LE PREMIER JOUR DU RESTE DE TA VIE...
1er Septembre 2047 - 11h
Gare de King's Cross - Londres
Voie 9 3/4 - Poudlard Express
@Nyxis Calderon

En ce premier jour de septembre, c’était avec excitation mais non sans une certaine appréhension qu’Ernest avait rabattu le couvercle de sa malle, prêt pour une nouvelle année scolaire. À la différence que cette année, il ne poursuivrait pas son cursus dans une école moldue comme ça avait été le cas jusqu’à présent. Comme la plupart des enfants de sorciers, le petit garçon possédait des aptitudes magiques héréditaires qui avaient commencé à se manifester quelques années auparavant. Et comme la plupart des enfants de sorcier, une fois les onze ans révolus, il s’était retrouvé face à une lettre envoyée par hibou lui étant expressément adressée. La première de sa jeune vie de sorcier.

À présent, il se tenait là, prêt à quitter le foyer familial pour entamer sa toute première année d’études à l’école de sorcellerie Poudlard. Depuis l’arrivée de la fameuse lettre, le petit brun n’avait cessé de se réjouir. Il avait dévoré la plupart des livres qui figuraient sur la liste de fournitures et sa curiosité à l’encontre du monde magique semblait insatiable. Enfin, il allait pouvoir lui aussi marcher dans les pas des membres de sa famille et prouver qu’il était digne des pouvoirs qui lui avaient été transmis et de son héritage. C’était sans compter sur cette petite boule qui commençait à lui serrer le ventre. Ernest n’avait jamais été séparé de ses mamans bien longtemps. Il était partagé entre l’effervescence de ce nouveau départ et la peur de l’inconnu. Et comme souvent dans ces cas-là, le garçon ne révélait aucune émotion.

Se rendre à la gare de King’s Cross avait été plus délicat que prévu. Tirer sa grosse malle dans le métro aux heures de pointe n’était pas une tâche aisée. Ils s’y mirent à trois, lui et ses mères et arrivèrent finalement à destination non sans quelques difficultés et quelques regards suspicieux. La gare était immense. Le flot de voyageurs pressés était incessant et Ernest fut rappelé à l’ordre plusieurs fois par sa mère tant son attention s’éparpillait. Et puis il l'aperçut exactement comme il l’avait imaginé. L’entrée de la voie 9 ¾. Un mur de brique, en somme. Sa mère lui avait expliqué la démarche à de nombreuses reprises et même si le petit brun était familiarisé avec le monde magique, l’idée de foncer dans un mur ne le mettait pas tout à fait à l’aise. Après quelques mots d’encouragement, il se décida finalement à prendre son élan.

Et Ernest passa de l’autre côté du miroir. Ou de l’autre côté de la barrière magique. Entre la voie 9 et 10, la voie 9 ¾ à destination de Poudlard était à très animée. Des sorciers de tout âge s’agitaient sur la plateforme en compagnie de leur famille. Certains chariots étaient plus remplis que d’autres, Ernest compta un certain nombre de hiboux, quelques chats et une multitude de créatures plus exotiques. Lui n’emmènerait que Margareth, sa plante carnivore qu’il tenait précieusement sous le bras. Si certains élèves étaient déjà vêtus de leur cape de sorcier, d’autres comme lui, portait des vêtements moldus tout à fait classique. Une paire de basket, un jean et un sweet à capuche. Le complet d’un adolescent de onze ans.

Elianor Stevens, sorcière de son état, avait pris les choses en main pour assurer une place confortable à son fils à bord du Poudlard Express. Elle avait du caractère, sa mère, et ne s’en laissait pas raconter. Elle avait aussi l’expérience de ses propres années à Poudlard. Une fois la grosse malle chargée dans un compartiment, tous les trois redescendirent sur la plateforme pour les dernières embrassades et les dernières recommandations. Lucy Morgan ne put s’empêcher de verser une petite larme qu’elle tenta de dissimuler au regard de sa femme et de son fils. Elle était sensible, sa mère. Assez pour que la boule qui nouait l’estomac d’Ernest se resserre un peu plus.

“Il sera de retour à Noël… Il a onze ans. Il est temps de le laisser faire ses propres expériences.”

Elianor était pragmatique. Elle leva les yeux au ciel face aux reniflements sonores de sa compagne. Mais c’était pour ça qu’elle l’aimait, non ? Un signal sonore retentit dans la gare, accompagné d’une grande gerbe de fumée qui s’échappa de la locomotive rouge. Le signal pour tous les élèves de rejoindre leur place pour un départ imminent. Ernest grimpa dans le wagon et resta quelques instants dans le couloir, observant ses mères par la fenêtre qui lui adressait des signes d’encouragement. Un nouvel avertissement sonore et il sentit quelques secondes plus tard le mouvement saccadé du train qui se mettait en branle. Onze heures tapante. Des hordes de parents saluaient le départ de leurs enfants. Peu à peu, la plateforme s’éloignait de lui. Ou plutôt, c’était lui qui s’éloignait d’elles. Son regard resta accroché au quai de la gare jusqu’à ce qu’il ne puisse plus apercevoir Elianor et Lucy. À présent, il se rapprochait d’une nouvelle vie. À la fin de la journée, Ernest ferait ses premiers pas en tant qu’élève de Poudlard. Mais le trajet serait long jusque là.

Il ne tardait à Nyxis de monter à bord du merveilleux train auquel elle ferait face dans quelques instants. Une lourde soirée de préparation du matériel de cours ainsi qu'une matinée chamboulée par le stress, l'organisation de la valise et les parents surexcités à l'idée que leur petite fille fasse son entrée à Poudlard, avait précédé cet instant. Les centaines de fois où Mme Klove avait demandé Comment te sens tu ? n'avait qu'accentué l'envie de quitter cette maison de la petite fille. Elle avait tellement attendu ce moment. Le jour où enfin, elle, une simple sorcière vivant avec des parents, prendrait son envol dans le monde magique, et tracer son propre avenir. Cependant, elle redoutait plusieurs choses. En effet, il lui faudrait sûrement rencontrer des élèves. Se faire des amies. Se perdrait-elle dans le château ? Comment seront les professeurs ? Dans quelle maison serait-elle envoyée ? Et si elle n'était pas à Serpentard ? Bien trop de questions fusaient à travers son esprit, lui donnant mal au crâne. Le seul point positif était que la gare King's Cross n'est pas bien loin de Covent Garden, n'obligeant pas la blondinette à attendre un long trajet en voiture avant d'arriver sur les lieux. Mr Calderon lui avait expliqué l'année dernière que pour trouver la gare 9¾, il fallait traverser un mur de pierre. Quelle idée insensée n'est ce pas ? Pourtant, il le faudrait bien.

À présent, elle et ses parents étaient face à ce fameux mur, entre deux quais, et des centaines de personnes courant dans tout les sens pour prendre leur train. Comment les moldus font-ils pour ne jamais repérer les sorciers ? Nous passons tout droit dans un mur et personne ne l'a jamais remarqué ? Stupide monde... Elle pris une grande inspiration avant de courir, derrière son chariot, vers cet endroit. Elle ferma les yeux pour ne pas voir ce qui l'attendait. Lorsqu'elle les rouvrit, elle n'en cru pas ses yeux. Un magnifique train noir et rouge, avec une fumée sortant de la locomotive, ce qui lui sembla des milliers de wagons, et juste en face, une multitude d'enfants et de parents, saluant leurs enfants, les accompagnant dans le train, les câlinant, se trouvait devant elle. Au moins, c'est le bon endroit. Ses parents ne tardèrent pas à la rejoindre, et, d'un geste affectueux, l'enlacèrent, après quoi, ils tournèrent le dos et partirent en sens inverse. Ils avaient confié à Nyxis qu'elle devrait se rendre seule à l'intérieur, car un travail important et secret les attendaient. Désormais, elle devrait se débrouiller. Poussant son chariot bien trop lourd, elle se fraya un chemin à travers la foule, et réussi à se hisser dans un wagon, après avoir risqué de tomber sur les rails, poussée par une mère peu prudente.

Dès lors, les cris des parents inquiets se transformèrent en des échanges plus calmes et étrangement rassurant. Nyxis soupira. Ça y est. Elle y était. Tout allait s'arranger à présent. Elle réussi à trouver un compartiment vide où elle pû ranger sa valise dans l'étagère appropriée, après quoi la blondinette se laissa tomber sur la banquette. Ses mains tremblent. Serait-elle en train de stresser ? Non, bien sûr que non. Elle ne voulait pas y penser. Quelques minutes passèrent. Le silence troublant donna l'envie à Nyxis de se précipiter à l'extérieur, espérant trouver quelqu'un. Qui aurait cru qu'elle aurait tant besoin de discuter ? Sa montre se mis à sonner. L'alarme programmée la nuit dernière fonctionnait. 11 heures. Elle entendit le signal de départ, et, peu à peu, sentit le train avancer. Son coeur se serra. Elle ne voulait pas l'admettre, mais ses parents, malgré tout, allaient lui manquer. Mais, surtout, Jane. Bien trop de choses à porter, pour une enfant de 11 ans. Appuyant sa tête contre la fenêtre, quelques larmes s'échappèrent de ses yeux. Mais pas de simples larmes. Celles, qui, pendant quelques années, s'étaient accumulées chez la jeune fille.

@Ernest Stevens, désolée pour le retard

À l’arrière du train, dans l’un des compartiments les plus éloignés de la locomotive, les affaires d’Ernest attendaient qu’il les rejoignent. Après quelques minutes où il avait regardé le train recracher les rails depuis le couloir, il s’était finalement décidé à partir s’assoir. Le trajet serait long, il n’allait pas rester debout comme ça pendant les cinq ou six heures qui lui restait à attendre jusqu’à l’arrivée à Poudlard. Trop absorbé par l’instant du départ, par les visages des ses mères qui s’éloignaient et le sentiment qu’il n’était plus possible à présent de faire machine arrière, l’adolescent n’avait pas remarqué que quelqu’un d’autre s’était glissé dans l’espace que sa mère avait choisi pour lui.

Ce n’est qu’au moment de refermer la porte coulissante qui remarqua la présence de la petite blonde et sursauta. Est-ce qu’il s’attendait vraiment à faire le trajet jusqu’à l’école tout seul ? Le moment où il devrait adresser la parole à quelqu’un était inéluctable. Il ne s’était juste pas préparé à ce que ce soit à cet instant précis. Pas de cette manière.

“Euh… Bonjour… c’est.. euh… mes affaires… là…”

Il pointa sa grosse malle installée dans les filets comme pour justifier sa présence dans le compartiment. Elianor avait une sacrée force pour être capable de la soulever à cette hauteur. Elle n’avait même pas usé du sortilège de lévitation. Sa phrase hachée retomba dans le vide alors qu’il remarqua les yeux humides de la jeune fille et les traces de larmes qui avaient dû rouler sur ses joues. Les siennes rosirent légèrement, gênées d’avoir interrompu la demoiselle dans sa détresse. La tristesse, c’était très intime comme émotion.

“Euh… pardon… je… ‘fin… je peux attendre dehors… ou… revenir…”

Il se frotta l’arrière du crâne nerveusement. Pas fameux comme première entrée en matière et premier contact dans l’histoire de Poudlard. Ou plutôt dans son histoire de Poudlard.

@Nyxis Calderon

Ernest voyait bien qu’il était arrivé à un moment inopportun et qu’il dérangeait. Ses joues rougirent presque autant que celles de la jeune fille qui lui faisait face et il baissait les yeux alors qu’elle essayait de reprendre contenance. La gêne, il connaissait. Et si ça faisait plusieurs années qu’il ravalait ses larmes ça ne voulait pas dire pour autant qu’il n’en avait plus. Il avait simplement appris à les cacher sous la timidité. Il s’installa sur la banquette face à elle, mais plus près de la porte, son sac serré sur ses genoux. C’est qu’il ne savait pas vraiment où se mettre.

Si l’adolescent avait appréhendé les premiers contacts qu’il aurait avec d’autres élèves, à présent c’était fait. De nature très introverti, il aurait bien été capable de passer les six ou sept heures de trajet le regard fixé sur la banquette sans un mot. C’était sans compter sur la petite blonde qui se décida à reprendre la parole. Le petit brun n’était pas sûr de savoir s’il s’agissait d’un soulagement ou non. En tout cas, c’était plus facile quand ce n’était pas lui qui parlait.

“Nan… ‘fin… t’as pas à t’excuser… tu m’as pas… ‘fin… ça arrive… c’est… humain…”

Lui aussi avait le cœur lourd en pensant à ses mamans restées sur le quai de la gare. Mais un autre sentiment cohabitait avec la nostalgie, celui de la curiosité insatiable, de l’impatience de découvrir Poudlard. Enfin ! Ernest rougit un peu plus en même temps qu’il fronça les sourcils. Pourquoi le remerciait-elle ? Il n’avait pourtant rien fait. Cela dit, il avait subi assez de moqueries, de quolibets et autres persiflages pour se dire que l’indifférence, c’était déjà pas si mal. Il n’était néanmoins pas si indifférent que cela. Les larmes des autres le rendait très mélancolique. Il n’aimait pas l’idée que quelqu’un puisse souffrir.

“Euh… Ernest… Stevens…”

Il tenta d’esquisser un sourire. Discret, mais bien présent.

“Je… je trouve pas ça moche… ‘fin… c’est… pas commun, c’est sûr… mais pas moche… Calderon, c’était le nom d’une guérisseuse mexicaine… t’as des origines d’Amérique du Sud ?”

Ernest aimait lire surtout quand il s’agissait d’histoire de la magie. Dans son esprit se formaient un panthéon des sorciers, des arbres généalogiques et des figures héroïques qui peuplaient son imaginaire d’enfant. Peut-être que lui aussi, un jour, il serait un grand sorcier et qu’il vivrait des aventures incroyables. Il en rêvait en tout cas. D’apprendre la magie et de devenir invincible. Pour que plus personne ne se moque jamais plus. Pour que plus personne ne soit jamais blessé.

@Nyxis Calderon

Nyxis s'appuya un peu plus contre le rebord de la vitre. À mesure que le train avançait, les dernières maisons disparaissent, indiquant que nous quittions dorénavant les villes. Et ça n'est pas plus mal. La jeune fille souhaitait plus que tout le soutien d'un peu de verdure, un environnement qui l'apaise, d'autant plus que les teintes grisâtres des maisons aux alentours ne sont guère plaisante.

Ses remerciements avaient dû surprendre le garçon cer celui-ci avait légèrement rougi, et on n'avait pas besoin d'être un expert pour assurer que ses paroles étaient hésitantes. La fillette elle même ne savait pas pourquoi elle l'avait remercier. Est ce parce que, contrairement à ces enfants au parc, il avait un coeur ? Parce qu'il ne l'avait pas jugé pour ce qu'elle était, même en ne la connaissant pas ? Elle en avait simplement ressenti le besoin.

- “Ravie de faire ta connaissance Ernest. J'aime beaucoup ton prénom. Et Stevens ça fait... classe.”

Il semblait que la bonne humeur commençait à revenir, et, petit à petit, les yeux de la blondinette se réanimèrent d'une lueur passionnée.

-“Si tu le dis... Ah je ne savais pas, mais non je ne crois pas avoir de telles origines. Ça serait incroyable ! J'irais me renseigner.”

Mexicaine ? Amérique du sud ? Elle n'en n'avait jamais entendu parlé. Lui aurait-on caché ses réelles origines ? Aucune idée. Mais, ça l'intriguait plus qu'autre chose. Ça vaut bien un coup d'oeil dans un bouquin ça !

- “Tu as l'air bien informé. Tu aimes l'histoire ?”

Il est vrai que sa remarque sur la guérisseuse lui avait valu un sourire. Étrangement, elle avait mis son orgueil de côté et avait apprécié la mini reference historique que lui avait exposé son camarade. En temps normal, elle se serait senti inférieure et stupide de ne pas l'avoir su. Elle aurait tué pour dire Oui, je sais. Enfin, tué, c'est un grand mot.

Désolée pour le retard