De tous les élèves convoqués pour son atelier lecture, Elfie Chassin avait été la seule à manquer à l'appel. Instinctivement, il aurait pu penser qu'elle souffrait d'un quelconque mal ou simplement -ça arrivait- qu'elle ait eu une panne d'oreiller. Des petites souris bavardes lui avaient toutefois confirmé que l'adolescente était en pleine forme et avait simplement, sans trop de doute, délibérément séché son atelier. Ça lui faisait mal au cœur, mais il était à peu près parvenu seul à une explication du pourquoi : alors qu'il pensait rendre service à ses étudiants en leur permettant la lecture d'un document qui semblait leur être difficile d'accès, les retours avaient été... plutôt mitigés et l'attitude pendant l'atelier, franchement pitoyable. Sigmund avait été beaucoup peiné de comprendre que ses élèves n'appréciaient pas autant que lui les lectures matinales dominicales. De son simple point de vue, l'atelier était un service rendu, et il avait empiété sur ses congés hebdomadaires - le temps qu'il consacrait habituellement à sa famille - pour le donner à ces enfants qui n'en avaient rien à faire et qui pire, considéraient cela comme une punition.

Alors, ça le peinait d'autant plus qu'une enfant parmi eux ait simplement choisi de ne pas répondre à l'appel de son directeur de maison. Avait-il si peu d'autorité que ça ? Ses activités paraissaient-elles si ennuyantes aux yeux des enfants ? Merlin, était-il au moins un bon directeur ? Ces derniers temps, il avait l'impression de ne rien faire comme il fallait, et ça le déprimait beaucoup.

Chassant sa peine, il avait décidé de convoquer Elfie pour tirer un peu la situation au clair avec elle. Du point de vue de la courte missive qui était parvenue à la jeune fille, l'invitation sonnerait certainement comme une retenue. Ce n'en était pas vraiment une : Sigmund avait simplement envie de discuter avec elle en dehors du cadre très formel de son bureau -ce qui, de tout point de vue, n'avait réussi ni à l'un ni à l'autre leur première fois. Bornée, Elfie semblait également refuser tout service ou aide qu'on lui proposait. C'était ainsi que l'idée avait fini par germer dans l'esprit du botaniste : s'il ne pouvait pas aider l'adolescente, alors, il s'arrangerait pour que ce soit elle qui lui apporte une aide quelconque. Tout pour ouvrir le dialogue.

Son vieil Étoile Filante en main, Sigmund attendait l'adolescente vers l'entrée du terrain d'entraînement. Elle avait été prévenue qu'elle aurait besoin de son propre balai et d'une tenue adaptée au vol. Il ne lui restait plus qu'à venir au rendez-vous.

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Il y a quelques jours, Elfie avait reçu une convocation pour aller lire le règlement avec les petits rebelles de gryffondor. Bien que Leo y était convié également, la septième année avait décidée de se passer de cette étrange mise au point. C’était ridicule, si Monsieur Charleston pensait que simplement relié les règles du château allait arrêter les écarts des élèves ici, c’était bien mal les connaitre. Même sans lire les fameuses feuilles, la plupart connaissait les risques et agissaient en connaissance de cause. De plus la gryffondor ne se pensait pas comme les plus jeunes qu’il avait convoqué, c’était juste des enfants qui s’amusaient comme il le pouvait dans la prison qu’était Poudlard. Passer toute sa matinée enfermée avec eux, n’avait donc pas fait partie de son plan, elle était partit s’entraîner à la place avec Alex et Onyx.

Pour l’instant, elle ne prenait pas au sérieux son directeur de maison, c’était une autre raison qui l’avait décidé à échapper à ce petit rendez-vous. Lors de son premier échange avec le professeur, il l’avait laissé filer sans qu’elle n’ait rien à dire, tout en lui indiquant que peut importe son comportement ou ses notes, elle pourrait garder sa place dans l’équipe. Ainsi même si elle ne se présentait pas à la convocation, elle avait été certaine qu’il n’y aurait pas eu de représailles. Enfin ça c’était avant qu’elle reçoive une autre convocation qui avait tout l’air d’être une retenue. Peut-être que finalement Sigmund Charleston avait un semblant d’autorité. Ne voulant pas faire traîner cette histoire a se retrouver des heures enfermées dans une pièce à rédiger des lignes ou à ranger une serre, elle s’y était donc présentée. Elle avait prit son balai pour rejoindre son professeur. Encore une idée étrange, quelle punition allait il bien pouvoir lui faire faire avec un balai et sur le terrain d’entraînement? C’était plutôt l’inverse. Mais bon avec lui il fallait s’attendre à tout.

Arriver à sa hauteur, avec seulement une minute de retard, d’une tête qui avait l’air de mauvaise humeur mais qui s’apparentait plus à la tête habituelle d’Elfie dans ce genre de situation, elle tenta d’en savoir plus sur la suite. « B’jour, allez à l’essentiel, je dois faire quoi? » très rapide, mais c’était sûrement un signe de sa part pour lui avouez qu’elle n’avait pas envie de s’éterniser à l’écouter parler durant des heures.

Apercevant la silhouette d'Elfie non loin, Sigmund secoua la main pour se faire remarquer et la saluer. Elle était presque à l'heure, ce qui du point de vue du botaniste revenait au même qu'une arrivée à l'heure. Autrement dit, même si cette attitude aurait dû être parfaitement normale pour une élève, il était plutôt fier d'elle. Le directeur de Gryffondor avait fini par se faire à l'air maussade qui ne quittait jamais les traits de son étudiante. Pour lui, Elfie était comme certains de ces chats qui ont la malchance d'avoir l'air toujours mécontents, avec le museau froissé, l'œil vif et les oreilles en arrière : c'était leur tête naturelle, ils n'y pouvaient rien.

Elle le salua et demanda à passer à la suite. Aller à l'essentiel, toujours aller à l'essentiel ! Cette petite n'aimait vraiment pas faire la conversation, n'est-ce pas ? Mais cejourd'hui, il était de toute façon prévu que Sigmund lui fasse plaisir, alors il lui épargnerait les longs discours -du moins, pour commencer. Après une petite heure de vol, elle se montrerait peut-être plus bavarde, et de toute façon la communication serait essentielle pour leur exercice.

« Bonjour ma grande ! Tu n'es pas venue à mon atelier, hein ? » Question rhétorique, il savait bien qu'elle n'avait pas été là, et la raison de sa convocation avait parfaitement bien été mentionnée sur le mot qu'il lui avait fait transmettre. Il lui manquait seulement la nature de l'activité qu'ils feraient ensemble. « Vois-tu Elfie, si je te dis que j'étais très habile sur un balai quand j'avais ton âge, me crois-tu ? » Se doutant bien qu'elle ne lui ferait pas la conversation à ce sujet - et pire, que ça ne l'intéressait probablement pas, le botaniste enchaîna rapidement. « J'ai un peu perdu la main, et je le ressens sur les courses de balais. J'aime beaucoup concourir avec vous, les p'tits jeunes mais... bon, on va dire que ce n'est pas glorieux. Tu vas m'entraîner ! Je compte sur toi pour me dire ce qui ne va pas avec... bon, tu sauras mieux que moi. Ma posture, la façon dont je prends mes virages, toutes ces bricoles... » Commençant déjà à enfourcher son balai, sa moustache se tourna vers l'adolescente : « Oh, et merci ! » Puis, il tapa violemment du pied par terre : « Hue ! »

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Tout montrait chez Elfie que sa présence ici à côté de son directeur de maison ne lui plaisait guère. Son visage était fermé et son regard assez dur, en attendant la suite, qui ne tarda pas à arriver. C’était plus qu’étrange. Il n’y avait que Sigmund Charleston pour faire d’une retenue un cours de vol. Mais si il pensait la piégé en tentant une autre approche, il se trompait. Déjà au vu de son niveau de vol actuel qui était déplorable mais elle ne lui laisserait aucun bénéfice d’espérer qu’il puisse se rapprocher d’elle. Elle avait déjà trop donnée avec son prédécesseur et s’était perdue. La façon dont elle était punit ne changeait rien, puisque pour elle, c’était une évidence, c’était une punition. De son ton toujours si désagréable espérant que son professeur l’emmène copier des lignes ou ranger des papiers, elle lui répondit, à sa manière. « Lire le règlement que j’ai jamais lu depuis mon arrivée à poudlard entouré de premières année ne faisait pas partie de mon plan en effet. » mais bon, ça il le savait déjà.

Les comportement étrange de Monsieur Charleston était difficile à cerner. La gryffondor aurait sûrement préféré un directeur comme les autres avec qui tout était plus simple, mais lui, elle n’arrivait pas à savoir où il voulait en venir. « Pourquoi ne pas demander à Ennis pour qui ça serait un plaisir? Tout ce que vous gagner la c’est un mauvais professeur. » C’était qu’une question de logique pour Elfie. Ennis savait voler et le cours donner aurait été bien plus efficace et plaisant, mais à la place il demandait à la septième année des plus désagréables pour le faire, personne n’aimait passer du temps avec elle, mise à part quelques exceptions. C’était bien plus simple. Voyant son professeur décoller, elle tenta, dans un dernier espoir de le faire changer d’avis. « Sérieusement vous pouvez pas me faire une retenue sur une table comme tout le monde où je suis pas obligée de vous adresser la parole? » Cela n’avait que peu de chance de réussir mais elle lui faisait comprendre qu’elle ne le suivait pas dans son enjouement, ainsi il se déciderait peut-être à lui donner tout ce qu’elle mérite, une retenue comme les autres.

« Jamais lu en l'espace de six ans ? C'est un vilain mensonge ! » nota l'enseignant qui voletait déjà tranquillement dans les airs. Pour ne pas mettre de la distance trop vite entre lui et son étudiante, il commença à tracer des cercles autour d'elle, s'amusant parfois à s'en approcher un peu trop près. Ça alors, elle était vraiment, vraiment de mauvaise humeur. Pourtant, cette rencontre n'avait pas pour objectif de la punir. Ce n'était même pas une retenue, simplement une autre tentative de communication du grand sorcier qui s'estimait « dans l'air du temps » et se targuait bien d'en avoir « déjà vu d'autres, ma fille est passée par là ! » On se gardait toujours bien de lui signaler que la progéniture en question était toujours portée disparue.

Finalement, même si c'était pour râler, Elfie se montrait presque aussi bavarde que lui. Tout sourire, le professeur tira d'un coup sur le manche de son balai pour tenter une petite pirouette sur lui-même. Se retrouver soudainement la tête à l'envers lui refila une sale nausée. Manifestement, il y avait un âge pour ces fantaisies et Sigmund l'avait déjà passé. Il revint vite sagement auprès de l'étudiante, s'immobilisant à un mètre d'elle. « Ce n'est pas à Ennis que j'ai besoin de parler, c'est avec toi. » dit-il en esquivant bien sa dernière question. L'insolence était la marque de fabrique d'Elfie Chassin. S'il commençait à la réprimander pour son sarcasme et son manque de respect, il marquerait inévitablement l'échec de leur échange. À la place, il esquissa un léger sourire joueur. « Tu en as pensé quoi, de ma pirouette ? Je t'en ai mis plein la vue ? » Même son petit-fils faisait mieux sur son balai jouet, il n'y avait rien eu de glorieux à sa piètre performance. Ça, il le savait bien. Mais Elfie n'allait tout de même pas pointer du doigt le fait que ç'avait été médiocre, non ? Puisqu'il n'était même pas tombé de son balai !