Pour mieux saisir l'ambiance musicale...

La nuit était déjà tombée et les reflets de la lune dans le ciel lui donnée un aspect fantomatique par les fenêtres.

Éli avait déserté assez vite la grande salle ce soir, rien ne lui faisait vraiment envie, elle avait juste besoin de se reposer un peu, ses derniers temps la fatigue commencée à s'accumuler.
Pourtant, ses paupières à peine fermées, tout se mélangé dans son esprit projetant d'insurmontables problèmes et ses pensées ne faisait que resserrer un nœud de stress invisible pour les autres, subissant la journée, des affronts de sa colère sans les avoir mérités.

Elle avait cette fâcheuse tendance à tout voir en noir et ces derniers temps sa tête lui donnait sans cesse l'impression d'exploser sous la moindre contrariété.
En regardant les autres vivres autours d'elle, léger et insouciant, ne cherchant pas plus loin et profitant des moments qu'ils se créaient, elle les enviait tellement et en même temps elle en avait tellement peur.

Elle avait peur,
peur de ressentir, peur de donner,
peur de tout perdre ensuite...

Elle n'avait pas toujours été comme ça, plus petite elle était pleine d'énergie, pleine d'envie de joie, et elle le dansait... sa avait toujours été sa manière à elle de montrer qui elle était.
Mais il y a des choses qui brisent, qui font que le jour suivant notre vision des choses change, imperceptiblement pour les autres mais intérieurement c'est un tsunami qui nous assiège, qui nous prend par surprise le peu de certitude que l'on avait.
A 8 ans elle avait failli ne pas se relever, elle aurait pu tout perdre mais la danse et sa famille l'avaient maintenue, forte et combative...en apparence.
Elle avait, depuis grandit et forgeait sa carapace, ne laissant plus aucune place pour le doute ou l'imprévu;
Organisant les moindres détails de sa vie, programmant tout et tout le temps;
Elle n'avait pas prévu d'être une sorcière, elle n'avait pas non plus prévu de perdre la confiance des personnes les plus importantes de sa vie.
Même au sol elle n'arrivait plus à croire que tout ça pouvait être diffèrent maintenant, cet été n'avait pas aidé à lui rendre la confiance qui lui faisait défaut.

Sa carapace fissurée prenait l'eau, elle avait l'impression de se noyer intérieurement.

Tournant et retournant dans ses draps, le sommeil bien loin d'elle, la jeune fille n'y arrivait plus.
Elle se releva, enfila un t-shirt large sur un leggings, il fallait qu'elle sorte. Il fallait qu'elle respire à nouveau.

Les pieds nus sur le sol, elle descendit les marches qui la menait au salon, passa les tonneaux vers l'extérieur de la salle commune et sans réfléchir se laissa guider vers le 4ème étage.
Elle n'avait pas conscience de l'importance de ses pas, elle ne sentait même pas les pierres froides sous ses pieds.
Son esprit trop chargé, son corps n'était qu'un moyen de transport bien trop lourd à porter.

Elle se retrouva devant la porte de la salle de répétition, sa respiration n'était qu'un murmure et elle entra.

La salle était vide, les grandes fenêtres transmettaient sur le sol les reflets de la lune, tamisé et juste assez lumineux pour entrevoir le calme apaisant.
C'était grandiose et simple à la fois. Son regard se posa sur le piano à droite, il trônait au milieu de la scène. Elle avança, touchant du bout des doigts les touches blanches, fermant les yeux. Son professeur de danse les accompagnait souvent au piano et elle ressentit immédiatement un apaisement en retrouvant la sensation de ses souvenirs pas si lointain finalement.
Du plus loin qu'elle se souvenait, la musique avait toujours fait partie de sa vie et elle n'avait pas réaliser que sa lui manqué cruellement ici.

Elle parcourut du regard la pièce, cherchant une façon de lâcher prise... autrement.
Une boite à musique se trouvais là, toute proche du bureau du chef de chœur, magnifique et simple, décorée d'un petit cirque, machinalement, sans vraiment savoir comment faire, elle en fit sortir une musique encrée au fond d'elle, à la fois intense et lourde de sens, douce mais percutante.

Il ne lui fallut qu'un instant pour comprendre que c'était la clef de son équilibre. Son corps, meurtri par son esprit abimé ne demander qu'a se libérer de cette prison.
Elle n'écoutait plus rien , la musique n'était qu'un battement, une impulsion, un instinct...

Ses gestes étaient confus, frappant, explosif.
Seules ses mains tendues, ses pieds battants, ses mouvements décalés et intenses n'avaient de sens. Aucune pensée négative... plus aucune pensée...

Son cœur avait trop pleuré et son corps maintenant crier !!!

La musique s'arrêta, la laissant tremblante et vidée. Elle resta immobile un instant, à genoux, les mains posées à terre, la tête baissée vers le sol, libérant enfin ses émotions.
Ses larmes coulaient, intensément et sans pouvoir les contrôler, mais sur son visage, un sourire d'apaisement venait de s'installer... timide, fragile, un de ceux qui réparent...

798 mots

C'était maintenant devenu une habitude pour elle, lorsqu'elle ressentait le besoin d'évacuer un peu la pression, de se libérer de ses émotions, elle venait mettre de la musique en salle de répétition et poser des mouvements sur ses maux.

Sans public, sans jugement.

Ce soir, elle avait juste besoin de penser à autre chose. Elle était sans réponse d'un ami de son "autre vie" coté moldus, depuis un temps qu'elle considérait comme trop long. Bien sur, c'était tout relatif et le fait qu'elle prenne les choses bien trop à cœur que ce qu'elle n'aurait dû était seulement le fruit de son hypersensibilité maladive.
Elle avait toujours eu besoin de comprendre, qu'on la rassure, et ses moments sans réponses réveillaient des failles plus profondes chez elle, comme une impression d'abandon complètement injustifié.

Elle savait que, de là ou il était, sa vie était bien trop remplie pour pouvoir être disponible si souvent pour ses réponses mais sans vraiment y songer son cœur saigné un peu, son esprit trop apeurer de perdre quelque chose auquel elle tenait bien trop.

Est-ce que l'absence de communication affaiblissait leurs liens ? Elle espérait que non. Est-ce que ces hiboux réguliers, et qui lui permettait d'être un peu plus elle-même dans ce monde compliqué ne lui faisaient pas plus de mal par leurs absences en contrepartie ? Peut être un peu, mais elle n'aurait rien changé à cela pour autant. Elle n'avait pas envie de perdre le fils tendu entre leurs deux univers, bien différents mais qui étaient devenus si important pour elle.

Elle crier intérieurement et extérieurement de savoir son humeur si dépendante de ces mots absents.

Les mouvements qu'elle faisait sur la musique, en force et en fragilité aussi, donnaient le ton de son état. Parfois déterminer à ne pas se laisser déborder par son ressenti qui n'appartenait qu'a elle, parfois complètement dépasser par ses crises d'incertitudes qui la rendait fébrile.

Elle dansait sa peur de ne pas compter tant que cela.
Elle dansait sa force d'être entière et vraie quoiqu'il en coute.
Elle dansait.
Elle dansait et ses pas portaient ses émotions bien plus loin, lui laissant un moment de tranquillité, de vide et d'apaisement.

Demain était un autre jour, les réponses qu'elle attendait resteraient peut-être lettre morte.

Demain était un autre jour, et les mots qu'elle recevrait la feraient surement esquisser un sourire de soulagement.

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Plus rien n’était logique dans la tête d'Éli. À la fois heureuse et complètement perdue, elle était étroitement retenue par des pensées qui ne la quitter pas, et qui auraient dû ne jamais se trouver dans son esprit. La petite fille avait grandi, elle avait atteint un âge ou la découverte d'elle-même commencé à lui poser question, son corps changé et ce qu'elle ressentait parfois venait bouleverser toutes ses certitudes. Elle explosait, bouillonnée, hurlée de l'intérieur, et en une demie seconde, elle avait envie d'en rire, de se moquer d'elle-même, se trouvant ridicule d'être si ambivalente.

Son cœur battait trop vite, pour tout, pour rien, et souvent pour eux alors qu'il n'aurait dû battre que pour lui.

Le soir, seule face à son jugement, elle se détestait d'aimer cette dimension ou tout paraissait simple et limpide, ou les yeux de l'un ne rivalisé pas avec ceux de l'autre, ou tout glissé sur elle en ne causant aucun dégât collatéral.
Elle se détestait d'y penser, mais chaque nuit, elle rejouait leur histoire.

En arrivant dans la salle de répétition ce jour-là, Éli avait un furieux besoin de lâcher tout ce qu'elle avait contenue au cours de la journée pour ne pas s’écrouler. Le regard de son amie, son incompréhension, les larmes qui noyaient une culpabilité bien trop présente, elle avait juste besoin de faire le vide. Ne plus penser à rien, effacer dans un mouvement ses incertitudes, corriger d'un pas ses égarements, balancer sur la musique ce qu'elle pensait être sans issue.

Lorsque le son résonna, juste pour elle sur le palier des répétitions solitaire, ses mouvements décomplexés livrés comme une thérapie, explosèrent sans retenue. Glissant, frôlant, désorientés, miroir parfait avec son esprit embrumé. Elle avait franchies des limites qu'elle pensait ne jamais outrepasser, avec Red, avec Constance, avec elle-même. L'impression que chaque décision qu'elle avait choisi de prendre ces dernières semaines, n'avaient était qu'une suite d'écarts bien trop grands pour elle.

À peine perceptibles pour les autres, toutes ces pensées négatives accumulées venaient d'imploser, ses pieds tremblants effleuraient le sol, son corps en effervescence dansait sans limites, ses mains pénétraient l'air avec force, prolongeant ses mouvements jusqu'au bout des doigts, complètement libérés des contraintes et du jugement. Le bruit de son cœur accompagnait le tempo dans une cadence parfaite, transcendant son improvisation, riposte à son mal-être.

Elle dansa jusqu'au tarissement de la moindre pensée... Glissant jusqu'au sol, le dos contre le mur, exténuée, des images de Lucia lui revenait. Elle avait toujours considéré la danse comme un exécutoire, une bouée de sauvetage, une façon d'exprimer ses blocages, mais cette fois elle compris vraiment ce que son amie pouvait ressentir. La libération totale du vide assourdissant écrasant tout, jusqu'à ne plus ressentir que l'essoufflement, le muscle trop meurtri qui ne laisse aucune place au reste... Le souffle court, son sourire entremêlé de larmes, Éli comprit enfin l'exquise douleur de cette amnésie passagère.


@Gideon Atwood, @Redose Omniak, @Constance Nelson, @Lucia Varalta