Je hoche la tête, la mine sérieuse comme si ma vie en dépendait. J’avais l’impression de fomenter un plan absolument terrible pour des gens qui ne méritait pas moins. Je suis Augustin dans son rire malsain, dans une imitation un peu naïve.
Une étrange chaleur se propage dans mon cœur et mes joues, sur lesquelles je plaque mes paumes glacées. Je n’ai pas envie de rougir devant lui ! Je ne veux pas qu’il me prenne pour un petit farfadet mignon et tout fragile. Mais ce qu’il me dit résonne encore en moi comme un doux refrain. Je hoche à nouveau la tête, mais cette fois plus timidement. Je crois dur comme fer à sa promesse, de ce que j’ai pu voir du Serpentard, ce n’est pas trop compliqué de concevoir que celui-ci se vengera sans sommation.

Mes yeux se plantent alors dans les siens, un peu plus hauts que moi. Son air se fait plus sérieux, presque menaçant et je recule mon visage de quelques centimètres en fronçant les sourcils. Jusqu’où souhaite-t-il me protéger ? Si j’ai accepté de le suivre, je l’assumerai jusqu’au bout, quoi qu’il en coûte.

— Je fais p-pas que te suivre, Aug. Je suis d’a-d’accord avec tout ça. On rigolera en-ensemble, comme on se fera… p-punir ensemble. J’suis p-pas un bébé. Dis-je, la mine presque boudeuse en croisant les bras sur ma poitrine.

Jamais je ne dirai que c’est de sa faute. En tout cas, pas uniquement de sa faute. Certains diraient que j’ai un côté loyal de Poufsouffle, moi je préfère dire que j’ai ma fierté de Serpentard.

Nous continuons notre trajet jusqu’à la grande salle, le couloir, l’escalier et enfin nous arrivons à l’endroit tant rêvé. Je m’approche discrètement de la rambarde et jette un œil au-dessous. Je pouffe d’un rire moqueur.

— I-ils sont tous là, ces nu-nullos.

Revenant vers Augustin, je sors ma baguette que j’avais rangée entre temps.

— Sort de lé-lévitation ?

Bon, le petit blondinet savait dans quoi il s’embarquait, et cela rassura instantanément Augustin : ils ne fonçaient pas tête baissée dans un plan foireux et ça lui plaisait.

Une fois la porte passée, les deux acolytes arrivèrent finalement derrière la rambarde sans se faire remarquer. Nore évoqua la possibilité d’utiliser un sortilège de lévitation.

- Mmh, si tu veux mon avis, ça fera pas assez mal, nan faut quelque chose de plus direct.

Il avait bien quelque chose en tête, mais il n’était pas sûr que Nore le suive dans son action.

- Perso je suis plutôt pour leur envoyer une grosse boule dans la gueule, et j’ai déjà ma cible.
Il avait dit tout cela en fixant le Gryffondor qui lui avait tenu tête : il ne semblait pas très malin et vide de tout intérêt, mais c’était un gros bras. Malgré l’humiliation devant tous ses amis, il était resté fier, sentiment qu’Augustin voulait voir partir de son visage.

À la bagarre, le petit serpent blanc gagnait tout le temps même s’il n’était pas foncièrement musclé, il plaçait ses coups droits et justes et les envoyaient avec une force qu’il pouvait balancer dans son point droite ou gauche.

Et là, avec une boule de neige glacée, il était certain de faire mouche à quelques mètres et de faire pleurer ce petit prétentieux. Il le méritait après tout.

@Nore Winter, alors bourrin ou magie?

J’approuve, les lèvres pincées. Est-ce que j’en étais capable ? Lancer une grosse boule de neige délibérément dans la tête d’un autre élève ? Après ce qu’ils m’avaient fait, oui. Sans aucun doute. Dans certains cas, la magie n’était même pas de mise.

— T-t’as raison. Ils méritent mmmême pas qu’on les déglingue avec la ma-magie.

Suis-je influençable ? Peut-être un peu. Je suis petit, rabaissé, jeune et introverti. Évidemment que je cherche l’acceptation de ceux que je trouve grands et impressionnants. Mais je m’en fiche. J’assumerai plus tard si je fini par trouver les ennuis. Pour le moment je m’amuse presque. D’harcelé je passe à harceleur, et même si l’idée ne me réjouis pas tant que ça, tout cela plaît bien à mon égo constamment rabaissé par ce genre d’élèves.
Je suis des yeux le garçon qu’Aug a prit pour cible. Pas étonnant, il avait l’air d’être le pire. J’ai fait mon choix aussi. Celui qui ne cessait de me suivre du regard en continuant de se moquer, le même qui a débuté cette bataille de boule de neige, d’ailleurs. Il se prendra toute ma haine et ma vengeance dans la face. Et j’espère qu’il le sentira passer.

Un dernier regard à l’encontre de mon nouvel ami et je sors la belle boule de neige que j’avais faite qui commence déjà à fondre avec ma chaleur corporelle.

— Il faut qu-qu’on lance en… en même t-temps. À trois. Après on… part vite vite, comme si de rrrien n’était.

Un plan infaillible pour des garçons de nos âges. Je m’approche de la rambarde et attends.

— P… P-prêt ? Un… Deux… T-Trois !

Je lance de toutes mes forces mon missile et cours dans le sens inverse sans prendre le temps de voir si j’ai touché ma cible. Je manque d’ailleurs de me prendre le pied dans ma robe et de m’étaler sur le sol, dans la fuite.

J’entends quelques cris en contre bas alors que je cours encore. Une boule me tord soudainement l’estomac. Est-ce mal, ce que j’ai fait ? Et en même temps… bien fait pour eux…



Bourrinnnn, bastooooon

Le petit blondinet répondit du tac-au-tac qu’il se sentait prêt en sortant sa boule de neige de son manteau. Celle d’Augustin était prête, elle aussi : ces petits salauds allaient le payer de leur larmes. Un décompte se lança par le nouvel ami de l’écossais puis tous deux jetèrent leur boule en même temps.

Comme prévu les deux boules atteignirent leur cible, en plein dans la tête des harceleurs désormais harcelés, et durant la fuite des deux Serpentard à moitié hilares, le serpent blanc put percevoir des cris de douleurs, suivi de véritables pleurs.
Il sourit bêtement, avec le sentiment de devoir accompli.

Il adressa la parole à Nore tout en s’enfuyant vers la grande salle :

- Je crois que t’as eu ta revanche mon pote, ils ont bien chialé ces gros minables!

Puis il tendit sa main dans une volonté de faire un « high-five » à son désormais nouvel ami. Risquaient-ils une punition? Sûrement mais pour cela il faudrait que quelqu’un les ait remarqué, ou qu’on les balance.

La journée avait bien évolué, et l’humeur du jeune blanc était elle aussi, tout à fait changée : il n’était plus du tout de mauvaise humeur, s’était fait un ami et avait fait une énorme bêtise à la seconde même où ils s’étaient rencontrés.

@Nore Winter, coucou désolé pour le gros retard

Hilare, mon inquiétude disparaît aussitôt qu’elle est apparue. Ils l’ont mérité et nous, ça nous a bien fait rire ! J’aimerais bien dire que je suis prêt à remettre ça, mais il ne faut pas abuser non plus. Je sais bien que la violence ne résout rien, mais dans ce cas, faut-il subir continuellement sans jamais se venger ? Non. Je ne raisonne pas non plus de cette façon. Et puis, je dois faire honneur à ma maison : la ruse est toujours de mise.

Une fois dans la grande salle, je reprends mon souffle et réponds au check de mon nouvel ami.

— Ça c’est s-sûr que j’l’ai eu ! Tu-tu… p-penses qu’ils sauront que… c-c’est nous ?

Je ne sais pas ce que j’attends comme réponse. Mais peut-être que j’ai vraiment envie qu’ils sachent que c’était notre œuvre. Peut-être arrêteraient-ils de me harceler ? Ils comprendraient que je suis capable de me venger, et que je ne suis pas une simple marionnette qu’ils peuvent manier à leur aise.

— M-merci, Aug. J’suis c-content de t’avoir ren…contré.

Nous restons cachés encore quelques temps, le temps que la situation se tasse. Je ne pense pas que qui que ce soit nous ait vu et puisse nous dénoncer aux adultes ou aux préfets. Je croise les doigts, en tout cas. J’espère que cette journée ne sera pas gâchée par quelque chose du genre.
Me refaisant toute la scène dans la tête, je me tourne vers Augustin pour lui poser une question.

— Dis, p-p-pourquoi ils t’ont apppppelé… p-papa noël ?



Mes excuses pour le retard également