriserait jamais à les porter, elle ne peut rien faire contre quelque chose qu'elle ignore.

« Merci, Ennis O'Belt. Je viens de comprendre quelque chose d'important grâce à toi, » lui souris-je. Techniquement, je pourrais même profiter de cette journée d'entière liberté pour goûter enfin des boissons d'adulte : m'imaginer affalé au comptoir des Trois Balais à enchaîner les verres de whisky m'arrache un second sourire. « Merci, Ennis, » répété-je. « Je doute qu'il y en ait mais sait-on jamais ; tu as déjà trouvé des pièces intéressantes à Pré-au-Lard ? De la marque Wizarmani j'en doute, j'en ai vu qu'au Chemin de Traverse, mais peut-être autre chose... »

Tu n'as pas idée de ce que tu viens de déclencher chez Lest

Les derniers mots de la châtain semblèrent laisser son camarade bien pensif. Le laissant à sa réflexion, elle ne dit plus rien, reportant son regard sur sa composition de botanique. Compte tenu de la discussion sur les motifs de la marque de vêtements sorciers, cela tira un sourire à la préfète qui se remettait au travail en ajoutant quelques informations éparses jusqu'à ce que la voix de Coelestin retentisse a nouveau pour énoncer un état de fait. Effectivement d'ici une grosse semaine, ce serait les vacances. Et même, dans quelques jours il y aurait une sortie au village sorcier voisin, la deuxième serait en plein milieu des vacances.

- "Tu ne devrais pas douter autant de ce qu'on peut trouver à Pré-au-Lard." Elle releva la tête, souriante. "Gaichiffon regorge de pièces intéressantes, ce ne sont pas toujours des marques très connues, parfois, souvent même, ce sont des petits créateurs. Mais la qualité est là." Elle posa sa plume, laissant ses yeux dériver sur l'ouvrage. Ennis penchant doucement la tête, les réflexions avaient dues être intense pour que le jeune homme perde de son doigté. Mais elle ne dit rien à ce propos, préférant une toute autre chose:

- "Si tu es d'accord, je pourrais t'y accompagner pour t'aider à trouver quelque chose qui te convienne." Elle aimait ça fouiller les portant et dénicher de belles pièces. Elle n'achètent pas toujours, et pas toujours pour elle, cet attrait pour les beaux habits était certainement son seul trait dit féminin. "Peu de mes amis partagent le goût des beaux vêtements. Et seule, la recherche a moins d'attrait." L'avis de l'autre était toujours intéressant, surtout quand l'œil était avisé, ce qui était le cas de son partenaire favori - Dom n'avait même plus besoin qu'elle soit là pour trouver un vêtement qui lui aille à tout point de vue - et semblait aussi être celui du Serdaigle à ses côtés.


C'est ça aussi qui est beau dans le RP, les apports insoupçonnés des partenaires

La proposition de la Gryffondor me laisse d'abord très surpris. Est-ce que l'on vient tout juste de me proposer une séance de shopping, sans moquerie ni arrière pensée ? Mais très vite, l'enthousiasme laisse place à un amer constat : Ennis me propose certainement d'aller à Gaichiffon un samedi, lors des sorties proposées par l'école. Or, c'est tout juste ce que je souhaite éviter, pour des raisons qui me semblent évidentes mais ne le sont probablement pas pour elle.

« J'aimerais énormément, mais je crois que je vais plutôt y aller seul, » lui réponds-je avec regret.

Les commerces n'étant pas très nombreux à Pré-au-Lard, les chances de croiser d'autres élèves dans une boutique sont très importants. Ce n'est pas un risque je peux me permettre de prendre pour le type de vêtement que j'ai prévu d'essayer. Pour un vêtement comme les chemisiers de Wizarmany, peu de personnes prêtent attention aux quelques détails qui permettent de différencier un vêtement vendu à un public féminin de ceux destinés à une clientèle masculine : ce ne sont au final que de subtiles différences au niveau de la coupe et des tissus, raison supplémentaire qui fait que je ne comprends pas pourquoi les vêtements doivent être genrés de manière si binaire quand il s'agit juste de tissu.

Craignant que la préfète me croit simplement désintéressé par sa proposition qui m'a en réalité beaucoup touché, j'explique :
« Si on y va un samedi, il y aura d'autres élèves. Comment crois-tu que d'autres personnes réagiraient s'ils me voyaient fouiller dans les vêtements pour femme -ou pire, s'ils s'approchent des cabines d'essayage et m'aperçoivent avec une jupe ou une robe ? » soupiré-je. Je repose mon ouvrage, mes mains commençant à devenir douloureuses à force de broder. J'ai de toute façon perdu ma concentration au passage, alors il serait plus sage que je m'arrête pour aujourd'hui. Du bout des doigts, j'effleure mes derniers points et grimace légèrement à la vue de mon pétale raté. Néanmoins, mon travail est désormais plus riche en détails, notamment grâce à O'Belt et le modèle papier que j'ai pu compléter. C'est une bonne journée. Frustrante, mais bonne tout de même.

Ennis n'était pas vraiment du genre à se formaliser, s'il ne voulait pas alors soit. C'était perdre de l'énergie que de se vexer même si elle aurait aimer gagner une personne avec des goûts vestimentaires certain dans son cercle de connaissances. La cinquième année acquiesça donc sans rien dire de plus. Et le sixième année trouva pertinent de s'expliquer. La châtain l'écouta donc avec attention. Il avait raison sur plusieurs points et même si elle n'avait pas sourciller sur la mention de porter des jupes ou des robes, elle avait trouvé cela étrange, pas étonnant en y réfléchissant, mais étrange. Mais si ce n'était que ça, il y avait toujours moyen d'arranger la vérité.

- "Si tu regardes dans le rayon des femmes, c'est que tu m'aides à chercher une pièce, personne ne trouvera rien à y redire. On peut être un homme et savoir choisir des vêtements pour une femme et inversement." Elle avait haussé les épaules. Plus c'était simple, plus les gens adhéraient à ce genre d'explications. "Et le principe d'une cabine d'essayage c'est bien qu'on ne te voit pas te changer. Je porte les vêtements jusque là-bas... une fois que tu es derrière le rideau, tu te changes, tu vois dans les miroir si ça te va... A Gaichiffon c'est bien fait, il y a moyen d'être discret et tranquille. Et en dernier barrage..." Elle eut un sourire. "Crois moi, j'ai beau être préfète, on m'évite autant que possible. De l'antipathie il paraît." Une éducation différente, une froideur affichée, on avait fini par comprendre qu'à moins d'une vraie urgence, il valait mieux la laisser en paix.

- "Mais je comprends que cela t'inquiète, tu penseras que le samedi des vacances est le troisième du mois, il n'est pas impossible qu'une sortie se fasse pour ceux qui restent au château. Je serais toi, je choisirais un autre jour." Conseilla-t-elle donc à son camarade. "J'espère que tu y trouveras ton bonheur, je n'achète pas à chaque fois mais j'y passe souvent et il est difficile de ne pas se laisser tenter."

Tout en commençant à ranger mes affaires, j'écoute la Gryffondor d'une oreille attentive. Ses explications sont plutôt convaincantes et tout en l'écoutant, je me surprends à m'imaginer à ses côtés dans la boutique, à fouiller chacun pour dénicher les pièces les plus intéressantes et les montrer à l'autre pour un avis, traîner dans les cabines d'essayages tout en discutant des dernières actualités de mode, et peut-être même conclure l'après-midi avec une boisson chaude au salon de thé de Madame Pieddodu. C'est un tableau plutôt alléchant qui allume dans mon cœur une petite flamme d'envie et qui surpasserait presque ma peur d'être vu par d'autres élèves.

« Est-ce que je peux... y réfléchir ? » lui demandé-je avec hésitation.« Je rentre chez moi pendant les vacances, mais pour la prochaine sortie à Pré-au-Lard après la rentrée... si tu es toujours d'accord, peut-être que ça pourrait être faisable. Comme tu l'as dit, si je suis avec toi on peut tout simplement croire que je t'aide à trouver des vêtements. »

Je termine de ranger mes dernières affaires dans mon sac, prenant bien soin de ne pas abîmer ma broderie au passage. Mon regard glisse à nouveau vers le poignet de la préfète et mon visage se fend d'un sourire à la vue du lilas entouré de roses, motif qui m'est devenu si familier après avoir travaillé plusieurs heures dessus. Jusqu'ici, je n'avais jamais prêté attention au style vestimentaire de la Gryffondor, ce qui est peu étonnant étant donné que je ne la connais pas vraiment, mais maintenant que j'ai un peu discuté avec elle, je remarque qu'elle dégage une certaine prestance en plus d'être plutôt distinguée. Parler mode avec elle et chercher des pièces de collection ensemble serait certainement passionnant.

« Je te tiens au courant, si ça te convient ? En tout cas, encore merci pour ça, » dis-je en pointant du doigt le motif floral de son chemisier. Je me lève et glisse mon sac sur mes épaules, adressant au passage un dernier sourire à la préfète, prêt à partir.

A part si Ennis retient Lest avec une question ou autre, c'est mon dernier post. Merci beaucoup pour ce rp

- "Bien sûr, prends le temps d'y réfléchir. Ça ne va rien changer pour moi que ce soit là ou plus tard. La proposition tiendra toujours." Confirma Ennis en observant son aîné poursuivre le rangement de l'ensemble de son matériel de broderie. Il prend d'ailleurs des précautions infini en plaçant son ouvrage dans son sac. La châtain n'y avait pas spécialement jeter de nouveau coup d’œil depuis que la discussion avait dérivé sur la possibilité de partir à la recherche de vêtements ensemble lors d'une prochaine sortie au village sorcier voisin de l'école.

- "J'attends de tes nouvelles. En dehors de mes cours, si tu ne me trouves pas à la bibliothèque, je suis généralement sur le terrain d'entraînement." L'informa la préfète. Le château était immense, autant prévenir le Serdaigle des endroits où on la trouvait avec le plus de probabilités. "Il n'y a pas de quoi, ça ne me demandait pas d'effort particulier." Répondit-elle avec un sourire léger alors que Coelestin se levait, sac sur l'épaule, avec vraisemblablement l'intention de partir. Elle le laissa donc faire, reprenant son activité même si ce n'était pas celle qu'elle avait initialement prévue. De toute façon, ce devoir, il allait bien falloir qu'elle le termine. Autant profiter d'avoir remis le nez dedans pour que cela soit fait une bonne fois pour toute. Elle n'aurait plus qu'à le remettre au propre.


Ce fut un plaisir, et ça en sera un autre de remettre ça si le cœur t'en dit