Samedi 12 septembre,
Aux alentours de 8h30

Depuis le samedi 5, Merinda n'était plus aussi efficace qu'avant dans ses entraînements avec Narcisse. Effectivement, la jeune métisse était désormais certaine de ses sentiments envers le Poufsouffle, mais elle n'arrivait pas à les lui dévoiler. Pourtant, elle était sûre et certaine que ses sentiments étaient réciproque... Mais comment s'en assurer sans se jeter tête la première dans le sujet ?
Ainsi, le cerveau de la Serpentard bouillonnait sans arrêt, jour et nuit, allant jusqu'à lui donner la migraine, tentant de trouver la manière idéale d'entamer cette conversation avec son ami. Tous les soirs elle se disait "demain, à l'entraînement, je lui dirai !", et tous les matins, elle ne disait rien. Ses états d'humeur pouvaient changer rapidement, et son comportement était parfois impacté. Par exemple, elle qui n'avait jamais été gênée lors des contacts physiques, se retrouvait à rougir longuement lorsqu'elle devait corriger une position de Narcisse pendant leurs entraînements, et lorsque leurs peaux s'effleuraient. Tout cela faisait que ses capacités en karaté et en Coup de Vitesse n'arrivaient plus à augmenter, et qu'elles étaient même en train de chuter radicalement.
Ce matin, en sortant de la Salle sur Demande et en empoignant sa gourde pour boire, Merinda décida que ça serait maintenant ou jamais. Tout en parcourant les couloirs avec Narcisse, elle prit une grande inspiration, avant de s'arrêter brutalement. C'était un des rares endroits où il y avait peu de tableaux, et aucune personne réelle ne passait ici dans ces heures-là.
"Euh..."
Le cran de la jeune fille fut soudain réduit à néant, et elle regretta de ne pas pouvoir revenir en arrière pour supprimer son comportement débile de la surface de la planète. Sauf qu'elle ne pouvait pas, et qu'elle venait d'enclancher le processus. La roue s'était mise à tourner, et elle ne pouvait plus l'arrêter.
"Je... Narcisse..."
Comment, par la barbe de Merlin, pouvait-elle dire ce qu'elle avait sur le cœur ?

@Narcisse Brando et @Orlaith Ó Súilleabháin, la roue est lancée !

Narcisse avait remarqué que récemment, Merinda n'était pas très en forme. Tout du moins c'est ce qu'il pensait. Là où auparavant, il devait lutter pour conserver l'avantage lors de leur sparring, depuis quelques temps, c'est à peine s'il rencontrait des difficultés. Il lisait sans problème le moindre de ses mouvements et les anticipait mieux qu'elle ne le faisait. Sans compter qu'elle avait l'air de s'être affaiblie quelque peu... Non, vraiment, il y avait anguille sous roche. Ou boursouflet sous oreiller, comme il aimait à s'entraîner à cette expression plus rigolote. Toutefois, comme il savait qu'il était nul pour lire les gens, il préféra mettre ses doutes de côté, si ça se trouve il s'imaginait des choses !

Il sifflotait gaiement en parcourant les couloirs accompagné de son ami, les mains croisées sur sa nuque, observant avec une curiosité non feinte chaque pierre du mur. Il voyait la vie en rose et tout allait bien ! Il allait prendre une bonne douche pour ensuite se consacrer à ses révisions. Comme ça, par envie. Toutefois, la voix de Merine attira son attention et il se retourna vers elle en arquant un sourcil.

« Yep ? »

Il s'approcha d'elle en croisant les bras sur sa poitrine, avant de pencher la tête sur le côté. On aurait pu voir les points d'interrogation flotter autour de lui. Depuis quand était-elle aussi hésitante pour parler ? C'était bizarre, sans aucun doute. Il leva la tête pour la regarder dans les yeux, rappelons qu'elle faisait bien une quinzaine de centimètres de plus que lui.

Après une seconde, son visage s'éclaira, et il claqua des doigts, avant de poser sa main sur l'épaule de son amie dans un grand sourire rassurant.

« Aaah j'ai compris ! T'inquiète pas Merine ! C'est pas grave si t'as un coup d'mou, j'l'avais remarqué mais j'avais peur d'me tromper ! »

Il tapota son épaule avant de hocher la tête en croisant les bras, l'air sûr de lui.

« T'inquiète ! C'est pas grave ! Si tu veux on peut faire une pause de quelques jours pour qu'tu reposes ! Héhé, pause pour qu'tu reposes, ça rime... »

Narcisse se retourna et s'approcha d'elle, apparemment surpris qu'elle n'arrive pas à s'exprimer plus clairement. Il eut un grand sourire et posa sa main sur l'épaule de la jeune fille, qui ne put s'empêcher de frissonner à ce contact. Elle eut un grand espoir lorsque le Poufsouffle s'exclama qu'il avait compris, mais il n'avait finalement rien compris du tout... Ah et en plus il avait remarqué qu'elle avait un comportement bizarre depuis une semaine ? Voilà qui n'arrangeait pas la chose...
Merinda sourit à la rime de Narcisse, mais c'était un sourire faux : le stress montait en elle, mais elle savait qu'elle devrait lui dire un jour. Alors, prenant son courage à deux mains, la Serpentard commença :
"Euh ouais... c'est pas vraiment ça... en fait... je crois que..."
Mais depuis quand était-elle aussi peu habile à l'oral ? Elle n'avait vraiment aucune idée de comment présenter la chose.
"Bah euh... je... fin, j'te trouve vraiment..."
Bon, il fallait arrêter le carnage. Sans réfléchir, sans même se rendre compte de ce qu'elle faisait, Merinda baissa la tête vers Narcisse et l'embrassa sur la bouche. Lorsqu'elle réalisa qu'elle était en train d'embrasser son ami, elle se redressa brutalement, le visage rouge comme une pivoine. C'était dit ! Enfin non, elle n'avait rien dit, mais s'il ne comprenait pas...
La Swart se pinça la lèvre inférieure avec les dents, gênée par son geste, mais également heureuse d'avoir enfin agit autrement qu'en amie. Il faut dire que depuis une semaine, elle avait plusieurs fois baissé le regard pour scruter les lèvres de son ami, se demandant ce que cela faisait quand on embrassait quelqu'un que l'on aime vraiment. Eh bien, elle n'était pas déçue !
Cependant... Narcisse avait-il aimé ça lui aussi ? Le doute s'empara de la Serpentard, et elle commença à se triturer les mains, attendant que son ami - ou peut-être plus désormais ? - entame la conversation.

Narcisse se redressa en fronçant les sourcils lorsqu'elle le contredit. Sa main se leva pour venir doucement frotter son front sous la réflexion. Si ce n'était pas ça... Qu'était-ce donc ? Dans tous les cas, il s'était bien trompé, il devait impérativement réexaminer les choses ! Il hochait imperceptiblement la tête en réfléchissant, essayant de faire fonctionner ses méninges. Une moue tordait doucement ses lèvres tandis que son index tapotait le bout de son nez. Puis elle se mit à hésiter encore plus. Il leva davantage la tête vers elle en s'approchant d'un centimètre ou deux pour mieux l'entendre. Il allait lui demander ce qui lui prenait, elle n'était clairement pas dans son état normal, et il commençait même à s'inquiéter pour elle !

Et... Eh ? EEEEEH ?! Narcisse aurait tout aussi bien se retrouver en statue de pierre en cet instant. Son visage vira entièrement au rouge, en moins d'une seconde, et ses traits reflétèrent tout sa stupeur. Bouche-bée, les sourcils froncés sous l'incompréhension et surtout la surprise. Il ne savait pas pourquoi, mais son premier réflexe fut d'avoir envie de s'essuyer les lèvres. Il referma la bouche, et ferma les yeux un court instant, juste le temps de réfléchir.

Ses parents lui avaient dit qu'il plaisait à Merinda. Ils avaient vu juste.

Tout se connecta en un éclair, et il sentit un immense poids écraser brusquement sa poitrine. Son visage se déforma très lentement. Ce n'était pas ce qu'il voulait. Il sentait des milliards d'autres sensations et d'émotions qui cherchaient à se frayer un chemin jusqu'au premier plan de sa conscience, mais il sentait aussi que s'il les laissait parler, il s'effondrerait. Non, au lieu de cela, il se raccrocha à la première chose qu'il put. Sa voix avait rarement été aussi dépourvu d'émotion, malgré le fait qu'il regarde droit dans les yeux Merinda.

« C... c'est pas bien Merine. »

Ses parents lui avaient expliqué énormément de choses, et beaucoup ne faisaient pas encore totalement de sens pour lui. Mais désormais, la leçon sur le consentement le frappa à nouveau comme un marteau l'écrasant entre le métal et l'enclume. Il secoua doucement la tête, incrédule. Un sourire nerveux déformait légèrement ses lèvres.

« Tu... tu peux pas juste embrasser quelqu'un comme ça sans lui demander avant. »

Il fronça davantage les sourcils, tout se mélangeait.

« Enfin... faut au moins en parler avant, des indices, euh, quelque chose, n'importe quoi ! J'en savais rien moi. Enfin, si, mes parents m'avaient expliqué, un peu, j'avais pas tout compris. »

Il expira de nouveau... sa main se posa sur son visage, il était brûlant, mais pas pour les bonnes raisons. Il fut toutefois énormément soulagé de voir qu'il n'en voulait aucunement à Merinda. Pour être honnête, il se sentait même terriblement coupable. Il en eut même envie de vomir. Lui avait-il donné des idées ? Alors, voilà ce que voulait dire ses parents également ? Il fallait être clair, et la moindre chose, le moindre geste, pouvait être perçu comme un signe, quelque chose à interpréter.

« Je suis désolé... Vraiment, excuse-moi Merine. »

Il prit une grande inspiration avant de plonger son regard dans celui de son amie. La détermination avait balayé pour un temps tout le reste.

« Ok, écoute-moi, super attentivement. »

Une nouvelle inspiration.

« J'ai aucune idée de c'que c'est l'amour. Genre, j'ai pensé l'être, pas mal de fois, avec Kelly, même avec toi, un peu, au début, peut-être ? J'en sais rien. J'arrive pas à concevoir ce que c'est ! Ok, j'te dis juste les choses comme elles viennent, désolé. Mais... j'ai aucune idée de c'que c'est Merine... j'crois qu'j'suis pas prêt pour ressentir ça... Genre, ça veut dire quoi être amoureux ? J't'aime beaucoup, vraiment beaucoup, ça par contre j'en suis sûr ! Mais... comme... comme une amie, comme une partenaire d'entraînement euh, vraiment, moi j'adore passer du temps avec toi ! J'te l'jure ! Mais... »

Il se mordit la lèvre en essayant de réprimer l'énorme boule douloureuse lui enserrant la gorge.

« Mais j'pense pas être amoureux... De personne d'ailleurs. J'veux dire... vraiment, j'comprends rien à ça. Et... je sais que ça va te faire mal tout ce que je dis... enfin, je le sais pas, je l'imagine... on m'a jamais vraiment dit ça... »

Le souvenir de Kelly lui expliquant les choses lui revint en mémoire, si seulement il avait son expérience ! Il leva un regard presque implorant vers son amie. Il n'avait qu'une seule envie, lui faire un câlin pour lui dire que tout allait bien. Mais pour une étrange raison, il avait l'impression que la toucher ne ferait qu'empirer les choses. Il détestait tellement faire du mal aux autres, il s'en voulait tellement, mais il n'allait pas se laisser démonter !

« Je te promets qu'on restera amis, ok ? Si tu veux toujours de ça, je peux te promettre que ça changera pas, ok ? »

Samedi matin, enfin le week-end ! C'est-à-dire une belle journée en perspective ! Orlaith était d'excellente humeur quand elle se leva, et se dirigea rapidement vers la Grande Salle. Objectif : avoir quelque chose dans le ventre avant d'aller dehors. Faire quoi, aucune idée pour l'instant, mais probablement grimper à quelque chose ou courir après une balle.
Elle descendait donc rapidement les escaliers, à moitié réveillée, sans prêter une grande attention au monde alentour. Mais elle reconnut tout de même Merinda, du coin de l’œil, en passant sur un palier. Un sourire s'afficha sur son visage, et elle se rapprocha d'elle pour lui dire bonjour.

Mais en y regardant de plus près, la rouquine aperçut un Poufsouffle en compagnie de son amie, un Poufsouffle qu'elle reconnut après s'être frottée les yeux pour complètement se réveiller comme étant Narcisse. Son sourire s'élargit encore, ça faisait longtemps qu'elle ne l'avait pas vu, c'était l'occasion de le voir !
Mais... Mais... Qu'est-ce qu'ils faisaient là ?! Pourquoi... Mais Merinda, elle était pas amoureuse de lui, si ? Pourquoi elle l'embrassait ? Parce que c'était bien un bisou non ? Mais Narcisse c'était pas... C'était pas un amoureux quoi. Fin déjà, la Gryffone l'aimait bien hein, mais il était quand même vachement moins beau que Merinda, et puis il était super naïf, alors qu'elle elle était grave intelligente, et forte, et courageuse, et...

Non, mais pourquoi elle irait l'embrasser lui ?! Elle était incroyable, alors que lui il était... gentil. C'est bien, gentil, mais ça fait pas un amoureux quoi. Un amoureux, ça devrait être plus que gentil. Surtout l'amoureux de Merinda ! Enfin ça, c'était bien ce qu'Orlaith se disait.
Sûrement parce qu'au fond d'elle-même, elle se disait qu'elle, elle aurait fait une bien meilleure amoureuse. Mais ça, elle ne l'avait toujours pas réalisé. Elle ne comprenait juste pas. Comment elle pouvait embrasser Narcisse ? Alors que... qu'il y avait plein d'autres personnes. Qui seraient mieux à embrasser.

D'ailleurs, même Narcisse semblait du même avis ! Il... La Gryffone n'entendait même pas ce qu'il disait. Elle l'observa juste repoussa son amie, son visage complètement décomposé. Presque livide. Non mais pour qui il se prenait ?! Non, clairement, comment c'était possible ? Si c'était elle que la Serpentard avait embrassée, elle ne l'aurait jamais repoussée !
La fillette resta bouche-bée, fixant la scène sans même entendre les paroles qui étaient échangées. Enfin, qui étaient lancées par l'autre surtout, parce qu'il avait pas l'air de s'arrêter. Non mais pour qui il se prenait, sérieusement ! Y'avait la plus belle fille de Poudlard qui voulait de lui comme amoureux et il disait non ! Mais... mais Orlaith elle aurait jamais dit ça. Elle l'aurait jamais repoussée.

Merinda réatterrit dans la réalité lorsque Narcisse ouvrit la bouche.
"C... c'est pas bien Merine."
Le monde tourna puis s'effondra autour de la Serpentard. D... de quoi ?
"Tu... tu peux pas juste embrasser quelqu'un comme ça sans lui demander avant."
La jeune métisse réalisa soudain ce qu'elle venait de faire, et elle recula d'un pas, comme pour montrer à son ami qu'elle ne lui ferait plus de mal, avant de se confondre en excuses, ignorant les larmes qui tentaient de sortir mais qu'elle retenait :
"Je... j'suis désolée Narcisse ! C'est que... j'arrivais pas à m'exprimer, et puis je croyais que..."
Elle s'arrêta là, n'arrivant pas à aller plus loin. Elle ouvrit de grands yeux lorsque le Poufsouffle lui dit que ses parents lui avaient expliqué... Honor avait deviné qu'elle était amoureuse de lui avant même qu'elle-même ne s'en rende compte ? Mais comment pourrait-elle regarder de nouveau la mère de son ami ? Enfin, la question ne se posait pas, puisque Narcisse ne l'inviterait sûrement plus chez lui désormais...
Merinda écouta son ami lui expliquer qu'il ne savait pas ce qu'était l'amour, et plus il parlait, plus les larmes montaient aux yeux de la Serpentard. Mais elle ne pleurerait pas devant Narcisse. La situation était déjà assez honteuse pour en rajouter... Le "J't'aime beaucoup, vraiment beaucoup !" du Poufsouffle n'améliora pas les choses, et en tournant la tête sur le côté pour cacher ses yeux qui commençaient à se troubler par les larmes qu'elle retenait, Merinda découvrit Orlaith au bout de couloir !
Orlaith ! Mais qu'est-ce qu'elle foutait là ?! Se taper la honte devant Narcisse n'était apparemment pas assez, il fallait aussi que celle qu'elle considérait comme sa meilleure amie se pointe là et l'observe passer le pire moment de sa vie ? Merinda détourna le regard de manière à cacher le début de ses larmes aussi bien à Narcisse qu'à Orlaith.
"Et... je sais que ça va te faire mal tout ce que je dis..." continuait Narcisse.
Ah bah oui, là ça faisait bien mal ! Les papillons que la jeune fille avait ressentis dans son ventre quelques minutes plus tôt avaient été exterminés par une avalanche de chagrin, et elle n'arrivait même plus à retenir ses larmes ! Elle sentit une perle d'eau salée couler le long de sa joue, et elle espéra de tout son cœur que personne, ni de Narcisse ni d'Orlaith ne la verrait. Si elle faisait mine de l'essuyer avec le revers de la main, son masque serait brisé.
"Je te promets qu'on restera amis, ok ? Si tu veux toujours de ça, je peux te promettre que ça changera pas, ok ?"
Bien évidemment qu'elle voulait rester son amie ! Il croyait quoi ? Que son amour disparaissait comme ça, emmenant au loin toute trace d'amitié ? Que maintenant qu'elle savait que ce n'était pas réciproque elle se foutait de lui ? Nan, elle ne marchait pas comme ça. Elle aurait aimé que, d'un coup, elle ne soit plus amoureuse et que tout redevienne comme avant ! Mais ses sentiments persistaient et ça faisait mal. Cependant, elle ne comptait pas ignorer Narcisse. Elle continuerait d'aller à leurs entraînements tous les matins, de s'asseoir à côté de lui dans les matières où ils étaient à côté, mais elle tenterait d'oublier peu à peu ses sentiments. Elle vaincrait le mal par le mal, en espérant que ça marche. C'était sans compter l'espoir.
"Bien sûr que j'veux rester ton amie... Fin..."
Pourquoi les larmes fuyaient ? Pourquoi n'y avait-il pas une barrière infranchissable, un barrage pour empêcher les pleurs de couler ?
"Je... j'aurais préféré ne pas savoir... c'que c'est qu'être amoureuse, tu vois..."
Elle prit une grande inspiration.
"J... j'avais raison quand... quand j'disais qu'c'est l'cauchemar l'amour..."
N'en pouvant plus de retenir ses larmes en vain, Merinda se détourna totalement de Narcisse, et commença à partir vers l'autre bout de couloir - celui où n'était pas Orlaith - en essayant de marcher normalement, ni trop vite ni trop lentement. Au fond d'elle, elle espérait que Narcisse la rattraperai, mais elle ignorait comment elle réagirait.

Hiii je m'attendais pas à faire un pavé comme ça, désolé Elle me fait trop de la peine Narc hésite pas à la rattraper hein Ou Orlaith ?

Narcisse leva les mains au niveau de sa tête, en la secouant doucement.

« T'inquiètes pas, tu es pardonnée. »

C'était le moins qu'il pouvait lui accorder, un pardon pour ce petit écart. Ce n'était vraiment pas important à ses yeux, là tout de suite. Ce qui comptait, c'était de faire en sorte qu'elle puisse aller bien. Car même lui, qui était particulièrement nul pour percevoir les émotions des autres, malgré tous ses efforts, devinait sans peine tous les tracas que ressentait son amie. Il la vit détourner la tête, et devina également pourquoi.

Mais il ne pouvait rien y faire.

Il ne pouvait rien y faire, il ne pouvait pas lui mentir, il ne pouvait pas enjoliver la vérité, ni la détourner, ni la contourner, ni l'atténuer, il ne pouvait juste pas faire ça ! C'était inconcevable. Aussi choisit-il de se taire. Pour une fois dans sa vie, il préférera le silence.

Il soupira de soulagement lorsqu'elle lui dit qu'elle voulait toujours rester son amie, c'était rassurant. Il secoua doucement la tête en croisant les bras sur sa poitrine.

« Je suis désolé Merine... Vraiment, j'aurais aimé qu'ce soit réciproque, mais c'est pas l'cas, et j'peux pas t'mentir. »

Il aurait voulu en ajouter davantage, il aurait voulu s'étendre à l'infini sur le sujet pour la rassurer, pour juste continuer de lui parler et qu'elle ne soit pas livrée à elle-même, mais elle le prit de court. Lorsqu'elle se détourna, il fit un pas en avant en tendant le bras, puis il se figea. Il sentit la main de ses parents sur son épaule, et il entendit la voix de son père. "Laisse-lui du temps, tu ne peux rien faire tout de suite."

Sa mère aurait rajouté qu'il n'aurait pu qu'empirer les choses s'il lui courait après. Mais ils en avaient de bonnes eux ! Il n'avait qu'une envie c'était de la rattraper ! Mais il se mordit l'intérieur des joues et baissa le visage, avant de prendre une grande inspiration.

« Tu reviens m'voir quand tu veux ! Promis ça changera rien entre nous, ça j'peux t'le promettre ! »

Mais il ne la suivit pas. Il se contenta de la regarder un instant, avant de s'adosser contre le mur à côté de lui en passant sa main sur son visage. Il ne réalisait pas pleinement ce qu'il ressentait, c'était trop flou et trop abstrait, ça n'avait aucun sens, et il aurait besoin de temps pour digérer...

Quand des larmes commencèrent à glisser sur les joues de Merinda, la Gryffone resta figée. Elle ne savait pas si elle devait réagir, elle ne savait pas vraiment ce qu'elle faisait là en fait. Visiblement, elle n'aurait pas du être là. Personne ne l'avait invitée, et elle avait assisté à quelque chose qu'elle n'avait aucune envie, mais vraiment aucune envie de voir.
Et maintenant, elle ne réussissait toujours pas à faire demi-tour alors que la Verte expliquait qu'elle était amoureuse de Narcisse, mais que l'amour était un cauchemar... Oui, sur le moment, elle n'allait sûrement pas dire le contraire. Elle avait l'impression qu'on venait de lui glacer tout son corps, qu'elle ne pouvait plus rien ressentir. Comme si elle avait été anesthésiée d'un coup, violemment. Comme si maintenant, elle ne ressentirait plus jamais quoi que ce soit.

A part une espèce de douleur lancinante, de déception de la part de son amie, d'espoir gâchés. Elle l'observa, hésitant à courir vers elle pour la prendre dans ses bras et la consoler ou rester à sa place, loin de cette histoire. Mais Merine fit le choix pour elle, puisqu'elle s'enfuit dans l'autre sens. Elle avait clairement croisé son regard, mais si elle n'allait pas vers elle, c'était qu'elle n'était pas prête.
Bon. Elle avait le droit.
Narcisse lui cria après avant de s'affaler contre le mur, comme s'il était exténué et qu'il ne parvenait même plus à tenir sur ses jambes. Son amie avait envie d'être seule, alors elle n'allait pas la suivre. Mais elle avait besoin de comprendre, de partager.

Elle avança alors doucement, complètement vidée. Elle avait ressenti un peu de colère envers le Poufsouffle mais en fait, même s'il l'avait blessée, il avait été gentil avec elle. Peut-être qu'elle pourrait parler avec lui alors, peut-être qu'il saurait qu'en fait, Merinda racontait n'importe quoi, qu'elle rigolait, que c'était une blague entre eux...
Peut-être qu'il pourrait lui expliquer. Orlaith se rapprocha et se laissa tomber au sol aux côtés de Narcisse. Sans trop savoir par où commencer, elle fit craquer tous ses doigts dans le lourd silence des couloirs vides. "Alors... Alors elle est vraiment amoureuse de toi, Merine, tu crois ?" Elle laissa un silence avant de continuer, d'un trait de voix. "P't'être qu'elle voulait rigoler... Ou faire la grande en t'embrassant..." Du regard, elle fixait l'endroit où avait disparu la brune, comme tentée de la rattraper. Elle n'attendait qu'une validation du garçon pour y aller.

Tout était tellement confus et mélangé. Rien n'avait de sens, rien n'avait d'explication. Comment cela pouvait-il être possible ? Narcisse secoua doucement sa tête entre ses mains, tentant vainement de démêler ses pensées entremêlées et enchevêtrées les unes aux autres encore plus que d'habitude. Sérieux, ça voulait dire quoi, être amoureux ? Avoir envie d'embrasser l'autre ? Bah non, puisque sa mère avait déjà embrassé certains et certaines sans être amoureuse... La vision de son père sur l'amour semblait déjà plus compréhensible que celle de sa mère. Mais même s'ils leur avaient expliqué, il n'arrivait pas à comprendre, c'était tout simplement hors de ses capacités intellectuelle encore immatures.

En temps normal, il était peu probable qu'il aurait pu remarquer l'arrivée d'Orlaith à ses côtés. Mais en cet instant, un éléphant aurait pu marcher à côté de lui, qu'il ne l'aurait pas entendu. Ce fut les craquements de ses articulations qui attirèrent son attention, et il lui lança un salut de main sans force, le regard perdu dans le vide, le regard éteint.

Un soupir, il secoua la tête, l'air impuissant, cherchant ses mots durant plusieurs longues minutes, jetant des regards dans la direction où Merinda venait de partir. Un haussement d'épaules.

"Purée j'en sais rien, je, ça m'paraît absurde, enfin, j'veux dire, pourquoi ? Ça fait pas d'sens d'être amoureux d'moi, c'est trop tôt, et puis j'sais même pas c'que c'est l'amour ! Oh la la..."

Ses mains se plaquèrent sur ses joues.

"Si elle voulait rigoler c'est pas drôle du tout, on joue pas avec ce genre de chose, le consentement et les bisous c'est du sérieux !"

Il regarda dans la direction où avait disparu son amie, s'appuyant sur sa main, dont le coude reposait sur son genou.

"Mes parents m'diraient qu'c'est pas une bonne idée que j'retourner lui parler tout d'suite, mais j'ai pas envie qu'elle soit toute seule... Et puis, purée, elle doit être tellement triste ! Non vraiment, l'amour c'est compliqué... C'est beaucoup trop compliqué, j'en veux pas..."

Il ramena ses genoux contre sa poitrine, sous son menton, en s'y accrochant doucement, simplement pour s'appuyer davantage contre le mur. Son soupir laissa échapper une partie de ses inquiétudes.

"Elle mérite mieux d'toutes façons, ça c'est clair héhé !"

Orlaith n'avait jamais vu Narcisse dans cet état-là. Toute la joie de vivre qui brûlait d'ordinaire en lui, qui le rendait même parfois insupportable, semblait éteinte définitivement. Comme si elle était tellement fragile qu'il avait suffit d'un léger souffle pour y mettre fin. Mais la Gryffone était tellement absorbée par sa propre morosité qu'elle n'y prêta aucune attention.
Non, à ce moment précis, il ne comptait pas vraiment dans ses pensées, comme s'il était simplement un personnage secondaire destiné à valider ce qu'elle se disait déjà. Son silence ne la dérangeait donc pas : après tout, s'il ne disait rien, c'est qu'elle avait raison. Que Merine voulait rigoler...

Et elle sursauta quand le Poufsouffle reprit la parole, d'un coup. Ses braises devaient s'être enflammées de nouveau... Mais le son de sa voix reconnecta la fillette à la réalité. Lui non plus... Lui non plus il ne comprenait pas, mais s'il ne savait même pas ce que c'était l'amour, comment elle pouvait être amoureuse de lui ?! Ça ne se faisait pas, c'était pas correct ! C'était pas possible d'aimer quelqu'un qui ne savait pas ce que c'était... Si ?
Mais sa détresse augmentait en flèche. La rouquine ne savait pas vraiment de quoi il parlait, le consentement ça ne lui disait rien, mais ce qui était vrai, c'était qu'on ne rigolait pas avec ça. Il suffisait de voir l'état dans lequel ils étaient maintenant, tout les trois. Si Merinda n'avait pas essayé de l'embrasser, ils n'en seraient pas là...

Peut-être qu'au fond d'elle, Orlaith savait qu'elle n'avait pas essayé de rigoler, qu'elle savait que ce genre de choses ne s'y prêtait pas, mais elle tentait de s'en convaincre. Comme si elle s'agrippait à un faible espoir que cet amour pour Narcisse soit inventé, imaginé pour rire. "C'est... C'est pas drôle mais ça peut arriver, d'faire des blagues pas drôles..."
Elle soupira. "Ou p't-être qu'elle s'est juste trompée, qu'elle a cru qu'elle t'aimait alors que non. Ou qu'elle sait pas c'que sait le contement*..." Mais elle se tut quand il reprit la parole. Son cœur s'accéléra d'un coup. Non, il fallait pas qu'il aille la voir ! Si quelqu'un allait la voir c'était Orlaith ! Ou sinon elle restait seule, mais s'il y allait, elle allait peut-être encore vouloir l'embrasser et ça, c'était pas possible !

"Je... Si elle est partie... C'est, c'est qu'elle a plus envie d'te voir ! T'as pas voulue l'embrasser en même temps, c'est normal !" La fillette s'était emportée, tentant de le convaincre de rester au fond de ce couloir, loin, bien loin de la Verte. "Elle s'ra triste un peu, mais après elle s'rendra compte que c'est mieux comme ça, que c'est nul l'amour comme t'as dit !"
Elle déposa ta tête contre le mur derrière elle, se relâchant un peu. Elle ne savait même pas ce qu'elle faisait là au lieu de réconforter son amie, mais le cœur n'y serait pas vraiment si elle y allait. Et puis, Merine lui avait bien signifié qu'elle ne voulait pas la voir. "J'espère qu'elle s'en rendra compte, que... Qu'elle mérite mieux. Quand on sera plus grands."