Ce n'était pas la première fois que quelqu'un suggérait que Sunday était quelque peu différent, bien que le garçon ne le prenne pas mal. Sa préférence allait complètement à l'idée d'avoir une personnalité différente, plutôt que des aptitudes différentes comme lorsqu'il était question de magie, que ce soit à Poudlard ou parmi les moldus. La réflexion entraînée par la proposition de Nico poussa le Serpentard à meubler en attendant qu'il trouve quelque chose, et il répondit donc aux conversations précédentes dans un sens logique qui pourrait grandement perturber son camarade. Pour Sunday dont les pensées ricochaient sans cesse les unes contre les autres, le chaotique de sa réponse n'avait rien de bien étranger :
— Oui, mais ça solidifie le crâne de se prendre le mur. Tiens, tu veux sentir ? J'ai la tête dure maintenant ! souffla-t-il en réponse à la taquinerie de son camarade, se penchant légèrement pour donner un petit coup de tête contre l'épaule de ce dernier, le geste noyant ses mots dans un concert de bruissement de textile et de cheveux. J'sais pas, c'est vrai qu'elle a l'air un peu... comment on dit... Un peu... Brute, quelque chose comme ça ? Je sais pas, ponctua-t-il, posant sa joue sur la paume de sa main tout en détaillant son camarade du regard.

Les éléments demandés par Nico étaient difficiles à trouver pour le Serpentard, il lui fallait extirper trois choses parmi tout un océan de pensées, le garçon préférait la pêche au filet pour en ressortir un banc de pensées plus ou moins liées. Extirper de son cerveau trois pensées sans aucun lien logique lui parut soudainement plus épineux et bien que ses yeux étaient posés sur le Serdaigle, il ne le voyait pas, concentré dans cette tâche demandeuse. Malheureusement pour Nico et ses plans insoupçonnés de Sunday, le Serpentard était toujours le dernier au courant de tout et n'avait que peu d'intérêt pour les rumeurs, aussi sa réflexion se porta sur des éléments bien différents : lui-même, ce qui était quand même bien plus palpitant.
— Okay, okay : je mets le lait avant les céréales, quand j'étais petit je voulais être un danseur de ballet, j'ai un crush sur Miss Valerion comme les 3/4 des garçons à Serpentard.
Plus que ses propres affirmations, le garçon voulait apprendre davantage de choses sur le Serdaigle ; il n'était pas d'un naturel très curieux quant aux autres, mais pour une raison ou une autre, Sunday eut l'impression qu'une grande amitié était possible entre eux — la réponse de Nico quant à sa réflexion sur Ronflex y étant probablement pour quelque chose. Pliant ses bras sur sa table, il posa sa joue contre ses bras et tendit l'oreille, impatient de voir quel genre d'affirmations Nico aurait en tête lors de son tour.

Nouveau rire de ma part. Ok il avait celui-ci, on allait bien s'entendre je pense. Bizarre mais bon délire. Comme quoi, je l'ai peut-être jugé un peu vite. Le brun, je mine de taper sur son crâne, pour vois si ça sonnait creux.

— Tu rigoles dure ? J'ai entendu l'océan là-dedans !

Je le taquinais en rigolant légèrement. Au final, j'allais pas lui dire, mais ça sonnait un peu creux, donc peut-être que c'était pas si faux ce que je disais. Quoi qu'il en soit, il avait quand même remarqué ce que je ressentais par rapport à Valerion, mais vu que j'avais pas d'autres preuves pour l'instant, j'allais pas non plus épiloguer dessus et j'étais plus intéressé par les rumeurs qui se tramaient chez les Serpy que par leur directrice. C'est à mon plus grand plaisir que je vis Sunday se prêter au jeu assez facilement. Chouette, il allait tout pouvoir me dire. Bon, ses premières propositions étaient pas vraiment très intéressantes, mais je me disais que c'était surtout pour s'échauffer. Je fais mine de réfléchir assez vite, mais j'avais ma petite idée.

— Ça se voit que tu te laisses pas avoir par Valerion, je suis sûr que c'est ça la fausse. Puis t'as l'air de faire pas comme les autres.

J'esquisse un sourire, vu comment il parlait de sa directrice, je le voyais mal avoir un crush sur elle. C'était au moins ça pour lui. J'avoue que je comprenais pas comment on pouvait crusher sur elle, elle était belle, mais elle faisait peur quoi. Bon, c'était à mon tour d'enchainer avec mes propositions. Je réfléchis deux secondes.

— J'ai inondé la cour de bombabouse y'a trois jours, j'ai un chien qui s'appelle Neptune et j'ai vu Narcisse Brando embrasser Lavinia Campbell l'autre jour.

Mon regard se plonge dans celui du Serpentard. Est-ce qu'il allait trouver ? Et est-ce que j'allais lui dire surtout ? J'aimais bien l'idée qu'il s'imagine des choses et qu'il propage des trucs sans que je lui dise explicitement les choses. J'avais pas encore décidé mais ça promettait d'être tordant.

L'humour de Sunday plut visiblement à Nico. L'association des deux garçons était aussi inattendue que prévisible ; s'ils étaient très différents, ils partageaient quelque chose qui était difficile à décrire avec des mots. Un peu chaotiques, tout deux ne semblaient pas réellement faits pour rentrer dans le moule de ce qu'on attendait habituellement d'un élève de Poudlard, ou même d'un élève tout court. Soufflant un petit rire entre ses dents suite à la réaction de son camarade, Sunday se fit la remarque qu'il avait peut-être trouvé un ami. Ce n'était pas le premier qu'il se faisait à Poudlard, mais chacune de ses connaissances étant différentes, la sensation lui paraissait toujours nouvelle.

Nico avait d'ailleurs bien cerné le Serpentard qui hocha la tête lentement suite à son enquête rondement menée : il n'était, bien entendu, pas du tout intéressé par sa directrice de maison ni par quelconque autre professeur.e. Et, bien entendu, aucun.e autre élève ne l'avait poussé à penser quoi que ce soit de romantique, très peu pour lui. La seule chose qu'il savait des relations romantiques, c'était qu'il voyait plutôt ça comme une transmission de pensées, c'était quelque chose qui devait puiser sa qualité dans l'amusement ou l'admiration qu'on ressentait en compagnie de quelqu'un. Enfin, c'était en réalité ce que son père lui avait dit, lui n'en savait pas davantage.
Recentrant sa réflexion sur leur petit jeu, Sunday réalisa que Nico n'avait pas cherché à savoir ce qui était vrai. Ainsi, il manquait totalement l'information que le Serpentard avait un jour voulu être danseur de ballet, mais avec du recul il se sentit un peu embarrassé d'avouer ceci et décida de ne pas insister.

Les affirmations du blondinet provoquèrent l'apparition d'un point d'interrogation métaphorique dans l'esprit du Serpentard qui ne voyait absolument pas comment il pouvait savoir ce qui était vrai ou ce qui ne l'était pas. L'inondation d'une cour à l'aide de bombabouses paraissait être une hyperbole mais il semblait à Sunday que les blagues à Poudlard étaient de toute façon très souvent des grosses catastrophes dont les effets étaient banalisés ou balayés grâce à la magie. Le niveau de gravité d'une action différait grandement du monde moldu.
Le nom du chien de Nico n'engendra pas grande réflexion chez Sunday, qui constatait qu'un nom de chien pouvait avoir tant d'origines différentes qu'il était tout à fait possible qu'un chien soit nommé Neptune.
Enfin, la dernière déclaration, qui lui avait soutiré une grimace inconsciente lors de sa formulation, le laissa un peu plus songeur. Il lui fallut un instant pour se remémorer les noms. Il n'était pas difficile de savoir qui était Lavinia, une sang-pur qui avait bâti toute son existence sur la fierté de son nom, mais il était moins certain de savoir qui était Narcisse Brando. De toute façon mauvais pour retenir les noms et les visages, le Serpentard haussa les épaules comme pour se persuader lui-même que ça n'avait pas grande importance.
— Peut-être qu'ils se sont vraiment embrassés...? Je sais pas, rien me paraît impossible, déclara-t-il tout en fuyant le regard de Nico, légèrement intimidé par sa manière de le regarder. Les doigts de ses deux mains se joignirent dans un ballet de nervosité alors qu'il fronça les sourcils, témoins de sa grande réflexion — Sunday ne voulait pas avoir tort. Puis l'illumination lui vint, il était certain que le baiser entre ses deux camarades était la vraie affirmation, après tout, c'aurait été bizarre que Nico invente ça de toute pièce, il n'y avait rien de bien intéressant à ça. Alors, il adressa un petit sourire en coin à son camarade, haussant un peu plus le ton sans se rendre compte que quelques camarades autour de lui pouvaient l'entendre. Lavinia Campbell et Narcisse Brando se sont embrassés, c'est sûr, c'est ça le truc vrai !

Sunday avait foncé droit dans là où je voulais l'emmener. Faut dire que c'était pas particulièrement compliqué de lui faire avaler des couleuvres. Et je dois dire que ça peut être à mon avantage pour la suite. Quand il me pose celle qui pensait être la vrai, je ne vais pas répondre, me contentant juste d'esquisser un grand sourire avant d'ajouter.

— Il y en a deux qui sont vrais, donc faut encore que tu fasses une proposition !

Ça suffirait au moins à lui mettre le doute et j'allais laisser planer le truc, sans finir par lui répondre. Je le voyais bien aller raconter ça à tout le monde et c'était aussi pour tester la capacité du jeune serpentard à être mon porte parole de rumeurs en tout genre. La suite de l'heure se passe sans encombre, on continue à jouer à ce petit jeux avec Sunday, malheureusement à part des trucs sur lui, il m'apprenait rien d'intéressant. Fin du cours, fallait que je passe à l'action, j'avais pas oublié que je devais une boite de LEGO au brun. Et si lui pensait que j'avais baissé les bras, moi j'oubliais pas le défi qu'il m'avait lancé.

Hop, on sort de la salle de classe et ni une ni deux je le prends par le bras pour qu'il vienne se cacher avec moi dans le couloir. Qu'on dise pas qu'un Ferrell tienne pas ses défis ..