Pendant longtemps, la noiraude avait détesté Krimrok, son mentor. Ses secrets, ses excentricités, sa disparition soudaine… Elle lui en voulait de ne pas lui avoir dit qu’il comptait l’envoyer ici, de l’autre côté de l’océan. L’allemand avait toujours un coup d’avance, même quand il n’était plus là. Etait-il vivant, était-il mort, elle n’en savait rien. Tout ce qu’elle savait, ce qu’il avait réussi à convaincre un de ses amis de l’engager elle, une parfaite inconnue.

Cela faisait moins d’un an qu’elle avait quitté l’Allemagne, et quelques mois qu’elle avait finalement obtenu son premier appartement, au Mexique. Son patron, Reginaldo Furtado de Ávila, un collectionneur brésilien, n’avait pas compris son besoin d’avoir un chez elle, étant donnée qu’elle était sans arrêt entre deux voyages. Mais tant qu’elle faisait son travail, il ne disait rien. Et Morgan le faisait bien.

Mais c’était éreintant parfois, surtout quand elle devait supporter des abrutis pendant plusieurs jours de travail. Ce qui avait été le cas cette fois-ci. La galloise n’aimait pas devoir collaborer avec des mercenaires, elle aimait être en solitaire – sans misogynie et sans bourrins dans les jambes. Heureusement, Morgan allait avoir deux-trois jours de tranquillité, avant de retourner voir son patron, et elle en profita pour passer chez elle.

Il était tard, mais la sorcière décida de passer chez sa voisine, avec une vieille bouteille de whisky qu’elle avait trouvé par hasard il y a quelques temps. Elle lui avait déjà parlé quelques fois, et avait rapidement reconnu l’accent irlandais de la femme. C’était une drôle de coïncidence, deux femmes venant des Îles Britanniques, vivant côte à côte à l'étranger.

« Agatha t’es là ? c’est Violet, chuchota-t-elle à travers la porte tout en toquant, ne voulant pas se faire entendre des autres habitants du bâtiment. »

Le quotidien d'Agatha au Mexique commençait à rentrer dans le normal. Son ancienne vie en Irlande semblait s'effacer lentement, comme un rêve après le réveil. a vrai dire, Agatha avait l'impression de se réveiller d'un cauchemar. Ou d'en vivre un ? Son appartement n'était pas assez grand pour acceuillir tout les reliques de sa vie passée, elle avait du trier et aller à l'essentiel. Même si elle était partie pour séloigner du Royaume Uni et se rapprocher d'Izel, elle voyait peu sa fille et n'arrivait pas à reconstruire le lien. Leur relation à toute les deux impliquait Herbert, et le maillon s'était cassé. Agatha, mère et épouse, se retrouvait à quarante cinq ans seule dans un appartement en Amérique Latine, et elle se sentait triste. Pas d'une tristesse intense qui provoque des pleurs, des décisions. Elle était triste d'une douleur lancinante, toujours en sourdine qui semblait à la fois raccourcir et étirer ses journées. Pour en rajouter, les membres de sa famille ne semblaient pas comprendre cet exil, et Agatha était fatiguée d'essayer de leur expliquer. Elle était partie et ne reviendrait pas, qu'y avait t'il d'autre à dire ? Cela ne servait à rien de chercher plus loin, d'aller voir des psychomages, ou de rester dans l'ancienne maison. Qu'aurait t'elle bien pu faire d'une maison maintenant qu'elle était seule ? C'était le rêve de retraite d'Herbert, une maison dans laquelle ils pourraient vieillir avec un petit jardin dans la banlieue dublinoise, pas le sien.

De son éloignement, Agatha ressentait une sympathie particulière pour ses concitoyen. C'est pour celà en partie qu'elle avait immédiatement accorder sa sympathie à Violet, une autre anglophone qui vivait dans le même immeuble. En parlant du loup, là voilà qui toquait discrètement. Agatha se dépêcha d'aller lui ouvrir, tout en chuchotant avant de refermer la porte derrière sa visiteuse.

- Violet ? Entre vite.

Une fois la porte refermée, elles pouvaient parler normalement.

- Qu'est-ce qui t'amènes ?

La sorcière accepta vivement l’invitation à entrer de sa voisine. Elle espérait ne pas l’avoir réveillée, mais au vu sa rapidité à lui ouvrir la porte, cela devait être peu probable. Agatha aussi semblait avoir une raison d’être debout à cette heure, et peut-être que la galloise troublait la tranquillité de l’irlandaise. Néanmoins, ce qu’elle avait dans la main compenserait peut-être le dérangement que sa présence occasionnait.

« Je sais qu’il est tard, mais… »

Tard, tôt… Dans le cycle désordonnée des journées de la noiraude, ce n’était plus vraiment des notions qui s’appliquait. Ce n’était qu’entre se boulots qu’elle dormait réellement, quand elle retrouvait le confort minimaliste et la sécurité de son appartement. Mais ce soir, elle avait besoin de compagnie. De préférence, autre que les poivrots et les gens de son… milieu. Et Morgan ne connaissait pas tant de monde que ça en dehors de ces deux catégories. Sa voisine, et son fournisseur de cloporte pour nourrir Silv – il était cependant hors de question de passer une soirée avec le deuxième individu.

« Un verre, ça te dit ? », finit-elle avec un air qui se voulait convainquant, tout en montrant la bouteille de whisky. L’origine de ce liquide lui était complètement inconnu. Irlandais ? Ecossais ? Tout ce qu’elle savait, c’était la langue écrite sur l’étiquette : l’anglais.

Agatha était arrivée au Mexique en titubant, métaphoriquement parlant. Pourquoi le Mexique ? Pourquoi ne serait-ce que partir ? Tout de suite après le décès de Herbert, Agatha a fui sa maison, a fuit l'Angleterre son pays devenu dangereux qui l'a rendue veuve, et est allée sauver sa peau, si ce ce n'est son esprit, loin du décor funeste.

Agatha ne pardonnera jamais a St Mangouste. Au fond, il y a des milliers de fautifs. Ne lui a t'ont pas répète qu'un accident est un concours de fâcheuse circonstances ? C'était la faute d'Agatha de ne pas l'avoir accompagné voir Theodore. De la faute de Teddy de s'être fait avoir par une tasse mordeuse. De la faite du vendeur de la tasse mordeuse. Avec cette logique, la moitié du monde sorcier était coupable. La sorcière ne s'était pas laissé le temps de répondre à ces questions, ou de remonter le fil : comme un reflexe, elle était de retour au pays ou ils avaient vecus des jours heureux. Izel, ici, peut rentrer pour toute les vacances. Agatha sort peu, mange peu. Étrangement, après presque deux décennies de femme marie avec enfant, voilà qu'elle se retrouvait seule a nouveau. Elle se trouvait des passes temps, des occupés journées, mais tout résonnait avec un vide. En arrivant, elle pensait resserrer les liens avec Izel. Malgré une certaine complicité mère fille, Herbert avait toujours été plus proche d'Izel, et Agatha s'inquiétait du deuil d'Izel. Mais sa fille au contraire, lorsqu'elle était avec elle, refusait d'en parler, et ne semblait aller ni mal ni bien.

Boire semblait donc une solution idéale pour s'éloigner de toutes ces préoccupations. Agatha ne voulait pas savoir d'où la bouteille venait, mais simolement oublier le temps d'une soirée

je fais le ménage et j'ai retrouvé ce brouillon écrit il y a (trop) longtemps. Il est temps pour moi de partir, mais merci d'avoir fait ce bout de chemin en ma compagnie !