Mercredi 30 Septembre 2048
À la fin du cours

Comment m’étais je donc débrouillée pour garder cette année une matière aussi nulle que la métamorphose ? Hein ? Comment ? J’avais enfin la possibilité de choisir mes cours, et non, j’avais pris une filière où il y avait potions et métamorphose, les deux pires matières du monde. Ah l’an dernier c’était simple de se dire ça, je me disais que c’était la meilleure solution etc. Comme je regrettais… J’aurais dû sacrifier des choix pour l’avenir pour m’éviter de supporter les cours de métamorphose.

Mais c’était trop tard. J’étais obligée de supporter cette matière où l’on torturait des animaux devant moi et où l’on m’obligeait à faire de même. Car ça ne devait pas être agréable d’être transformé en théière, en bouton ou en pantoufle, si ? Bien sûr, il n’y avait pas que la métamorphose impliquant des animaux, ça avait un nom d’ailleurs, trans substantiel non ? Bref. En majeure partie, c’était ça. Et bien évidemment, qu’est ce qui était tombé aux examens ? Ce qui avait résulté un commentaire scandaleux sur mon bulletin. « Il devient dangereux de laisser Shawna pratiquer la métamorphose. » Quand j’avais reçu mon bulletin et lu le commentaire, ça a avait fait mal.

Après, il n’avait pas tort. Je n’arrivais pas à maîtriser mes émotions quand je lançais un sort de métamorphose. Mais où était le mal ? Bien sûr que je ne maîtrisais pas mes émotions ! Qu’est ce qu’il attend d’autre de moi ? Que je reste froide et insensible, que je regarde un petit lapin dans le blanc des yeux et que je le transforme en pantoufle, sans aucune émotion ? Je ne suis pas un monstre ! Vraiment, la Métamorphose, c’est pas que je suis nulle. En potions, je suis nulle, ok, c’est comme ça. Mais la Métamorphose, je fais juste un bloquage. Après tout, ce n’est pas plus difficile que les Sortilèges ou la DCFM, qui sont mes deux points forts.

Au moins, cette année, je ne suis pas obligée de supporter l’horrible professeur Lynch, qui a osé me salir mon bulletin. Vraiment, bon débarras ! Mais bon quand même cette prof elle est étrange ! Et puis, elle a une tête de cerf empaillée près de son bureau. Révoltant ! Je me demande si c’est un vrai… Alors à chaque cours, je me mets au fond de la classe et je rumine ma colère. Encore aujourd’hui, je suis installée au dernier rang et je fulmine contre cette matière de barbares. Et je suis frustrée d’échouer en pratique, c’est injuste.

Vraiment, je ne décolère toujours pas. J’en ai marre de faire des choses contre mes principes. Je n’arrive même plus à regarder en face les animaux que je transforme. Je ne peux pas voir la peur et la douleur dans leurs petits yeux. Je me demande si la douleur persiste longtemps… Je jette un coup d’œil à la prof. Elle, elle sait forcément.

Mais, ça impliquerait d’aller lui parler… Et j’avoue ne pas être super motivée… Mais j’ai besoin de savoir. Besoin de savoir si certains effets persistent, si ils souffrent longtemps, qu’est ce qui arrive si on casse un verre qui est en fait un oiseau, si les objets transformés en animaux sont des vrais humains… Tant de questions sans réponses qui m’obsèdent et me bloquent depuis maintenant un peu plus de deux ans.

Alors à la fin du cours, je range mes affaires et m’approche du bureau, hésitante. Je stresse, je la connais pas trop cette prof, et une prof qui a un cerf empaillée est forcément une mauvaise personne. J’attends que la plupart des élèves se soient dissipés, puis je fais un pas. Puis un autre. Et encore un autre, jusqu’à me retrouver devant le bureau. Trop tard pour reculer. Gênée, les jours déjà rougissantes, je parle d’une petite voix.

- Excusez moi miss… Est ce que je peux vous déranger un moment ?

Et voilà, c’est fait. Maintenant je dois juste trouver le courage de lui poser mes questions…

@Selah Crane désolée pour le pavé…

Le mois de septembre était passé plus vite qu'on ne pouvait prononcer métamorphose trans-substantielle. La sorcière prenait peu à peu ses marques dans le château en tant que professeur mais un doute persistait. Durant les cours, la sorcière n'y pensait pas. Oh après tout, elle était bien trop concentrée sur ses élèves. Elle passait entre les bureaux, s'arrêtant quelques fois pour ré-expliquer un point de matière compliqué, ou pour corriger des postures. Selah englobait d'un oeil avisé, toutes les petites têtes de sa salle de classe, espérant que chacun puisse évoluer.

Non, vraiment, Selah n'y pensait pas quand la pièce était remplie.

Mais lorsque la salle se vidait, un frisson lui parcourait l'échine du dos, grimpait dans sa nuque et poursuivait sa course sur les bras de l'Anglaise. De mauvaises ondes, voilà ce qu'il y avait, ici. Elle les ressentait. Etait-ce psychologique, ou un fantôme avait-il décidé d'élire domicile dans les recoins les plus sombres de sa classe ? La professeure quittait alors rapidement les lieux, après chaque cours, et préférait largement largement la compagnie de ses collègues, en salle des professeurs.

Ce jour-là, Selah se hâta de noter quelques indications concernant le prochain devoir à rendre, avant que les élèves ne fassent semblant de ne pas l'avoir vue écrire, et donna quelques dernières consignes. Pour un premier mois, Selah était tout à fait en ordre dans son planning, et cela relevait du miracle, quand elle voyait les quelques élèves qui faisaient les yeux ronds sur la nouvelle matière.

La professeure avait déjà attrapé son sac, prête à quitter les lieux, lorsqu'une élève s'approcha du bureau. Les élèves la croyaient-ils si bavarde pour la harponner à chaque fin de cours ?

- Bien sûr. dit-elle en hochant la tête, sachez que je vous vois m'observer dans le fond de la classe. Vous avez l'air d'une mandragore en colère.

Je me préparais à un gentil sourire et à un encouragement style « Oui, bien sûr tu as une question ? » Je n’y étais pas du tout… Tous les profs ne sont pas des Sigmund Cherleston… Je me fige en entendant sa réponse. Mais… Je suis si peu discrète quand je la fusille du regard ? Ou alors elle a un pouvoir particulier ?

Prise de court, ma réaction ne se fait pas attendre. J’écarquille les yeux et je bafouille, tentant de me justifier.

- Quoi ? Euh je veux dire, comment ? Non non pas du tout c’est juste qu’en fait bah vous voyez c’est que…

Je m’enfonce de plus en plus, c’est la panique. Je deviens toute rouge, je n’étais déjà pas à l’aise mais alors là… Je me dandine d’un pied sur l’autre, catastrophée par la tournure que prend la situation. J’essaie désespérément de me rattraper.

- Je… Non pas du tout j’suis pas en colère ni rien, enfin j’ai rien contre vous…

Si un peu quand même… Vous avez une tête de cerf dans votre bureau, c’est juste scandaleux, vous aimeriez que je vous tranche la tête pour l’accrocher dans mon dortoir ? Sans compter que vous enseignez une matière qui apprend aux élèves à torturer des créatures innocentes. Donc si, j’ai un truc contre vous ! Mais bon, ça, faut pas le dire.

- C’est juste que… La Métamorphose je suis pas trop fan quoi… Je, j’ai du mal, surtout quand faut transformer des animaux…

@Selah Crane

Selah ne s'attendait pas à une telle réaction. Voilà que la mandragore en colère se mettait à bredouiller des mots, se reprendre, pour reformuler ses phrases. Décidément, Selah était-elle donc devenue si vieille pour ne pas comprendre les adolescents ? La professeure avait espérer mettre son interlocutrice en confiance, mais c'était certainement sans compter sur ses expressions du visage qui avaient du passer pour de la sévérité. Pauvre mandragore.

- Je vous taquinais, très chère. Cependant, il est vrai que je vous trouve effectivement peu réceptive à la matière.

Après tout, la métamorphose ne pouvait pas plaire à tout le monde. Selah y était tombée dedans malgré elle, et la métamorphose avait fait partie intégrante de sa vie, enfant, adolescente, et adulte. Il était de son devoir d'intéresser ses élèves, et de leur ouvrir un maximum de portes pour leur futur.

- Oh je vois. répondit-elle, les sourcils froncés. Transformer un animal n'est pas la métamorphose la plus évidente, surtout quand l'animal est assez nerveux et ne tient pas en place, mais ne vous inquiétez pas pour cela, c'est une question d'habitude, et pendant l'année, nous reverrons les bases pour éviter que celui-ci bouge.

Elle lui fit un clin d'oeil complice, pensant avoir compris le fond du problème.

- Chacun son domaine de prédilection. J'ai un faible pour métamorphoser de l'inerte en vivant, mais c'est important que vous puissiez maîtriser chaque aspect de la métamorphose, pour être une sorcière accomplie. Ne perdez pas espoir, avec beaucoup de pratique, vous pourrez transformer n'importe quel animal en tout un service à thé !