Il ne prendrait pas Solenn pour une maman. Il en avait déjà une et il essayait déjà de la rendre fier, il ne pouvait pas non plus se permettre de vouloir rendre fier tout le monde, il n'y arriverait pas. Elle ne serait pas une maman, mais elle était devenue en l'espace de quelques minutes une personne à faire confiance, et c'était sûrement pour ça qu'il s'était blotti contre elle comme ça, parce qu'il se persuadait qu'elle ne lui ferait pas de mal et qu'il pouvait compter sur elle. S'appuyer sur son épaule pour oublier qu'il avait l'impression de s'effondrer à chaque pas et lui montrer que quand elle tomberait, il serait là aussi pour la rattraper. Il ne le dirait pas à voix haute, il ne saurait pas comment faire pour ne pas que ça paraisse bizarre. Il n'était pas très fort avec les mots, Edwin, il laissait la plupart du temps ses gestes parler pour lui. Il se souvenait d'avoir été très tactile, mais à Poudlard il avait souvent peur de toucher les gens. Ca lui manquait parfois, le contact, les sourires des gens, miroir au sien. Bien sûr à Londres ça n'avait jamais été le grand amour entre lui et les autres mais sa mère avait toujours été la première à le câliner dès qu'il lui en prenait l'envie. Il n'avait pas eu beaucoup d'amis, mais sa mère avait été là. Petit à petit, il s'était dit que tant qu'elle était là, il n'avait pas besoin d'avoir des amis dehors.

Il sourit doucement. Solenn c'est joli. Ca ressemble au soleil et t'es rousse en plus... j'crois que le soleil il a la même couleur dans l'espace. Il s'enroule plus dans ses habits en soupirant J'ai l'impression que devenir un sorcier c'est compliqué, et que je vais jamais y arriver.

La fatigue le rendait bien plus bavard. La fatigue et la situation si douce. Il lui semblait qu'à l'instant, ils étaient dans une bulle et qu'il pouvait tout lui dire. Ce n'était sûrement pas vrai, mais il se sentait si calme, si apaisé que les mots sortaient tout seul, roulant sur sa langue et se répercutant contre les murs comme les dizaines de milliers d'étoiles et leur reflet.

Ce serait super chouette... fredonne-t-il doucement La prochaine fois, ce sera à moi de t'aider, ok ?

Retard ? qui a dit Retard ?

La remarque du garçon fit disparaître son sourire, mais elle ne fit aucun commentaire.



Elle se rappela Cassiopée, sa brune aux yeux émeraudes. "Tu es comme un soleil."
Elle, elle était sa lune.

Solenn sortit de ses pensées qui auraient pu la mener loin et ramena son esprit ici, avec Edwin. Penser à Cassy était toujours douloureux mais moins triste peut-être ? La brune lui manquait toujours et elle lui manquerait toujours.
Elle partagea son expérience alors, avec un sourire sincère aux lèvres.

La réponse du garçon lui fit hocher la tête malgré elle. Elle ne pouvait mentir délibérément, continuer à dire que tout était beau, tout était simple à Poudlard. Surtout en ce moment, où le contexte politique était plus étrange que jamais et avec tous ces nuages noirs à l'horizon.

Elle reporta ses pensées sur l'environnement extérieur. Là, tout était silencieux. La nuit tombée avait emporté le bruit avec elle, avait déposé un voile sur le monde, et c'était délicieusement agréable. Rester ici pour toujours ? Même avec le poids de la tête du garçon sur ses épaules, Solenn signerait.

La réponse du garçon la fit rire légèrement. Elle ne s'était pas attendue à cette réflexion et ne répondit rien en premier lieu. L'idée de s'épancher sur ses problèmes à Edwin, un garçon qu'elle venait de rencontrer semblait comique. De toute façon, il lui faudrait lui raconter toute sa vie et c'était une pensée effrayante.

-Je ne sais pas si c'est possible de m'aider pour mes problèmes...

Elle avait dit cela sans vraiment y réfléchir mais le regretta tout de suite. Elle commençait presque à s'y habituer, elle ne pouvait compter les gaffes qu'elle avait déjà sorti.

Désolée pour le retaaaaard

Il ne remarque pas qu'il a dit quelque chose de mal, en fait, il ne remarque jamais et là il est de toute façon bien trop fatigué pour y faire attention. Il a l'impression de pouvoir s'endormir là, alors que le mur et le sol de pierre ne sont pas du tout confortables. Mais pour la première fois depuis longtemps il se sent assez apaisé pour réussir à s'endormir rapidement. Le professeur d'astronomie serait sûrement en colère s'il le voyait là au matin, il aurait un sacré savon et sûrement un coup de froid en même temps alors il lutte pour resté éveillé. Il ne veut pas que ce moment s'arrête. Il ne veut pas retourner à sa vie où il doit courir après tout le monde pour garder le rythme. Là il peut se poser, laisser ses jambes se reposer. C’est agréable, et même bien plus que ça. A ce moment là, il est presque entièrement blotti contre la rousse et il n’a pas la désagréable impression que le toucher lui brûle la peau. Il est doux, apaisant. Il fait du bien au lieu d’être agressif et violent. C’est doux, comme l’air nocturne, comme les étoiles qui laissent des reflets dans la pièce, comme la lune qui les garde sous sa lumière.

Pas grave chuchote-t-il doucement Je t’aiderais quand même Combien de fois avait-il pensé que ses soucis à lui étaient incurables ? Toujours, en fait. Et elle, elle avait balayé ça en le laissant hurler un bon coup et en trouvant les bons mots. Peut-être que ce n’étaient pas les meilleurs, sûrement même parce qu’il n’y en avait pas de miraculeux, mais sur le coup c’était tout ce dont Edwin avait eu besoin. Quelqu’un d’honnête et qui s’intéressait à lui. Ça pouvait paraître égoïste et ça l’était sûrement mais il avait eu besoin de ce petit moment où il avait l’impression d’être important, que quelqu’un s’intéressait à lui. A comment il allait même s’il ne voulait pas être faible, même si le montrer lui faisait mal au ventre.

C’était bizarre d’avoir dit tout ça à une fille qu’il ne connaissait pas, et il ne savait pas pourquoi ni d’où il avait tiré l’idiotie de le faire mais il était bien content d’avoir laissé de côté sa fierté pour le moment. C’était agréable de ne plus devoir tirer sur tout son corps pour tenir debout, pour garder la tête haute alors qu’elle pesait deux tonnes. Même ses épaules semblaient tirer pour se baisser et ça faisait physiquement mal de se tenir droit à ces moments là, mais il se sentait obligé de le faire, obligé pour quelqu’un qui n’était même pas là. Mais ses yeux le suivait partout, et Edwin voulait rendre sa mère fière de lui, et pour lui, devenir un sorcier était simplement impossible même s’il voulait la rendre heureuse. Peut-être même qu’elle détestait qu’il soit ça, sûrement. Et pis impossible c'est qu'un mot, et il est naze.

Leur contact était maintenant établi depuis longtemps, et Solenn en avait presque oublié ce que c'était de ne pas ressentir la chaleur du corps du garçon. Ils étaient bien là. Elle ne voulait plus se dégager, échapper à son contact. Non, elle découvrait maintenant qu'elle en avait besoin, que son être se sentait trop seul tout le temps. Sa mère l'enlaçait quelquefois. La dernière fois, c'était alors que Solenn revenait de l'hôpital après avoir vu pour la dernière fois Trinity. Abigail l'avait pris dans ses bras et les deux étaient restées longtemps comme ça. Solenn n'avait pas beaucoup pleuré, mais l'idée de ne plus revoir la brune pour partager leur passion commune l'avait brisé un peu plus. Elle devrait s'être habitué à voir partir les gens qu'elle aimait, mais en vérité c'était toujours un déchirement.
L'air nocturne commençait à s'infiltrer entre les mailles de ses vêtements et un frisson sortit Solenn de ses pensées. Elle entendit les paroles d'Edwin et ne put répondre. Ces mots l'avaient prise de court, elle en avait perdu la parole. C'était rempli de gentillesse, d'attention. C'était si pur. Solenn n'y était pas habituée et elle ne put empêcher les quelques larmes qui montèrent.

-Merci.

Sans qu'elle ait pu le cacher, sa voix était pleine de larmes à son tour et elle espéra que le brun ne se décide pas à la regarder. Heureusement, Edwin fit un autre commentaire qui la fit rire. Elle renifla légèrement et s'essuya avec sa manche pour ensuite répondre :

-"Ils ne savaient pas que c'était impossible, alors ils l'ont fait". Tu crois que tout est possible ?

Pourrait-elle un jour réussir à se libérer de son passé ? Devrait-elle pour toujours tirer le poids des événements ?

-Pac'que peu importe combien de fois j'essaie d'y croire, ça marche pas.

Elle regretta alors ses paroles. Edwin avait onze ans, pourquoi être aussi pessimiste ? Elle essaya de se rattraper et lui murmura :

-Mais si toi t'y crois, c'est que c'est possible.

Edwin était plutôt câlin, même s'il avait souvent ses vagues à ne pas vouloir toucher les gens. Avec sa mère ça avait souvent posé problème parce qu'elle ne l'était, elle, jamais quand lui en avait envie ou alors très peu. Alors il avait fini par ne plus du tout aimé les câlins à un moment donné parce que c'était plus facile comme ça, mais ici, contre Solenn il se sentait parfaitement bien. Elle n'était pas particulièrement douce, elle ne sentait pas le parfum comme toutes les filles maquillées à l'extrême et ça rendait tout ça parfait. Il se blotti un peu plus contre elle quand il sent qu'elle commence à pleurer et blotti son visage dans son cou, les yeux fermés. Et il profite un petit moment, juste comme ça, à la serrer fort contre lui sans vraiment trop savoir si elle en avait envie aussi ou s'il était le seul à avoir ce besoin de contact ce soir. Peut-être que tout cela la dérangeait et qu'elle allait le dégager, que trop de câlins ça la rendrait mal, mais c'était pas grave. Il s'excuserait en faisant semblant de ne pas être blessé et ça irait, au moins il aurait eu un corps contre le sien et un cœur qui bat sous son oreille pendant quelques minutes. Il aurait bien aimé avoir un frère ou une sœur, juste pour ça.

J'en sais rien, y'a des trucs impossibles, genre marcher quand t'as pas de jambes mais je suppose que... je suppose que quand c'est pas pour un truc physique ou de l'argent qui t'en empêche, alors c'est possible. Faut juste faire des efforts et se dire que tu peux y arriver et ça ira Il n'avait pas l'impression d'être un sorcier pare que physiquement il n'arrivait à rien. Pas à se sentir bien, pas de sorts et pas d'explosion de magie comme tous les autres en parlaient. C'était comme si la sienne ne s'était jamais réveillée, et Edwin n'était pas sûr de si elle se réveillerait un jour.

Il se serre un peu plus contre elle pour lui apporter un semblant de réconfort. Il n'est pas doué pour faire autre chose. J'crois pas en grand chose mais faut essayer, si t'abandonnes maintenant y'aura jamais rien qui va se passer Il n'avait pas cru à la magie alors c'était compliqué de se dire que ça arriverait. Il se sentait un peu pathétique de lui dire de croire en tout ça alors que lui-même ne croyait pas en lui ou en Poudlard. Ou en tout ce qui pourrait bien arriver à partir de maintenant. Mais bon, il essayait de se persuader des choses même sans y croire parce que ce serait toujours ça de prit. Tu tremble, tu veux rentrer ?

Impossible, n'était-ce qu'un mot parmi tant d'autres, comme le disait Edwin ? Est-ce qu'il était possible de laisser la barrière que ce mot formait de côté, d'être capable d'aller au delà de la définition ? Si la décision d'abolir cette frontière était revenue à Solenn, l'aurait-elle prise ? Aurait-elle été celle qui aurait rendu tout possible ?
Elle s'autorisa à ne pas répondre à cette question. Faire un choix, émettre une réponse, cela l'effrayait. Elle ne voulait pas cette responsabilité. Elle voulait juste que les gens qu'elle aimait reste près d'elle. Elle voulait juste enlever ce poids sur sa poitrine, qui comprimait son coeur et ses poumons et l'empêchait de bien respirer, de prendre le temps d'apprécier. Apprécier le bonheur que les autres pouvaient chercher à lui offrir, apprécier les petites victoires, les desserts au chocolat, les petits dessins qu'elle trouvait gravé sur les tables de cours, les sourires des autres, les victoires de Quidditch - ou au moins ressentir l'excitation du match lorsqu'on arrive à entrer dans l'euphorie -, les rires, tous ces petits détails qui rendaient la vie plus supportable, agréable même.
Oui, voilà tout ce qu'elle voulait. Ce n'était pas sorcier dit comme ça, mais beaucoup de choses la retenait d'y parvenir, ou du moins de garder cet état d'esprit plus que quelques minutes.

Elle écouta Edwin répondre à sa question, et se permit de rajouter quelque chose qu'elle trouvait important de noter. Elle espérait qu'Edwin comprenne qu'elle le disait spécialement pour lui.
Le garçon donnait beaucoup de signaux contradictoires. Tantôt il lui soutenait qu'il ne fallait toujours essayer, tantôt il semblait totalement perdu et Solenn avait l'impression qu'il souhaitait abandonner. Mais peut-être suffisait-il que quelqu'un le lui dise ? Peut-être avait-il besoin de l'entendre, et pas simplement de le dire ?

-Et ça peut prendre beaucoup de temps, d'essayer. Mais ça veut pas dire qu'il faut pas le faire.

Quelle ironie ! Solenn Cooper donnait des conseils sur comment ne pas abandonner, comment persévérer. Si elle s'était réécoutée, elle aurait sûrement rit vu le ridicule de la situation.
Car Solenn n'était pas capable de voir les efforts qu'elle réalisait chaque jour. Elle travaillait de plus en plus, et ne parvenait pourtant pas à se rendre compte qu'elle n'était pas réellement une perdante. Car elle essayait. Elle faisait de son mieux.
Et surtout, elle continuait de croire. Elle voulait aller mieux, c'était une promesse qu'elle s'était faite, qu'elle avait faite à Cassiopée. Et cette promesse, qu'importe les obstacles, elle voulait la tenir.
Mais malheureusement, Solenn, aussi têtue qu'Edwin apparemment, ne voyait que les efforts des autres et pas les siens. C'était bien plus facile de cette façon.

Elle tourna légèrement sa tête, même si le visage du brun n'était pas accessible à son champ de vision, et répondit dans un petit sourire :

-Non, ça va. Mais si tu veux rentrer, tu m'le dis, hein ?

L'idée que le Serpentard puisse vouloir partir était étrange, désagréable. Elle était bien ici, et elle espérait de tout cœur que ça soit la même chose pour lui.

et plus qu'un RP+ pour la meuf qui m'inspire le plus sur Terre, que dis-je ! dans l'Univers entier ! y'aura jamais d'extraterrestres pour te détrôner *émoji couronne*

Les choses pouvaient prendre du temps.

C'était étrange pour Edwin de se dire qu'il aurait toujours le même combat dans plusieurs mois. C'était peut-être pour ça qu'il était, sans en être vraiment conscient, incapable de vraiment essayer de se plaire ici. Le cœur n'y était juste pas et l'esprit refusait de partir dans quelque chose qui userait trop d'énergie pour un résultat qu'il n'était même pas sûr d'atteindre. Et s'il ne se plaisait jamais à Poudlard ? Est-ce que cela voudrait dire qu'il serait destiné à essayer sans succès pendant des années ?

Les nuits londoniennes semblaient si éloignées en cet instant. Il se sentait étrangement bien malgré cette donnée, mais ce n'était pas fait pour durer. Ce soir ça allait parce qu'il n'était pas tout seul et parce que Solenn arrivait, même un peu, à lui donner espoir pour la suite. Qui pouvait dire avec certitude qu'une fois rentré dans son dortoir, les incertitudes ne viendraient pas à nouveau lui bouffer la cervelle ? Personne, et surtout pas Edwin. Peut-être que c'était destiné à mal se passer parce qu'il n'avait aucun espoir que les choses s'améliorent, ou peut-être que même s'il avait eu de l'espoir ça se serait passé aussi mal que maintenant. Ne pas espérer ça faisait mal, mais ça évitait bien des déceptions.

La seule chose pour laquelle Edwin avait encore un espoir pratiquement infaillible, c'était rendre fière sa mère. Plus tard, cet espoir faiblirait mais à cet instant, il était encore persuadé qu'il y arriverait un jour. Que ça prendrait juste du temps, comme Solenn le disait. Le petit espoir qu'un jour il serait là où il était destiné à être, que ce soit à Poudlard ou à la maison, à Londres. Actuellement, il avait l'impression d'avoir le cul entre deux chaises et d'être nulle part et partout à la fois. Le soucis, c'est qu'il ne savait pas du tout où il devait mettre son énergie ni même où il était destiné à aller. Son énergie s'égrainait partout et il n'arrivait même plus à penser correctement. La voix de sa mère résonnait dans son esprit en même temps que celles de tous les sorciers qu'il avait déjà croisé. Les quelques cons de Serpentard, les profs, Solenn. Comment savoir en qui avoir confiance ? Et même s'il pensait que Solenn était quelqu'un de confiance, est-ce que cela durerait ?

Edwin se leva, époussetant son pantalon Je pense que je vais rentrer moi, j'ai... il faut que je rentre, et j'ai beaucoup à réfléchir. Briser la bulle qu'il avait créé avec Solenn lui faisait mal au cœur. La boule dans son estomac était revenue au galop à peine la mention de rentrer à son dortoir avait quitté ses lèvres. Cependant, c'était obligatoire. Ils ne pouvaient pas rester toute la nuit ici, et Edwin commençait sérieusement à fatiguer. Il fallait rentrer tant qu'il arrivait encore à voir clair, même si son cœur aurait préféré rester avec Solenn.

En se cachant un peu plus dans son haut pour éviter le froid mordant de la nuit, il fit un petit signe à Solenn avant de s'éloigner pour rejoindre les escaliers. Une promesse de se retrouver à nouveau plus tard, ici ou autre part, Edwin fila rejoindre son dortoir, l'esprit déjà un peu plus léger.

RP fini