Ce mercredi-là, comme tous les mercredis, Wilfried était libéré de cours. Il était plutôt satisfait de lui puisqu'il était allé travailler quand même et avait réussi à prendre un peu d'avance pour le reste de la semaine, enfin uniquement pour les matières qu'il appréciait et qu'il approfondissait bien volontiers. Il verrait bien en temps voulu pour les autres.
Il était surpris du travail qui était à fournir à Poudlard, et ce dès les premiers temps, et derrière ses airs nonchalants, la nécessité de la rigueur et du sérieux ne lui avait pas échappé.
Cependant, avoir travaillé jusqu'à presque 16h un jour sans cours constituait déjà un exploit pour le petit brun qui, fier de lui, s'accorda d'aller se goinfrer de fondants du chaudron dans sa salle commune. Le temps était de toute façon terriblement maussade (sa motivation en aurait d'ailleurs été grandement altérée s'il en eut été autrement) et n'engageait qu'à manger du chocolat au coin de la cheminée pour ne pas risquer une sombre dépression.
Il remonta donc le couloir du deuxième étage, savourant la contemplation des tableaux sur son chemin, notamment celui de Boris le Hagard qui le faisait toujours sourire avec son drôle d'air, sa moustache allongée et son col chiffonné, comme s'il avait été fait de papier. De plus, ses cheveux avaient l'air d'une vieille serpillère. Bref, pas très à son avantage ce bonhomme...
Une fois ce tableau passé, les fondants du chaudron reprirent leur place de choix dans les pensées du jeune gryffondor quand il entendit du bruit dans une salle de classe, dont la porte était entrouverte. Habituellement, les classes dans lesquelles des cours avaient lieu étaient fermées, pour que les occupants ne soient pas dérangés par les déambulations des élèves. Aussi cette salle particulière retint l'attention de Wilfried. Il s'approcha et, curieux de tout ce qui le concernait ou non, il regarda à l'intérieur par l'entrebâillement de la porte. Il aperçut une jeune sorcière, une baguette à la main. Intrigué de ce qu'elle allait faire, il resta derrière la porte pour l'observer.

Une rentrée, wow, qu'elle enthousiasme sur mes lèvres. Peut-être pour moi était-il temps de travailler mes sorts ? Puisque plus j'avançais dans ma scolarité, plus mes notes dégringolaient, en même temps, qu'elle idée de passer toute son année dans le parc, à ne strictement rien faire. Je n'avais en réalité pas envie de travailler, mais il le fallait, non ? Alors baguette à la main, direction une salle vide pour ne blesser personne - j'ai pas envie de faire comme la dernière fois - et ce fut vite trouvé, enfin bref.
Je testa quelques sorts, sans résultats, il fallait le dire tout de même, je n'étais pas douée pour ce genre de chose.



Mais depuis tout récemment je sentais un regard insistant sur moi, je m'efforçais de ne pas me retourner, de toute façon c'était sûrement rien du tout, mais au cas où je lança :



On verra bien si il y avait quelqu'un, au pire mes paroles avaient été lancées dans le vide, personne ne me prendrait pour une folle. C'était toujours mieux, et si quelqu'un m'observait, c'était vraiment bizarre, de sa part en tout cas. Enfin je veux dire.. C'est quand même vachement étrange de faire ça, pas courant, mais l'humain est curieux, toujours obligé de se mêlé des affaires des autres.

Wilfried observa la jeune fille un moment. Il fallait qu'elle se trouve pile dans l'entrebâillement de la porte pour qu'il puisse la voir alors la scène dont il se faisait le spectateur n'était pas complète. Par moment, il la voyait agiter sa baguette et l'entendait prononcer une formule, mais il ne voyait rien et n'entendait rien ensuite. Il ne comprenait pas très bien ce qu'elle faisait, c'était sans doute la raison qui l'avait poussé à rester si longtemps derrière cette porte. La fille marmonna quelque chose que le gryffon ne put pas comprendre. Repensant aux fondants du chaudron qui l'attendaient, il s'apprêta à repartir quand une voix forte l'arrêta :

- Ça t'amuse d'observer les gens dans leur dos ?

La voix venait de l'intérieur de la salle. Wilfried scruta la jeune fille qui ne s'était même pas retournée. Comment pouvait-elle savoir qu'il était là ? Il n'avait pas fait de bruit... Peut-être qu'il y avait un miroir dans la salle dont l'angle donnait exactement sur l'embrasure de la porte ? Elle avait l'air énervée en tout cas... Le première année ne se démonta pas et lui répondit d'un air hautain en entrant dans la salle :

- Houlà faut te calmer hein ! T'es parano toi... Je suis juste passé dans le couloir, je t'observais pas ! Mais je veux bien le faire puisque tu m'invites, ajouta-t-il d'un air moqueur.

Il alla s'asseoir sur une table, laissant pendre ses pieds, et planta ses rétines dans celles de la Serdaigle.

- Alors vas-y montre donc ce que tu sais faire, tu réclamais du public, tu vois je te regarde maintenant !

Et il attendit avec un air de défi.

J'avais donc à faire avec un gars avec un ego plus surdimensionné que le soleil de notre système solaire. Je lui lança un regard noir à la suite de ses remarques avant de ranger ma baguette. Il se prenait pour un être supérieur ? On verra bien qui l'était vraiment ! Je souriai assez hautainement à mon tour :



Avant de perdre mon sourire presque immédiatement, comme quand on nous force à rire sur les photos de famille, pour lever les yeux aux ciels et me préparer à quitter la salle.



Au moins ça avait le don d'être clair et bien dit, qu'il ne m'embête pas trop longtemps lui !
Je lui faisais face, les bras croisés, pour indiquer très clairement que je ne me laisserais pas faire par un pauv' gars comme ce chaton, courageux ? Mais bien sûr ! Il n'y en avait peut-être qu'un qui lui l'étaient, mais les autres sentaient l'égoïsme et le faux sourire. Je n'aime pas les valeurs de cette maison.

La jeune fille refusa le défi de Wilfried sans même prendre le temps de le considérer. Quelle déception pour le jeune gryffon ! Lui qui croyait se distraire un peu... Elle semblait à la fois en colère et boudeuse avec ses bras croisés. Mais quelle susceptibilité ! Etait-ce parce que c'était une fille ? Ou parce que c'était une Serdaigle ? En tout cas ce n'était pas très intéressant. Pourtant, le jeune garçon avait envie de s'amuser un peu en poussant plus loin ses provocations. Elle s'était voulue piquante dans sa première réplique, mais cela ne faisait que montrer qu'elle ne se sentait pas à la hauteur... Wilfried lui répondit donc d'un ton badin :

- Un professionnel ? Non, ne t'inquiète pas, ne soit pas "désolée", je veux bien te faire l'honneur de te regarder toi tout simplement, tu peux continuer même si tu n'es pas très douée, je ferai en sorte d'être indulgent. Et puis tu avais l'air si désespérée d'avoir du public, je ne voudrais pas te décevoir... Si je veux voir un professionnel, je te demanderai pas à toi si ça peut te rassurer, conclut-t-il en adressant un clin d'œil faussement complice à la jeune Serdaigle.

Il resta assis sur sa table en balançant ses jambes d'un air désinvolte. Et il fixa la jeune fille, scrutant ses réactions, les yeux brillants de malice.

J'ai toujours eu le sang froid, jamais je ne me suis énervée pour rien. Mais je dois avouer que ce petit me mettais les nerfs à rude épreuve, je me tourna avec un sourire vers lui, faisant très certainement savoir que je n'avais pas du tout, pour le moins du monde envie de jouer.



Dans quoi je m'embarquais encore..



J'étais foutue, c'était fini à présent, mieux valait que je me rende en Allemagne, loin de ce fou et de ma propre folie. Je restais là debout, sans broncher, mais j'étais particulièrement paniquée à l'intérieur. Je ne pouvais pas revenir sur mes paroles ! C'est être faible.. Je me forçais de ne pas regarder mes galoches aux lacets parfaitement noués, la terre ayant totalement salies ces dernières. Regarder mes galoches, c'était avouer ma défaite, alors mon regard vaquait sur les murs de briques parfaitement cirés, comme si en centaines d'années d'existence, il n'avait jamais pris de coup de vieux. Alors qu'ils devaient être salis par la moisissure en temps normal. Je referma le poing sur ma baguette, je serais comme les murs de l'enceinte de ce château, je ne me laisserais pas avoir par les parasites, en tout cas, je ne me laisserais pas avoir par les parasites comme lui.

Les provocations de Wilfried semblèrent avoir l'effet escompté : la Serdaigle acceptait de se servir de sa baguette. Enfin un peu d'animation dans ce château ! Les élèves semblaient trop sages d'habitude...
Elle était maligne cependant : pas question d'être la seule à lancer des sorts et à prendre des risques, elle entraînerait le gryffon avec elle. Elle lui proposait un sortilège chacun leur tour. Heureusement qu'elle n'était pas entrée dans un duel, Wilfried n'étant qu'en première année, il n'avait pas appris grand chose...
Il ne pourrait sans doute pas aller bien loin dans cet échange, mais pas question de refuser ! Pour une fois que quelqu'un acceptait de se mouiller.

Il descendit de sa table avec légèreté sans quitter sa camarade des yeux. Elle semblait n'en mener pas large ; son regard parcourait les murs, fuyant, comme si elle cherchait un moyen d'échapper à ce qu'elle avait proposé. Mais paradoxalement, elle tenait fermement sa baguette et semblait bien décidée à ne pas reculer.

Wilfried sourit devant cette détermination naissante, les yeux chargés de défi et lui lança avec une légère courbette de gentleman un peu ridicule pour un enfant de onze ans :

- Très bien ! Honneur aux dames...

Il fit quelques pas en arrière pour lui laisser de la place et fixa la jeune fille, les yeux brillants d'excitation. Elle avait réussi à susciter son intérêt et il avait hâte de la voir à l’œuvre.