J'escaladais rapidement l'escalier en direction de la volière, le petit paquet ficelé caché sous ma robe de travail. Emballé avec soin, les ingrédients : un peu de poudre verte, un sachet de crochets de serpent, un demi flacon de sang de salamandre et quelques foies de chauve souris ; mon maigre butin, ne pesait pas bien lourd mais si mon oncle se débrouillait bien, il en tirerait peut être huit ou dix mornilles.

Ce n'était pas grand chose au regard de la difficulté. Subtiliser les restes d'ingrédients des cours de potion n'était pas non plus sans risque. Mais malgré mes efforts, je savais que Lalo ne serait pas content. Il ne me le dirait pas ou alors, d'une manière détournée. Peu importe, c'était la dernière fois. Je ne pouvais pas continuer à me mettre dans de telles situations.

Après avoir salué deux élèves Serdaigle dans le grand escalier, l'une d'entre elle était Astrid Keaty, je laissais le sixième étage derrière moi pour gravir les dernière marches qui me séparait du dernier palier. Malgré ma hâte, je détestais l'endroit. L'odeur et la saleté qui y régnaient me dégoutaient à chacune de mes visites et, je me félicitais de ne pas avoir encore de volatile à soigner. De toute manière, les hiboux de l'école faisaient l'affaire comme à chacun de mes échanges avec mon oncle.

Je poussais la porte et m'engouffrais dans la volière.

@Astrid Keaty pour la mention

Mercure devenait véritablement un as des filatures. Cela était probablement du à de nombreuses missions perpétrées au cours de ses premières années dans le château avec sa complice, Nox. Mais aujourd'hui elle avait décidée d'agir seule, car cette aventure ne la concernait qu'elle. Et peut-être Lavinia Campbell. Mais tout ceci n'était qu'un détail, pour Tamsin à l'heure actuelle, il n'y avait que sa cible en vue. Elle avait peiné à croiser ce garçon dans la salle commune — car peut-être passait-il trop de temps dans son dortoir, ou bien ailleurs, et il avait été impossible de le prendre la main dans le sac. Mais ce jour là, alors qu'elle était plongée dans un ouvrage sur la Divination, ses yeux faussement portés sur les pages du livre, elle l'avait vu. Ezra Waite. Ou plutôt elle les avait vu. Lui et son colis sous le bras. Impossible de s'y méprendre au vu des informations qu'elle possédait. Et même si un léger pourcentage de doute pouvait subsister, la tentation était trop forte. Elle claqua d'un bruit sec son livre et le fourra sous son bras, bien décidée à le suivre où qu'il aille.

Et de couloirs en couloirs, d'escaliers en escaliers — son livre de Divination comme alibi, alors qu'elle s'adossait parfois entre deux armures pour le feuilleter de manière nonchalante — elle le suivait avec une agilité et une discrétion sans faille, digne des plus grandes détectives. Plus ils montaient dans les étages, plus elle se questionnait sur comment découvrir ce que contenait le paquet. En donnant quelques cours à Lavinia, elle avait pu lui extorquer une maigre information sur ce fameux Waite, mais la jeune blonde n'était pas décidée à cracher entièrement tous les morceaux et le puzzle demeurait partiellement complet. Sans preuves, il était difficile d'acculer le voleur. Alors, en arrivant au dernier escalier qui montait à la volière et à ses pestilentielles fientes, elle décida de sang-froid d'y aller au bluff et le suivi comme son ombre dans l'antre des oiseaux postiers.

Dans la salle circulaire balayée de courants d'air, des yeux jaunes se tournèrent pour me fixer. L'endroit sale était empuanti par un mélange d'odeur de fiente et de moisissures de vieilles pierres.
Sur le sol, des plumes et de multiples pelotes de réjection formaient une croute grisâtre qui craquait sous mes pieds en produisant un son écœurant. Je m'arrêtais pour laisser mon regard cheminer d’alcôve en alcôve avant de l'immobiliser sur l'une d'entre elle dans laquelle je reconnus mon messager habituel.

Il s'agissait d'une femelle brachyote aux iris jaunes entourés de disques blancs, au plumage brun rayé et au poitrail clair parcouru de flammèches sombres. Belle et majestueuse, mon choix avait surtout été guidé par le fait qu'elle ressemblait aux strigidés que je connaissais dans les tourbières des Marshes.

Je traversais donc l'espace qui me séparait du volatile et, une fois à sa hauteur, posais comme une offrande mon paquet devant ses serres avant de sortir de l'une des poches une petite souris morte que je lui tendis en guise de repas. L'oiseau n'hésita presque pas. Il goba le rongeur puis émit un petit cri strident que je pris pour un remerciement.

"Tu as eu l'air d'aimer mon petit cadeau. Je t'en apporterai une autre si tu emmènes ce paquet pour moi. Il est pour Lalo Bowen. Tu le trouveras au même endroit que la dernière fois."

Un nouveau cri, m'indiqua que l'oiseau semblait avoir compris mon ordre. Il n'attendait maintenant plus que mon signal pour prendre son envol.

RPGWRIMO : 249 mots

Prête à pénétrer à son tour dans la volière pour prendre le jeune Waite la main dans le sac, Tamsin émit un geste de recul au dernier moment. Comment ? Oui comment diable allait-elle si prendre pour le piéger ? Le jeune sorcier avait certainement plus d'un tour dans son sac et elle ne pouvait décemment pas l'accuser alors même que le colis qu'il venait de mettre entre les serres de l'oiseau n'était pas transparent. Se sortir d'une mauvaise passe serait aisé, il plaiderait pour un lot de friandise ou n'importe quoi d'autres. Alors...

Il était peut-être trop tard, car elle était sortie de l'ombre de sa cachette et défiait déjà le voleur du regard. Au bluff elle avait dit, elle ne pouvait y aller qu'ainsi : « Plus un geste Ezra Waite. » Elle espérait que cette entrée fracassante ferait sursauter son camarade et que, transit de peur, il avouerait tout. Dans ses rêves les plus fous. Car Tamsin en justicière, ça n'avait pas de grand sens, mais après tout, elle aimait sortir de cette zone de confort dans laquelle elle s'était trop longtemps lovée. Elle s'approcha à pas lents et acheva de s'arrêter dans son dos, baissant la voix pour éviter que n'importe qui puisse entendre cette conversation. Après tout, cela pouvait tout à fait rester entre eux. « Je sais ce qu'il y a dans ce paquet et crois moi, je n'hésiterais pas à balancer si tu laisses cet oiseau de malheur partir avec. » Elle n'était pas forcément menaçante non, le ton virait clairement au jeu. Et pour une fois, elle était fière de mener la danse.

A la première injonction, je sursautais. Trop occupé avec le volatile, je m'étais bêtement laissé surprendre. Le timbre de voix, féminin, ne me parlait guère mais la mention complète de mon nom ne laissait que peu de doute, l'individu me connaissait. A ce stade, ses manières ressemblaient plus à une farce puérile : "Haut les mains, peau de lapin !". Je ne me retournais pas, ni ne répondais. Je ne goutais guère l'envie de plaisanter alors que j'en finissais avec mon larcin. Mais bientôt, je sentis la personne se rapprocher doucement alors qu'un parfum inattendu et citronné atteignait mes narines. Cette effluve bienvenue s'avérait plaisante et familière. Ce qui suivit, par contre, me fit frémir.

Qui ... ?

D'une volte, je me pivotais et me retrouvais le devant le visage pâle, quasi albinos d'une troisième année dont les traits singuliers, tout comme le nom, ne m'étaient nullement inconnu :

Tamsin Gillis

Son regard gris sous sa frange droite miroitait d'espièglerie et, pour l'avoir déjà observée, je savais que la Serpentard avait pour elle plus d'un tour dans sa baguette. J'admettais aussi qu'elle n'était pas du genre à se soucier des règles, ses sorties nocturnes avec une autre fille de la maison ne m'avaient pas échappé. Il y avait matière à discuter. J'ironisais :

"Je ne savais pas que Mr Kohler avait nommé une nouvelle stagiaire. A combien ma tête est mise à prix ?"

@Tamsin Gillis

Elle une balance ? Clairement pas. Rien à voir avec son signe astrologique de Poissons. Loin d'elle donc, l'idée d'aller rapporter ce qu'elle avait vu, surpris ou entendu. La preuve en était : ce que Lavinia lui avait confié, elle l'avait conservé pour elle et décidé de mener sa petite enquête seule. D'abord il lui fallait une preuve tangible de ce qu'on lui avait murmuré. D'autre part, Veronica avait beaucoup à faire de son côté cette année aussi et il n'était pas rare que certains secrets se révèle sur le tard. Toutefois rien ne prédisait qu'elle ne partagerait pas ses découvertes croustillantes avec son amie. Si découverte croustillante il y avait, car pour faire parler ce drôle d'oiseau, Tamsin comprit rapidement qu'il allait falloir ruser, comme tout bon Serpentard sait le faire.

Un sourire rapide passa sur les lèvres de la sorcière. Ezra rentrait clairement dans son jeu et l'ironie qui teintait ses paroles ne plu pas particulièrement à Tamsin. Elle gardait toujours en mémoire l'amer confrontation avec le concierge lors de ses débuts à Poudlard, aussi préféra-t-elle ignorer son sarcasme. Stagiaire du concierge, et puis quoi encore ? « Pas si chère que ça, ne prend pas trop la confiance. »

Elle minimisait la distance entre eux, révélant ainsi qu'elle n'était pas là pour le clouer au pilori, mais plutôt pour satisfaire sa propre curiosité. L'odeur pestilentielle des fientes lui rappela le pourquoi du comment elle ne s'était pas procuré de hibou personnel — outre leur prix à la Ménagerie. « Et puis ce serait comme donner un Gallion à un Niffleur que de renflouer ta famille avec une récompense pour ta tête non ? Vous n'êtes pas assez riches comme ça, il faut en plus que ... » Elle désigna du menton le petit paquet, qui était source de cette entrevue inattendue. « Tu te serves dans la réserve de l'école ? » acheva-t-elle à demi-mots. Il n'était plus temps de jouer, si les informations de Lavinia était vraies, elle espérait discerner sur le visage de l'adolescent au moins une trace de surprise. Si par contre elle se méprenait... Elle n'osa pas y penser, le rouge menaçant de lui monter aux joues.

D'accord, Tamsin n'était clairement pas là par hasard. M'avait elle suivi ? Possible. Pour ne pas éveiller les soupçons, j'avais parcouru le chemin jusqu'à la volière sans le moindre subterfuge, naturellement, comme n'importe quel élève qui s'apprêtait à envoyer un courrier. Ce n'était donc pas un tour de force, la filature avait été un jeu d'enfant. Non, le tour de force, ce qui était plus habile et pour moi déroutant, c'est que la troisième année semblait bien renseignée. Trop bien renseignée, ce qui me m'était sur mes gardes et elle, en danger.

Donc, elle sait..

Mon cerveau réfléchissait à tout allure. Même si ses informations sur la provenance des ingrédients étaient erronées, elle connaissait la nature de ce que mon paquet contenait. Comment faisait elle ? Je l'ignorais. Quelqu'un pouvait m'avoir vu en cours de potion et lui avoir rapporté. C'était le plus plausible. Dans quel intérêt ? Me nuire... Je n'avais pas d'ennemis et, pas non plus d'affinités. Faire l'intéressant...

Je ne montrais rien. Je n'aimais pas son ton, ni ses manières et surtout ne comprenait pas ce qu'elle pouvait tirer de moi avec ses accusations. Mais, elle savait. Je m'approchais de son visage, les yeux plantés dans ses prunelles grises et entre mes dents serrées par la colère, je la questionnais :

"Qu'est ce tu veux Tamsin ?"

@Tamsin Gillis

Un sourire de démone affleura sur ses lèvres. Tamsin n'était pas la reine du chantage, c'était d'ailleurs une pratique qu'elle n'avait jamais envisagée d'utiliser. Mais force était de constater que tenir entre ses doigts un oisillon en cage, lui procurait une satisfaction étrangement plaisante. Ezra Waite était à sa merci. Ce qu'elle voulait ? Elle même n'en savait franchement rien, mais peut-être qu'il pourrait lui être d'utilité publique plus tard ? Et si elle en touchait deux mots à Veronica, il y aurait fort à parier que son amie saurait quoi faire de ce chantage.

Mais aujourd'hui la gamine avait décidé de se débrouiller seule et de tirer le meilleur parti de son espionnage en solitaire. La réaction du garçon ne laissait que peu de place au doute : il avait quelque chose à se reprocher et il tentait de louvoyer pour préserver son secret contre n'importe quelle monnaie échange. Que voulait-elle ? De l'argent ? Clairement pas. Elle n'avait aucune avidité pour les Gallions ronds, sonnants et trébuchants.

Ce qui l'intéressait c'était de posséder des informations que d'autres n'avaient pas. Comme ce que Lavinia lui avait révélé et qui lui permettait aujourd'hui de faire pression sur son camarade de Serpentard. Mais pour le moment...

« Rien. »

Elle ponctua cela d'un sourire. Amer et pernicieux. Elle n'avait besoin de rien, juste de savoir que le jour où il lui faudrait quelque chose, elle avait la poids de la balance avec elle.

« Du moins pour le moment » ajouta-t-elle. « Ton tour viendra Ezra. Soit simplement prêt quand ça arrivera. »

Et sur ces bonnes paroles, elle tourna les talons, prête à partir, maintenant qu'elle savait le méfait accompli et le venin distillé dans les veines du jeune Waite. Qui sait, peut-être qu'elle rentrait se faufiler en salle commune pour tout balancer à leur directrice de maison.